Entre Loire et Gironde, entre Nantes et Bordeaux, entre collines du Bocage vendéen et de Saintonge, le plat pays du Marais poitevin, à demi-marin, à demi-fluvial, s'ouvre en V, en direction du Seuil du Poitou (1).
La Sèvre niortaise coule est-ouest, de Saint-Maixent et de Niort vers Marans, l'anse de l'Aiguillon et l'Océan. Dans l'intervalle des côtes à falaises qui s'étendent au nord et au sud, il n'y a qu'un port : La Rochelle.
Entre Niort (à 28 mètres d'altitude) et la mer, longtemps, il n'y eut que d'antiques routes de terre, en mauvais état, se dirigeant vers Saint-Jean-d'Angély et Saintes ou Bordeaux au sud, vers Nantes au nord.
A une époque où les charrois par terre étaient lents, coûteux et peu sûrs, la Sèvre niortaise offrait — pour peu qu'on l'aménageât — une voie d'eau directe, bon marché et sûre, entre Niort et l'Océan, par le port de Marans, à une cinquantaine de kilomètres à vol d'oiseau.
Ce fait géographique explique l'aménagement fluvial de la Sèvre et la création du port de Niort que l'on a pu qualifier d'« établissement maritime enfoncé dans le Poitou».
I. LE PORT DU XIe AU XIIIe SIÈCLE
Dès la fin du XIe siècle, l'amélioration du cours de la Sèvre suit les premiers travaux de dessèchement des marais, entrepris par les moines bénédictins de l'abbaye de Saint-Liguaire.
Au XIIe siècle, avec les croisades, l'Europe occidentale gagne la maîtrise de la Méditerranée et une aptitude particulière au négoce.
Dans nos campagnes, défrichements et extension du peuplement s'accompagnent d'un certain développement industriel et commercial, puis de la recherche de débouchés et de moyens de communication.
A cette époque, la Sèvre est navigable jusqu'au port de Maillé, un peu en aval de Damvix, où l'on charge du sel (2).
Niort est né de la Sèvre, au point où la route traverse la rivière par deux ponts, bâtis à l'emplacement du « nouveau gué » : Novio ritu. Le port est en un lieu appelé « Grenier », sorte de dock dans lequel les bateaux entrent par un arceau, ouvert dans le mur d'enceinte, au pied des murailles du vieux Château — à l'emplacement de la rue Brisson actuelle.
De là, des barques se rendent à Marans, d'où les vaisseaux rochellais naviguent vers le nord de la France, en longeant les côtes. Des relations commerciales existent entre Londres, Rouen et Gravelines.
En 1241, Alphonse de Poitiers voit, dans la centralisation des céréales à Niort, une source de prospérité pour cette ville « une des plus riches » du Poitou, en relation avec l'utilisation de la Sèvre.
Au moment où Louis IX instaure une monnaie saine, une ligue — on peut dire une « hanse » — se forme, en 1262 (3), entre La Rochelle, Niort et Saint-Jean-d'Angély.
Cette association obtient, de la comtesse de Flandre et de Hainaut, des privilèges — franchises commerciales — en rapport avec l'exportation à Gravelines des « vins blancs et vermeil », blés et laines de la région de Niort puis, sei des marches d'Aunis et de Saintonge. Ces marchandises sont transbordées des « gabarres » — barques fluviales à faible tirant d'eau, à voile et à rame — circulant sur la Sèvre, à bord des vaisseaux de haute mer de La Rochelle. Entrepôt de marchandises, destinées à l'exportation ou au transit, Niort apparaît alors comme l'arrière-port de La Rochelle.
Un texte de 1285 (4) précise la nature de ce commerce :
produits agricoles régionaux : vins exportés vers l'Angleterre, blé et farine à destination de l'Espagne, des îles de Ré et d'Oléron, de Rouen, miel, cire et fruits (figues et grappes de raisin); produits de la mer : sel d'Aunis — le meilleur de l'Occident — et des greniers libres ou clandestins de la Sèvre, harengs de la mer du Nord ou de la Baltique, poulpes, poissons secs ou « haddock » — aiglefin fumé — et « gauberge » — morue sèche -, merluches et morues fraîches; produits industriels : peaux de bœufs et d'agneaux importées en balles d'Angleterre ou d'Espagne, huile de poisson et blanc de baleine venant de la Baltique, utilisés par la chamoiserie locale; produits fabriqués : pièces d'étoffes, bronze et cuivre, fer et métaux; épices d'Orient : gingembre, poivre, canelle, cumin.
Ces marchandises diverses, « portées et reportées par le cours de la Sèvre » sont réparties, à travers le royaume, « de Niort jusques au port de Marans », sur de petits bateaux dont la charge ne dépasse guère une valeur de 60 sols, soit près de 500.000 anciens francs.
Cette même année 1285, l'importance de ce trafic fluvial amène en mai les régents du royaume — pendant la « Croisade » d'Aragon de Philippe III le Hardi à « concéder aux bourgeois de Niort » la création d'un port libre ou port franc, où les marchandises pourront être débarquées ou transiter, moyennant des droits établis par tarif.
Pour financer réparation des rives et construction du port, le roi accorde au maire et à la commune, le tiers du droit de « Coutume » ou de « rivage », à lever sur ces marchandises (5).
II. LE PORT AU XIVe SIÈCLE
Pour aménager la Sèvre, il apparaît qu'il faut creuser un port à Niort, approfondir le lit de la rivière et augmenter le volume des eaux par la construction d'écluses.
En 1323 (6), maire et échevins s'enquièrent « du lieu utile où l'on pourrait faire port et hâvre en ladite ville ». Décrété en 1285, le port n'est pas encore construit, mais « il sera grandement profitable et fructueux à toute la ville et à tout le pays environnant ».
Le projet de 1285 n'a pas de suite, à cause des guerres continuelles avec les Anglais, qui désolent le Poitou pendant tout le XIVe siècle, des défaites de Crécy (1346) de Poitiers (1356) et de l'épidémie de peste noire de 1347.
Au traité de Brétigny (1360), Niort revient à la France mais se contente d'être un centre de transit entre l'Océan et le Poitou et son commerce est gêné par les « impositions » de Saintonge et d'Angoumois.
En 1377 (7), sous Charles V, on reprend l'idée d'y établir un port, bien que la France subisse crise économique, avilissement de la monnaie, renchérissement de la vie, pénurie de mainœuvre. Jean, fils du roi de France, duc de Berry et d'Auvergne, comte de Poitou, ordonne de « construyre un port » et, à cet effet, de « lever une ayde » — la Coutume de Sèvre — sur les « denrées et marchandises montant et descendant la Sèvre et ses affluents depuis Marans : (celles) qui entreront et seront menées en nostre ville de Niort pour vandre et aussi de (celles) qui seront amenées ou prise ès portz » de Sepvreau, la Tifordière, Coulions, Azyré et Maillé, du gué et du Pairé de Velluyre et « de [dix] autres âvres et portz » de la Sèvre (8).
Il en sera de même « sur les denrées menées par charrettes ou à bestes ou autrement, en allant et en venant, entre Niort et Fontenay-le-Comte…..et sur celles qui passeront entre Nyort et Beauvoyr et seront amenées au port de Sevreau ».
Le trafic commercial porte sur des produits agricoles locaux (blé, farine, vin, miel, cire, huile, fruits, oignon, graisse, pain), des bois (osier (9) pour emballage, merrain ou poutre, bois de coudrier et de châtaignier), des cuirs tannés et peaux vertes ou sèches de bovins et d'ovins, des animaux (porcs, ovins et bovins), des fromages, des produits divers (épicerie, mercerie, gomme, résine), des textiles (laine filée ou brute, robes de droguet et d'étoffe grossière), des métaux (fer et acier brut ou ouvré, étain, plomb et ferraille), des produits de mer (sel, poissons frais ou secs, harengs fumés en « rondelles » de bois ou en vrac), des articles fabriqués (poterie de terre, verre, poêles et objet de bronze ou de cuivre, tonneaux et pipes vides).
Entre 1285 et 1377, d'après Gouget (10), les prix des vins et blés du Poitou se maintiennent, tandis que ceux des cuirs, métaux et denrées alimentaires, venus de la mer, diminuent du quart à la moitié. L'agriculture est stationnaire et l'industrie se développe, grâce à l'abaissement du prix des matières premières.
III. LE NOUVEAU PORT AU XVe SIÈCLE
En 1382, « les travaux nécessaires ne sont pas encore achevés pour la navigation » sur la Sèvre, c'est dire qu'ils sont commencés.
En 1402 (11), « Nyort est grant ville, belle et notable et bien réparée…..la plus forte et de plus notable et forte matière que ville de la conté de Poictou ne de la duchée de Guyehne….. Au dict lieu de Nyort, a beau port et notable…. (où)…. chargent les habitants….. leurs blés, vins et autres marchandises et les font mener, sans nul empeschement, jusques à Marans. »
Depuis 1380 et le début du XVe siècle, on voit le creusement d'un nouveau port sur le bras de la Sèvre, derrière le Fort Foucault, à « l'emplacement qu'il occupera jusqu'en 1868, là où s'étendent aujourd'hui la Place du port et le boulevard Main » (12).
Il est construit « en le fauxbourg du Port ». Un canal est creusé « en amont de Belisle jusqu'au lieu destiné pour faire le hâvre ou port ».
En 1402, Jean, duc de Berry, accorde aux habitants de Niort, pour deux ans, « le droit de coutume sur la rivière, au port de Sepvreau et au nouveau port de Niort. …afin de pouvoir terminer la construction dudit port qui est fort avancée et, pour laquelle, on a déjà dépensé beaucoup d'argent ».
En 1415, « année malheureuse pour le commerce », et bien que le Poitou soit « encore accablé des dernières guerres », l'ayde « des ports de Niort, Cevreau, Bessines, Portreau, Saint-Liguaire, la Thiffardière, Peyglan et la Roussille….est affermée en bail » (13). D'après Gouget (14), on peut évaluer le commerce sur la Sèvre à plus d'un million de francs 1863, environ un milliard de notre monnaie.
En 1419 (15), il est parlé du « port et des sept portes [écluses] par lesquelles les grandes barques montent et descendent la rivière », mais il est déjà question de réparations urgentes à faire ou de renoncer à naviguer sur les eaux de la Sèvre : « faire ouverture et passage des lieux empeschables au dit navigage…., notamment destruction de plusieurs anciens moulins ».
En 1448 (16), Niort commence à perdre son commerce de transit et, à la fin du siècle, une barrière de douanes royales arrête le trafic vers la Saintonge et l'Angoumois.
La Sèvre s'envase, les gabarres n'arrivent plus à Niort, « le port et hâvre de ladite ville sont tombés en grant ruyne et décadence. »
De fait, de 1425 à 1464, la Sèvre ne reçoit pas un denier du produit de la coutume et son entretien ne peut pas être assuré.
En 1464, sous Louis XI, la rivière est tellement « comblée de sablons que les ports et hâvres, par où les navires abordoient et où se montoient et descendoient les marchandises, estoient totalement deffroqués et rompus, à la totale discontinuation du commerce» (17).
En 1468, le Bas-Poitou reçoit à nouveau la Coutume (18).
La Sèvre était, depuis quelques années, dans un état complet d'abandon. La navigation ne pouvait s'exécuter que pendant l'hiver et était totalement interrompue en été, au moment des basses eaux. Les droits d'ayde continuaient cependant à être perçus, mais ils n'étaient plus consacrés au port de Niort et à la Sèvre.
Louis XI fit cesser cet abus et, le 19 avril 1468, il rendit une ordonnance pour que les droits d'ayde fussent perçus par le receveur ordinaire de Poitou ou par son commis. « Pour les deniers qui en proviendront estre convertiz, et employez en la réparation et entretenement des dites rivières navigables (la Sèvre et la Vendée) et des porz et havres d'icelles. » (D. F.)
Considérant, dit Louis XI dans cette ordonnance , que nostre pays de Poictou est fertile et fort abondant en bléz, vin et autres fruits, dont la traite n'en povoit et ne peut être bonnement faicte, sinon par navire, veu la grant estendue du pays et la grant quantité et multitude des fruits qui croissent chacun an, et attendu que en mettant la rivière la Sèvre en estat navigable depuis nostre ville de Nyort, qui est la principale en icelle marche jusques à l'Isle de Marans, qui est prouchain et contigue de la mer, la délivrance de blez, vins et autres fruits croissant dans notre pays de Poictou « se pourrait aisément faire. » (D. F.)
Louis XI rappelle dans cette même ordonnance que des droits pour l'entretien de la navigation de la Sèvre avaient été établis par le duc de Berry et qu'ils se levaient au gué de Velluyre, au bos de Langlée, au passage de Moreilles de Champagné et autres ports qui sont sur la rivière la Vendée, au lieu de la Pichonnière et Maillé et autres localités situées dans l'île de Maillezais, excepté sur les hommes de l'évêque et sur ceux qui allaient à son marché de Maillé.
Ces droits se percevaient aussi sur la Sèvre, à Coulon, à Courdault, à Bouillé et dans les autres ports de la châtellenie de Benet, au lieu de la Neyvoyre et dans les autres ports de la châtellenie d'Arçay, et aux ports de Niort, Sevreau, Bessines, Port-Nau, Péglan, la Tiffardière et la Boussille.
Tous les deniers et revenus provenant de ces aydes avaient été consacrés à l'entretien de la Sèvre, jusqu'au moment où le duc d'Alençon, qui avait vu ses terres occupées par les Anglais, reçut de Charles VII, en dédommagement, la seigneurie de Niort « pour en joir, ensemble des revenus et prouffits, lequel la tint pas longtemps, pendant lequel il s'appropria le revenu du péage qui avoient esté ordonné pour entretenir la dite rivière en estat navigable et par ce moyen fut interrompu et discontinué l'entretien et icelle rivière devint tellement comblée de sablons et empeschée de bois, que les porz et havres sont rompus et y est discontinué ledit fait de marchandise espéciamment en temps d'été. » (D. F.)
Cette ordonnance produisit d'excellents résultats.
Les droits perçus furent employés à creuser le lit de la Sèvre, à le débarrasser des sables, des troncs d'arbres qui entravaient la marche des bateaux et à réparer les ports.
La navigation reprit son ancienne activité.
« La commune de Niort, dit M. Gouget (Mémoire sur le commerce de Niort, pages 33 et 34), après la « longue tyrannie d'Alençon et le coup dont le roi (Charles VII) l'a frappée pour sa révolte en 1440, est rétablie : elle refait son sceau, recompose le rôle de ses bourgeois, rebâtit son hôtel de ville, son aumônerie de Beauchamp, abattue par le canon de l'armée royale, sa maladrerie, ruinée par le temps ; fixe pour un instant ses finances, réorganise ses écoles; éprouvée enfin par la peste, paie à ses frais des médecins venus de Poitiers.
Depuis la mort du duc de Berry, les seigneurs voisins s'étaient affranchis de ses péages, elle les rétablit ; depuis la praguerie, les officiers royaux s'étaient substitués à ceux du comte d'Alençon dans l'exercice des droits de commune, elle provoque un procès qui en interrompra entre leurs mains l'usage puisque la question se traite par le droit civil, et retournant contre eux les mêmes armes elle proclame dans le droit des communes une règle du droit féodal qu'au fief du Roy doit avoir plus de liberté que des autres.
Elle se mêle à tous les intérêts généraux de la province ; envoie ses hommes à la députation des trois Ordres du Poitou, qui va demander au roi l'établissement à Poitiers d'un parlement en même temps que Poitiers demandera que le siège royal ne soit pas maintenu à Niort ; se ligue avec Saint-Jean-d'Angély pour protester contre les traites foraines d'Angoumois et de Saintonge ; provoque à Poitiers, Saint Jean, La Rochelle, un concert de plaintes contre de nouveaux droits imposés sur le commerce ; et, ville dont la moitié s'est révoltée pour le Dauphin, dont l'autre est demeurée obstinément fidèle au Prince, s'autorise à la fois du passé et de l'avenir vis-à-vis du dauphin Louis et du roi Louis XI. »
Le 7 septembre 1469, Louis XI eut une entrevue avec son frère, le duc de Guienne, sur un pont de bateaux construit sur la Sèvre, au passage du Brauld.
Le 7 septembre 1469, Louis XI eut une entrevue avec son frère, le duc de Guienne alors en armes contre lui, sur un pont de bateaux construit sur la Sèvre, au passage du Brault ( l'anse du Brault).
Il se défiait des menées de son frère, et il avait placé près de lui le chevalier Jean d'Estissac, seigneur de Coulonges-les-Royaux, sur lequel il croyait compter ; mais il fut déçu dans son attente, et, pour s'en venger, il fit abattre, en 1471, le château que ce chevalier possédait à Coulonges.
Mais, si Louis XI était impitoyable dans ses vengeances contre les serviteurs qui le trompaient, il savait récompenser magnifiquement ceux qui le servaient avec zèle et dévouement.
Lors du mariage de son conseiller, Philippe de Commines, avec Hélène de Chambes, fille de Jean II de Chambes, seigneur de Montsoreau et d'Argenton, il lui fit cadeau de 30,000 écus d'or, afin de l'aider dans l'acquisition de cette dernière terre, et de 400 écus d'or pour réparer et meubler le château.
Philippe de Commines raconte que, lors de la signature de la paix d'Amiens, le roi donna un festin pantagruélique.
Afin d'égayer les convives, Louis XI avait fait placer à la tête de chaque table des seigneurs de l'humeur la plus joviale, fort gros et fort gras.
Le seigneur de Bressuire et le seigneur de Villiers eurent le singulier honneur de figurer en tête des tables.
En 1472, Philippe de Commines installé en Vendée, il s'aperçut que le petit port d'Olonne était géographiquement idéal pour le commerce, notamment afin d'attirer les marchands étrangers, à condition que la sécurité de la ville soit effectivement assurée.
Aussi Louis XI ordonna-t-il la fortification de la ville, le 10 novembre, par ses lettres patentes.
En octobre 1472 Louis XI avait donné à son nouveau conseiller, Philippe de Commynes, les terres de Talmont, Olonne, la Chaume, Curzon, qui faisaient partie de la succession de Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, succession qu'il s'était appropriée en circonvenant dès son arrivée au pouvoir, le vicomte Louis d'Amboise.
Lorsque Commynes alla visiter ses nouveaux domaines il constata que Talmont était refoulé vers l'intérieur par l'avancée des atterrissements qui obstruaient le cours d'eau du Payré. Par contre le port des Sables, à peu de distance, paraissait tout indiqué pour prendre la relève, Louis XI, qui accompagnait Commynes, se rendit aux Sables au début de décembre, et quelques jours après, alors qu'il séjournait au petit manoir de Dinchin (a), près le Puybéliard, il accorda aux Sables-d'Olonne une organisation municipale, et affranchit la ville de toutes tailles et subventions, exemption que les lettres royaux de 1474 précisèrent en déclarant que la «traicte des blez et vins qui se vuydent par la mer ou havre d'Olonne » devait y être comprise. En entérinant ces dernières lettres patentes la Chambre des Comptes restreignit l'exemption des droits de traite du blé et du vin à 20 ans (b).
D'ailleurs cette exemption avait pour contrepartie l'obligation de clore la ville des Sables de tours, portails et murailles. Il n'est pas sûr toutefois qu'elle ait suscité une activité maritime plus importante, car celle-ci se serait alors répercutée sur les menues coutumes de mer, droits seigneuriaux qui, eux, continuaient à être perçus.
Les comptes manquent entre 1470 et 1491, mais les chiffres qui nous sont conservés, année par année, de 1491 à 1501 marquent plutôt un ralentissement des affaires par rapport aux baux du milieu du siècle; et les droits perçus sur toutes les marchandises vendues en la halle d'Olonne pendant les marchés qui se tiennent chaque jeudi, accusent des fluctuations périodiques, non un quelconque accroissement régulier.
Les droits sur la pêche sont par contre explicités dans plusieurs des comptes. Cette « coustume du poisson frays » se lève du premier jour de Carême au 24 juin, fête de saint Jean-Baptiste. Les pêcheurs doivent se présenter (au-dedans de la pierre du port », avant le coucher du soleil; le fermier de la coutume prend un poisson sur cinq, le pêcheur choisissant d'abord les quatre poissons qu'il veut garder.
Si le bateau de pêche ne s'est pas présenté avant le coucher du soleil, il doit attendre le lendemain pour faire port, sous peine d'une amende de 60 sous. Cette coutume est complétée par une autre amende de 60 sous levée sur tout bâtiment de pêche qui se rend à La Rochelle ou ailleurs vendre le poisson frais sans se présenter au port des Sables, à moins qu'il n'y soit contraint par le mauvais temps. Cette amende fait l'objet d'une nouvelle ferme ; mais de 1412 à 1418 au moins, le vicomte de Thouars a « un preneur en port des Sables », qui reçoit 60 sols de gages par an pour aider à poursuivre les défaillants (c).
Si les menues coutumes du port des Sables produisent un revenu relativement stable, la coutume du' poisson frais donne des chiffres nettement variables selon les périodes, chiffres qui marquent un accroissement notable de la pêche dans les années 1450-1460 et une certaine stabilisation à la fin du siècle à un niveau d'activité plus élevé qu'au début du siècle (d). Ces variations sont sans doute dues en partie aux événements politiques (guerres avec l'Angleterre et la Bretagne; le ralentissement des années 1412 à 1415 est, en tout état de cause, certainement en partie la conséquence d'une grave épidémie qui décima alors la terre d'Olonne (e).
Talmont est déjà, à cette époque, partiellement écarté de la mer par la progression de la côte; aussi il s'est complété par les ports de la Guittière et de la Vinière, à l'embouchure nouvelle du havre du Payré. Les « menues coustumes de la mer » pour les trois ports sont affermées en même temps que le revenu du four à ban et les droits de halle (f).
Le compte de 1468 précise ces menues coutumes de mer : il s'agit d'un droit de 2 deniers obole sur chaque tonneau de vin et de blé, et de 8 deniers sur chaque charge de sel — à moins que le vendeur ne soit le propriétaire du marais salant — droits perçus chaque fois que ces marchandises sont chargées dans l'un des trois ports pour être expédiées par mer (g). Le compte de 1488 y ajoute un droit de 4 deniers « pour chacun fardeau cordé qui passe sur le pont de l'ayve de Thalmont » (h).
Les comptes de Talmont et de sa circonscription ne mentionnent pas de droits sur les chargements de poissons, comme aux Sables-d'Olonne, mais citent de curieuses coutumes relatives à la pêche.
A Talmont le seigneur a une partie du poisson de mer qui s'échoue sur la côte, à savoir la tête et une longueur de deux pieds de chaque marsouin ( i). A Saint-Benoît, sùr le Lay, petite rivière côtière, les pêcheurs peuvent pêcher dans le canal du lieu deux fois par mois, à la pleine et à la nouvelle lune, et doivent pour ce droit de pêche 2 deniers ou un tranchoir de poisson au choix du seigneur de Saint-Benoît.
Une autre taxe est levée sur la pêche des anguilles dans le même canal (j). La pêche des anguilles à Curzon, en amont de Saint-Benoît sur le Lay, ne se pratique qu'une nuit par an; le droit en est affermé chaque année, mais il arrive que les grandes eaux grossissent à tel point le Lay que cette pêche ne puisse être pratiquée (k).
Dans la large baie qui se creuse à la hauteur de l'île de Ré, seule la ville de Marans, aujourd'hui loin de la mer, avait quelque activité maritime, mais elle était située en dehors du Poitou.
Elle constituait cependant le débouché naturel de deux des plus grandes villes du Poitou, Fontenay-le-Comte, par la Vendée, modeste affluent de la Sèvre Niortaise, et Niort, par la Sèvre.
Le duc Jean de Berry, comte de Poitou, avait établi des taxes pour l'entretien de la navigation sur la Sèvre et la Vendée; ces taxes avaient de longtemps cessé d'être perçues lorsque Louis XI les remit en vigueur le 19 avril 1468.
Il ne semble pas que la Vendée ait permis une navigation active vers la mer; en tout cas, dès 1471, on constate que la rivière est coupée par une écluse qu'un particulier, Jean Brugière, a établie et qui ne sera démolie qu'après un long et difficile procès.
Par contre les textes citent assez souvent la navigation sur la Sèvre, et il est certain que Marans a constitué effectivement le port de Niort sur la mer.
Tous ces droits de chargement étaient des taxes seigneuriales. Pardessus ces droits locaux le souverain percevait des impôts sur trafic maritime, impôts qui recouvraient l'essentiel de l'activité de la côte bas-poitevine. La vente, la revente ou l'échange du sel étaient frappés par une taxe s'élevant au quart du prix de vente : c'était le quart du sel de Poitou, qui est suffisamment connu pour qu'il soit inutile d'insister à son sujet, et qui, d'ailleurs, n'était pas, en soi, un droit exclusivement maritime.
La « traicte des blez, vins et autres marchandises passans et reppassans par les ports, havres et eschenaulx» de Luçon, Chanais, Saint-Benoît-sur-Mer, la Tranche, Moricq, Jard, Saint-Michel-en-l'Herm, Talmont, les Sables-d'Olonne, Saint-Gilles-sur-Vie, Besse et Beauvoir-sur-Mer, couvrait par contre très exactement toute l'activité de la façade maritime du Poitou
. Cette traite rapportait environ 500 livres par an au trésor royal. Elle témoigne à la fois de l'importance du trafic, et de la pénétration, au XVe siècle du pouvoir royal dans toute l'activité du pays.
A la fin du règne de Charles VII, sous la Halle de Niort, on vend (1494) : grains et farines, vins en gros, peaux fraîches, cuirs tannés et à tanner, article de cordonnerie et vacherie, lins, chanvres, toiles, serges et tapis, draperie, friperie, laine filée et à filer, poil foulé et à fouler, plumes, mercerie, coutellerie, ferronnerie, batterie d'étain, acier, charbon (de bois), bois ouvrés et à ouvrer, terre cuite et à cuire, pots et verres, pain et poisson, viande de boucherie. Fin du XVe, siècle la navigation est facile et commode (19).
IV. LE PORT ET LA SÈVRE AU XVIe SIÈCLE
Au début du XVIe siècle, ports et navigation sont encore négligés.
Le canal est presque comblé par vases et sables, le lit de la Sèvre est envahi d'herbes et de boue, les grandes barques ne peuvent plus arriver au port de Niort, lui-même dans un état déplorable (20).
En 1507, Louis XII, « désirant le cours et navigage de Sèvre être réparés et entretenus…. baille….. le droit de Coutume à charge de faire.
les réparations….. nécessaires….. tellement qu'elle soit navigable jusqu'audit lieu de Niort. dans trois ans prochainement venant…. »
La rivière ensablée, ne permet plus aux gabarres de remonter jusqu'à Niort (21); du reste, faute de réparations, la route de Nantes à La Rochelle est également impraticable. On perçoit la « grande coutume » sur les marchands allant de Coulon à la Garette et vice-versa, mais aussi le moindre petit port fluvial a son « rivage », droit levé sur les barques qui accostent ou déchargent à quai (22).
Louis , par la grâce de Dieu, roi de France; savoir faisons, a tous présent et a venir, comme de pièça ; à nos chers et bien amés les maire, échevins, bourgeois, manans et habitans de notre ville de Niort, nous eussent présenté certaine requête contenant que près ladite ville passe la rivière de Sèvre, laquelle souloit être par ci-devant navigable, depuis ladite rivière jusqu'à la mer, et afin d'entretenir ledit navigage, nos prédécesseurs, et dernièrement feu notre cousin, le roi Louis, le 17 jour d'août l'an 1474, leur donna le droit de coutume qui se lève de par nous sur les bateaux et marchandises navigeants en ladite rivière , au port de Niort et autres lieux où il a accoutumé être levé, et jusqu'à dix ans lors en suivant ; pendant lequel temps ladite rivière auroit été par eux et leurs prédécesseurs bien et dûment entretenue en son navigage, tellement que lesdits bateaux et marchandises venoient navigeant et chargés de marchandises jusqu'au port de ladite ville de Niort, depuis lequel temps de dix ans échu et expiré, nos officiers ont baillé à ferme ledit droit de coutume, aucune fois à six ans, et autrefois à dix; et jamais n'a été fait de bail à plus de quinze livres par chacun an, et à la charge de faire certaines réparations et entreténement, tant du canal de ladite rivière, que des écluses et chaussées d'icelle, toutefois depuis que lesdits supplians n'ont plus du ledit droit de coutume; lesdites réparations et entreténement tels qu'ils étoient requis et nécessaires en ladite rivière pour ledit navigage, sont demeurées, et n'ont été faites; au moyen de quoi ledit port et havre de ladite ville est tombé en grand'ruine et décadence; le cour et canal navigable de ladite rivière , comblé et rempli de sable et immondices, les chaussées rompues, abattues et démolies, et tellement que les bateaux et marchandises qui soulcient et avoient accoutumé venir descendre devant les portes de ladite ville de Niort, n'en approchent et ne peuvent approcher d'un quart de lieue, dont la choie publique, tant de ladite ville de Niort que des pays de Poitou et autres circonvoisins, sont grandement intéressés, parce que le charrois en est beaucoup plus cher.
Pour réparer laquelle rivière, et la faire navigable , ainsi qu'elle souloit être, conviendroit mettre et employer grandes sommes de deniers; et à cette cause, lesdits supplians , par leursdites requêtes, nous ont fait supplier et requérir que ledit droit de coutume qui, comme dit est, a accoutumé d'être baillé qu'audit prix de 15 liv. par chacun an, il nous plût leur bailler à toujours, en nous faisant et payant par chacun an, en notre recette de Poitou, la somme de 20 liv. tournois, qui est cent sous pus qu'elle n'a accoutumée être baulée; à la charge de réparer ladite rivière, et icelle faire navigable, et aussi d'icelle entretenir, et sans que nous ni nos officiers y fussent tenus faire aucun frais, qui seroit en ce faisant le profit et commodité, tant de nous que de nos sujets desdits pays de Poitou, Limosin, de ladite ville de Niort et des circonvoisins; sur le contenu en laquelle requête, et après qu'eussions icelle bien et au long fait voir et entendre par nos amés, féaux conseillers, les gens de notre grand conseil, nous eussions octroyé nos lettres, adressantes au sénéchal du Poitou, ou son lieutenant audit siège de Niort ; par lesquelles lui eût été mandé soi informer, bien et dûment appelés nos avocat et procureur audit siège et ressort de Niort, de et sur le profit, commodité ou incommodité que nous et la chose publique pourrions avoir en octroyant auxdits habitans le contenu en ladite requête et information; ensemble, leurs avis et opinion, renvoyés par-devers nous, pour par après y être pourvu auxdiis supplians, comme de raison; lesquelles informations eussent été faites, et icelles ensemble les avis et opinions de nosdits officiers renvoyés par-devers nous, inclus, ci-attachés, sous lecontre- sel de notre chancellerie.
Et de rechef, nous eussent, lesdits maire, échevins, bourgeois et manons de ladite ville de Niort, requis leur octroyer le contenu en ladite requête, et sur ce, impartir notre grâce; pour ce est-il que nous, ces choses considérées, et après que par nos amés et féaux conseillers, les gens de notredit conseil, avons fait voir et visiter lesdites informations; avis et opinion de nosdits officiers, voulant et desirant le cours et navigage de ladite rivière être réparés, entretenus aux bien, profit et utilité de nous et de la chose publique, et lesdits supplians et ladite ville de Niort, favorablement traiter, et entretenir, en faveur et considération de la loyauté et vraie obéissance qu'eux et leurs prédécesseurs ont toujours eu et démontré par effet envers nous et les nôtres.
Pour ces causes, et autres à ce nous mouvant , avons, auxdits maire, échevins, bourgeois, manans et habitans de ladite ville de Niort, baillé et baillons, de grace spéciale, par ces présentes, et à toujours, ledit droit de coutume qui se lève et a accoutumé être baillé par nous à ladite somme de 15 liv. tournois, pour d'icelui droit de coutume jouir et user par eux et leurs successeurs à toujours, en nous faisant et payant, et à nos successeurs, en notredite recette ordinaire de Poitou, par chacun an, la somme 20 liv. tournois, et à la charge de faire, par lesdits supplians, lesdites réparations requises, convenables et nécessaires et accoutumés à faire sur ladite rivière, tellement qu'elle soit navigable jusqu'audit lieu de Niort, ainsi qu'elle sculoit être d'ancienneté, et d'icelle entretenir à toujours, et sans qu'à nous ni à nos officiers y convienne faire aucun frais, pourvu, toutefois, que lesdits supplians seront tenus de faire lesdites réparations et mettre ladite rivière en bon état dans trois ans prochainement venant; si donnons en mandement par ces présentes ; à nos amés et féaux conseillers, les gens de nos comptes et trésoriers à Paris, et au sénéchal de Poitou ou son lieutenant à Niort, et à tous nos autres justiciers et officiers, ou à leurs lieutenans, et à chacun d'eux sur ce requis; et si comme a lui appartiendra, que de nos présentes graces et bail ils fassent, aux cas susdits, lesdits supplians et leurs successeurs à toujours mais perpétuellement jouir et user pleinement et paisiblement, en contraignant à ce faire et souffrir, et à leur payer ou à leurs receveurs ou commis, ledit droit de coutume, ainsi qu'il nous a accoutumé être payé, tous ceux qu'il appartiendra, et qui pour ce, seront à contraindre par toutes voies et manières dues et raisonnables, sans leur mettre ou donner, ni souffrir être fait, mis ou donné aucun destourbiet ni empêchement ; au contraire, lequel si-fait, mis ou donné, leur avoit été ou étoit , ils le mettent ou fassent mettre incontinent, et sans délais, à pleine délivrance ; et afin que ce soit chose ferme et stable à toujours, nous avons fait mettre notre scel à cesdites présentes, sauf en autre chose, notre droit et l'autrui en tout.
Données à Blois, au mois de février, l'an de grace 1505, et de notre règne, le huitième. .
Ainsi signé Louis. Par le Roi : Robertet. Visa Contentor-des-Landes.
Le 16 octobre 1507, ces tenus patentes furent enregistrées à la chambre des comptes.
Un peu plus tard, vers 1550 (23), sous Henri II, « ….la rivière de Saivre est navigable…. (de Nyort) jusques à la mer…. Par icelle, entre, au païs de Poitou, la plupart du sel qui se vend et débite en icelluy et en…. greniers à sel de Loudung et Thourenne et plusieurs autres marchandises comme laines, vins, foings, blés…. Par icelle rivière, s'emportent hors ledit païs : bleds, vins et autres choses qui superabondent en icelluy…. Les passaiges de la rivière, en plusieurs endroits [sont] endommagez et gastez, tant à l'entrée de la dite rivière en la mer, pour [ce que] les digues de ladite mer sont rompues, qu'au cours d'icelle rivière diffluant de ladite ville de Niort jusques à la mer. Les sables et haraines s'accumulent et s'agirent par innundations d'eaues et agitations de ventz, en certains lieux de la rivière [et] empeschent le droict et libre cours des bateaulx et rendent le navigage plus difficile et de plus grands fraiz aux marchands…. qui sont contrainctz, bien souvent, descharger leurs bateaulx à moitié, pour passer…. »
Aussi, emploie-t-on les ressources « à la réparation et entretènement de la rivière de Sèvre, dès l'embouchure et entrée de mer jusques en la ville de Nyort, port et hâvre. »
En 1553 (24), il apparaît « nécessaire de nettoyer le hâvre… de retenir les eaux du canal par une bonde… à ouvrir…. lorsque les gabarres et vaisseaulx, montans contremont, entreront au navigaige, à l'endroit des moulins de Comporté….portes de la Roussille. ..Le hâvre est grandement ruyné et démolli…. »
Le curement de la Sèvre apparaît urgent, car sables et haraines s'y accumulent (25).
En 1554, on parle déjà des « Portes de la Roussigle », des écluses de la Roussille (26).
En 1576 (27), on relève le louage d'un bateau pour 45 voyages, effectués entre les portes de la Roussille jusqu'au port de Niort, à raison de 10 sols par voyage. Cette location est faite par un charpentier de Coulon, probablement constructeur de bateaux, à un marchand de Saint-Liguaire.
En 1586, dans une lettre à Corisande — Diane d'Andouins, comtesse de Gramont et de Guiche — Henri IV précise que, à Marans, « de cent en cent pas, il y a des canaux pour aller chercher le bois par bateaux…. des canaux de toutes largeurs, des bateaux de toutes grandeurs. Cette rivière s'étend en deux bras, qui portent non seulement grands bateaux mais les navires de 50 tonneaux y viennent. Il n'y a que deux lieues jusques à la mer. Certes, c'est un canal non une rivière. Contremont, vont les grands bateaux jusques à Niort, où il y a douze lieues…. » .==> Lettre d’Henri de Navarre à Corisande, dite « Lettre de Marans » La Rochelle, 17 juin 1586
Henry Clouzot recopie ce passage et précise, en 1940 (28), que « sur l'achenal de Marans naviguaient deux catégories d'embarcations.
Les grands bateaux à fond plat, les « gabarres », transportant sur ayve [eau] barriques de vin, tonnes de sel, blé, matériaux de toutes sortes notamment des ardoises, grands fagots de chêne, frêne et vergne (29), jaugeaient un et demi ou deux tonneaux.
Les petits bateaux, conduits par 2 ou 3 hommes, un à l'arrière gouvernant, les autres « avironnant » ou halant sur les rives, le jour ou par nuits claires, parmi les méandres de la Sèvre, étaient ceux des usagers du Marais, les « nioles ». Celles-ci, longues de 2 et demi à 3 mètres étaient actionnées à la « pigouille », longue perche terminée par une petite fourche appuyée au fond de l'eau, sur la vase ou le sable.
(La Rochelle, les Voyages de l'Hermione - La Fayette)
A part, se tenaient des navires de mer de 50 tonneaux, soit le tonnage actuel des « dundee» de pêche de La Rochelle (35 à 40 tonneaux) ».
« Des « bouttes-tonneaux» — débardeurs ou portefaix — transbordent les marchandises apportées de Flandre ou de Bretagne, sur les « gabarres » qui, seules, remontent de Marans à Niort.
Le port de cette dernière ville ne reçoit que des gabarres, jaugeant un ou deux tonneaux, halées par des chevaux ou des hommes, la voile ne pouvant être employée que comme auxiliaire dans les biefs plus ou moins longs, où le cours de la rivière ne se déroule pas en méandre. L'embarcation à voile de l'estampe de Chastillon est probablement fantaisiste ». Pas autant que le croit Clouzot, comme nous le verrons plus loin.
V. Au XVIIe SIÈCLE
En 1604 (30), la ville de Niort convient, avec l'abbé de Saint-Liguaire, « de construire et relever à neuf et à ses frais les portes et chaussées de la Roussille », et abandonne l'ancien lit de la Sèvre, entre Sevreau et la Garette, qui servait alors à la navigation, et on creuse un nouveau canal.
1. Politique de Colbert. — Au début du règne de Louis XIV (31), les transports se font encore surtout par « routes d'eau », quand cela est possible. Vauban, le technicien de l'époque, assure qu'« un bateau. ..peut…. seul, avec six hommes et quatre chevaux, mener la charge que quatre cents chevaux et deux cents hommes auraient bien de la peine à mener par les charrois ordinaires ».
Dans le même ordre d'idée, Colbert écrit que les chemins « ne servent qu'aux carosses et aux coches et ne sont pas nécessaires…. pour l'avantage des peuples ». Aussi le roi s'intéresse-t-il aux ouvrages pour rendre les rivières navigables ».
N'est-ce pas pour cela que le duc de la Meilleraye (32) désire que la Sèvre soit navigable sur tout son cours et que les barques de Marans remontent jusqu'à Saint-Maixent, mais il meurt en 1664, sans avoir vu réaliser ce projet.
Malgré les efforts de Colbert, la navigabilité des cours d'eau continue à laisser à désirer, la navigation étant entravée par des péages. Le port de La Rochelle, lui-même, est négligé : au lieu des bateaux de 800 à 900 tonneaux, il n'en peut plus recevoir que de 300 à 350 (33). On y débarque pourtant une partie des marchandises importées des Iles d'Amérique.
(Port de l'abbaye de Maillezais)
2. Bateaux et bateliers. —
En 1619 (34), un marchand de Niort loue à ferme, pour un an, pour 30 livres, à un habitant d'Arsay, un grand bateau « circulant sur la rivière de Sayvre, sa garniture d'une grande palle (35), fourche, avec les aulssières » (36). Ce bateau appelé « Le Matelot » peut porter 15 à 20 tonneaux de blé (13 à 17 tonnes d'aujourd'hui).
En 1651 (37), on relève une association entre un maître-charpentier de Niort, un marchand de la Roussille, un gabarrier du port de Niort et un marchand-gabarrier de Saint-Martin, paroisse de Sainte-Pezenne. Le maître-charpentier s'engage envers les marchands du Faubourg du port de Niort de « faire passer, à l'aller et au retour, par les portes de la Roussille, en attendant qu'elles soient accommodées, les bateaux chargés ou non, moyennant 20 sols à lui payer par bateau ».
Dans la deuxième moitié du XVIIe siècle, la navigation joue un certain rôle sur la Sèvre et les minutes notariales reflètent cette importance.
Un « faiseur de vaisseaux » habite en Ribray, paroisse « Nostre-Dame de Nyort» (38)
Un marchand de Niort, pair et bourgeois, demeurant faubourg du port, vend à un autre marchand de la ville (39) un « grand batteau estant sur le âvre du port… avec tous ses équipages [il faut lire équipements] : gouvernail, matouze, mâts, voille….. estagues, l'aussière, les bras et tout ce qui en dépend….. 110 livres tournois payées au comptant. »
Un autre batelier (40), demeurant aussi faubourg du port, vend à un batelier un « batteau estant sur la rivière de Sa ivre et au port de cette ville, du poids de 10 thonneaux [9 tonnes environ], avec son esquipage de sa palle, gouvernail, mâts, matouze et quatre vaslets au long des bouts, sans aulcune voille ny cordage.
Est faite la présente vanthe…. 90 livres…. payées la moitié» comptant, l'autre dans huit jours. Un troisième « vaisseau, à contenir 3 thonneaux [2 tonnes et demie], avec son esquipage », est évalué 90 livres (41).
Un quatrième « batteau, à contenir 9 thonneaux [8 tonnes] aveq son gouvernail, la mastouze et les voilles. » est vendu 150 livres par un batelier du port et faubourg de Niort à un charpentier de Damvix (42). Enfin, un marchand, du port et faubourg de Niort « dans la paroisse de Sainte Pezenne », loue à quatre bateliers, l'un de Maillé et trois d'Arsay, de mars 1663 « à la feste de Saint Jean Baptiste prochaine [24 juin], un grand batteau de 22 ou 23 thonneaux [19 ou 20 tonnes], équipé de mâts, voilles, cordages et gouvernail, ayant tout l'esquipage nécessaire. [étant] sur la rivière de Saivre et à présent sur le port et âvre de cette ville…. moyennant la somme de 60 livres et d'avancer une gabarrée [la contenance d'une gabarre] de fagots, prise à Maillé ou à une demi-lieue autour, au port de Niort » (43).
En résumé, sur la Sèvre, circulent alors des petits bateaux sans voile portant de 2 tonnes et demie à 9 tonnes, et des grands bateaux avec voile portant de 13 à 20 tonnes; les uns appartiennent aux bateliers, les autres leur sont loués par des marchands, plus riches (44).
Les bateliers ne sont pas gens aisés, comme on peut en juger par l'évaluation des meubles, à l'occasion d'un inventaire de communauté (45).
L'un d'eux, père de trois enfants, possède un mobilier très simple, évalué 300 livres dont un « vaisseau » comptant, à lui seul, pour un tiers; il possède, en outre, 140 livres en deniers. Un autre possède, en 1666, une pièce de vigne, au fief de Torfou, de 15 sols de rente, et une partie de pièce de marais, contenant le total une quarterée environ, vendue 15 livres (46). Un troisième n'est pas assez riche pour réparer son bateau : « La Mothe du Port » de 20 tonneaux [17 tonnes] et doit en engager le tiers à un marchand du port de Niort qui effectue « les réparations, amélliorations et rhabillement » et finalement, ne pouvant payer, le batelier vend les deux autres tiers qui lui restent.
La ferme générale des droits de barrage et péage, « qui s'amassent aux portes et fauxbourgs de Niort », sous-afferme à un marchand de la ville les droits à la porte et faubourg du port, moyennant 100 livres par an, en 1667 (48).
De même, Suzanne Tiraqueau, veuve de Charles de Baudéan, comte de Neuillan, jadis gouverneur des villes et château de Niort, afferme à la veuve du sieur du Fresne, demeurant à Sepvreau, pour cinq ans, le droit de passage de cette localité (49).
En 1656 (50), «au moyen de la navigation qui se faict sur les rivières de Saivre et Vandié [Vendée], il se lève, par les droicts de Sa Majesté, au lieu de Marans, 4 à 500.000 livres annuellement».
En 1664, « un droit de 20 sols, levé sur chaque bateau chargé allant et venant, de la contenance de 8 tonneaux [6,5 tonnes] et au-dessus… et de 10 sols sur ceux au-dessous, est perçu aux « Portes de la Roussille ». Ce droit est employé pour la réfection et rétablissement de cette écluse » (51).
3. Déclin de la navigation. —
Au XVIIe siècle, la prospérité de l'industrie et du commerce de Niort sont liés à la navigation sur la Sèvre qui permet le transport de marchandises variées.
En 1666, le duc de Navaille, « gouverneur particulier des ville et château de Niort », précise à Colbert « qu'il se débite, tous les ans, pour deux millions de sel ou de blé, dans le port » (52).
Ce sel est expédié vers le Poitou et l'intérieur du royaume. De même, Brouage et La Rochelle sont, pour l'étranger, les principaux entrepôts de sel de l'Océan, que les navires flamands, hollandais, danois transportent dans les pays du Nord et la Baltique, vers l'Allemagne et la Moscovie.
En 1668, François Bion, marchand, demeurant au port de Niort (53), transporte sur ses bateaux, de Marans à Niort, à la suite de deux marchés, 60 milliers [30 tonnes] de résine d'Arcachon pour chandelles, livrées à Marans, 50 livres le millier, par un marchand et bourgeois de Bordeaux. Cette marchandise est en grands et petits pains, arrimés avec des cordes sur les bateaux (54).
Depuis le XVIe siècle, chamoiserie et tannerie de Niort, installées sur les bords de la Sèvre, ont lié des relations avec le Canada, découvert en 1534, colonisé utilement depuis 1608 par des familles émigrées d'Aunis, de Poitou et de Bretagne.
Ce commerce, interrompu un moment par la prise de Québec par les Anglais, de 1629 à 1632, a repris depuis. Peaux du Canada et bois de teinture de Brésil — contenant une matière colorante rouge -, importés au début par Londres et Amsterdam, arrivent maintenant à La Rochelle, également un des deux grands marchés de pelleteries du royaume. Ces produits viennent par la Sèvre. Le « braisil » est utilisé dans les provinces du Centre de la France, les peaux alimentent les chamoiseries niortaises dont la prospérité est fonction du développement de la mode des gants.
Vers 1667, les 2.000 Français du Canada importent toutes leurs étoffes du Poitou, par le port de Niort. Les trappeurs canadiens apprécient rusticité, solidité et imperméabilité de ces tissus, en rapport avec la rudesse de leur genre de vie.
D'autre part, l'annexion du banc de Terre-Neuve, en 1697, et le traité de paix de 1701 entre Français canadiens et Indiens, favorisent l'importation, par Niort, des peaux et huiles de poisson qui entraînent, à nouveau, un grand développement de la chamoiserie locale, travaillant pour l'armée (culottes de peau).
En 1675, « plusieurs marchands du faubourg du port de Niort se plaignent que la navigage est ruinée et que les vaisseaux ne peuvent plus approcher dudit faubourg d'un quart de lieu et qu'ils restent, dès la fontaine Saint-Martin (55), où ils sont contraints de mettre les marchandises sur des chevaux et des charrettes (56).
En 1679, une inspection de la Sèvre constate « la dégradation des travaux et l'envasement du cours ».
Quelques années plus tard, en 1693, le grand canal de Ret est construit et va aboutir à la mer pour écouler les eaux des marais (57) en amont du canal.
En 1698, maire et échevins exposent « que le canal de Niort est presque comblé… par les inondations de l'hiver précédent. Les bateaux ne peuvent approcher de la ville et du port, de plus d'un quart de lieue. Les portefaix, qui ne vivent que du commerce qui se fait sur la rivière, ne refuseront pas de donner trois ou quatre journées pour nettoyer le dit canal. ». L'intendant du Poitou « arrête que le canal du port de Niort sera incessamment nettoyé et que les « penades » qui chargent et déchargent les bateaux donneront, selon leurs offres, chacun, quatre journées de corvées pour vider le canal ».
VI. Au XVIIIe SIÈCLE
En 1702, « l'adjudicataire des réparations du port de la Roussille précise que si les portes [les écluses] sont hors de leur situation ordinaire, c'est que les bateliers ouvrent ces portes avec violence à toutes les heures du jour, pour y faire passer leurs bateaux ». Aussi, l'intendant du Poitou arrête-t-il « qu'à l'avenir, les portes ne seront ouvertes que trois fois par jour » : 7, 12 et 18 heures du 1er avril au 1er octobre et deux fois par jour : 10 et 15 heures du 1er octobre au 1er avril, et que « le fermier du péage sera seul tenu d'ouvrir et fermer les portes ».
- Trafic commercial.
— En 1718 (58), le trafic commercial, par terre et par eau, porte sur une grande variété de produits de toutes provenances, « qui se voiturent sur le port et rivière de Niort à Marans et de Marans à Niort et autres endroits ».
Parmi les produits agricoles régionaux, on note les vins de tous crus, demi-vins, vendanges, eau-de-vie, des produits de la terre : avoine, minot de farine, paille, foin, ail et oignons, angélique, beurre frais et salé, des fruits : raisin, pommes, poires et figues du pays, châtaignes de la région et du Limousin, amandes, noix sèches et vertes, oranges et citrons de la Méditerranée.
Fruits de mer : anguilles, anchois, sardines fraîches ou salées, harengs blancs, morue verte du grand banc, morue sèche, aloses, saumons, moules, huîtres et palourdes, poissons de rivière.
Produits textiles, matières premières : chardons pour drapiers, chanvre peigné et broyé ou brut non teillé (59) ni broyé, fil de lin, de Rennes et de chanvre, lin de Hollande, laine lavée et en suint, lin non filé, coton filé ou non, puis objets fabriqués : draps de laine, soieries, camelots, coutil, toile bougran (60), toile baptiste, mousseline, linon, reusche (61), serges tiretaines (62), droguets (63) tout laine ou fil et laine, fabriqués dans la province, bas et bonnets de Saint-Maixent, bas fins.
Peaux et pelleteries : peaux de bœufs, vaches et veaux en poil, moutons, chèvres et chevreaux, basane en laine et poil, peaux tannées, peaux de mouton en cuireaux (64), peaux de daim, cerf, biche, orignal (65); et élan en poil, en terre et en graisse, pour tanneur. Articles en bois : ais, merrains, planches, madriers, bûches, fagots, bois de rouage (de charronnage), bois ou rais de charrettes, bois à bâtir, de charpente et menuiserie, cercles et feuillards, grands cercles de frêne pour barriques, charbon de bois, fûts de boisseaux, caisses, tamis, pelles, boîtes, futailles, fléaux, sabots, balances en bois, buis en bûches et copeaux, lattes de Gâtine et de Chizé. Oléagineux : graine de lin, graisse animale, huile de noix, d'olive, d'Orléans à graisser, de poisson pour chamoiseur.
Produits tinctoriaux : garance, indigo, brésil, bois de campêche, de Sainte-Marthe, pastel, galle.
Produits chimiques : couperose, cendres, vert-de-gris, azur, alun, suif, gomme, goudron, soufre, cire blanche et jaune, résine, térébenthine, savon, chandelle, noir de fumée, poix de Bourgogne, bran (66) d'abeilles. Matériaux de construction : ardoise, plâtre, briques, tuiles, carreaux, chaux, sablon à fourner, pierre de taille, moellons, parpins, verre pour vitres.
Animaux : agneaux, moutons, brebis, chevreaux, bœufs, vaches pour l'abattoir, veaux de lait, cochons, petits porcs ou gorons, dindons, chapons, oies, canes, poules et poulets, œufs.
Produits alimentaires : sel en mine, sucre en pains, cassonade blanche, grise ou terrée.
Mercerie et droguerie : galons d'or et argent, dentelles, balais de palmes, de bouleaux et de bruyères, fouets, crin de cheval, ficelle, cordage, sangles, fil d'étoupe. Métaux : acier, étain, cuivre et laiton ouvrés ou non, clous, fil de fer, ferraille.
Produits divers : charbon de terre, balles, paniers, corbeilles, jonc, miroir, faïence, porcelaine, verrerie et bouteilles, papier, linge vieux, meule à moudre, osier et réortes (liens d'osier), poteries de terre, poêles, marmites, pots de fer, gardefeu, faucilles.
Épices et produits coloniaux : clou de girofle, canelle, poivre, muscade, café, thé, chocolat.
A partir du 1er octobre 1718, et chaque année suivante, le bail du « produit de la Coutume » est cédé, au plus fort enchérisseur, sur « toutes les marchandises et denrées apportées à Niort et, à cet effet, des barrières sont construites aux principales rues et advenues des fauxbourgs de cette ville et aux portes d'icelle, afin d'y établir des gardes pour la perception des droits et visites des marchandises», notamment sur le Navigage (67)
Sous Louis XV, en 1720, la perte de Terre-Neuve et, en 1755, la perte de la colonie du Canada portent un coup terrible au commerce de Niort et à ses industries de la chamoiserie, draperie et chapellerie.
Heureusement, dès 1700, Niort importe, par La Rochelle et la Sèvre, les meilleurs cuirs étrangers, notamment ceux des possessions espagnoles du Brésil par Buenos Ayres, peaux de daim, d'élan et d'orignal, sans cela tanneries et chamoiseries auraient été réduites aux peaux achetées en France.
L'industrie textile de Niort a perdu le marché canadien. Fontenay-le-Comte et Saint-Maixent exportent de bonnes serges en Portugal et Italie. La matière première — la laine brute — vient d'Espagne, de Provence et de Saintonge, parfois de Barbarie. Parthenay aussi envoie des serges au Portugal. Les grosses étoffes, fabriquées dans la Gâtine, notamment à Parthenay, dont l'entrepôt est à Niort, étaient envoyées au Canada par La Rochelle.
La perte de cette colonie ruine toutes ces fabriques tandis que les transactions avec l'Espagne ne sont ralenties que lors de la guerre de Succession, de 1701 à 1713.
Le blé de Poitou continue à être expédié en Portugal et en Espagne tandis que Niort exporte du chanvre en Angleterre, qui lui envoie en échange des tissus importés. Bien que Colbert soit opposé à la culture de la vigne, « mère nourricière du royaume », elle constitue le principal revenu de treize provinces françaises, notamment du Poitou, Saintonge et Pays d'Aunis qui exportent leurs excédents de vin et d'eau-de-vie en Angleterre, au Canada et dans les Iles d'Amérique.
2. Bateliers.
En 1722 (68), les négociants de La Rochelle, ayant besoin de matelots, une enquête nominative est conduite sur les « batteliers et autres employez à la navigation de la rivière de Sayvre. Alors, un commerce considérable…. se fait à Marans ».
L'« Estat des navigans sur la rivière de Seivre, depuis Nyort inclusivement jusques à Marans exclusivement » (69), compte 26 bateaux, autant de maistres-bateliers groupant 36 « voituriers par eau », appartenant à 15 familles (70) « sur ladite rivière et demeurant à Niort », 6 voituriers à Coulon (a), Damvix (b), au Mazeau (b) et Maillé (a) et 33 « hommes de bord ou crocheteurs navigants » — dont 28 pour le seul port de Niort; parmi ces derniers, dix appartiennent à six familles de bateliers.
Ce sont des journaliers qui « servent à pousser les bateaux….. à les charger, décharger et à porter les denrées dans les magasins. Pendant huit mois de l'année, d'avril à octobre, ils se louent pour faire fenaison, moisson et vendange » et les bateliers sont alors obligés de se réunir à trois ou quatre pour conduire un seul bateau. »
Le nombre des bateliers est insuffisant et « les marchands sont souvent obligés de faire venir leurs marchandises par terre », de même les minots ou farines, destinés aux arsenaux du Roy qu'on est forcé, faute de « voiturier par eau, d'envoyer par charrois…. à La Rochelle et à Rochefort.
Il y a encore moins, à proportion, d'hommes de bord qu'il n'y a de voituriers…. (car) il en faudrait au moins deux par bateau. Je ne sais — ajoute l'enquêteur — si ce n'est point à cette disette de navigans qu'on doit imputer la grande diminution du commerce…. depuis quelques années, sur ce port…. (Cela est dû, en partie) à ce que « les journaliers gagnent…. ailleurs un salaire exorbitant. ».
3. Navigation.
En 1723, une société puissante, constituée cinq ans auparavant, obtient le privilège des canaux à ouvrir en Saintonge, Aunis et Poitou pour établir la liaison par eau de Poitiers au golfe de Gascogne par le Clain, la Vonne et la Sèvre niortaise. Contestations entre sociétaires et procès aboutirent à la révocation du privilège et à l'abandon du projet (71) dont on ne reparlera qu'en 1790
De 1723 à 1731, il n'est question que d'obliger les « engagistes » du Domaine du roi à effectuer la réparation des « portes de la Roussille », rompues depuis 1718 et, en novembre 1726, « 20 charges de marchandises, en aval de l'écluse, ne peuvent arriver au port et on ne peut faire embarquer les marchandises des négociants de Niort, destinées aux places maritimes : marchands de La Rochelle et entreprises des fournitures de la marine à Rochefort ».
En 1729 (72), d'après un mémoire des maire et échevins, en réponse à Mgr de Blossac, intendant du Poitou, « la rivière de Saivre porte bateaux, depuis Niort jusqu'à Marans et de Marans à la mer ».
Le mauvais état de l'écluse de la Roussille menace d'interrompre, en 1732 (73), « un commerce qui intéresse la ville de Niort, les provinces d'Aunis et de Poitou, les magasins de la Marine à Rochefort et le commerce avec les colonies. » d'Amérique. Les « bateliers, qui passent à l'écluse de la Roussille, payent un sol par tonneau de charge.
Depuis le dépérissement de cette écluse, des bateaux de 18 tonneaux [16 tonnes] au plus peuvent monter et descendre la rivière tandis qu'auparavant des bateaux de 40 [35 tonnes] la parcouraient. » (74).
Après correspondance, menaces et saisies, l'intendant décide que, « depuis le 1er juillet 1733, la navigation sera interrompue jusqu'à fin septembre-fin octobre, époque à laquelle sera terminée la reconstruction des « portes » de la Roussille. »
En novembre 1734, les travaux achevés, maire et échevins de Niort sont convoqués, « sur les lieux, pour recevoir les clefs des portes de la Roussille. ».
4. Commerce des minots.
En 1735 (75), maire et échevins de Niort précisent l'importance du commerce des minots dans cette ville. Les farines de la Mothe-Saint-Héray et de sa région sont mises en sacs ou en barils pour l'exportation. Elles sont apportées à Niort par charretiers ou voituriers qui, « obligés de venir, presque tous les jours dans la ville, charger des sels et… autres marchandises, ne font payer que la moitié du prix de transport par route. Sacs et barils sont entreposés dans des magasins…. sur le port, jusqu'à ce qu'il y en ait d'assez grande quantité pour…. en charger un bateau entier. De là, ils sont transportés par la Sèvre jusqu'à La Rochelle, d'où ils gagnent les Iles d'Amérique ».
Il se fait « un commerce considérable » (76) de céréales, à Niort autant qu'à Marans, dans les bourgs de La Mothe-Saint-Héray, Pamproux, Saint-Sauvant, Sansay et Celles et dans les villes du Poitou : Fontenay-le-Comte et Luçon : grains et farines pour les colonies d'Amérique, l'Aunis, la Saintonge, l'île de Ré et les îles voisines.
5. Projet de Sèvre navigable jusqu'à Saint-Maixent.
Comme le voulait le duc de la Meilleraye au XVIIe siècle, on estime, en 1739, que (77) « si l'on pouvait rendre la Sayvre navigable depuis Saint-Maixent. Ce serait… d'une grande utilité et commodité pour les élections et villes de Poitiers, Lusignan et Saint-Maixent qui commerceraient avec les Iles, La Rochelle, Rochefort pour les bois des vaisseaux du Roy et autres endroits d'où l'on tirerait aussy les marchandises nécessaires dont la voiture par terre est très coûteuse…..le commerce des bestiaux étant leur principal revenu. S'ils avoient une rivière navigable…. ils s'en serviroient pour faire d'autres commerces…. sur les bois à travailler et à brûler…. très chers à Nyort et les fers des forges de la Meilleraye, Verrières, Courbanson et autres, les minots., les serges, bas et autres marchandises qui passent par Saint-Maixent pour se rendre à Nyort, où on les embarque.
Saint-Maixent serait un second entrepôt pour toutes les marchandises que l'on va chercher à Nyort… Ce projet…. seroit très avantageux au public et rembourseroit, en peu d'années, la dépense qu'il occasionneroit et, dans la suite, rapporteroit un gros revenu….
« Les quatre cinquièmes des marchandises…. entrées à la barrière du Port de Niort et à la porte Saint-Gelais (78)…. seraient transportés par eau jusqu'à Saint-Maixent, si la rivière était navigable : celles qui viennent par terre de Saint-Maixent à Niort pour s'embarquer pour Marans et [vice-versa], celles venues par terre de Bordeaux, La Rochelle, la Saintonge et environs pour aller à Saint-Maixent, pour y estre consommées ou pour passer plus loin. (79)
Un grand nombre de personnes feroient le voyage Saint-Maixent-Niort en barque bien couverte…. avec peu de dépenses. » Parallèlement «. Marans [deviendrait] un bon port où les vaisseaux marchands de toutes nations pourroient aborder…. décharger leurs marchandises…. en charger d'autres pour les transporter ailleurs. »
Il faudra «…. tracer un chemin [de halage] pour hommes et chevaux qui tireront les barques…. qui. …n'auront besoin que de trois hommes : un pour gouverner, un pour ayder, un sur le cheval… Il faudra fixer le transport des marchandises à la moitié de ce qu'il en coûte aujourd'hui : à 20 sols du cent pesant…. (Il faudra)…. sonder cette rivière. …pour luy donner une largeur pour que deux des plus grosses barques…..puissent y passer de front….. largeur de 12 mètres et profondeur de 2 mètres.
Enfin, [il faudra] établir….. des portes [qui] fourniront. …[l'eau] pour remplir le lit de la rivière….. et rendre la navigation facile en tout temps, depuis Marans jusqu'à Saint-Maixent. »
Les entrepreneurs pourront « employer des ouvriers et….. cent soldats almans ou suisses. Les bateaux [seront] fabriqués en Hollande puis à Marans. Les Hollandais en tireront denrées qui se vendent ici à prix modique et, chez eux, bien cher : châtaignes, poires et prunes sèches, autres fruits, chardons pour la draperie et la bonnetterie, peaux de chevaux, huile de noix pour brûler dans les lampes. …(ou) pour la peinture.
6. Trafic.
« Hors des remparts, le quartier du Port de Niort vit du commerce sur la Sèvre... Halés ou avironnés, des bateaux emportent vers Marans : barriques de vin du fameux cru de la Foye-Monjault vendu à l'Angleterre….. laines de Gâtine qui partent pour les Flandres…. minots réputés de Bagnault et La Mothe-Saint-Héray, draps blondelets destinés aux îles d'Amérique, sel d'Aunis. (80)
A Niort, il y a un minage (81) et des halles, où se tiennent marché au détail et marchands en gros. Le blé qui s'y vend « sur montre » [sur échantillon] est dans des greniers que la plupart des fermiers de campagne ont à Niort pour estre plus à portée du port et de la rivière, afin de les conduire à Marans. Ces blés sont visités dans les greniers et, s'ils sont conformes à la montre, ils sont acceptés. »
A l'autre extrémité de la Sèvre, Marans est le lieu où se vendent tous les blés et farines qui sortent du Poitou. « Il s'y fait deux sortes de commerce. L'un de détail, le mardi, le moins important,. inférieur à un million de livres par an (82), s'effectue aux minage et halles, pour ces denrées consommées sur place, à plus ou moins longue échéance, par les habitants eux-mêmes. Il est toujours garni au- delà…. et parfois les particuliers ne pouvant se ranger dans la halle, quelques-uns se tiennent sur le quai, le long du minage. »
Le commerce de gros, plus irrégulier, a lieu soit sur les bateaux, sur la Sèvre même, soit dans les greniers, où céréales et farines sont déchargées et entreposées pour être vendues sur les marchés suivants. Il s'élève en moyenne à une valeur de 4 millions de livres par an (83). Ce marché, dû à la rivière, est né…. de la communication de Marans avec la mer ».
Céréales et farines, arrivées par bateaux — contenant jusqu'à 20 tonneaux [17,5 tonnes] — voient leur vente retardée par les besoins de l'Etat ou les basses eaux de la Sèvre qui ne permettent pas d'arriver jusqu'à Marans, au jour prévu. « Si on en excepte les deux dernières années [1747 et 1748] où les céréales ont été rares dans la province du Poitou, ce qui a réduit les envois, on a vu des marchés de Marans de plus de 700 tonneaux [615 tonnes] de bleds, [la contenance de 35 bateaux] sur la rivière et de plus de 2.000 sacs [150 tonnes] de minots et farines ».
Dès leur arrivée, les bateliers font mesurer les céréales, sur leurs bateaux, par plusieurs contrôleurs à la fois et les chargent dans « les barques qui les portent dans les magasins ou greniers des commissionnaires » ou directement sur navires de mer. Leur temps est limité, car ils remontent aussitôt la rivière avec un chargement de sel, destiné à l'intérieur.
En 1740, le corps municipal de La Rochelle demande l'établissement d'un canal de navigation depuis ce port à la Sèvre niortaise.
Vers 1757 (84), Paul Marcelin Fontanes, inspecteur des manufactures du Poitou, père de Louis de Fontanes, le futur grand maître de l'Université impériale, résume la situation.
« La ville de Niort est située sur une rivière navigable qui porte, jusqu'à la mer, des bateaux d'environ 20 tonneaux [17,5 tonnes], pris au port de cette ville, et de 50 tonneaux [44 tonnes] et au-delà à quelques [ports] plus loin.
Niort est placée presque au centre d'une province [le Poitou] qui recueille du vin, fabrique des eaux-de-vie, possède des bois de construction, des grains et plusieurs autres articles. Elle n'a alors pour tout commerce que celuy de détail pour les besoins locaux : cela est sy vray qu'il ne se vend pas une barrique de vin ou d'eau-de-vie pour le dehors. Favorisée par tant d'endroits, elle n'a point de commerce de gros…. car le tarif de Niort assujettit à payer des droits d'entrée, non seulement les marchandises qui se consomment dans la ville, mais encore toutes celles qui, par le commerce en gros, s'emportent au loin, si elles passent sur le territoire de Niort et y séjournent plus de 24 heures. Ces droits — 5 et 6 de la valeur — joints aux droits de magasinage, les augmenteroient d'au moins 8% ..» si l'on voulait les entreposer dans cette ville pour créer un commerce de gros.
Dans la première moitié du XVIIIe siècle, navigation sur la Sèvre et commerce de Niort sont assez actifs, grâce à la période de prospérité qui précéda la perte de nos colonies d'Amérique. Il n'existe alors aucune force motrice et les transports par charrettes sont longs, coûteux et pénibles, tandis que la Sèvre niortaise offre un moyen de circulation supportant de lourdes charges : jusqu'à 14 à 20 tonnes par bateau.
7. Bateliers et portefaix.
Nous l'avons vu, la navigation faisait vivre 36 « voituriers d'eau », possédant 26 bateaux, et 33 « hommes de bord », soit plus de 3% de la population active de Niort.
En 1763 (85), un fonctionnaire de la Marine de La Rochelle veut enrôler les bateliers de Niort à l'Inscription maritime de Marans. L'intendant du Poitou, M. de Blossac, proteste auprès du ministre, M. de Choiseul, car Niort « est la seule ville commerçante, pour ainsi dire, de la province, à [60 kilomètres] de La Rochelle, la plus proche ville maritime. Elle est au milieu des terres, sur une petite rivière qui favorise son commerce. Les bateliers y sont tellement rares qu'ils font presque la loy aux négociants. » C'est une des raisons de l'amélioration de leur situation matérielle.
D'après Pillet, commis aux entrées de Niort, en 1739 (86), et son « état des proffits que les maitres-bateliers, qui ont des barques sur la rivière, allant de Niort à Marans, sans compter. les fraudes…. pour éviter de payer les droits…. le produit de cette navigation peut monter à 50.000 livres par an…. Tous les maîtres-bateliers — plus de 30 — font, temps commun, chacun un voyage par semaine et sont toujours chargés, en descendant et en montant la rivière car si, dans 30 voyages par semaine, ils n'avoient pas au moins 1.000 livres de bénéfice, ce qui fait plus de 50.000 livres par an, comment pourroient-ils entretenir leurs familles, comme ce qu'ils font, et vivre en gens aizés, car il est constant qu'ils sont presque tous bien accommodés des biens de la fortune. »
Le métier est suffisamment rémunérateur pour être choisi par cinq ou six hommes d'une même famille, alors qu'un siècle auparavant, un fils de batelier préférait être apprenti chamoiseur-blanconnier.
Souvent, les membres de cette corporation fluviale — assez instruits pour savoir signer — s'unissent par mariages et finissent par constituer une véritable dynastie, notamment les Dambas, Meschain et Gabriault.
François Bazin ou Bassain est charpentier-constructeur de bateaux et expert à l'occasion. Jacques Meschain (87) épouse la fille du meunier du moulin du Roc au faubourg du port et achète comptant une trentaine de bêtes d'une valeur de 485 livres (88). Louis Dambas (89) possède meubles et effets de 473 livres et une maison de 168 livres sur le quai du navigage mais n'a pas de bateau.
Les portefaix eux-mêmes, pas assez nombreux, voient leur sort s'améliorer. Alexis Dambas, batelier à l'occasion, loue une maison et saulnière, sur la rue du quai : 55 livres par an (90). Jacques Layrault (91), portefaix et batelier — c'est-à-dire « homme de bord » accuse en meubles et effets 400 livres vendus 515 aux enchères (92), loue, 21 livres par an, une chambre haute et cellier, dans une maison au faubourg du port, sur le quai du Navigage, et possède un demi-journal de vigne (93).
Nous sommes particulièrement renseigné sur la situation du batelier Jean Gabriault (94), à la fois propriétaire de bateaux, transporteur de minots, marchand de sel et de vin au détail. Il possède quatre bateaux d'une valeur totale de 800 livres : « l'un à porter 16 thonneaux [14 tonnes] de froment avec tous ses ustensiles de voiles, mâts, cordages, gouvernail, mâtouze, planches, espares, pigouilles », barils pour le transport des minots, l'autre coulé à fond de 14 tonneaux [12 tonnes], un troisième à porter 4 tonneaux [3,5 tonnes] et un quatrième d'un tonneau [880 kilos] (95).
Ces bateaux sont conduits par des « hommes de bord » (96), qui gagnent chacun 3 livres par semaine, pour voyage du port de Niort à celui de Marans. Ce trafic donne lieu au payement de droits aux octrois de Niort (13 livres), au fermier des portes de la Roussille pour passage de ses bateaux (12), aux adjudicataires des entrées de Niort pour marchandises passées à la Barrière du Quai (8), au directeur des Aides de Niort pour vente de vin au détail (19).
Ce batelier et commerçant a pour clients : 4 marchands de Niort (35 de ses affaires), un d'Exoudun (22 %), des minotiers de Bagnault (23 %), un de Marans, des voituriers (8 %) de Pamproux, Sanxay près Poitiers, Civray et Niort, deux bateliers de Niort (1,5%).
Jean Gabriault tient des livres-journaux pour « les voitures et livraisons de marchandises de son commerce ». Il semble spécialisé dans le transport des minots du port de Niort au port de Marans, pour le compte de quatre minotiers (97) de Bagnault et d'un marchand d'Exoudun (98).
A son décès, une saulnière, en location, sur le quai du port, contient 191 sacs pleins de minots [14 tonnes], en transit, appartenant à six minotiers, et 136 sacs de toile vides. Il se charge également du transport et du commerce des céréales : son grenier renferme près de 10 tonneaux [9 tonnes] de grains : 90 d'avoine, 9 de froment et 1 de baillarge ou orge d'été, d'une valeur totale de 637 livres (99). Son fenil contient 10 milliers [5,5 tonnes] de foin d'une valeur de 157 livres.
Gabriault reçoit du sel d'Aunis qu'il entrepose et vend dans la boutique, au rez-de-chaussée de sa maison donnant sur le port : 60 mines et 11 boisseaux [24 hectolitres environ], d'une valeur de 440 livres (100).
Sa cave contient 14 barriques, de 210 litres chacune, d'une valeur de 370 livres de vin rouge et une de vin blanc, l'un et l'autre de Saintonge, livrées par Baudin de la Foye-Monjault, qui prête les fûts (21 vides), 10 barriques de vin du cru local de première cuvée et 3 de deuxième cuvée : ces dernières d'une valeur totale de 113 livres (101). Il vend du vin au détail, possède un matériel vinaire (102) et récolte du raisin dans deux journaux et demi [75 ares] de vigne dans la paroisse de Sainte-Pezenne (103).
L'inventaire décèle d'autres marchandises : textiles, d'une valeur de 140 livres : 82 kilogrammes de fil de chanvre, lin et étoupe en pelotes et échevaux, lin et chanvre en poil, laine propre, lin en poupées; bois, pour 72 livres : de construction (planches et chevron de cerisier) et de chauffage (fagots de noyer et cerisier, de vergne et aubier de marais, javelles et bûches).
Son aisance est affirmée par 1.321 livres en numéraire, de la vaisselle d'étain d'une valeur de 144 livres, sept gobelets et une tasse d'argent (135 livres). A titre d'illustration, la dissolution de la communauté, après décès, s'élève à un actif de 6.465 livres, soit vingt fois le montant de la succession d'un batelier, un siècle auparavant.
Jean Gabriault habite, au faubourg du port de Niort, la maison dite de la Fontaine, donnant sur la rue et devant le bassin du hâvre (104) et occupe deux saulnières, en location, sur le quai du port, devant la seconde cale du Navigage. Notre batelier possède un mobilier (105) et un trousseau évalués 3.000 livres. Il porte l'habit avec veste, gilet et culotte en ras de Saint-Lô gris, pinchina bleu ou revêche (106), chapeau, mouchoir de cou, bas de laine ou de lin, souliers.
8. Amélioration de la navigation.
— En 1748 (107), l'intendant du Poitou décide « de faire curer le bassin du port de Niort, comblé. ..de débris. ….[dus] à l'inondation extraordinaire de février 1747. …abondante et si grande que, de mémoire d'homme, on n'avait vu notre rivière si grosse ni si haute. …Des dommages considérables ont été causés à des marchandises des marchands du port….. surtout au sel…. emporté et fondu….. pendant 5 ou 6 jours. » (108).
L'intendant ordonne également de nettoyer le lit de la rivière jusqu'à Saint-Liguaire, pour faciliter la navigation.
En 1751, « le curement….. est mis à la charge…. [de la ville]. Maire et échevins «. désirent accomplir cette œuvre, si importante pour le commerce, et demandent à être autorisés à commander tous les habitants corvéables de la ville pour travailler audit curement et à recevoir les autres manœuvres qui se présenteront. ».
Ces travaux, commencés en septembre 1752, l'intendant de Blossac exhorte maire et échevins « à donner tous leurs soins à leur achèvement ».
En 1773 (109), la communication par eau est établie avec Marans « par des écluses proportionnées au volume de l'eau, puis par les portes de la Roussille, à une lieue de Niort, près l'abbaye de Saint-Liguaire.
Au sortir de ces portes, le bateau, qui va de Niort à Marans, entre dans un canal fait de main d'hommes sur près d'une lieue, …et rejoignant la vieille rivière. …autrefois navigable jusqu'au Château et au petit port près des Halles ». Lorsque « les eaux sont brouillées (110), pendant les crues, les écluses servent de pêcheries, fermées avec des filets. On y prend beaucoup d'anguilles que l'on sale et emballe : branche de notre commerce avec Limoges ».
VII. LA FIN DE L'ANCIEN RÉGIME ET LA RÉVOLUTION
- 1. Trafic.
— La perte du Canada, en 1763 (111), fait le plus grand tort au commerce…. très varié de la Sèvre qui, navigable jusqu'au port de Marans, ouvre une communication avec l'Océan. Niort fait un commerce fort étendu avec les îles de l'Amérique, les peuples du Nord et la Méditerranée. En échange, la ville reçoit des sels, peaux en poil qu'elle apprête en chamois, sucre, café, indigo, plomb, fer, bois des Isles, planches de sapin, poisson salé, beurre conservé, fromage de Hollande et autres comestibles, ardoises.
Cette ville est un entrepôt d'où les marchandises se répandent dans les autres provinces. Le commerce de Niort peut devenir très intéressant si on exécute le projet, formé depuis longtemps, d'un canal portant directement ses denrées et ses marchandises à La Rochelle, sans passer par Marans.
La navigation du port de Niort (112) est assurée, chaque semaine, par environ 20 bateliers qui partent tous les dimanches, au matin, pour se rendre au marché de Marans, le mardi. Ils y transportent une assez grande quantité de farines en sacs ou « minots » qui viennent de La Mothe-Saint-Héray, Bagnault, Exoudun, Pamproux et lieux circonvoisins, des blés, bois, merrain et autres denrées.
De là, ces denrées se transportent sur des barques à La Rochelle, Brouage, les îles de Ré et d'Oléron, Bordeaux, etc. Les bateliers repartent pour revenir à Niort, ordinairement le même jour, chargés de sel et autres marchandises pour la ville, où ils arrivent, lorsque l'eau est bonne, le mercredi ou le jeudi et, lorsqu'elle est basse, le vendredi et quelquefois le samedi.
En 1775, la Chambre de Commerce de La Rochelle demande, à son tour, l'ouverture d'un canal de navigation à Niort, mais la guerre d'Amérique de 1778 entrave ce projet.
En 1779 (113), le bassin du port de Niort est entièrement encombré par le limon que la Sèvre y apporte.
Le lit est très peu profond, aussi les bateaux ne peuvent-ils venir jusqu'à cette barrière, pour peu que les eaux soient basses. Il en résulte « …grand préjudice et beaucoup de dépenses pour les bateliers, chargés de la conduite des bateaux, qui sont obligés d'alléger de moitié [leur chargement] pour pouvoir arriver jusqu'au port, sans pouvoir venir…. jusqu'au bassin ».
« La Sèvre….. est le principal débouché pour le débit et le transport des grains….. directement à Marans et, de là, à la mer. Sur cette rivière, se chargent la plupart des minots nécessaires aux embarquements, notamment vers La Rochelle, Rochefort et les iles ».
Sur la Sèvre, passent également la plupart des bois de construction, employés par Rochefort. Par la même voie, Niort reçoit toutes les denrées et marchandises provenant des provinces méridionales et de l'étranger.
Le nettoiement du bassin et de la rivière est de la plus grande nécessité.
En 1785 (114), « la rivière est tellement encombrée de vases, depuis l'extrémité d'Aligré (Marans) jusqu'au « Mauvais tour » que la navigation ne peut plus avoir lieu que pour de très petites barques et, avec beaucoup de lenteurs, difficultés et dangers.
Le curement de la rivière est effectué sur 3.650 mètres, depuis l'extrémité de d'Aligré jusqu'à la grave dite du Saut-aux-chiens. ». A la même date (115), les officiers municipaux de Niort assurent que « la ville est, par sa position, susceptible d'un assez grand commerce…. et par la voie de Marans, communique avec La Rochelle. Elle sert…. d'entrepôt aux marchandises du Haut et Bas Poitou, destinées….. aux Iles françaises [d'Amérique]. ».
Ils demandent que La Rochelle deviennent un port franc pour les États-Unis de l'Amérique, ce qui permettrait, depuis la perte du Canada, l'importation de pelleteries et d'huiles de poisson, nécessaires à l'industrie niortaise de la chamoiserie et l'exportation « des grosses draperies ou pinchinat qui s'y fabriquent », des bas et bonnets de laine de Saint-Maixent, des draperies de Parthenay.
2. Doléances des bateliers.
— Toujours à la même date, au quartier du port (116) demeurent la famille Bion, marchands riches et industrieux, les marchands Pillet, Juin et Cazabonne de Cazaneux, les neuf bateliers Boutet (Jean et François), Rambus, les frères Rousseau, Gendron, Daigrier, Passebon et Thineau.
En 1789 (117), il s'agit de marchands, teinturiers-marchands, portefaix, des sept bateliers Gabriaud, Boulet, Linault, Tirand, frère et fils Rousseau.
Les bateliers du port, notamment les deux Rousseau, les frères Rambus, les deux Gendron rédigent leurs « remontrances et doléances » (118). Ils demandent la suppression du droit d'antolle ou péage, établi à Marans depuis 1769, qui leur coûte, à chacun, 30 à 40 livres d'abonnement par an, du droit de minage de 3 livres ou une mesure de blé par tonneau et du droit d'amarrage, établi depuis 1775, de 6 livres par batelier.
Ils se plaignent que « les écluses. ..sont si étroites que les bateaux n'y peuvent passer, quand les eaux sont basses, qu'avec difficulté en freinant et en dommageant leurs bords, ce qui entrave considérablement la navigation et entraîne la perte de bateaux et d'hommes qui les conduisent.
Les plantations d'arbres, sur les jarretières des écluses, endommagent souvent les voiles des bateaux qui sont exposés à couler. ». [Ils demandent] « leur destruction ainsi que l'enlèvement des pierres et graviers qui s'écroulent, comblent le canal et les écluses, font obstacle à la navigation ». Ils veulent l'interdiction « des bondes, saignées ou ouvertures, faites dans le canal de navigation et maintenues pendant plusieurs jours par des particuliers; souvent les bateaux ne peuvent y passer faute d'eau ». Ils s'élèvent contre les empiétements des propriétaires. Ils demandent qu'on n'y jette plus de graviers, gravois et immondices, [qu'on n'y plante plus] de pieux qui forment des batardeaux, au point que deux bateaux ne peuvent plus passer de front ».
Ils réclament « la suppression du droit de coutume, établi à Coulon, depuis 1767, sur les marchandises transportées par bateaux passant chargés ».
Ils préconisent la réduction du « droit exorbitant des portes de la Roussille, porté à 54 sols par bateau, au lieu des 24 sols, levés autrefois pour l'aller et retour. Actuellement, ce droit est exigé même pour les bateaux vides et les petits bateaux ou allèges attachés aux grands, pour servir à leur décharge, lorsque les eaux sont très basses. L'interdiction de franchir ces portes, entre coucher et lever du soleil, porte préjudice au commerce ».
Enfin, la corporation des bateliers de la Sèvre sollicite « le curage de la rivière navigable, de Coulon au bassin du port de Niort, et le rétablissement des cales ruinées qui faciliterait charge et décharge des marchandises. [Il n'est] presque plus possible de continuer la navigation». Ils désirent, enfin, que le droit de coutume, payé à la Barrière du quai, soit employé pour l'entretien de la Sèvre.
3. Projet de canal de La Rochelle à Saint-Maixent.
— En 1791 (119), prend corps un projet audacieux de navigation de La Rochelle à Paris, par la Vonne jusqu'en amont de Saint-Maixent. On y prévoit : trafic d'eaux-de-vie de la Charente, blé et bois de chauffage des Deux-Sèvres, Vendée et Vienne, sel d'Aunis, denrées des colonies et du Levant, vins de Bordeaux et produits des départements méditerranéens.
Par la Sèvre descendent déjà, de Niort à Marans : blés de l'ancien Poitou destinés à l'ex-Aunis.
Les entrepôts de blé de Marans, très importants, pourvoient les régions de La Rochelle, Saint-Jean-d'Angély, Marennes, Rochefort et l'administration des vivres de la Marine nationale de ce port. Presque tous les habitants se livrent au commerce de la revente ou à la commission.
A Marans, ont été établis des droits de minage, prélou et d' « antolle ». Cette dernière, digue temporaire « en terre glaise », barre le cours de la rivière et conserve les eaux à la fin de l'été, lorsqu'elles sont basses. Pour faire franchir cette digue de l'Antolle aux bateaux montant et descendant, des cabestans sont manœuvrés par quelques hommes qui aident les mariniers des bateaux.
Pour protester contre ce droit levé par le seigneur de Marans, le peuple détruit l'Antolle en septembre 1790.
Il est question également de l'assèchement d'une partie du Marais poitevin et de la réduction des frais d'entretien des routes, fatiguées par les charrois.
En 1792 (120), après acceptation du projet de canal par le gouvernement et rapport de l'ingénieur Demetz, le Directoire du département des Deux-Sèvres adresse un mémoire au ministre de l'Intérieur.
La construction du canal La Rochelle-Paris par Niort, Saint-Maixent, Poitiers et Châtellerault, sollicitée en vain, depuis de nombreuses années « par les peuples, fut rejeté par l'influence corruptrice de la maison d'Aligré, ci-devant seigneur de Marans; mais, aujourd'hui, le régime de la liberté a anéanti ces oppositions particulières. ». Ce projet doit assurer : la disparition des obstacles à la circulation des grains par les ports de mer, la possibilité pour le port de La Rochelle de fournir sel, eau-de-vie et denrées coloniales en échange des céréales, bois de chauffage et de constructions navales qui lui font défaut, l'abondance en céréales, farines et bois des Deux-Sèvres, l'assèchement de « 30.000 journaux » de Marais mouillés, l'envasement du port de La Rochelle.
La guerre étrangère arrête, à nouveau, la réalisation de ce projet.
Lorsqu'en 1794 (121) la Convention constitue un Comité des Ponts et Chaussées, le député deux-sévrien Le Cointe-Puyraveau, membre de ce comité, assure Niort de son appui. Le port de cette ville et son bassin sont encombrés de vases, graviers et sables, entre Belle-Ile et Saint-Martin, au bas de l'écluse de la Roussille, en aval du moulin de la Tiffardière, et laissent la rivière souvent presque à sec.
Il ne reste alors plus assez d'eau pour la navigation en été, tandis que les marais sont inondés en temps de crue. Une quinzaine de pêcheries ou « bouchaults », gênant la navigation, doivent être démolis.
En 1793 (122), « de Niort à l'écluse de la Roussille », la rivière est embarrassée par des gués, d'une longueur totale de 640 mètres, à approfondir. Il faudrait établir : chemin de halage, essartements et deux corps morts avec câble pour faciliter le passage de l'écluse.
Du port de La Roussille à Coulon, quelques hauts-fonds gênent la navigation à l'aval de l'écluse sur 160 mètres de long.
De Coulon à Damvix, la rivière est large et profonde mais il faudrait établir chemin de halage et ponceaux.
De Damvix à Marans, le lit, décrit des contours, les rives, peu résistantes, sont mouillées les sept huitièmes de l'année et le halage paraît difficile. Pour faciliter et raccourcir la navigation, il faudrait curer le canal et creuser un tronçon de 600 mètres de long pour éviter un circuit de 4 kilomètres.
De Marans à la mer, les ouvrages à réaliser sont moins utiles pour la navigation que pour l'écoulement des eaux.
De Coulon à Marans, la navigation est gênée par 21 écluses. Par temps de pluie, les eaux s'élèvent aux pertuis des digues, obstacles difficiles à surmonter pour des bateaux conduits à la gaffe. L'écluse de la Roussille (123), fermée autrefois par des vannes à coulisses, l'est alors par des portes busquées défectueuses. La navigation est interrompue, en basses eaux d'été, pendant deux mois, pour les gros bateaux de 15 à 20 tonneaux, et il n'y a pas place pour le halage. Les mariniers ne conduisent leurs bateaux qu'avec beaucoup de difficultés, surtout à la remontée.
Au port de Marans, où la marée est assez forte, les bateliers portent leurs marchandises sur des chasse-marées et autres bâtiments de mer.
En 1799 (124), une compagnie se constitue pour ouvrir le canal Niort-La Rochelle par Marans, sur 60 kilomètres, et assurer la navigation sur la Sèvre, sans interruption pendant les basses-eaux, projet qui doit être exécuté en cinq années, avec payement de droits de halage et d'hôtellerie. Cette compagnie (125) doit posséder un capital de 4 millions de francs, moitié par actions, moitié par emprunt.
Le trafic annuel total prévu est de 640.000 tonneaux dont 128.000 pour le trajet aller-retour Niort-La Rochelle : blé pour La Rochelle, la France et l'étranger, farine pour La Rochelle, Rochefort, l'île d'Oléron et les vaisseaux partant pour les îles françaises d'Amérique, eau-de-vie, produits alimentaires venant de France pour la ville et les colonies, bois de construction et à brûler, fèves, légumes, poix, dégras, peaux et autres articles pour Niort et Saint-Maixent, pierre à bâtir, moellons, briques et poteaux, cercles, merrains et ouvrages de vannerie pour la ville et la campagne, foin, paille, fruits, sucre, café, coton, mélasse, morue, beurre, huile, fromage, pelleterie sortant de La Rochelle vers l'intérieur de la France, sel pour le Poitou, vin pour les Iles d'Amérique.
En 1800 (126), d'après le préfet Dupin, les plus gros bateaux de 15 à 20 tonneaux chargent à Marans et sont tirés à la « cordelle » par des hommes, mais seulement un peu en aval de Coulon, car les chemins de halage sont généralement informes, mal entretenus et trop étroits; aussi, les bateliers sont-ils obligés de passer continuellement d'un bord à l'autre.
En amont de Coulon, le halage est absolument impraticable. La navigation est interrompue par les glaces — une fois tous les vingt ans -, par les grandes crues — deux ou trois fois par an -, par les basses-eaux environ deux mois, ce qui réduit beaucoup les chargements. L'écluse de la Roussille a besoin de réparations continuelles et onéreuses et diminue l'écoulement des eaux. Vases et graviers se déposent au fond du lit et la rivière est toujours embarrassée par les pêcheries ou « bouchaults » des riverains.
VIII. Au XIXe SIÈCLE
En 1801 (127), la navigation de la Sèvre est prise en considération : un décret fixe à nouveau les droits à payer pour les transports, soit 30.000 francs par an, insuffisants pour financer les améliorations prévues.
1. Le projet de canal Niort-La Rochelle.
En 1802 (128), Dupin s'adresse, en ces termes, à la Société d'agriculture des Deux-Sèvres : « le projet. …prévu sous l'Ancien Régime. …est enfin approuvé par un gouvernement….. qui veut que toutes les contrées de la France participent aux bienfaits de la nature. Ce projet entraînerait….. la diminution du prix de transport d'une foule d'objets d'importation et d'exportation, notamment des grains et farines, un des grands objets de production du pays » et aurait une action sur l'industrie et la richesse locales.
L'ingénieur Courtalon propose que le canal La Rochelle-Niort, long de 44 kilomètres, aboutisse entre Arsay et Damvix et commence à l'écluse de chasse du port de La Rochelle.
En 1804 (129), la navigation est toujours interrompue sur la Sèvre pendant les basses-eaux. Le gouvernement impérial a « accordé en 1803 des fonds extraordinaires » pour son amélioration immédiate : l'ancienne écluse de la Roussille a été réparée, les hauts-fonds qui gênaient le passage des bateaux ont été curé, des « goures » et « bouchaults » ont été détruits, d'autres le seront bientôt.
« Les fonds du nouvel octroi sur la Sèvre seront exclusivement appliqués à subvenir aux travaux. Le flux de la mer, chargé de limon, a déposé vers Marans des vases qui font craindre que la navigation soit bientôt interrompue.
Le premier soin est d'ouvrir un débouché aux eaux, à Marans, dont le canal est obstrué et beaucoup trop étroit. Ces travaux sont liés au canal projeté. Il existe encore à Niort un commerce d'entrepôt de farines, importées de La Mothe-Saint-Héray, Salles et Exoudun. Dans le département, 800 meuniers réduisent en farine la totalité des grains qui y sont consommés et la moitié de la farine destinée à l'exportation….. par le port de Marans aux ports de La Rochelle, Rochefort et les îles voisines. »
En 1805 (130), rien n'a encore été réalisé. « Des vases existent toujours dans la Sèvre, entre son embouchure et Marans. Aussi, les bateaux, faisant le transport à partir de Marans, descendent-ils avec le reflux et sillonnent-ils le fonds avec leurs quilles et leurs ancres, traînés sur le lit pour ralentir leur marche, au détriment des rives.
Les vases forment une sorte de « barre » entre la mer et Marans et rétrécissent le lit de la rivière, à partir du « Faux Tour » ou anse de Braud ».
Le 17 juillet 1805 (131), un décret décide qu'il sera ouvert un canal de navigation de Niort à La Rochelle, d'après les projets approuvés en 1802 par le Conseil général des Ponts-et-Chaussées.
En 1806, on enlève alluvions et hauts-fonds entre Niort et La Roussille.
2. Construction du canal Niort-La Rochelle.
Les premiers travaux de creusement du canal sont commencés, le 17 juin 1805, avec emploi d'ouvriers du pays et de forçats napolitains qui ne seront congédiés qu'en 1810.
En 1808, lors du passage de Napoléon Ier à Niort, le port et les bords de la Sèvre, le long des chamoiseries, sont dans un état déplorable, aussi l'Empereur signe-t-il, le 7 août, un décret, daté de Niort, décidant qu'« un quai sera construit dans cette ville, le long des fabriques. ….pour une dépense de 20.000 francs, en plus des 12.000 prévus » (132).
Le 21 octobre 1809, l'adjudication des travaux par le préfet Dupin précise que « le cours de la Sèvre soit dégagé de tous obstacles, depuis Niort jusqu'à la mer, sur une largeur de 24 mètres, à la ligne de flottaison du plus haut étiage, avec chemin de halage de 6 mètres de large, comme l'avait fixé le décret impérial du 29 mai 1808. Ceci implique une navigabilité constante ».
Cette même année (133), en vue de l'amélioration du cours de la Sèvre niortaise, négociants (134) et maîtres de bateaux de Niort (135) « reconnaissent — une fois de plus — comme très utiles à la navigation les redressements proposés sur le cours aval de la rivière, de Damvix à la mer (mais que) dans la partie amont, jusqu'à Niort, la navigation est entravée. en plusieurs endroits. »
En 1811, le projet Mesnager s'efforce, à la fois, de prévoir le dessèchement des marais et d'effectuer de nouveaux travaux en faveur de la navigation.
En 1812 (136), le creusement du canal La Rochelle-Niort se poursuit avec la main-d'œuvre fournie par l'atelier de Belle-Croix, composé de 500 déserteurs des régiments français condamnés aux travaux publics; ils ne seront licenciés qu'en juillet 1844.
3. Ports de Niort, Marans et La Rochelle.
Avant 1818 (137), « les transports par eau rendent de grands services à l'exploitation des marais et le marché de Marans est surtout approvisionné par bois des marais et produits des hautes terres, transportés à ce port par bateaux. Denrées et marchandises arrivant de la mer, débarquées sur les quais de Marans, sont transportés à la remontée par la batellerie jusqu'au port de Niort, et de là, dans les villes du Poitou. Cette navigation rencontre encore des difficultés sur les hauts-fonds et les pêcheries; mais présente une certaine activité.
« Dans le port de Niort (138), un commerce d'importation et d'exportation donne lieu à l'établissement de nouvelles fabriques. Par le canal de navigation, il reçoit vins en cercles et bouteilles, liqueurs et vinaigres, jambons, fromages et beurres étrangers, coquillages, poissons de mer frais et salés, huiles, fruits secs, denrées coloniales, bois de teinture, droguerie et épicerie, étain et plomb en grenaille, planches et « saumons », sel, résine, goudron et savon, fagots et bûches de marais, foin et paille, plâtre, ardoises, bois de charronage, vannerie, charbon de terre, planches et solives, bois blanc et sapin en planches, madriers et chevrons, toutes marchandises et denrées provenant du commerce maritime, des bords de la mer et de l'intérieur du Marais.
C'est un débouché pour les produits des fabriques et de l'agriculture du pays, destinées à l'étranger. C'est à peu près le trafic enregistré au XVIIIe siècle.
« Dans le port de Niort, 16 à 18 maîtres-bateliers — dont les deux tiers sont des commerçants — s'occupent des transports par eau de Niort à Marans, sur plus de 23 bateaux dont 5 du port jaugeant 25 tonneaux chacun, 6 de 20, 4 de 15, 8 de 10 et les autres 5 tonneaux.
Les bateaux de 15, 30 et 25 tonneaux effectuent ordinairement les voyages de Niort à Marans. Ceux de 5 à 10 tonneaux leur servent
d'allèges, pendant les basses-eaux ou sont employés de Niort (139) à Coulon et dans les marais, en amont de Marans. » Dès fin juin, on « ne peut franchir les bas-fonds qu'en faisant usage d'allèges et, en tout temps la navigation reste pénible, lorsqu'on n'a pas le vent.
Le manque de chemin de halage, dans la traversée des Marais mouillés, oblige de pousser les bateaux à la perche mais la fatigue est excessive si le vent est contraire et le lit encombré d'herbes. »
En raison du tirant d'eau, « la navigation maritime se divise en trois biefs. Du port de Marans à l'Anse de Braud, on a trois mètres dans les fortes vives eaux comme en temps de crues. Le lit étroit et sinueux…. ne convient qu'à des allèges, coureaux et bâtiments de petit cabotage, remontant au port…. sur lest ou après avoir transbordé la majeure partie de leur cargaison dans des allèges.
Dans l'Anse de Braud et jusqu'à la rade, il y a de l'eau pour les navires de 250 à 300 tonneaux qui peuvent mouiller et échouer au corps de garde et sous les écluses des Marais desséchés ; les allèges de Marans vont faire le service de bord à bord. Les bâtiments plus importants sont déchargés et chargés en rade….. non sans difficultés. A l'amont de la Passe du Rocher, dans l'embouchure, on trouve largeur, tirant d'eau de 4 à 5 mètres, bon amérage et vases molles.
En amont, jusqu'à Marans, le commerce réclame redressements et approfondissements, indispensables même pour les allèges ».
En 1820 (140), pour éviter de porter préjudice à Marans, qui avait protesté, le directeur général des Ponts et Chaussées décide de reporter l'arrivée du canal La Rochelle-Niort sur le cours inférieur de la Sèvre, en aval de ce port et en amont du barrage projeté en 1818 par l'ingénieur Mesnager.
Ce canal présente des avantages pour le port de La Rochelle : expéditions de sel, denrées coloniales, vins de Bordeaux, produits méditerranéens, sapin du Nord, morue, savon, pelleteries, huiles de poisson vers l'intérieur des terres (141); importations de grains transportés jusqu'ici par roulage et par la Sèvre peu navigable. Les ingénieurs évaluent le trafic possible à 21.000 tonneaux à la descente et 14.000 à la remontée du canal, soit au total 35.000 tonnes, évaluées, en 1845, à 43.000 tonnes (soit 27.500, plus 15.500).
De 1821 à 1826, des travaux sont exécutés sur la Sèvre, partie en régie, partie par des ateliers de déserteurs condamnés aux travaux publics, pour 780.000 francs et 47.000 mètres cubes de déblais (142).
En 1826 (143), « rien ne peut arriver par eau fluviale à Marans ni en partir. Les bateaux, venant du haut-pays, sont forcés de s'arrêter à 4 ou 8 kilomètres en amont. A grands frais, il faut aller prendre leurs charges avec des charrettes et passer sur les digues, endommagées par ces transports.
Sur la partie inférieure de la Sèvre, où circulaient des bâtiments de plus de 100 tonneaux remontant à Marans, actuellement les allèges ne peuvent pas aller charger les navires au mouillage du Braud, sauf au retour des syzygies.
Quelques misérables batelets arrivent au port, draînés péniblement sur la vase et les bateliers, épuisés de fatigue, doivent payer des droits considérables. L'important commerce de la ville, après avoir souffert en 1825, a tout à fait cessé en 1826 (144).
La population des bords de la Sèvre, qui ne vivait que de la navigation, commence à éprouver la misère. Les 5.000 habitants de Marans voient le commerce abandonner leur ville et prendre d'autres routes.
4. La navigation sur la Sèvre.
En 1831 (145), les 12 bateliers du port de Niort, appartenant à cinq familles, assurent que la rivière est sans eau du moulin du Roc à Saint-Martin, de juillet à janvier, aussi sont-ils dans l'impossibilité de « monter » leurs bateaux. La situation est la même du Pas de Toulouse à la Roussille, de cette écluse à la Tiffardière et il y a bien peu d'eau de Magné à Coulon, où les bateliers ont beaucoup de peine pour naviguer avec les écluses et les barrages des pêcheurs qui causent des avaries aux bateaux.
En 1834 (146), « la rivière est barrée par le stationnement des bateaux dans le port de Marans et, en aval, certaines parties sont si étroites qu'un seul bâtiment ferme la rivière à marée basse. »
5. Projet de canal maritime Niort-Océan.
En 1840 (147), selon la littérature grandiloquente de l'époque « tout grandit et tout s'améliore dans le pays, où l'on sait apprécier les sciences et les appliquer avec sagesse et discernement aux besoins de l'agriculture et du commerce. Toutes les difficultés cèdent aux études scientifiques ». On pourrait ajouter que la famille de Louis-Philippe a de gros intérêts dans la construction et l'affermage des
canaux (148). « …..L'ingénieur Mesnager a su rendre à l'agriculture des terrains immenses des Marais de la Sèvre niortaise et employer, aux besoins de la navigation, les eaux de la vallée, disséminées naguère dans de vastes lacs et des canaux fangeux. Avant lui, le lit n'existait nulle part; depuis, l'ordre le plus parfait a succédé au plus grand désordre….. »
« La voie navigable doit rattacher Niort à l'Océan, Paris et Bordeaux. La position géographique de Niort, enfoncé vers le centre de la France, réagira sur les villes de Poitiers, Châtellerault et Limoges qui, jusqu'ici n'ont pas de port pour mettre leurs produits en circulation.
Depuis, les améliorations réalisées par Mesnager, dans le bassin de la Sèvre, on peut remonter, jusqu'à Niort ; la navigation maritime s'arrête à Marans. Le canal de Paris à La Rochelle traverserait le port maritime de Saint-Martin de Niort.
Depuis la mer jusqu'à cette ville, la vallée de la Sèvre n'est qu'un golfe ou un port naturel envasé où le reflux de l'Océan vient briser ses lames.
Le canal maritime (projeté) serait d'une grande utilité pour la ville et ses 20.000 habitants. » Le commerce de Niort (149) ne peut que profiter de ce travail qui permettrait aux mariniers de conduire leurs bateaux en été aussi facilement qu'en hiver, alors que la navigation estivale est arrêtée jusqu'alors au village de Sevreau.
En mai 1841 (150), un service de transport par bateau à vapeur est établi sur la Sèvre jusqu'à Niort, pendant une quinzaine de mois, avec un bâtiment de petites dimensions, mais les bateliers, à cause des mortes-eaux, déposent leur chargement à Sevreau et le transport jusqu'à Niort se fait par charrettes. A cette époque, 1.264 bateaux partent annuellement du port, chargés de blé, farine, pierres et bois de charpente et rapportent sel, résine, plâtre, huile, vin et vinaigre.
Le prix du tonneau — 6 francs — est augmenté en été, en raison des difficultés dues aux basses eaux.
En 1845 (151), Niort ne peut amener péniblement à Marans que des bateaux de très faible tonnage, mus à la palle ou à la rame, à travers des prairies marécageuses, par une pente de 9 mètres jusqu'à la mer.
Il faudrait pouvoir faire venir à Niort les marchandises de l'extérieur pans être obligé de les transborder à Marans ou de les débarquer à La Rochelle, pour en charger les routes royales nos 11 et 22.
Il faudrait établir sur la Sèvre par Marans, une voie de navigation de grande section et à Niort, un port maritime intérieur, à relier au chemin de fer projeté.
En 1846 (152), « Niort, ville la plus commerçante du Poitou, reçoit presque tous les produits exotiques, débarqués à La Rochelle et à Marans, et donne lieu à un mouvement de 50.000 tonnes sur la Sèvre.
Si celle-ci était « dégagée de tout obstacle, les bâtiments de mer de Bordeaux, Nantes, Marseille, Le Havre pourraient s'engager dans la rivière et remonter sans transbordement jusqu'à Niort. Presque tous les produits de consommation ou d'industrie du commerce niortais sont de nature encombrante : blés dirigés sur le Midi ou l'Angleterre, bois de Suède et de Norvège, vins de Bordeaux, savons de Marseille, pierre de taille des carrières locales, plâtres de la Seine, ardoises d'Angers, charbon anglais alimentant les nombreux fours à chaux des Deux-Sèvres, graines oléagineuses du Nord, huiles renvoyées en échange des peaux du Chili, ossements d'animaux dirigés sur Bordeaux, sucre, sel, résine, tourteaux, suif de Russie, fers de Bretagne, produits tirés de l'Amérique, obligés de prendre la coûteuse voie de terre.
Pour les porter jusqu'à Niort, par bâtiments à quille de 200 tonneaux, il faudrait engager une dépense de 6 millions de francs, mais on éviterait les frais de transbordement à Marans. Le transport se réduirait à un halage facilité par les vents d'Ouest et les navires à quille seraient facilement conduits par des chevaux. La dépense serait alors de 2 ou 2,50 francs par tonne, au lieu de 12 francs alors par eau, terre et chemin de fer. Le double mouvement du commerce niortais serait évalué modérément à 100.000 tonneaux (153).
Le projet de 1846 (154) prévoit deux voies d'écoulement : l'une par la rivière rectifiée, plus courte de 7 kilomètres que le trajet normal, la deuxième par un canal maritime barré de six écluses où, sur 50 kilomètres du port de Marans à celui de Niort, le remorquage s'effectuerait en un jour, au moyen de relais.
6. Décadence de la navigation.
En 1847 (155), la navigation sur la Sèvre, déjà précaire pour les barques d'un faible tonnage, à cause des hauts-fonds et des tournants brusques et dangereux, est souvent impossible en été aux approches de Niort.
Le port ne « consiste encore qu'en un chenal bordé de quais dont les murs ont besoin de réparations : c'est le bras droit de la Sèvre.
En étiage, le manque de largeur et de profondeur donne un mouillage d'à peine 70 centimètres. Très souvent les bateaux, à sec, s'échouent devant quais et cales d'embarquement. La Sèvre dessert aussi cinq petits ports : Coulon sur la rive droite, Sevreau, La Garette, Arçais sur la rive gauche, qui ne disposent que de talus pavés ou empierrés à faible pente, peu commodes pour l'enbarquement et le débarquement des marchandises.
Le cours navigable de la rivière est divisé en deux biefs, séparés par l'écluse de la Roussille. Le premier est appauvri par les prises d'eau et les pertes des chaussées ou « aigues » des moulins de SaintLiguaire et de la Roussille. Le deuxième bief présente des seuils, dus à l'insuffisance de la retenue de Bazoin.
En plusieurs points, la rivière est si étroite que deux bateaux ont peine à s'y croiser. Dans les coudes brusques, les barques, affalées par le vent ou le courant, échouent et sombrent au milieu de la passe. Les chemins de halage, presque partout submersibles, sont impraticables pendant une partie de l'année.
Après 1850 (156), la navigation est à peu près interceptée par l'insuffisance de profondeur aux abords de Niort et près des moulins de Saint-Liguaire et de la Roussille.
De ce dernier point à Jousson, en aval de Magné, quand le niveau s'abaisse à l'étiage, la navigation est complètement interdite jusqu'à Coulon.
Le commerce se trouve alors obligé de transporter toutes les marchandises par voitures de Coulon à Niort et réciproquement. Il en résulte frais, pertes de temps et dépréciation des produits. Malgré l'écluse de la Roussille, la navigation est interceptée, sur près de 17 kilomètres, pendant l'équinoxe d'automne, alors que le mouvement du port de Marans est actif et que le commerce a d'importantes expéditions à effectuer.
En aval de Coulon, la navigation, améliorée par les retenues de la Sotterie et de Damvix, s'opère avec des chargements raisonnables, mais il faut faire suivre les grands bateaux d'allèges, diminuant l'enfoncement des bateaux et leur permettant de traverser les hauts-fonds.
De Damvix à Marans, la circulation est assez facile, par marées favorables ou quand le barrage de Marans est fermé.
En aval de Marans, seuls circulent des bateaux à quille, avec l'aide des marées.
L'écluse de la Roussille — 5,20 mètres de largeur et 33,33 mètres de longueur — présente un renflement dans le sas pour le croisement des grands bateaux avec les nombreux petits passant en ce point.
Cependant les plus grands bateaux, utilisés par le commerce, n'ont que 4,10 mètres de large et 23 mètres de long, avec 85 centimètres de tirant d'eau, à cause des sinuosités de la Sèvre et de la faible largeur dans certaines sections du chenal.
Les écluses de la Sotterie et de la Loge, en aval de Damvix, sont en bois avec intervalle de 33,33 mètres et passage de bateaux de 5,20 mètres de large.
L'écluse de Damvix, avec intervalle de 15,80 mètres en été, aboutit au barrage de Marans, en aval duquel les bateaux ont un tonnage très variable, selon saisons et marées.
Autrefois, le tonnage des navires atteignait 50 tonnes, actuellement le Port de Marans est fréquenté, même en été, par des navires de 200 tonnes. Des ouvrages devraient permettre l'arrivée à Marans de navires jaugeant 600 tonneaux avec 8,70 mètres de largeur, 36 de longueur et enfoncement de 4,20 mètres.
Lors de son passage à Niort, Louis-Napoléon, en 1852 (157). le futur empereur, accorde 500.000 francs, dont 150.000 prélevés sur le budget des Travaux publics de 1854, pour construire deux éclusettes entre Niort et Coulon, afin d'assurer en étiage le passage des bateaux au marais Goin et à la Tiffardière.
7. Bateaux.
A partir de 1856 (158) — modernisation — « un bateau à vapeur », destiné au transport des voyageurs, effectue, tous les jours, le trajet Niort-Marans mais des bateaux naviguent encore sous voiles, à la cordelle ou à rame et, dès 1856, on note une réduction de 15 du trafic, attribuée à la concurrence du chemin de fer La Rochelle-Niort, elle atteint 19 en 1857 et 32 en 1858, le trafic ferroviaire offrant un tarif inférieur de 20 par rapport à celui de la voie d'eau (159).
La batellerie sur la Sèvre n'utilise que des bateaux de 20 tonnes, et plus de 24 d'entre eux n'ont que 20 à 45 tonnes; ils sont possédés par 23 propriétaires, un seul en possède deux (160).
Les bateaux, employés par l'agriculture, en très grand nombre, sont indispensables pour l'exploitation des Marais.
En 1865, les bateaux les plus usités, les « gabarres », peu nombreuses, présentent des formes arrondies avec 4,15 mètres de large et 19,40 mètres de longueur maxima. Leur chargement habituel oscille autour de 20 à 30 tonnes, mais il pourrait atteindre 40. Leur tirant d'eau est de 85 centimètres, avec possibilité de 1,10 mètre.
Des bateaux plats mâtés, terminés à l'avant en triangle effilé, ont 3,60 mètres de large, 20,60 de longueur maxima, chargement de 24 tonnes et tirant d'eau de 83 centimètres à 1 mètre. Les allèges ont 2,95 mètres de large, 11,50 mètres de longueur maxima avec chargement de 10 tonnes et tirant d'eau de 45-50 centimètres.
Les bateaux servant au commerce local ont 2 mètres de large, 6 à 6,66 mètres de long avec chargement d'une tonne, porté parfois à deux et tirant d'eau de 45-50 centimètres. Sur la Sèvre, circulent aussi de nombreux bateaux servant à l'agriculture ayant 6 mètres de long.
8. Le trafic de 1868 à 1914.
En 1868 (161), plus de 6.000 bateaux circulent sur la Sèvre — certains faisant plusieurs voyages — : plus du tiers à la descente et moins des deux tiers à la remonte. A la descente, 43% des bateaux passent de février à mai, avec léger maximum en mars. A la remonte, près de la moitié sont utilisés de février à mai avec maximum en mars-avril, un tiers en octobre-novembre. Le maximum annuel est atteint à la remonte en octobre — le cinquième de l'année — près de deux fois plus qu'en mars et plus du triple du maximum de mars à la descente.
Des cinq ports de la Sèvre : la Roussille, la Sotterie, Bazoin-Maillé, embouchure du Mignon et la Grève, le plus important, à l'embouchure du Mignon reçoit près de 3.000 bateaux par an, soit la moitié du total annuel, avec maximum à la remonte (82 %) et maximum du total des bateaux remontant la Sèvre (63 %).
Le port de la Sotterie, au second rang, reçoit 1.788 bateaux, un peu moins du tiers de ceux parcourant la Sèvre dans l'année, à peu près le même nombre à la descente qu'à la remonte, ou le quart du total de la remonte annuelle.
Le port de Bazoin-Maillé, abandonné en juin-juillet dans les deux sens, n'est fréquenté dans l'année que par 700 bateaux, mais avec 99 à la descente et 38 des bateaux descendant annuelle
ment la Sèvre, ce qui le place au premier rang des autres ports à ce sujet.
Pour le trafic annuel, la Sèvre porte plus de 25.000 tonnes dont 47 de bois, 25 d'engrais et amendements, 16 de céréales, grains, légumes et fourrages, 12 de matériaux de construction.
Les produits agricoles représentent un trafic de 56 à la descente, avec les quatre cinquièmes du tonnage d'août à novembre après la récolte et maximum en septembre (le tiers) et près de 60 à la descente pour le port de Bazoin-Maillé et 44 à la remonte pour celui de la Roussille.
Les bois sont transportés pour près des quatre cinquièmes à la descente avec deux tiers du tonnage en février-mars par le port de Bazoin-Maillé et celui de l'embouchure du Mignon (près de la moitié chacun), un cinquième à la remonte avec moitié du tonnage de mars à mai, surtout par le port de la Sotterie (87 %). Engrais et amendements sont transportés surtout à la remonte — 90 du tonnage — et surtout par le port de l'embouchure du Mignon (88 %).
Les matériaux de construction, au contraire, descendent surtout la rivière (86 %) dont 70 par le port de la Sotterie.
En 1869 (162), les bateliers se plaignent que le transport des marchandises s'effectuant de Niort à Marans, ils sont dans l'obligation de demander, pour le transport par voiture entre Niort et Coulon, presque la totalité du prix qu'ils reçoivent pour le transport de ces mêmes marchandises de Niort à Marans, de telle sorte qu'il ne leur reste presque plus rien pour vivre sur le transport par bateau entre Coulon et Marans, c'est-à-dire 37 kilomètres.
Il est impossible aux bateaux de passer par le bras de rivière du port de Sudreau, même à vide, car, sur plusieurs points, il ne reste que 20 à 25 centimètres d'eau.
Cette même année (163), on compte le passage de 3.400 bateaux utilisés pour la navigation locale sur les cours d'eau et canaux de la vallée de la Sèvre — les quatre cinquièmes ayant de 4 à 5 mètres de long -, plus 5.000 pour les relations entre les lieux habités et les transports des habitations aux champs dans le Marais. Au total, cela représente 8.400 passages de 106 bateaux — soit en moyenne 70 voyages pour chacun par an — dont 22 bateaux de 3 tonnes, 2 de 7-8 tonnes, 4 de 4 tonnes, 68 bateaux plats de 4 tonnes, 3 de 6 et un de 16 tonnes, 5 chalands pour le service du port de Marans (4 de 12 tonnes et un de 46), un sloop jaugeant 35 tonnes, attaché au port de Marans.
En 1877, l'État améliore la navigation par bateaux de commerce sur la Sèvre, entre Niort et Marans, par la construction de barrages et d'écluses, élargissement, approfondissement et redressement du lit de la rivière pour plus de 2 millions de francs.
Malgré cet effort, la décadence de la navigation s'affirme, due à la fois à la création de voies ferrées, à l'amélioration et au développement des voies de communication terrestres à travers le Marais.
En 1880 (164), on recense encore 14 bateliers sur la Sèvre mais en 1887, il n'y a plus que 9 chalands de 20 à 46 tonnes, 2 à Marans, 1 à Saint-Hilaire-la-Palud, 2 à Damvix, 1 à Coulon, 1 à Arçais, 1 à Vix et 1 à La Grève.
A partir de 1885 et pendant une dizaine d'années, le vapeur « Brieux » de La Rochelle (14 CV, 4,5 tonnes de jauge, calant 1,30 mètres) effectue un service régulier de remorquage de gabarres sur le canal de Marans et la Sèvre, entre La Rochelle et Niort, à raison de deux voyages par mois. L'absence de marchandises comme frêt de retour augmente les frais de transport.
En 1888, des bois en grumes sont transportés par radeaux vers les scieries mécaniques de la Sotterie, La Garette, Le Vanneau, Mazeau, Damvix.
Débités en planches, ces bois sont expédiés par voie d'eau jusqu'à Coulon, où ils prennent soit le chemin de fer, soit la route. Les autres courants de transport portent sur : bois à brûler, pierre à bâtir, sable et ciment, engrais, produits maraîchins (bestiaux, lait, beurre, œufs, haricots, ray-grass, osier et salades d'hiver). Ces articles sont amenés par voie d'eau jusqu'à Coulon qui en expédie annuellement pour 50.000 francs.
La navigation à vapeur n'est assurée que par un remorqueur de 14 CV effectuant le trajet Niort-La Rochelle par Marans deux fois par mois, traînant deux gabarres en bois et à fond plat, portant l'une 86, l'autre 53 tonnes.
La concurrence du chemin de fer et de la route est sensible et les bateaux manquent à peu près complètement au départ de Niort.
En 1891, 113 bateaux de 3 à 50 tonnes, représentent un total de 668 tonnes de jauge, 104 sont conduits par leur propriétaire : 31 gabarres dont 4 de Marans — de 26 à 33 tonnes, et 27 de 3 à 8 tonnes, 72 bateaux plats dont 5 de 6 tonnes, 1 de 16 tonnes de Marans et 66 de 3,5 à 4 tonnes, un sloop de l'île de Ré (35 tonnes) et 6 chalands (1 de 46 tonnes de Marans et 5 de 12 tonnes à l'État, en régie), soit 8 bateaux de 20 à 46 tonnes.
En 1912, on ne recense plus que 76 bateaux, jaugeant 374 tonneaux dont 60 conduits par leur propriétaire, 3 pontés, 2 en fer, 4 portant de 20 à 48 tonnes (1 à Damvix, 1 à Marans, 2 à Bernegoue) dont un de 50 tonnes à fond plat et en tôle.
Registres des bureaux de déclarations et états statistiques ne donnent qu'une approximation très faible du trafic réel des marais de la vallée de la Sèvre, où la plupart des transports se font par les nombreux canaux de dessèchement s'embranchant sur les rivières et échappant à tout contrôle.
Depuis le 1er janvier 1898, les transports de marchandises et produits industriels étant relevés d'une manière plus complète, notamment le flottage des bois, le tonnage effectif du trafic intérieur sur la Sèvre et ses affluents est bien supérieur à celui enregistré les années précédentes. Les statistiques ne tiennent cependant pas compte des bateaux inférieurs à 3 tonnes de jauge qui, journellement, servent à l'exploitation agricole des marais mais on calcule approximativement, à cette date, que l'on peut compter sur un total de 6.000 tonnes, les transports de bestiaux et outils exclus. Sur la Sèvre niortaise, on compte, en 1903, un trafic intérieur de 35.000 tonnes, 11.000 d'expéditions, 7.400 d'arrivages, 2.400 de transit sur un total effectif de 56.000 tonnes.
Sur la Sèvre, on transporte : bois à brûler et de service, matériaux de construction, produits agricoles et denrées alimentaires; sur le Mignon : engrais et amendements; sur l'Autize : bois flottés et matériaux de construction.
Rarement du charbon, arrivé par navires à Marans, est transbordé sur des bateaux pour remonter la Sèvre. La navigation est presque exclusivement locale et le trafic est réparti entre les différents ports.
En 1903, on compte le passage, sur la Sèvre niortaise seule, à la descente de 8.700 bateaux avec tonnage de 26.000 tonnes, à la remonte 8.400 avec tonnage de 30.000 tonnes. Le halage est à traction humaine et chevaline, l'usage des voiles étant le plus souvent gêné par les sinuosités de la rivière. La durée des trajets est fonction de la charge des bateaux, de la force du courant, de la température, de l'état de la rivière, des crues et des glaces qui les retardent. On calcule qu'à la remonte un vapeur fait de 3 à 6 kilomètres/heure, le halage au cheval de 2 à 4 kilomètres, et, à la descente, respectivement, de 4 à 6 kilomètres/heure et de 3 à 5 kilomètres.
Le service régulier La Rochelle-Niort est supprimé depuis la fin de 1871. Le chemin de fer, évitant les transbordements, et le tramway départemental de la Charente-Inférieure, longeant la rive gauche de la Sèvre, ont diminué d'autant la navigation fluviale à longue distance, leurs tarifs étant inférieurs. Il est très rare de trouver un fret de retour par eau entre Niort et La Rochelle.
En 1910 (165) La Sèvre niortaise est canalisée, le mouillage augmenté, mais la navigation fluviale ne profite guère de ces travaux.
Plus aucun bateau n'est attaché au port de Niort et, sur la rivière, on n'en compte plus que quatre ou cinq, d'un tonnage de 20 à 30 tonnes, mais la navigation locale a toujours la même activité entre les diverses communes du Marais.
En 1912, la navigation est sans importance entre Niort et Coulon, mais plus active entre les ports de Coulon et de Marans. Presque tous les arrivages de la Sèvre, à la remonte, proviennent de La Rochelle, et à la descente des ports du Mignon, l'Autize et la Vendée.
Le transit de la Sèvre se limite à des bateaux allant de l'Autize et du canal de Marans à La Rochelle, sur le Mignon et réciproquement. Depuis quelques années, les communes ont tendance à convertir le chemin du halage en chemin carrossable, notamment sur le territoire de l'île d'Elle, Damvix et Coulon. Une diminution du trafic est due à l'inondation prolongée des marais réduisant l'exploitation des bois de peupliers, l'emploi des engrais et de volume des récoltes.
IX. LES MARCHANDISES TRANSPORTÉES DE 1886 À 1941
1. Tonnage-marchandises.
Dans le détail du tonnage-marchandises, le trafic né sur la voie navigable représente, en moyenne, les 7/10 du total de 1886 à 1897, les 4/5 de 1898 à 1904, les 3/4 de 1905 à 1913 et de 1915 à 1918.
Parallèlement, dans ce même ordre d'idée, le trafic intérieur croît de 70 du total en 1886 aux 4/5 en 1904 pour redescendre aux 2/3 en 1913 et à la moitié de 1915 à 1918. Le tonnage, très légèrement supérieur — 5 en plus à la descente — de 1892 à 1905, s'inverse ensuite dans la même proportion — 5 en moins — en faveur de la remonte. Les expéditions l'emportent à la remonte dans la proportion de 70-80 de 1886 à 1913, de 66 de 1915 à 1918 pour l'approvisionnement du centre urbain et industriel de Niort.
Le trafic né hors de la voie est moins important : près d'un tiers de 1886 à 1897, du cinquième au quart de 1898 à 1913, au cinquième de 1915 à 1918, mais la proportion du transit, assez faible, diminue du tiers au cinquième de 1886 à 1897, regagne du cinquième au quart de 1898 à 1913 et retombe à 2 seulement de 1915 à 1918. Les arrivages comptent surtout à la descente avec 4/5 contre 1/5 à la remonte.
Le tonnage des marchandises à la descente l'emporte de 1861 à 1874 : 70 environ, s'égalise à peu près avec celui de la remonte de 1877 à 1925, tombe de 36 à 45 de 1925 à 1934, puis à 27-33 de 1935 à 1941.
2. Nature des marchandises.
Les produits agricoles (céréales, grains, légumes et fourrages) représentent plus de la moitié du trafic à la descente vers 1865 (17.000 tonnes), 14 en 1867-1868, 20 en 1870, 35 à 40 vers 1875 (7.000 tonnes), 4 à 9 seulement vers 1897 (1.946 tonnes); avec des observations plus précises : 25 à 33 vers 1903 (20.300 tonnes), 50-60 de 1918 à 1923, 72 à 90 de 1924 à 1941, c'est alors presque le seul groupe d'articles transportés, les bois flottés mis à part.
Les engrais, moyenne 7.000 tonnes de 1870 à 1880, pointent à 10.000 en 1889, baissent en 1897, remontent au maximum (15.000 tonnes) vers 1910, mais depuis une chute catastrophique aboutit à la disparition de ce trafic.
Les matériaux de construction atteignent un maximum vers 1867-1880 (5.000 tonnes), un second (plus de 10.000 tonnes) de 1909 à 1913, pour aboutir depuis à une chute puis à leur disparition.
Les bois de chauffage et de service s'élèvent en 1867 à près de 12.000 tonnes, se maintiennent à 10.000 tonnes, présentent une chute vers 1900, remontent à 11.000 tonnes en 1904-1913, aboutissent ensuite à une chute à zéro, pour remonter en 1940 pour obvier à la pénurie du charbon pendant les hostilités.
Les bois flottés ne représentent que 1.200 tonnes en 1886-1888, déclinent en 1889, puis de 1.600 à 300 tonnes de 1890-1895, remontent à 10.000 tonnes en 1896, 16.000 en 1898 — amélioration du contrôle -, se maintiennent à 5.000 jusqu'à 1905, descendent de 1910 à 1917, remontent à 16.000 tonnes en 1919 pour tomber de 2.000 à 4.000 tonnes de 1920 à 1926, puis de 1931 à 1935, pour disparaître complètement en 1936.
X. RENOUVEAU PASSAGER DU TRAFIC EN 1917
Gênée par les hostilités, dès 1914, la navigation locale continue sur la Sèvre, en 1917, avec 9.200 petits bateaux d'agriculture ou « nioles » de 4-6 mètres de long, jaugeant 2-4 tonnes. A cette date, les bateaux de mer ne peuvent remonter en amont de Marans, port maritime, à 54 kilomètres en aval de Niort et à 20 kilomètres en amont de l'embouchure de la Sèvre dans l'anse de l'Aiguillon.
En 1917 (166), un chaland de 25 mètres de long et 5 de large porte 57 à 60 tonnes, avec un tirant d'eau d'un mètre, 80 tonnes avec un tirant de 1,30 mètres. Le prix de revient de cette embarcation est de 30.000 francs y compris l'aménagement intérieur et l'armement fixe.
Un bateau automobile, le « Charles » de La Rochelle, fait escale à Coulon et Damvix, en venant de Niort.
De Niort à Coulon, la Sèvre est envahie par les herbes et il faut parfois relever l'hélice dix-neuf fois, d'où perte d'une heure.
Le 16 juin 1917, les écluses livrent passage à six bateaux, dont la « Clémence Hortense » (167) et deux remorqueurs, événement qui ne s'était pas produit depuis plus de cinquante ans (1867). C'est une date historique pour la navigation sur la Sèvre.
« Des dragues creusent sans arrêt (168) les hauts-fonds. Aux abords de Marans, une équipe de 200 prisonniers allemands élargit de 35 mètres le canal de Ponère et la navigation est rendue possible jusqu'à quelques kilomètres en aval de la ville de Niort. Chaque semaine, vapeurs et remorqueurs desservent les localités riveraines, apportent aux nombreuses laiteries de la région le combustible nécessaire à leur exploitation et remportent des marchandises diverses ».
Depuis plus de trente ans (1887), le trafic fluvial avait dû être abandonné, en raison du mauvais état de la route d'eau. On assiste maintenant « à la mise en état de la voie fluviale qui, par Marans, réunit le port de La Rochelle au nœud ferroviaire de la gare de Niort ».
En 1917, on note la suppression totale de l'importation des charbons anglais au port de Marans (500 tonnes) contre près de 5.000 tonnes en 1916. Le trafic général est alors de 18.000 tonnes contre 27.000 en 1913, moitié aux expéditions, moitié aux arrivages, 370 à peine pour le transit.
Par le canal de Marans et la Sèvre niortaise, une voie d'eau relie l'Atlantique à la ville de Niort. Humoristiquement, un journaliste précise « le canal, fabriqué par Napoléon III, sur les plans de Napoléon Ier, n'a pas été curé depuis le proconsulat de M. Thiers. Il n'est plus accessible qu'aux pêcheurs sous 50 centimètres de vases, un mètre de végétation inextricable et son chenal était, il y a un an, parfaitement impropre à toute navigation sur 24 kilomètres de La Rochelle à Marans et 58 de Marans à Niort ».
Le même journaliste (169) « a pu le parcourir en douze heures, sur un remorqueur — en octobre 1918 — alors que l'année précédente il en fallait trente-six. Les 4,7 kilomètres de dérivation de Ponère coupe, aux abords de Marans, une des larges boucles de la Sèvre niortaise. La moyenne s'est élevée à 10 kilomètres/heure, alors qu'elle n'était que de 5 kilomètres/heure sur le long ruban d'eau embroussaillé du marais poitevin. A partir du pont des Sablons, à mi-chemin entre Niort et Marans, il faut trente-sept minutes pour parcourir 1.700 mètres ».
Le 31 octobre 1918, un bateau de 30 tonnes de charbon aggloméré est débarqué au port de Niort mais pendant les mois de sécheresse, la « Clémence Hortense » ne peut continuer son trafic qu'en réduisant de moitié son tonnage, avec tirant d'eau de 90 centimètres.
De 1915 à 1918, le trafic de la Sèvre niortaise comporte à la descente : bois de chauffage et d'oeuvre (notamment fagots, planches, fûts vides et sciure de bois), produits agricoles (haricots du Marais), produits industriels (quincaillerie) et engrais (tourteaux). A la remonte, il s'agit de combustibles (surtout charbon, puis pétrole et carbure); bois (fagots, peupliers, bois de construction, sciure), produits agricoles (avoine, paille, foin, ail, blé, méteil, vin, peaux de moutons, cidre), matériaux de construction (sable, gravier, chaux). Il s'agit, à la remonte, en 1915 de 90 %, en 1918 de 50 de produits du Marais, surtout aux expéditions.
A cette époque, le trafic est assuré par une dizaine de bateaux, dont deux chalands en fer, 2 en bois, de deux à sept gabarres de 30 à 60 tonnes, six allèges de 25 tonnes tirées par un ou deux remorqueurs. La navigation part surtout de Damvix, Arçais, Magné, rarement de Niort, vers Marans et La Rochelle.
XI. DÉCADENCE FINALE EN 1921-1941
En 1921, il y a peu d'importations et d'exportations sur la Sèvre et ses affluents. Depuis quelques années, les charbons nécessaires aux scieries et laiteries de la Sèvre sont transportés par bateaux des ports de La Rochelle et de Marans. A la descente, 185 tonnes de bois de service sont expédiés sur La Rochelle par le canal qui relie cette ville à Marans mais 1.500 tonnes sont transportées par eau à Marans des scieries d'Irleau, Arçais et Damvix pour être expédiées sur Paris par chemin de fer.
Les bateaux de commerce sont des gabarres en bois à fond plat, non pontées, de 20-25 mètres de long, 3-4 de large, d'un tirant d'eau d'un mètre et d'un tonnage de 30 à 60 tonnes.
Trois bateaux ont fréquenté la Sèvre en 1921 : « La Sèvre » 59 tonnes, le « Mignon » 59, l' « Ernest Georges » 48 tonnes, à hélice.
En 1930, on relève, à la remonte : 445 passages de bateaux dont 40 de Bazoin à Damvix, 20 de la Croix-Sainte-Marie à Bazoin, un seul de Magné à Coulon, transportant 2.100 tonnes dont les deux tiers de bois flottés entre Coulon et Le Mazeau, un quart de produits agricoles entre Bazoin et Damvix, 1/10 de bois à brûler entre Maillé et la Croix-Sainte-Marie, 5 d'engrais entre Damvix, Le Mazeau et Coulon. A la descente, on note : 980 passages de bateaux dont 38 de Coulon à la Sotterie et 34 de Damvix à Bazoin. Il s'agit de 2.400 tonnes dont 47 de produits agricoles de Coulon à la Sotterie et 10 de bois à brûler de Damvix à Bazoin.
En 1941, la descente comporte 1.100 tonnes de bois à brûler et de service dont les 3/4 de Coulon à Irleau et 1.400 tonnes de produits agricoles dont 44 de Damvix à Bazoin et 41 de Ponère et Marans. La remonte est représentée par 2.700 tonnes dont 58 de bois à brûler entre Irleau et la Sotterie, 42 de produits agricoles, surtout entre Bazoin et la Croix-Sainte-Marie.
Nous sommes bien loin du total du trafic d'autrefois : 55.000 tonnes en 1827, 58.000 en 1904 et même des minima de 30.000 tonnes de 1800 à 1830 et de 25.000 tonnes de 1864 à 1890.
XII. CONCLUSION
Au cours de cette longue analyse, portant sur huit siècles, nous avons relevé plus de velléités et de projets — parfois grandioses que de réalisations pratiques. Cette histoire de la navigation sur la Sèvre niortaise affirme la vitalité économique de la ville de Niort et les tentatives persévérantes des hommes pour discipliner la nature, utiliser la position géographique de cette active cité et équiper une voie d'eau qui peut être rendue navigable. Ingénieurs, économistes et édiles ont tendu vers ce but, sans jamais l'atteindre d'une façon durable. Il faut avouer que les possibilités de la Sèvre niortaise, rivière à faible pente, sont limitées par les conditions géographiques locales elles-mêmes : répartition saisonnière des pluies (crues, sécheresse et glaces), action des marées, alluvionnement, végétation aquatique, mais aussi par l'évolution technique de la navigation et des transports par terre et voie ferrée, les besoins des industries de Niort, les progrès de l'agriculture et des moyens de circulation dans le Marais poitevin.
Le Néréis, dit «Bac à rateau», repousse 1 700 tonnes de vase.
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LA NAVIGATION SUR LA SÈVRE NIORTAISE ET LE PORT DE NIORT DU XIIE AU XXE SIÈCLE COMMUNICATION DE M. ROBERT TINTHOIN
Comité des travaux historiques et scientifiques (France).
Histoire de la ville de Niort depuis son origine jusqu'en 1789 . par L. Favre
Résumé historique des origines et de la formation du Marais Poitevin - L'histoire de la mer à Niort, dans l'antiquité romaine <==.... ....==> Voyage dans le temps avec les Cours d’eau du DÉPARTEMENT des DEUX-SÈVRES
Sepvret, premier pont de la Sèvre Niortaise<==
En 1377 (7), sous Charles V , on reprend l'idée d'y établir un port, bien que la France subisse crise économique, avilissement de la monnaie, renchérissement de la vie, pénurie de mainœuvre.
L'aspect actuel de la baie de l'Aiguillon résulte des endigages successifs qui, du moyen âge à 1965 ont isolé près de 100 000 hectares de l'ancien Golfe des Pictons pour créer le marais Poitevin. Dès 1199, l'abbaye de Moreilles entreprend de mettre en valeur les marais qu'elle possède autour des anciennes îles de Moreilles et Chaillé-les-Marais.
Le marais n'est pas arrivé à son état actuel tout naturellement. Il aurait encore aujourd'hui l'aspect d'un vaste marécage si la main de l'homme n'y avait pratiqué des travaux de dessèchement. Le dessèchement des marécages a toujours eu une triple importance : au point de vue de la salubrité, de la viabilité et de l'agriculture.....
Construits à la fin du XIX e siècle pour réguler les eaux du Marais poitevin, les deux barrages des Enfreneaux, situés sur la Sèvre niortaise Chaque année, des opérations de bacages de la Sèvre maritime sont réalisées pour éviter l'envasement de cet exutoire.
Plus de mille ans se sont écoulés sans que des faits historiques aient été mentionnés sur ce coteau de la Tiffardière où s'étaient installés des Taïfales ( Tiffauges- Mauges) pendant la domination romaine. Quelle construction la féodalité éleva-t-elle là pour défendre la Sèvre et le gué qui la coupait et donnait communication avec Saint-Liguaire ?
Il n'est pas besoin de s'étendre ici sur les dispositions prises par les Rochelais pour éviter qu'à la suite des malheurs de la guerre de Cent ans, leur commerce maritime se portât dans les ports de la banlieue.
(1) Cette étude est née de la participation des Archives départementales des Deux-Sèvres au thème de la XXXIIe foire-exposition de Niort de 1962 « La Mer et l'Homme ». Il y a cent vingt ans que le Bulletin de la Société de statistiques ancêtre de la Société historique des Deux-Sèvres — a publié une étude sur « la Navigation sur la Sèvre ».
(2) Ch. ARNAULT, Navigation sur la Sèvre, 1840-1841, p. 146; La Sèvre niortaise, son histoire et celle de sa navigation (Annuaire statistique et historique du département des Deux-Sèvres, 1841, Niort, p. 98 et s.)
(3) Arch. dép. du Nord, B 505/1309.
(4) Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 483 (Arch. mun. Niort), cf. in ifne, pièce j ustificative.
(5) Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 1714.
(6) lbid.
(7) Ibid., 2 E 1715 (copie de 1582).
(8) Ibid., 2 E 571 (1382) — des bots de Laglée, la Charrie, de Champagné, du Passage, Moureille, Courdault, Bouille, ports et hâvres de l'évêque de Maillezais.
(9) L'osier, cultivé à Coulon, Damvix et sur les bords de la Vendée, est particulièrement recherché par les pays de vignobles. Les lourdes gabarres, qui remontent la Sèvre, en transportent des chargements jusqu'au port de Niort avec le bois de chauffage (1er juillet 1377 : lettres établissant la Coutume de Sèvre, Arch. mun. Niort, n° 175).
(10) A. GAUGET, I. Le Commerce XIIIe-XIVe siècles. Mémoire pour servir à l'histoire de Niort, Niort, 1863, 106 p. (cf. p. 24).
(11) Arch. mun. Niort, n° 462 : plaidoyer des religieux de Celles.
(12) H. CLOUZOT et A. FARAULT, Niort et sa banlieue, Niort (Société historique des Deux-Sèvres), 1931, p. 252.
(13) Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 595.
(14) Loc. cit., p. 13.
(15) Arch. dép. Deux-Sèvres (cf. Ch. ARNAULT, Annuaire cité, p. 100).
(16) Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 489.
(17) Ibid., 2 E 314.
(18) Ibid., 2 E 486. Coutume levée au « gué et Perré de Velluyre, pont de la Charrie, bot de l'Anglée, passage de Moreille, Champagné, Le Certre, Maillé, la Pichonnière, les ports d'Azire, Coulon, Courdaulx, Voulie, Arçay, Niort, Cevreau, Bessines, Peiglan, Portnau, Tiffordière, la Roussille, trespas d'entre Niort et Beauvoir ».
(a) Le manoir de Dinchin appartenait alors à Pierre Prévost, fils de Jean Prévost écuyer, et de Jeanne Rabateau. Notons que c'est pendant ce voyage en Bas-Poitou que Louis XI fit conclure le mariage de Commynes avec la poitevine Hélène de Chambes, fille ainée du seigneur de Montsoreau. --- --
(b) Arrêt du 16 octobre 1474, publié par Mlle DUPONT, op. cit., t. III, p. 59.
(c) Arch. Vendée, 1 E 1244, fol. 23 v°; 1 E 1245, fol. 98 v°; 1 E 1246, fol.
183 v° (cette année-là, 1417-1418, le preneur ne reçoit aucuns gages parce qu'il n'a rapporté nuls exploits). Ce preneur en port s'appelle Pierre Rouillonneau. Pour le texte même relatif à la coutume du poisson frais, voir pièce justificative n° IV.
(d) Les trois comptes de 1413, 1415 et 1418 indiquent le nom des pêcheurs qui ne sont pas présentés au port des Sables : en 1413, Méri Belhueil, le 9 mars, Jean Jamet, le 20 avril, Jean Donne et Guillaume Boucoque le 21 avril (vendredi saint), et à nouveau Jean Jamet le 22 avril; en 1415, Philippon Audichon le 20 mars, et Charles de Blois le 22; en 1418, Tenot Audichon et Jean Jacquet, le 23 avril. Tous sont indiqués comme allant vendre leur poisson à La Rochelle; pour ces trois ans la ferme est de 4 et 5 livres ; de 1454 à 1459, elle se tient entre 30 livres et 37 1. 10 s. ;
de 1491 à 1500, elle varie entre 17 1. 10 s. et 26 1. 5 s. En février 1447 (n. s. t.) les habitants d'Olonne, les Sables et la Chaume affirment, au cours d'un procès, qu'ils « sont très povres et indigens et que tout leur fait gist en pescherie » Arch. nat., Zlà 16, fol. 164.
(e) En 1412-1413 et en 1414-1415, le receveur ne compte rien pour la taille due à Olonne « parce que les habitans sont mors la plus grant partie, et n'y a comme nulz habitans en ladicte taille », Arch. Vendée, 1 E 1244, fol. 9, et 1245, fol. 81.
(f) Le droit sur la vente des marchandises en la. halle ou « cohue » de Talmoq est appelé « cohuage ».
(g) Arch. Vendée, 1 E 1250, fol 4; marchandise « chargée esd. ports et mise en navyres pour charouier sur la mer ».
(h) Arch. Vendée, 1 E 1253, fol. 9.
(i) Id. 1 E 1246, fol. 175 « Du prouffit du poisson de mer, qui est avoir de la mersoupe la teste bien un pié emprès, et un pié dès le nambomulh (?) en bas ».
( j) Id., 1 E 1250.
( k) Id., 1 E 1244, fol. 12 vo, 1 E 1245, fol. 84 va, 1 E 1246, fol. 72 va,1 E 1247 , fol. 2 vo. La ferme varie de 1 à 21.
(19) Ch. ARNAULT, loc. cit., p. 102 (Annuaire.).
(20) Ibid., p. 146.
(21) Lettre de Louis XII pour le recurement de la Sèvre (Arch. mun. Niort, n° 483).
(22) Ét. CLOUZOT, Marais de la Sèvre niortaise et du Lay, 1904, p. 161.
(23) Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 1155.
(24) Ibid., 2 E 1154 (Registre des délibérations de la commune de Niort).
(25) Arch. mun. Niort, n° 1155.
(26) Dom FONTENEAU, t. XX, p. 322.
(27) Arch. dép. Deux-Sèvres, 3 E 65, Étude Brisset (Transaction, document relevé par M. le Dr Merle).
(28) In Mémorial des Deux-Sèvres, journal du 18 octobre 1940.
(29) Ét. CLOUZOT, Marais de la Sèvre niortaise et du Lay, p. 159.
(30) Cf. ARNAULT, loc. cit., Annuaire, p. 104.
(31) Cité par E. LAVISSE, Histoire de France, t. VII, 1re partie, p. 211.
(32) Charles de la Porte, seigneur de la Meilleraye (en Gâtine), 1602-1664, maréchal de France, surintendant des finances, commanda l'armée royale du Poitou, Saintonge et Limousin.
(33) Cité par E. LAVISSE, op. cit., p. 250.
(34) Arch. dép. Deux-Sèvres, 3 E 256 (Document relevé par M. Merle).
(35) Palle ou pigouille.
(36) Aussière, cordage pour les manœuvres dormantes et le halage.
(37) Arch. dép. Deux-Sèvres, 3 E 163, Étude Perat (Document relevé par M. le Dr Merle).
(38) Ibid., 3 E 219, Étude Jousseaume, fol. 379 : inventaire de communauté du 22 septembre 1666.
(39) Ibid., 3 E 216, fol. 298 : acte du 26 septembre 1663 (relevé par sœur Marie-Pierre).
(40) Ibid., 3 E 218, fol. 402 : acte du 2 décembre 1665 (relevé par sœur Marie-Pierre).
(41) Ibid., 3 E 219, acte du 22 septembre 1666.
(42) Ibid., 3 E 220, Étude Jousseaume, fol. 244 (1667).
(43) Ibid., 3 E 216, fol. 164 : acte du 21 mars 1663.
(44) Parmi les bateliers de Niort, nous avons relevé les noms suivants : Amirault, Archimbault, Brittay (dit aussi gabarrier), Chaslon, Drouard, Goudron, Lavault, Maistre, Meschain, Novion, Richaud.
(45) Arch. dép. Deux-Sèvres, 3 E 280, fol. 378 : acte du 22 septembre 1666. Mobilier : 2 chaslits de noyer « avec leur garde-paille sur lequel il y a un lit avec son traversoire de coutil et plume, couverte de boullanger barelé…. table, chaises et banc, armoire, 2 petits coffres, 8 linceuls, 6 nappes et 7 serviettes de toile d'estoupe, 16 livres d'étain en œuvre de vaisselle…, un vaisseau à contenir 3 thonneaux avec son equipage… estimé 90 livres. ». -
(46) Arch. dép. Deux-Sèvres, 3 E 219, Etude Jousseaume, fol. 160 (1666).
(47) Ibid., 3 E 221 : acte du 9 mars 1668.
(48) Ibid., 3 E 217, fol. 286 : acte du 22 juin 1664.
(49) Ibid., 3 E 220, fol. 220 : acte du f' juillet 1667.
(50) Extrait des registres du Conseil d'Etat (Bull. Société historique des Deux-Sèvres, 1876, p. 12).
(51) Arch. mun., Registre des délibérations de Niort (9 et 27 juin 1664).
(52) Correspondance administrative du règne de Louis XIV, t. IV, p. 69 (Documents inédits sur l'histoire de France).
(53) Sa femme, Suzanne Duport, et son fils, Jean Bion.
(54) Arch. dép. Deux-Sèvres, 3 E 220, Étude Jousseaume (25 septembre 1668). On compte 40 grands pains au millier, ou 500 kilogrammes environ.
(55) A la partie occidentale de la ville.
(56) CLOUZOT, Cens et rentes dus au comte de Poitiers à Niort, 1675, Arch.nat., ms., p. 274.
(57) Marais de Coulon, Benet, Magné, Saint-Liguaire, Saint-Rémy, Bessines, Sanxay, Saint-Georges-de-Rex, Amuré, Le Vanneau, Arsay et Damvix.
(58) PROUST, Tarif de 1718. L'octroi de Niort, p. 213 (cf. Délibérations municipales de Niort, Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 369). Tarif imprimé (Niort, impr. de Jacob Desbordes, 1719), Ibid., Br. G/11.
(59) Chanvre dont on n'a pas enlevé l'écorce.
(60) Toile apprêtée, plus fine que la toile tailleur actuelle.
(61) Ou ruche, mousseline.
(62) Etoffe de laine, pure ou mélangée, employée dans la literie.
(63) Tissu à trame de laine sur chaîne de fil ou coton, d'origine poitevine (XVIe s.), fabriqué notamment à Niort et Parthenay.
(64) Ou cuirot, peau de mouton sèche et délainée.
(65) Nom indigène de l'élan de l'Alaska et nord du Canada.
(66) Cire d'abeilles.
(67) Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 368, Délibération de Niort, 28 septembre 1718.
(68) Arch. nat., Marine, B3 reg. 284, fol. 284, 331, 341.
(69) Par Jean-Baptiste Desgaby, chevalier, seigneur de la Tour, conseiller du Roy en ses Conseils, intendant de justice, police et finances en la généralité de Poitiers.
(70) Familles de bateliers : Bougeron (a), Chaslon (b), Couillard (b), Dambas (c), Daigrier (b), Gabriault (e), Giraudet (a), Groussard (a), Lucas (a), Morin (a), Passebon (b), Racau (a), Roy (e), Thineau (c).
(71), Arch. nat., F14bis 6934. Cf. également un rapport de l'ingénieur en chef de la Charente-Maritime du 17 septembre 1845 sur le projet d'achèvement du canal de Niort à La Rochelle.
(72) Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 499.
(73) BRIQUET, Navigation sur la Sèvre, t. 3, p. 132.
(74) Arch. nat., F14bis 6934 : Réponse du maire de Niort à une lettre de l'intendant du Poitou, 12 avril 1732.
(75) Arch. nat., Marine B3, reg. 373, fol. 369, 372, 375.
(76) Arch. dép. Deux-Sèvres, E 379, registre des délibérations de Niort, 9 mai 1749 : Assemblée générale concernant le droit de minage de Marans où assistaient notamment 57 marchands notables de Niort, désignés nommément et par leur signature.
(77) Arch. dép. Deux-Sèvres, C 6 : Projet pour rendre la rivière de Sayvre navigable depuis Saint-Maixent jusqu'à Niort (14 p.).
(78) Il y existe des registres du Bureau des Entrées. …qui contiennent « un catalogue…. des marchandises qui se transportent ordinairement de Niort à Marans et de Marans à Niort, avec les prix qu'elles ont coutume de payer aux bateliers pour leurs transports, chacun son espèce, par poids, mesures, pièces et nombre. … ».
(79) Ces transports par route sont coûteux : il faut une charrette à 5 chevaux pour transporter : 2 balles de coton, 2 caisses de savon, 2 balles 1/2 de laine, 14 barils de poudre, 1 barrique de cuisses d'oies et jambons, soit plus de 1.200 cents pesant Arch. dép. Deux-Sèvres, Arch. mun. Niort, Délibérations, 2 E 369.
(80) Il existait alors des « saulnières » sur le quai du port de Niort, comme le prouvent les minutes des notaires de l'époque.
(81) Droit que l'on prenoit sur un sac plain de bled que l'on appeloit « mine », pour la peine que l'on avoit de la mesurer. Cette mine étoit pour estre détaillée et consommée dans l'endroit où on la transportoit », c'est-à-dire où on l'avait transportée (note empruntée au document cité, supra, p.504 , n. 3.
(82) Si l'on calcule sur la base du prix, en année commune, de 2 livres le boisseau de froment, mesure du minage de Niort, pesant 47-50 livres-poids, l'équivalent de 1 million de livres-monnaie est de 1.150 tonnes (cf. Arch. dép. Deux-Sèvres, 2 E 379, 1749, Délibérations concernant les Meuniers).
(83) Équivalent à près de 5.000 tonnes de froment.
(84) Arch. dép. Deux-Sèvres, C 8 : M. Fontanes, inspecteur des manufactures du Poitou, Mémoire sur l'établissement d'un commerce de gros dans la ville de Niort-en-Poitou.
(85) Arch. nat., Marine, B3, reg. 560, fol. 76 (1763).
(86) Cf. supra — note 3 p. 504.
(87) Arch. dép. Deux-Sèvres, Étude Godin, 3 E 520 : acte du 12 mai 1753.
(88) « 2 bœufs, une vache, 10 moutons, 18 brebis-mères avec les agneaux actuellement à leur suite. gardés., à demi-perte et profit, à la métairie de Lalouet, paroisse d'Aiffres. »
(89) Arch. dép. Deux-Sèvres, id. : acte du 16 avril 1753.
(90) Composée de chambre haute, antichambre et grenier.
(91) Arch. dép. Deux-Sèvres, Etude Godin, 3 E 520 : acte du 2 juin 1753.
(92) Son mobilier se compose de : Deux lits, berceau, coffre, petit cabinet, petit buffet avec vaisselier, huche à pétrir, 3 kilogrammes de vaisselle d'étain, une barrique pleine de vin du cru, une cuve à cuver.
(93) Au vieux fief Briand dans la paroisse de Sainte-Pezenne, acheté 16 livres en 1744.
(94) Arch. dép. Deux-Sèvres, Étude Godin, 3 E 520 : inventaire de communauté des 16, 17 et 19 mars 1753 (28 p.).
(95) Ces bateaux sont évalués respectivement : 500, 200, 70 et 24 livres.
(96) Jean Brunet, Jean Dambas et La Ramée (au surnom caractéristique).
(97) Les Guionnet Paul, Jacques, Jacques le jeune, marchands-minotiers de Bagnault (paroisse d'Exoudun), Proust de La Mothe-Saint-Héray, Rougier d'Exoudun, Louis Lescouleux.
(98) Frère.
(99) Manipulé dans « deux fûts d'un boisseau à mesurer dont l'un a une barre de fer au milieu ».
(100) Manipulé à la pelle de bois et vendu au boisseau (3 décalitres), demi-boisseau, quarteau (1,5 décalitre), mesure (0,25 hectolitre) et demi-mesure.
(101) Le vin de La Foye-Monjault coûte 25 livres la barrique, le vin du cru lre cuvée : 12 livres, de 2e cuvée : 5 livres.
(102) Trois cuves à cuver en cerisier et chêne de 1,2 et 9 barriques, 2 cuvottes de charrois, un bassinet et un entonnoir, d'une valeur de 50 livres.
(103) Demi-journal acheté en 1735, autre demi en 1746, les autres en location.
(104) Boutique, surmontée de chambre haute avec grenier, cave, trois écuries, fenil, vestibule, cuisine, chambre haute derrière avec grenier, petite cour, toit à cochons et jardin. Il possède cette maison mais paye pour elle 165 livres de rente. Actuellement place du Port, n° 29.
(105) 12 lits garnis, 8 tables, 3 cabinets, 2 buffets avec vaisselier, armoire, 3 coffres, 25 chaises, 2 bancs, 2 huches à pétrir, garde-manger et trousseau : 76 draps de lit de chanvre et réparou, 63 nappes de chanvre, étoupe et réparon, 5 douzaines de serviettes, 39 chemises d'hommes. Cf. supra, p. 509, n. 3.
(106) Le ras de Saint-Lô est un drap de laine à poil court, le pinchina une étoffe de laine non croisée et peignée, la revêche un tissu grossier à poil très long.
(107) BRIQUET, op. cit., t. 3, 27 mars 1747 et 17 avril 1748 (devis de travaux), p. 132.
(108) PROUST, Revenus et dépenses de l'Hôtel-de-ville de Niort, avant 1789 (Mém.
Société historique, 1888, p. 275-276).
(109) Arch. dép. Deux-Sèvres. Affiches du Poitou (28 octobre 1773), p. 171.
(110) Ibid., 11 novembre 1773, p. 178.
(111) Ibid., 4 février 1775, p. 19.
(112) Ibid., 3 août 1775, p. 131.
(113) Ibid., 22 F 18/3.
(114) Ibid., C 6.
(115) Ibid., C 8 : Observations sommaires que font les officiers municipaux de Niort sur les avantages. si La Rochelle était l'un des ports francs. des États-Unis de l'Amérique.
(116) Ibid., 22 F 18/3.
(117) Ibid., 22 F 18/3.
(118) Ibid. et L. CATHELINEAU, n° SP-33-P, 365.
(119) Arch. dép. Deux-Sèvres, série L, 1er supplément, 63/2.
(120) Arch. nat., F 1706, et F14 7076 : Mémoire adressé le 21 avril 1792.
(121) Arch. dép. Deux-Sèvres, Fonds Le Cointe-Puyraveau.
(122) Ibid., série S : Rapport Moulin sur la visite de la Sèvre du 21 décembre 1793.
(123) Arch. dép. Deux-Sèvres, série L, 1er supplément, 65 : 17 février 1796, Etat des canaux de navigation et rivières navigables des Deux-Sèvres.
(124) Ibid., série S : Mémoire imprimé.
(125) Composée de Fleuriau Bellevue, Chassiron membre du Tribunat, Seignette et Delacoste, juges au tribunal de Cassation, J.-B. Nairac, J.-J. du Moustier, F. Seguy, H. Neau, Jard Panvilliers, G. Desgraves-Raboteau qui souscrivent une dizaine d'actions.
(126), DUPIN, Mémoire sur la statistique du département des Deux-Sèvres, an IX.
(127) Arch. dép. Deux-Sèvres, série S.
(128) Lettre imprimée, 1er jour complémentaire an X.
(129) Annuaire des Deux-Sèvres, 1804, p. 263.
(130) Arch. dép. Deux-Sèvres, série S : Avis de l'ingénieur Demetz adressé au Directeur général des Ponts et Chaussées.
(131) Arch. nat., F14bis 6934 : décret de Fontainebleau.
(132) Arch. dép. Deux-Sèvres, série 22 F 18/3.
(133) Ibid., série S : Procès-verbal de l'assemblée tenue à Niort, le 14 juillet 1809, concernant l'amélioration de la Sèvre.
(134) Bernard Chambinière et Juin.
(135) Dambas et Daigrier.
(136) Arch. nat., F14bia 6934 : rapport du 17 septembre 1845.
(137) CUÉNOT et Th. MARTIN, Marais du bassin de la Sèvre niortaise (Bull. Société de vulgarisation des sciences naturelles, Niort, 1909 et 1910, p. 109-110).
(138) Note rédigée par le maire de Niort, 21 août 1818.
(139) Mémoire Mesnager du 30 septembre 1818, à l'appui d'un projet pour le perfectionnement de la navigation et l'amélioration du bassin de la Sèvre niortaise.
(140) Arch. nat., f14bis 6934 : rapports du 5 juillet 1820 et du 17 septembre 1845.
(141) Pour la morue et le sapin du Nord seuls, La Rochelle reçoit de 60 à 80 bateaux, dont plusieurs, surtout pour le bois, jaugent jusqu'à 500 tonneaux.
(142) Arch. nat., F14 524-526 (exercices 1821 à 1826).
(143) Arch. dép. Deux-Sèvres, Direction des Contributions indirectes de la Charente-Inférieure, Navigation à Marans, 28 octobre 1826.
(144) La foire — qui rapportait annuellement 300 francs de droits sur les bateaux venant de l'Est - ne produit, cette année, que 20 francs, preuve que le petit commerce souffre autant que les grandes spéculations.
(145) Arch. dép. Deux-Sèvres, série S 2 : pétition au ministre de l'Intérieur.
(146) Lettre de Fleurians de Bellevue à Émile Bernard Chambinière à Niort.
(147) Supplément au rapport du 1er août 1840 sur les Ponts et Chaussées des DeuxSèvres (12 août 1840).
(148) Ch. MORAZÉ, Les Bourgeois conquérants, XIXe siècle, Paris, 1957, p. 207.
(149) Arch. dép. Deux-Sèvres, 22 F 18/3.
(150) Annuaire du département des Deux-Sèvres, 1840, p. 176, et Arch. dép., F n. a. 1467.
(151) Arch. dép. Deux-Sèvres, série S : projet d'établissement du canal maritime de Niort-Océan par Marans; Rapport, 1845.
(152) Arch. dép. Deux-Sèvres, série S 2 : lettre du secrétaire d'État (avril 1846).
(153) Ibid. : Commission d'enquête administrative pour la navigation de la Sèvre, Niort, Mousset imprimeur, 1846. Sur 1.460 avis exprimés : 1.171 avis collectifs des habitants de Niort, Magné, Saint-Georges., 92 avis individuels notamment la Société de statistique, la Société d'agriculture, le Conseil d'arrondissement de Niort, le tribunal de commerce, la Commission permanente de la navigation, 77 avis individuels (8 carriers et 69 tanneurs), optent pour la double voie et la vallée et 118 pour l'amélioration de la rivière.
(154); Arch. dép. Deux-Sèvres, série S 2 (15 août 1847), Projet de 1846.
(155) Ibid. (25 juillet 1847).
(156) Ibid., Considérations générales sur la vallée de la Sèvre entre Niort et la mer. Imprimé sans date.
(157) Annuaire des Deux-Sèvres, 1854, p. 317.
(158) Arch. dép. Deux-Sèvres, 22 F 18/3.
(159) Ibid., F n. a. 1467.
(160) Six d'entre eux sont domiciliés à Niort, 1 à La Sotterie, 2 à Damvix, 2 à Saint-Hilaire-la-Pallud, 1 à Courdault, 3 à Taugon, 2 à Maillé, 1 à La Ronde, 2 à l'île d'Elle et 3 à Marans.
(161) Arch. dép. Deux-Sèvres, série S : Navigation sur la Sèvre. Statistiques.
(162) Ibid., série S 2 : pétition des bateliers de Niort au ministre de l'Agriculture, signée Lucas, Daigrier frères et Petit.
(163) Ibid., série S 2 (1870) : nombre de bateaux employés à la navigation locale de la vallée de la Sèvre.
(164) Bourgeois Alexandre et François, Cramois jeune, Cramois frères, Drapon François, Filonneau, Forestier, Garreau Baptiste, Gelot Louis, Godin frères jeune, Guérin Jean, Lucas François, Philippe et Robin.
(165) CUÉNOT et Th. MARTIN, loc. cit.
(166) Arch. dép. Deux-Sèvres, série S 2.
(167) Appartenant à Boucher de Niort (35 tonnes avec tirant d'eau de 1,10 mètre).
(168) Le Matin, numéro du 25 septembre 1917. Arch. dép. Deux-Sèvres, série S 2.
(169) Le Matin, numéro du 31 octobre 1918.
PIÈCE JUSTIFICATIVE
1285, mai. — Paris Les lieutenants généraux du roi Philippe le Hardi, Mathieu abbé de Saint-Denis et Simon sire de Nesles, concèdent en son nom aux bourgeois de Niort un port libre pour transporter toutes marchandises par la Sèvre entre Niort et Marans et établissent le tarif des taxes, dont un tiers sera remis à la ville pour la construction et les réparations du port et des portes, le roi se réservant les deux autres tiers ainsi que le profit des amendes Les a jurés » de la commune sont exempts de la «coutume » pour les produits de leurs terres et les marchandises à leur usage.
A. Arch. dép. des Deux-Sèvres, 2 E Niort 483.
Matheus, miseratione divina ecclesie Beati Dyonisii in Francia abbas humilis, et Symon dominus Nigelle, locum tenentes domini regis Francie, notum facimus universis, tam presentibus quam futuris, quod nos, ex auctoritate et vice domini regis nobis commissa et etiam nomine domini regis et pro ipso, concessimus et concedimus burgensibus de Niorto ut ipsi habeant portum liberum ad portandum et reportandum omnia mercimonia per alveum Separis et per totum domanium domini regis, si eis videbitur expedire, usque ad portum de Maranto, solvendo domino regis seu gentibus suis : — de quolibet dolio vini : sex denarios; — de modio mellis : tres denarios; — de sextario bladi : unum denarium; et tantumdem de farina; — de tacra coriorum : sex denarios, et infra secundum quantitatem sui.
Et similiter, de aliis mercimoniis que sequntur : — de modio salis : octo denarios; — de miliario ferri : decem denarios; — de miliario cere : duodecim denarios; — de miliario alectium : duos denarios; — de milliario piscium siccorum qui vocantur hadoc : duos denarios; — de milliario poliporum : sex denarios; — de miliario piscium siccorum qui vocantur gauberges, toyls, merluz et morues : duodecim denarios; — item, de quolibet panno, de valore sexagintasolidorum : duos denarios; et infra sexaginta solidorum : unum denari um ; — de bala gingibris, piperis, canele et cumini : duodecim denarios; — de flaello ficuum et racemorum : unum denarium; — de centum crassi piscis seu balene : unum denarium; — de centum aeni seu arani seu cupri : unum denarium; — de centum cujuslibet alterius metalli : unum denarium; — de omni vero nave alia mercimonia afferenti, dum tamen mercimonia valeant sexaginta solidos : sex denarios de costuma, et infra sexaginta solidos : tres denarios de rivagio.
Et de omnibus et singulis rebus supradictis volumus solvi domino regi duas partes et majori et communie de Niorto, pro refectione alveorum dicti fluvii Separis et pro constructione dicti portus et pro portis ville et aliis rebus cum locus affuerit, tertiam partem, retentis domino regi emendis que ratione dicti portus vel in dicto portu pro costuma vel aliqua de causa aliquo modo possent evenire; que due partes et emende colligentur per senescallum domini regis pictavensem et tertia pars per dictos majorem et communiam. Et nolumus quod aliquis de juratis dicte communie aliquid solvat de fructibus et redditibus terre sue nec de rebus emptis ad usum suum decostumis antedictis, et de hoc dicti jurati facient fidem coram senescallo domini regis predicto, non coram alio; de mercimoniis vero quas dicti jurati dicte communie emerint, volumus eos solvere, sicut alios extraneos, costumas antedictas. Que omnia concedimus et statuimus, salvo jure domini regis in aliis et jure in omnibus alieno. Et ut perpetue stabilitatis robur obtineant, sigillum regium quo utimur presentibus litteris duximus apponendum. Actum Parisius anno Domini millesimo ducentesimo octogesimo quinto, mense maio.