En 1851, la Société Archéologique avait eu l'heureuse idée d'élever une statue à saint Louis, à l'entrée du pont où il s'était couvert de gloire.
Le projet ne put aboutir, le produit de la souscription portait à peine d'en édifier le piédestal.
Mais, en 1891, quand on construisit un nouveau pont, il fallut faire disparaître ce monument tronqué. La Société des Archives historiques de Saintonge et d'Aunis reprit le projet; mais, limitée elle aussi aux ressources dont elle pouvait disposer, elle s'est contenté d'ériger un monument à la mémoire du saint roi.
Une plaque fort simple d'aspect, mais d'heureuse proportion, s'élève au-dessus d'une des arcades de la chaussée de Saint-James (1), une de celles que l'on doit croire contemporaines à la bataille, et sur laquelle sans doute Louis IX sera passé à la tête de ses troupes victorieuses.
Sur un bloc de marbre, enchâssé dans un cadre de pierres du pays, est gravée une inscription latine rappelant les événements des 22 et 24 juillet 1242.
L'inauguration en a été faite solennellement le 24 juillet 1892.
En voici l'inscription :
Gloriosissimo et Sanctissimo Principi
Asserendae in Libertatem Patriae
Acerrimo Propugnatori
Ludovico IX
Qui
Anglorum exercitum
In Ponte Talleburgensi
Item Sub Santonum mænibus
X et VIII kal aug anno dni MCCXLII
Fudit et Fugavit
Universitas
Rerum Santon et Alnisiens curagens
Aere conlato hunc titulum
Pientissima Posuit
VIII kal aug an dni
MDCCCLXXXXII
« Au très glorieux et très saint roi, énergique défenseur de l'indépendance nationale, Louis IX, qui sur le pont de Taillebourg, puis sous les murs de la ville de Saintes, les 22 et 24 juillet 1242, a taillé en pièces et mis en déroute l'armée anglaise.
La société des archives historiques de Saintonge et d'Aunis, comme pieux hommage a élevé ce monument le 24 juillet 1892. »
1893
On a célébré l'an dernier avec un certain éclat le treizième cinquantenaire de la victoire remportée par saint Louis sur les Anglais à Taillebourg le 22 juillet (sic) 1242.
Une stèle en pierre du pays a été construite sur une des arcades de l'ancienne chaussée de Saint- James où « sans doute passa le roi de France à la tête de ses troupes victorieuses » et ornée d'une inscription en latin qui consacre le souvenir de cette mémorable journée (2).
Par malheur, la date donnée à ce combat est erronée ; on peut même se demander s'il y a réellement eu un combat au pont de Taillebourg.
Il se trouve enfin que la suite des faits militaires qui ont précédé et suivi cet événement n'a pas été déterminée avec toute la précision désirable. En regardant de près les documents contemporains et en les corrigeant les uns par les autres, on peut rendre à la campagne de Poitou sa physionomie véritable.
Sans doute cet examen n'apportera pas de résultats nouveaux à l'histoire générale ; mais une critique minutieuse des sources historiques sur un moment aussi intéressant de nos annales peut avoir son prix.
Ces sources sont de nature assez variée : 1° les textes diplomatiques réunis dans les Fœdera de Rymer (3), les Layettes du Trésor des Chartes (4), les Rôles gascons (5); 2° les Chroniques; 3° le petit poème historique appelé la Chanson de Taillebourg.
Quelques mots sur les Chroniques ne seront pas déplacés, car pour apprécier la valeur de leur témoignage il faut savoir à quelle époque elles ont été rédigées et à l'aide de quels éléments.
Pour l'Angleterre, nous n'avons à vrai dire qu'un texte, mais fort important, c'est la chronique rédigée par Mathieu de Paris (6), moine à l'abbaye de Saint-Alban, qui mourut en 1259; la première rédaction de ses Chronica majora s'arrêtait on 1250.
C'est donc un témoin tout à fait contemporain. Il écrit sans art, transcrivant bout à bout les renseignements qu'on lui a fournis, sans s'émouvoir des répétitions ni des incohérences; mais ces renseignements sont le plus souvent de première main. Il est passionné, partial et bavard, mais honnête et très vivant.
— Les chroniqueurs français sont relativement nombreux. Le premier par ordre de date est le trouvère tournaisien Philippe Mousket, mort vers 1245, dont la chronique rimée s'arrête avec l'année 1242. Il a pu avoir des détails immédiats fournis par le contingent tournaisien qui combattit sous les ordres de saint Louis (7).
Les Récits d'un ménestrel de Reims écrits en 1260 ne sont pas une chronique proprement dite; mais l'aimable conteur avait l'oreille ouverte à tous les bruits du temps et il se fait l'écho de ceux qui pouvaient intéresser le plus ses auditeurs; son silence même peut donc être un enseignement (8).
Guillaume de Nangis, moine de Saint-Denis; appartient à la génération suivante; il a écrit ses Gesta Ludovici regis (9) sous Philippe le Bel et avant la canonisation de Louis IX, à l'aide des matériaux que lui fournissait le « scriptorium » de son monastère. Il nous dit lui-même qu'il a suivi Gilles de Reims, moine à la même maison, et Geofroi de Beaulieu, des Prêcheurs, qui avait tracé « avec une pieuse exactitude, le tableau moral de la très sainte vie du roi, sans parler des guerres ni de la politique (10). »
Le récit de la campagne de 1242, que Nangis devait sans doute à Gilles de Reims, fort en situation d'être bien renseigné, est un morceau capital en la matière; il a été reproduit d'ailleurs par les Grandes chroniques de France (11) et par Guillaume Guiart, dans sa Branche des royaux lingnages (12), chronique rimée qui fut composée en 1306.
Vers ce même temps, le sire de Joinville dictait ses Mémoires qui étaient terminés en 1309; il avait alors plus de quatre-vingts ans. Il n'a pas pris part à la campagne du Poitou, car il était trop jeune encore pour porter le haubert de chevalier.
Il a recueilli néanmoins quelques anecdotes intéressantes et dont il faudra tirer parti ; mais on verra aussi que ses souvenirs sont confus, et, mis en balance avec ceux des contemporains directs, ils paraîtront légers (13).
Après lui, il n'y a plus rien d'original dans nos chroniques. Quant à la « Chanson de Taillebourg (14), » elle a été certainement composée très peu après l'événement, sinon au moment même et, sans qu'elle nous apporte des faits réellement nouveaux, son témoignage ne peut être négligé.
Trop souvent les chroniques oublient de dater avec soin les événements ; c'est le cas pour Paris et pour Nangis. Les actes diplomatiques permettent jusqu'à un certain point de corriger ce défaut ; les chartes transcrites sur les Rôles gascons de la chancellerie anglaise nous seront surtout d'un grand secours en permettant d'établir avec une certaine exactitude l'itinéraire des deux rois (15), au moment le plus décisif de la campagne.
Il serait hors de propos d'exposer longuement les causes qui amenèrent le soulèvement du comte de la Marche et des barons poitevins contre le roi de France, ainsi que l'intervention armée du roi d'Angleterre en 1242.
Il suffit de rappeler, ce que chacun sait, que le comte de la Marche, Hugues X le Brun, à l'instigation de sa femme, Isabelle d'Angoulême, veuve du roi Jean-sans-Terre et mère du roi Henri III, renonça publiquement et d'une manière outrageante (Noël 1241) à l'allégeance qu'il avait jurée peu de mois auparavant au comte de Poitiers, Alfonse, frère de saint Louis (16).
Cette révolte ne pouvait laisser le roi d'Angleterre indifférent. Il n'avait cessé en effet de protester contre la sentence prononcée par la Cour des Pairs de France en 1202 et de réclamer les fiefs français qui lui avaient été ravis par Philippe -Auguste et par Louis VIII (17) ; il avait même fait en 1230 une tentative de vive force pour les reprendre, mais il avait échoué (18).
Des trêves, plusieurs fois renouvelées avaient suspendu de fait les hostilités, mais perpétué une situation incertaine d'où la guerre pouvait sortir à chaque instant.
En promettant au roi d'Angleterre le concours d'un grand nombre de seigneurs poitevins, Hugues le Brun, ou plutôt la comtesse-reine sa femme (19), persuada facilement Henri III de passer une seconde fois sur le continent.
Unis, ils se croyaient assez forts pour en imposer au roi de France; mais ils commirent une faute irréparable en laissant Louis IX prendre l'offensive.
On peut diviser le récit de la campagne de 1242 en trois grandes périodes : dans la première (28 avril-20 juillet), le roi de France n'a devant lui que le comte de la Marche et ses alliés; c'est une guerre de sièges; dans la seconde (21 juillet- 4 août), il marche droit aux Anglais, les bat devant Saintes et les refoule jusqu'à Blaye ; dans la troisième (4 août-7 avril), se placent la guerre contre Raymond VII, comte de Toulouse, jusqu'à la soumission de ce dernier (20 octobre), le blocus de de La Rochelle par les Anglais (octobre-novembre), les vaines tentatives de Henri III pour reconstituer son armée et ses alliances, enfin, la trêve qu'il obtint du roi de France et qui mit fin aux hostilités.
De féodale, la guerre était devenue nationale; elle aboutit à la défaite irrémédiable des ennemis intérieurs et extérieurs du jeune roi.
Saint Louis avait convoqué son armée à Chinon pour le 28 avril (20).
Il y reçut d'abord la soumission du vicomte de Thouars, Aimeri, et de son frère Geofroi, trésorier du chapitre de Poitiers (21).
Quinze jours après Pâques (4 mai), il était avec ses frères à Poitiers (22) et les opérations actives commençaient aussitôt.
Il avait fait de grands préparatifs : quatre mille chevaliers bien équipés, environ vingt mille écuyers, sergents et arbalétriers; mille chariots étaient réunis pour transporter les tentes, les machines de guerre, les vivres, les armes; les villes reçurent l'ordre de faire les approvisionnements nécessaires pour une armée en campagne.
Cette armée, qui se grossissait en outre chaque jour de nombreux contingents, « comme des fleuves coulant vers la mer », entra en campagne dans un ordre parfait, « comme c'était l'usage des Français (23) ».
Guillaume de Nangis énumère les châteaux assiégés et enlevés successivement par les Français (24), mais il ne donne aucune date, et l'on a quelque peine à suppléer à cette absence d'indications précises. Il est néanmoins le seul guide que nous ayons et il faut le suivre.
Tout d'abord, c'est aux domaines patrimoniaux des Lusignan que l'on s'attaqua. Montreuil en Gâtine ou Montreuil-Bonnin fut pris en quelques jours (9 mai) (25)
La tour de Béruges, située tout près de là, opposa une plus vive résistance; mais, battue par de nombreux engins, mangonneaux et autres, elle dut capituler ; on y trouva de grands approvisionnements, puis le roi la fit raser.
On marcha ensuite vers l'autre extrémité du Poitou, contre les terres de Geofroi de Lusignan, cousin et allié du comte de la Marche.
Fontenay-le-Comte fut pris en peu de temps (26) et Vouvent investi; Pendant le siège de cette place, Louis IX s'assura les services de Raoul de Beaumont qui promit de livrer à toute réquisition du roi ou du comte de Poitiers ses villes de Bressuire et de Chiché (27).
La nouvelle de cet accord parvint à Saintes le 7 juin (28), sans doute en même temps qu'une autre, plus grave encore pour les confédérés, celle de la soumission de Geofroi de Lusignan, qui, le 6 juin, livra Vouvent et promit l'hommage au comte de Poitiers (29).
C'est à ce moment précis que l'affaire prend une autre face par la déclaration de guerre du roi d'Angleterre.
Henri III avait pris la mer à Portsmouth le 9 mai (30), et, après une traversée tranquille (31), il avait débarqué à Royan le 13 mai (32).
Il avait peu de monde avec lui, parce qu'on lui avait écrit et répété qu'il trouverait en Poitou et en Saintonge autant d'hommes qu'il en voudrait en les payant, et il avait cru aveuglément son beau-père et sa mère.
Il arrivait donc seulement avec son frère Richard de Cornouailles, sept comtes (33) et environ trois cents chevaliers.
Après quelques jours de repos à Royan, il se rendit à Pons où il fut reçu par les seigneurs de Saintonge (20 mai) (34).
Il donna aussitôt (25 mai) à ceux qui lui devaient le service militaire en Guyenne, l'ordre de venir le rejoindre (35); mais en même temps, pour ne point paraître provoquer sans raison le roi de France, pour justifier son entreprise aux yeux de ses sujets anglais et gascons, il voulut entrer en pourparlers avec saint Louis et il lui adressa diverses réclamations sous une forme comminatoire.
Il lui imputait, en effet, plusieurs violations de la trêve et les deux rois étaient convenus, paraît -il, d'en conférer le cinquième dimanche après Pâques (25 mai) (36).
La veille (24 mai), quatre plénipotentiaires furent désignés par Henri III, mais, à l'heure et au lieu dits, ceux-ci ne trouvèrent personne (37). Nouvelle ambassade nommée le 30 mai; elle se composait d'hommes considérables (38) et devait présenter des griefs précis cette fois : pourquoi le roi de France s'était-il emparé des terres de Savari de Mauléon?. pourquoi avait-il reçu l'hommage de Raoul de Beaumont, qui était au service du roi d'Angleterre, et occupé Bressuire (39)?
Louis IX accueillit les députés avec courtoisie (40), mais refusa de répondre au fond sur-le-champ, tout en se déclarant prêt « à faire tout ce qu'il devait d'après la teneur de la trêve (41).»
Cette réponse ne donnant point satisfaction à Henri III, celui-ci répliqua aussitôt (42) qu'il considérait désormais la trêve comme violée par le roi de France (8 juin) et il lui fit déclarer la guerre (16 juin) (43) par quelques Hospitaliers (44).
En fait, il avait déjà donné l'ordre de commencer les hostilités (45); mais il n'était pas prêt.
Les rapides succès des Français avaient brisé la coalition des seigneurs poitevins et, pour décider les barons anglais à venir le rejoindre le plus tôt possible, Henri III en était réduit au mensonge, prétendant qu'il ne croyait pas en partant devoir être amené à faire la guerre au roi de France (46).
Six grandes semaines se passèrent encore, péniblement employées par lui à réunir des troupes (470) et à négocier des alliances (48), tandis que les Français mettaient à profit ce temps précieux pour achever la conquête du Poitou.
Ici, il devient plus malaisé de suivre la marche des opérations ; l'ordre dans lequel Nangis énumère les places assiégées et prises est très confus (49).
C'est d'abord Frontenay, une des meilleures forteresses du Poitou avec ses tours massives et sa double enceinte, avec une garnison nombreuse que commandait un fils naturel du comte de la Marche (50); elle résista pendant quinze jours et le comte de Poitiers y fut blessé au pied.
Cette blessure anima l'ardeur des assiégeants qui se lancèrent à l'assaut et qui emportèrent la place : quarante et un chevaliers, quatre-vingts sergents et beaucoup d'autres combattants furent faits prisonniers (51); le château fut rasé, et depuis la ville a été appelée Frontenay-l'Abattu.
On prit ensuite Villiers, qui appartenait à Gui de Rochefort, et qui fut aussi détruit, Prahec, Saint-Gelais, Tonnay-sur-Boutonne où Louis IX mit une garnison, Matha, qui était au comte de la Marche et dont il fit raser le donjon.
Thors, qui était à Ebles de Rochefort, n'osa résister; les défenseurs évacuèrent, nus et sans armes, le château où fut logée une garnison française.
Enfin Aucerrium fut pris et détruit. Les Français firent alors jeter un pont sur la Charente et les marais pour aller chercher le roi d'Angleterre dans Saintes (52); mais le passage ayant paru inopportun (53), l'armée descendit le fleuve et entra dans Taillebourg livré par Geofroi de Rancogne (54).
Jusqu'à ce moment, les Français n'avaient pas encore trouvé un seul Anglais devant eux.
Condamné à la défensive » par ses embarras d'argent (55), par la lenteur avec laquelle arrivaient les secours demandés, par l'inertie de ses alliés, Henri III s'était contenté de fortifier Saintes et de concentrer, de grandes forces maritimes pour garder le pont de Tonnay- sur-Charente ; puis il était revenu, sans oser s'aventurer au- delà du fleuve, vers Taillebourg.
Il avait engagé des pourparlers avec le seigneur de la ville, Geofroi de Rancogne, et il croyait l'avoir gagné à son parti (56).
Mais Geofroi avait une vieille querelle avec le comte de la Marche; il avait juré de laisser pousser sa barbe et ses cheveux tant qu'il ne l'aurait pas vidée (57).
Les succès remportés par le roi de France au détriment du comte de la Marche étaient le commencement de sa vengeance ; aussi n'hésita-t-il pas à tromper Henri III.
D'autre part, les gens de Taillebourg, gagnés par la promesse que leur fit saint Louis de confirmer leurs privilèges et de les prendre sous sa protection (58), accueillirent avec empressement les Français.
Ceux-ci avaient maintenant deux voies pour joindre les Anglais, le pont qu'on venait de lancer entre Taillebourg et Saintes et le pont de pierre qui franchissait la Charente à Taillebourg même et qui se prolongeait au- delà des marais de la rive gauche par une chaussée qui subsiste encore en partie aujourd'hui et qu'on appelle la « chaussée de Saint- James ».
Le lundi 21 juillet au matin (59), les deux armées étaient donc en présence, séparées seulement par la Charente qui là est profonde et non guéable.
Les tentes des Français couvraient la rive droite « comme une grande et populeuse cité »; les Anglais y voyaient flotter l'oriflamme et de nombreux étendards (60).
Ils étaient eux-mêmes certainement en trop petit nombre (61) pour garder tous les points du passage et une poignée d'hommes était placée au débouché du pont (62).
Que se passa-t-il alors? On raconte d'ordinaire que les Français forcèrent le passage du pont de pierre après une rude mêlée où le roi donna de sa personne.
Le célèbre tableau de Delacroix a pour ainsi dire consacré la tradition populaire.
La réalité, étudiée dans les documents contemporains, est tout autre. Écoutons d'abord le roi d'Angleterre lui-même.
Dans la lettre qu'il écrivit deux mois plus tard à son beau-frère l'empereur d'Allemagne, et où il résume l'histoire de sa malheureuse expédition, il dit seulement : « Apprenant que le roi de France s'approchait de Taillebourg, nous y arrivâmes de notre côté pour lui fermer le passage; mais n'ayant pu le faire parce que nous avions peu de nos Anglais avec nous, et à cause de l'évidente supériorité numérique des Français, nous battîmes en retraite jusqu'à Saintes (63). »
Les chroniqueurs contemporains sont aussi brefs. Mathieu de Paris laisse entendre qu'Henri III comptait sur les renforts promis par le comte de la Marche, et il raconte une vive altercation que le roi eut avec son beau-père quand il constata qu'il devait soutenir seul avec ses Anglais l'attaque française.
« Alors, ajoute-t-il, le comte de Cornouailles déposa ses armes et, un bâton à la main, il traversa le pont pour parler de paix ou de trêve ; car manifestement les Anglais allaient être pris. »
Accueilli avec beaucoup d'honneur par les Français, dont plusieurs avaient été rachetés par lui des mains des Sarrasins après la désastreuse affaire de Gaza, il fut introduit auprès du roi de France qui consentit à peine à lui accorder un armistice de quelques heures.
Revenu alors auprès du roi son frère : « Sauvons- nous », lui dit-il à l'oreille, « vite ! vite ! ou nous serons pris ! » Ils dînèrent à la hâte, « car les Français passaient alors le pont; » quand la nuit commença de tomber, le roi et son frère s'en furent, suivis de l'armée en débandade.
On ne s'arrêta qu'à Saintes (65).
Les chroniqueurs français sont aussi muets sur une bataille au pont de Taillebourg. Philippe Mousket n'y fait qu'une allusion vague : « Quand le roi fut sur la Charente, il fit passer la chaussée à ses gens; là il y eut grand nombre de cavaliers et de fantassins beaucoup aussi ; il y en eut de dispos et de lassés... D'autre part étaient les Anglais. Peu leur profita leur jactance ou leur ruse, car ils y furent tous déconfits et poursuivis jusqu'aux portes de Saintes (66). »
Ces vers du chroniqueur flamand s'appliquent aussi bien au combat (très authentique, celui-là) qui s'engagea le lendemain en avant et jusque sous les murs de Saintes; on ne saurait en tirer rien de précis sur l'affaire de Taillebourg.
— L'auteur anonyme de la « chanson de Taillebourg » n'est pas plus affirmatif : « Les Poitevins, les Gascons, les Anglais gardèrent mal le pont de Taillebourg, car les Français y passèrent malgré eux; ils les chassèrent et les mirent en déroute sans combat jusqu'à Saintes (67).
— Nangis offre avec Paris de grandes divergences et de frappantes ressemblances. « Le roi d'Angleterre, dit-il, était prêt à combattre, mais craignant son seigneur le roi Louis (68), il se replia avec ses chevaliers à deux portées d'arbalète et même plus. Alors les Français firent passer en toute hâte par le pont de bois (69) cinq cents sergents avec des arbalétriers et une grande quantité de fantassins armés. Aussitôt le frère du roi d'Angleterre déposant ses armes se dirigea vers le roi de France et fit demander une trêve par le comte d'Artois. Celui- ci, au lieu de recevoir Richard, alla trouver le roi son frère pour se consulter avec lui ; et, comme il ne revenait pas, Richard s'en alla. Les Anglais prirent peur et s'enfuirent le plus tôt qu'ils purent dans la cité de Saintes (70). »
— Guillaume Guiart, tout en suivant Nangis comme à l'ordinaire, y ajoute quelques traits : « La grande armée des Anglais s'achemine vers Taillebourg; les Français font de même. Ils font sur un marais faire un pont de madriers. Les Anglais viennent à leur rencontre pour leur disputer le passage. Il y a là beaucoup de lances et de chevaux hennissants ; les guerriers sont si nombreux qu'on aurait peine à les compter.
Là où le pont est achevé, ils viennent la tête haute; les campagnes en sont couvertes.
Les Français, qui les observent, s'en vont vers le pont.
Environ cinq cents sergents ou plus, bien que ce chemin fût étroit, passent outre, les premiers au galop; le reste de l'ost s'avance ensuite en bon ordre.
Les Anglais épouvantés tournent le dos et s'enfuient; avec pleurs, soupirs et plaintes, ils retournent ensemble vers Saintes (71). »
Joinville est plus catégorique, et son récit a fait fortune :
« Aussitôt que le roi vint à Taillebourg et que les deux armées s'aperçurent l'une l'autre, nos gens, qui avaient le château par devers eux, s'efforcèrent à grand mechef , passèrent périlleusement par nefs et par ponts et coururent aux Anglais; alors commença la bataille (li poygnays) forte et grande.
Quand le roi vit cela, il se mit au péril avec les autres, car les Français combattaient un contre vingt (72).
— Cependant, quand les Anglais virent le roi passer (73), ils se débandèrent et se réfugièrent dans Saintes. Plusieurs de nos gens entrèrent avec eux dans la ville et furent pris. »
Rappelons-nous d'abord que Joinville ne prit aucune part à l'expédition et qu'il dicta son récit plus de soixante ans après les faits accomplis.
En outre, s'il parle d'un vif combat au pont de Taillebourg, ignoré des contemporains, il se tait sur la bataille de Saintes dont tous les contemporains parlent au contraire; dès lors, ne peut-on soupçonner qu'il y eut quelque confusion dans les souvenirs du bon vieillard ?
Il avait appris qu'il y avait eu là un engagement sérieux; il savait de reste ce que présente de périlleux le passage d'un fleuve dans les conditions où les Français franchirent la Charente; en combinant ces deux faits, il en conclut naturellement que l'affaire avait été chaude là justement où elle devait l'être, mais où il semble bien qu'il n'y a rien eu.
Son récit contient cependant certains détails qu'on doit •retenir et qui, rapprochés surtout de Nangis, jettent une lumière assez inattendue sur les péripéties de la journée.
Pourquoi les Anglais n'ont-ils pas combattu, comme le donnent à entendre Paris et Nangis ? Pourquoi cette crainte d'être pris et cette fuite désordonnée jusqu'à Saintes ?
Saint Louis, nous dit Joinville, passa « par neis et par pons ».
Quand Nangis parle du pont franchi par les cinq cents sergents français, il désigne très clairement le pont de bois construit par les Français, et c'est bien ainsi que G. Guiart l'a compris.
Alors tout s'explique : les Français, ayant deux ponts à leur disposition, firent passer des troupes sur des barques; les Anglais, attaqués de face par un ennemi très supérieur en nombre et menacés en outre sur leurs ailes, n'essayèrent pas de repousser l'ennemi qui débarquait, et se replièrent, sans doute, pour se concentrer sur la route qui mène de Taillebourg à Saintes.
C'est alors que les cinq cents sergents franchirent au galop le pont de bois, suivis de nombreux fantassins.
Ce mouvement avait pour but de couper la ligne de retraite des Anglais vers Saintes. Il fallait les arrêter à tout prix, et c'est pourquoi le comte de Cornouailles se rendit aussitôt, seul et sans armes, par le pont de pierre, qui était libre, demander un armistice.
Paris a probablement raison quand il raconte le succès de cette démarche; il faut préférer son récit à celui de Nangis, qui ne rend compte de rien.
Si enfin l'on veut qu'il y ait eu un combat à Taillebourg, il faut le réduire aux proportions d'une simple escarmouche et admettre que l'événement capital de la journée a été le mouvement tournant exécuté par l'armée française sous les yeux de l'ennemi impuissant.
L'ennemi s'étant retiré, Louis IX passa tranquillement la Charente (74) le lendemain (22 juillet), et il envoya ses fourrageurs (75) en avant sur la route de Saintes.
Averti par un de ses « garçons », le comte de la Marche, qui était dans la ville sur le front opposé à l'ennemi, s'arme aussitôt avec ses trois fils chevaliers et, avec les Irlandais (76), les Gascons et les Anglais que le roi d'Angleterre avait amenés avec lui, il charge les fourrageurs et les met en désordre.
Un d'eux va prévenir le comte de Boulogne (77).
A l'instant, les trompettes sonnent, les tentes sont jetées bas; le comte de Boulogne se lance le premier contre l'ennemi qu'il arrête (78).
Le gouverneur de Saintes, qui portait l'étendard du comte de la Marche, est tué (79).
Alors la bataille devient générale, animée par la présence des deux rois.
Les Anglais chargent au cri de « Royaux ! Royaux!» et les Français, de « Montjoie ».
On combat dans les vignes, dans les chemins creux (80). Les Anglais luttèrent bravement (81); mais ils étaient inférieurs en nombre et durent céder le terrain.
Le roi d'Angleterre s'enfuit des premiers vers Saintes avec cent vingt sergents ; alors ses troupes se débandèrent et les Français, qui restaient en bon ordre, purent en tuer un grand nombre.
La poursuite fut si ardente, que quelques-uns entrèrent dans la ville mêlés aux fuyards. C'est ainsi que furent pris Jean des Barres, avec six des siens, par Guillaume de Say, et Pierre Orige, sénéchal du comte de Boulogne, par Jean Mansel, clerc du roi d'Angleterre et son intime conseiller (82).
Louis IX rallia ses gens et mit ses prisonniers sous bonne garde. Sa victoire était complète. ,.
Cependant la plus grande confusion régnait dans la place. Joinville a recueilli l'écho d'une nouvelle altercation entre Henri III et le comte de la Marche, car il ne peut guère y avoir confusion entre celle-ci et l'autre que Paris place à la journée de Taillebourg.
Un des Français prisonniers lui raconta, en effet, qu'ils entendirent « un grand descort, » le roi reprochant au comte de l'avoir « envoyé querre, car il disoit qu'il troveroit grant aide en France. »
D'autre part, Henri III dut subir les récriminations des siens, et son beau-frère Simon de Montfort s'emporta jusqu'à crier qu'il fallait « le traiter comme Charles le Sot, et qu'il y avait à Windsor de bonnes cages de fer pour l'y mettre (83) ! »
Peut-être Henri III songeait-il à résister dans Saintes, au risque d'y être bloqué par l'armée victorieuse, et de fait il y resta encore le lendemain de la bataille (23 juillet); mais, « sur l'avis de son conseil, » il battit en retraite vers Pons, suivi par le comte de la Marche qui abandonna la ville sans y laisser de garnison (74).
Louis IX y entra aussitôt, invité d'ailleurs par les habitants qui allèrent lui en remettre les clés, et il s'y établit solidement.
Cependant le roi d'Angleterre, trouvant la position de Pons peu sûre, se replia vers Barbezieux après avoir laissé une garnison dans la place.
Aussitôt Renaud de Pons « après lui avoir dit adieu et donné le baiser de Judas, » alla faire sa soumission à saint Louis qui était à Colombiers et fit publiquement hommage au comte de Poitiers (85) (25 juillet).
Cette défection fut accompagnée d'une autre plus importante encore.
Le fils aîné du comte de la Marche, traîtreusement conseillé, affirme Paris (86), par Pierre de Bretagne, se rendit au camp français pour demander la paix et, comme son père n'était pas avec lui, il resta en otage jusqu'au lendemain.
1242 Camp du Roi Louis IX à Pons Soumission de Hugues X Lusignan et Isabelle d'Angoulême
Le comte de la Marche, trahissant Henri III, vint en effet (26 juillet), avec sa femme, et ses deux fils aînés se jeter aux pieds du Roi, s'humiliant à genoux avec des soupirs et des sanglots, il avoua ses fautes et implora sa grâce, que saint Louis, toujours miséricordieux, lui accorda, mais à de dures conditions, mais il lui fallut renoncer à tous les domaines que saint Louis avait conquis et dont il fit don à Alfonse.
II abandonna la pension de cinq mille livres que touchait sa femme en vertu du traité de Vendôme; il remit au Roi, pour y tenir garnison, les châteaux de Merpins, Crozant et Châtel-Achard ; il abandonna l'hommage du comte d'Eu, de Geoffroi de Rancon, de Renaud de Pons et de Geoffroi de Lusignan ; il se désista de tout droit sur le grand fief d'Aunis.
Moyennant toutes ces concessions, il fut admis à prêter hommage au Roi pour le comté d'Angoulême et pour les seigneuries de Cognac, de Merpins, de Jarnac, de Villebois et d'Aubeterre, et à Alfonse pour le comté de la Marche et Lusignan (août 1243).
On raconte que, pour donner un gage de sa fidélité, Hugues alla avec Pierre Mauclerc, comte de Bretagne, à la tête d'une puissante armée, dans le Midi, pour empêcher les rois d'Angleterre et d'Aragon de faire leur jonction avec le comte de Toulouse; mais cela n'est nullement prouvé ni même vraisemblable: il eût été trop dangereux d'employer le comte de la Marche à combattre ses propres adhérents.
Hugo de Lezigniaco comes Marchie et Engolismensis et Y. Dei gracia regina Anglie dictorum comitissa locorum.
Hugues de Luzignan, comte des Marches et d'Angoulême, et Ysabel par la grâce de Dieu, reine d'Angleterre, comtesse desdits lieux.
Noveritis quod, cum guerra esset inter nos ex una parte et karissimos dominos nostros Ludovicum regem Francie illustrem et comitem Pictavie, fratrem ipsius domini Régis, ex altéra, tandem post plures conquestas quas idem dominus Rex fecit super nos, nos et filii nostri, videlicct Hugo Brunus, Guido et Gaufridus de Lezigniaco, milites, ad ipsum dominum Regem venientes, nos et terram nostram, alte et basse, ipsius domini Régis supposuimus voluntati;
Vous savez que lorsqu'il y eut guerre entre nous d'un côté et nos très chers seigneurs Louis, l'illustre roi de France, et le comte de Poitou, frère du seigneur Roi, lui-même, de l'autre, enfin, après plusieurs recours que le même seigneur le roi fait contre nous, nous et nos fils, c'est-à-dire Hugues Brun, Guy, et Geoffroy de Lusignan, soldats, venant au roi lui-même, nous et notre terre, haut et bas, soumis à la volonté du roi lui-même
et antequam dominus Rex in sua voluntate nos reciperet, dixit nobis quod conquestas quas jam conquisierat per se et gentes suas super nos, videlicet Xanctonas, cum castellania et pertinenciis, Forestam, domum de la Vergnia, et totum jus.quod habebamns in Ponte l'Abai, Mosterolium cum appendiciis suis,
et avant que le Seigneur Roi nous ait reçus dans son testament, il nous a dit que les conquêtes qu'il avait déjà obtenues par lui-même et son peuple sur nous, à savoir, Saintes, avec les châteaux et dépendances, Foresta, la maison de la Vergnia, et tout le droit que nous avions à Ponte l Abai, Mosterolius avec ses appendices,
Fronteneium cum appendiciis, Langestum, Sanctum Gelasium cum appendiciis, Praec cum appendiciis, Tauneium super Voto cum appendiciis, clausam Bauceium, feoda que tenebat a nobis comite Marchie comes Augi, feodum Renaldi de Pontibus, Gaufredi de Rançon et feoda que tenebat Gaufridus de Lezigniaco a nobis comite Marchie, et grande feodum de Alniaco, et omnes alias conquestas quas idem dominus Rex fecit super nos usque ad hodiernum diem, per ipsum et gentes suas, ipsi domino Régi fratri suo predicto, comiti Pictavie, et eorum heredibus in perpetuum retinebat.
Actum in castris in praeria prope villam Pontium. Anno MCCXLII, mense augusto.
Frontenay avec ses appendices, Langestus, Saint Gelay avec ses appendices, Prahecq avec ses appendices, Taunnay sur Voto avec ses appendices, le Bauçay clos, les honoraires que nous tenons du marquis, comte d'Augus, les honoraires de Renaud de Pons, le honoraires de Geoffroy de Rançon, et les honoraires tenus par Geoffroy de Lusignan de nous le comte Marche, et le grand honoraire d'Aunis, et toutes autres réclamations que le même seigneur le roi a faites sur nous jusqu'à ce jour, par lui et son peuple , il retenait pour toujours audit seigneur Roi son frère, le comte de Poitou, et leurs héritiers.
Acté dans un camp dans les prairies près de la ville de Pons. Dans l'année 1242, au mois d'août
Orig. Trésor des chartes, J. 192, n° 8. — Confirmation par Hugues Le Brun à Maubuisson, au mois de juin 1246. Orig. J. 192, n°
Ce jour-là Geofroi de Rancon était vengé; aussi voulut-il se faire tailler la barbe et les cheveux sur une estrade élevée au milieu du camp, afin que chacun fût témoin qu'il avait accompli son serment (88).
C'est à ce même moment, sans doute, qu'il faut placer un singulier récit de Mathieu de Paris (89); Dans les derniers jours de juillet, dit-il en substance, Henri III croyant trouver un asile sûr à Saintes (sic), se dirigea vers cette ville en passant par Archiac et Barbezieux.
Déjà il avait été secrètement prévenu par un croisé français, que Richard de Cornouailles avait délivré en Terre sainte, des projets du roi de France; celui-ci comptait l'envelopper dans Saintes et le faire prisonnier avec tous les siens. On lui dénonçait en même temps la trahison du comte de la Marche.
Cependant les maréchaux préparaient déjà les logis et le roi allait se mettre à table quand un second messager arriva hors d'haleine confirmant ces alarmantes nouvelles.
Le roi partit alors brusquement en ordonnant de brûler la ville, parce que les habitants avaient livré ses secrets aux Français.
L'armée le suivit dans le plus grand désordre, au milieu de l'encombrement des hommes, des chevaux et des chars.
Il fallut faire ainsi vingt milles de ce pays, c'est-à-dire quarante ou même cinquante railles d'Angleterre pour arriver jusqu'à Blaye et se contenter, pour toute nourriture, des fruits sauvages qu'on rencontrait sur le chemin.
Cela se passait le lendemain de la Saint-Pantaléon (28 juillet).
— Un coup d'œil jeté sur une carte montre ce qu'il y a d'inadmissible dans ce récit.
On ne va pas à Saintes par Archiac et Barbezieux, puisque c'est justement ainsi qu'on y tourne le dos; en outre Saintes était, on l'a vu, tombé entre les mains des Français le surlendemain de la bataille.
Faut-il donc entièrement rejeter ce récit parce qu'il est entaché de cette double erreur? Mais comment Paris aurait-il pu inventer tant de détails précis et qui sont loin d'être tous invraisemblables?, Henri III ne fait-il pas lui-même une assez claire allusion à une débandade pareille quand il écrit à l'empereur : « Renaud de Pons nous trahit; le comte de la Marche se tourna également vers le roi de France, et si nous n'avions éventé leurs desseins séditieux et perfides en chevauchant vers Blaye toute une nuit et tout un jour, ils nous auraient livré aux mains des Français comme ils en avaient formé l'infâme projet (90). »
Mais écoutons un autre témoignage : Paris dit que dans sa retraite le roi « perdit sa chapelle, c'est-à-dire tous les ornements sacerdotaux les plus précieux, et beaucoup d'autres choses qu'il serait trop long d'énumérer, à l'exception des reliques. »
N'est-ce pas ce que Mousket nous fait connaître sous une autre forme : « Messire Geofroi de Rancogne fit de l'ost sa partie bonne; il fit déloger le roi Henri. Ils ne chantèrent pas d'Ogier, les Anglais, en buvant de la cervoise !... Messire Geofroi, dans la déroute, s'empara de la tente du roi (91). »
Rapprochés les uns des autres, ces textes se confirment et s'expliquent, et nous devons tenir pour vrai le récit de Paris, au moins quant au fond. Il suffit d'y corriger le nom de la ville où Henri III faillit être pris, mais comment ?
Cette ville devait être située non loin de Barbezieux, puisque le roi y était encore le 26 juillet et qu'il était déjà le 27 à Blaye; ne serait-ce pas Barbezieux même ?
Reste la question de date. Paris donne celle du 28 juillet (lendemain de saint Pantaléon), ce qui est impossible, puisqu'Henri III était à Blaye le 27. C'est donc dans la nuit du 26 au 27 qu'il faut placer la débandade de l'armée anglaise.
Alors il faudrait corriger encore le texte de Paris et mettre « in vigilia » au lieu de « in crastino. » Une correction de même nature au texte de Guillaume de Nangis s'impose, comme on l'a vu (92).
Mais ces corrections n'altèrent pas la physionomie des faits exposés avec une vivacité si pittoresque par le chroniqueur anglais.
Henri III à Blaye, la campagne de Poitou était finie.
Le roi de France n'eut plus qu'à régler les conditions de la paix avec les seigneurs poitevins.
A son camp, établi sur une prairie en avant de Pons, il reçut la soumission des sires de Mortagne et de Mirambeau (93); son frère, celle d'Aimeri le jeune, comte de Rochechouart , qui vint lui faire hommage (1er août) (94).
Renaud III, sire de Pons parut devant le roi, armé de toutes pièces, la visière baissée et tenant un faucon sur le poing:
« Sire, lui dit-il, je viens à vous pour vous faire hommage de ma terre de Pons et vous supplier de me mainteniren la jouissance de tous mes droits. »
— « Sire de Pons, dit leroi, je reçois votre hommage et vous baille cette mienne espée pour vous en servir à la défense de ce royaulme, »
Et le roi, se déceignant de son épée, la donna à Renaud, qui fléchit un genou en terre pour la recevoir...
Renaud III, sire de Pons, avait épousé Marguerite de Turenne, dame de Bergerac.
Le même jour fut rédigé l'acte par lequel Hugues de la Marche et sa femme Isabelle notifiaient les conditions de la paix que le roi de France daignait leur accorder. Pour gage des bons services qu'ils promettaient au roi et à son frère, ils durent livrer les châteaux de Merpins, Château-Larcher et Crozant, et s'engager à payer 400 L t. par an pour y entretenir une garnison française (3 août) (95).
Puis les Français vinrent camper à Pleneselve et près de Marsillac, à Cartelègue. C'est là, à quatre lieues de Blaye, que Renaud de Pons vint prêter hommage au roi de France et Geofroi de Pons au comte de Poitiers (96).
Enfin, l'armée arriva devant Blaye où le roi d'Angleterre ne l'attendit pas, car, dès le 4 août, il avait établi son camp de l'autre côté delà Gironde (97).
D'ailleurs, elle ne tenta pas 1e siège de la place ; elle avait beaucoup souffert de la fièvre et de la dyssenterie, une épidémie lui enleva beaucoup de monde.
Louis IX tomba gravement malade, et l'on craignit qu'il na fût emporté par le fléau, comme son père au siège d'Avignon (98). Les Français se retirèrent donc, après avoir fortifié les places qu'ils avaient prises (99).
Alors Henri III quitta le camp et rentra dans Bordeaux (18 août).
Avant la fin du mois, saint Louis était à Tours ; il y reçut la soumission de Guillaume Larcheveque, seigneur de Parthenay, qui lui promit de lui livrer son château et qui fit hommage au comte de Poitiers. La garnison anglaise qu'Henri III avait mise au service de cet autre « traître » fut rappelée (l00).
Maintenant que la coalition était brisée, il ne restait plus qu'à frapper Henri III dans la personne de ses alliés.
A vrai dire, ces alliés se réduisaient à un seul, le comte de Toulouse.
Raymond VII avait, en effet, le même intérêt qu'Henri III à faire la guerre à la France ; en outre, le massacre d'Avignon et (29 mai 1242) avait pu faire craindre un réveil de la guerre albigeoise et un retour offensif des Français; il importait donc d'occuper Louis IX en Poitou, de telle sorte qu'il n'eût pas le loisir d'intervenir dans le Languedoc.
Raymond et ses alliés envahirent le Razès, le Minervois, les pays de Narbonne et de Béziers.
Le jour même de Taillebourg, l'archevêque de Narbonne, chassé par lui de sa ville épiscopale, l'excommunia (21 juillet). .
Après la victoire de Saintes, le roi de France détacha des troupes avec les comtes de Bretagne et de la Marche, en leur enjoignant de marcher vers les Pyrénées pour arrêter les Espagnols, qui d'ailleurs ne bougèrent pas (101).
Cependant Raymond n'abandonna pas encore la partie ; il alla conclure avec Henri III un traité d'alliance offensive et défensive à Bordeaux (28 août) (102), mais il eut le tort de s'engager dans des intrigues personnelles en essayant, par haine pour la mémoire du vainqueur des albigeois» de brouiller le comte de Leicester avec le roi son beau-frère (103); puis il alla mettre le siège devant Penne-d'Agenais.
Il était encore devant cette place quand le comte de Foix, sollicité par le roi de France, rompit avec lui et le défia (5 octobre). Cette défection ruinait les espérances du malheureux Raymond VII, et en même temps une armée française commandée par Hugues, évêque de Clermont, et par Imbert de Beaujeu menaçant les frontières du Querey, il demanda la paix. Le 20 octobre, il rentra en grâce à condition de respecter scrupuleusement le traité de Paris (104). Henri III était désormais isolé et impuissant. .
Il essaya cependant de lutter encore. Bien que plusieurs de ses barons anglais l'eussent quitté (105), il voulut tenir à la fois sur terre et sur mer (106). Il chargea Guillaume Longuépée d'une expédition en Périgord (24 septembre) (107), et fit bloquer La Rochelle (10 octobre)(108).
Cette dernière opération échoua ; au bout de six semaines tout danger pour cette place était si bien écarté que la garnison était licenciée (109). Des renforts envoyés d'Angleterre furent très maltraités par les tempêtes ; l'abbé d'Evesham, qui les amenait, mourut de ses fatigues en arrivant (8 décembre) (110).
Cependant les marins français donnaient partout la chasse aux Anglais. Ceux de Calais firent éprouver de grosses pertes aux « barons » des Cinq-Ports.
Le comte Pierre de Bretagne avait armé en course des barques qui rendaient périlleux le voyage de Gascogne (111).
En janvier, février, mars, Henri III tenta bien encore de réunir quelques troupes.
Il fit fortifier l'île de Ré (112) ; mais à quoi bon, puisque les ressources en argent et en hommes lui faisaient également défaut î Henri III se résigna enfin à traiter.
Le 7 avril 1243, une trêve fut conclue jusqu'à la Saint-Michel (29 septembre) et de là pendant cinq années.
Saint Louis gardait toutes ses conquêtes et les Anglais évacuaient l'île de Ré (113).
Une forme de trêve devait être conclue entre le Seigneur Roi et le Roi des Francs.
Forma treugarum initurum inter dominum Regem et regem Francorum.
— Rex omnibus, etc., salutem. Notum facimus quod nos, pro nobis et comite Ricardo, fratre nostro, et heredibus nostris et hominibus et adjutoribus nostris manifestis, et terris et feodis eorumdem, tam per terram quam per mare, cum Ludovico rege Francorum illustri, pro ipso et fratribus et heredibus suis et hominibus et adj utoribus suis manifestis, et terris et feodis eorum, treugas inivimus a festo Beati Benedicti abbatis in Marte usque ad festum Sancti Michaelis quod erit ab instanti festo Beati Michaelis in v. annis per totam diem duraturas.
Roi à tous, etc., salutations. Nous faisons savoir que nous, pour nous-mêmes et le comte Richard, notre frère, et nos héritiers et hommes et nos assistants manifestes, et les terres et redevances de ceux-ci, tant par terre que par mer, avec Louis l'illustre roi des Francs , pour lui et ses frères et héritiers et pour les hommes et leurs adjoints, et pour leurs terres et redevances, nous sommes entrés en reliefs depuis la fête du bienheureux Benoît l'abbé en Mars jusqu'à la fête de saint Michel, qui sera du fête immédiate du bienheureux Michel au v. ils dureraient des années tout au long de la journée.
Nos autem inter nostros nominamus Petrum Oger, Oliverum de Chaleis et Berardum de Mundlider. Rex autem Francorum nominavit inter suos: comitem Tholosanum,comitem Marchie, comitem G. Willielmum Alvernie, Gwillielmum Archiepiscopi, Gaufridum de Lezinan, Reginaldum de Pontibus, Galfridum de Galneo, Galfridum et Benedictum de Mauritannia, Pontium de Mirebel, Fulconem de Mastac dominum Mornaci, Heliam de Talemonte, Heliam Gumbaudi de Cosnac, Gwillelmum de Rupe, dominum Roentii, Iterum de Berbezi, Petrum Reimundi, Petrum Bethet, Wavvan de Talneo, Gaufridum de Rupe Forti, Reimundum de Montaud, Heliam Ridelli juvenem, Boudinum de Grignolis, Petrum Ais, Fulconem de Archiae, Hemericum de Rupe Chiwardi et Hemericum. filium ejus, Hemericum de Rupe, dominum Blenzac. Radulphum de Bello Monte dominum Beteriarum, Drogone[m] de Monte Ausyer, Gwillelmum de Sancto Quintino, Ebulonem de Rupe Forti, Karolum de Rupe Forti, Heliam de la Verne.
Et le roi de France nomma parmi ses hommes : le comte Toulouse, le comte Marche, le comte G. Guillaume d'Alvernie, Guillaume l'archevêque, Geoffoy de Lusignan, Renaud de Pons, Galfrid de Galneo, Galfrid et Benoît de Mauritannia, Ponce de Mirebel, Foulque de Masta, seigneur des Mornac, Helie de Talemont, Helie Gumbaud de Cosnac, Guillaume des Roche, seigneur de Royan, Iterum de Berbezi, Peter Reimundi, Peter Bethet, Wawan de Talneo, Geoffroy de Roche Fort, Reymund de Montaud, Helie Rudel le Jeune, Boudin de Grignolis, Pierre Ais, Fouque de Archiac, Aimery de Roche Chouard et Hemericus son fils, Hemericus de Rupe, seigneur de Blenzac. Raoul de Belle Mont, seigneur des Beterias, Drogon [m] du Mont Ausyer, Guillaume de Sancto Quintino, Eble de Roche Fort, Charles de Roche Fort, Helie de la Verne.
Et sciendum quod nos dimittemus insulam de Ré in treuga ex parte ejusdem regis Francorum eo modo quo erat in alia treuga proximo precedenti.
Et il est à savoir que nous libérerons l'île de Ré dans une trêve de la part du même roi des Francs de la même manière qu'il le fut dans une autre trêve de la précédente.
Talis est autem forma treugarum, quod si in treuga fuerit interceptum, de interceptione emendenda sic erit: interceptio facta nunciabitur declaratoribus treugarum hinc inde constitutis, qui sunt ex parte nostra: Booz de Mastac. comes Bygorrensis, Gaufridus Rydelli de Blavia, et Petrus de Burdegala; ex parte regis Francorum : senescallus Pictavie, Gaufridus de Rauncona et Reginaldus de Pontibus, tali modo quod si ex alterutra parte omnes illi tres non possent vel non vellent interesse, duo illorum nichilominus possent procedere sicut si tres interessent.
Telle est la forme des trêves, que s'il y a interception pendant la trêve, l'interception sera amendée comme suit : l'interception sera rapportée aux déclarants des trêves nommés de ce côté, qui sont de notre côté : Booz de Mastac. le comte de Bygorres, Geoffrey Rydelli de Blavia et Pierre de Bordeaux ; de la part du roi des Francs : le sénéchal de Poitou, Geoffroy de Rancon, et Renaud de Pons, de telle manière que si de part et d'autre ces trois n'ont pu ou n'ont pas voulu y assister, deux d'entre eux ne pourraient nullement procéder comme si trois personnes étaient présentes.
Si vero aliquis istorum moreretur, alius a parte ejus cujus esset dictator poneretur, ita quod si imfra ijos menses, postquam forisfactum eis constiterit, non fuerit emendatum, ex tunc ille cui forisfactum luerit poterit currere super forisfactorem suum donec plenarie fuerit emendatum, et nos, sine nos mesfacere, poterimus juvare hominem nostrum contra malefactorem qui forisfactum emendare noluerit, et rex Francorum poterit similiter facere in casu consimili.
Mais si l'un d'eux venait à mourir, un autre serait placé à ses côtés comme dictateur, de sorte que si dans les mois suivants, après que la déchéance aurait été établie pour eux, il n'en eût pas été fait droit, dès lors celui à qui la déchéance aurait été a été accordé pourrait courir contre son auteur jusqu'à ce qu'il ait été entièrement rectifié, et nous, sans nous faire tort, nous pourrons aider notre homme contre un malfaiteur qui refuse de réparer ce qui a été perdu, et le roi des Francs pourra faire de même dans un cas semblable.
Dominus autem malefactoris non poterit juvare malefactorem qui forisfactum emendare noluerit, nec aliquis qui sit de posse vel dominio ipsius domini, donec forisfactum fuerit plenius emendatum.
Mais le maître du malfaiteur ne pourra pas aider le malfaiteur qui refuse de réparer ce qui a été perdu, ni quiconque est sous le pouvoir ou l'autorité du maître lui-même, jusqu'à ce que la perte ait été entièrement réparée.
Et nos idem poterimus facere in casu consimili, nec dominus malefactoris nec sui poterunt juvare malefactorem, sicut predictum est.
Et nous pourrons faire de même dans un cas semblable, et ni le maître du malfaiteur ni les siens ne pourront aider le malfaiteur, comme il a été dit.
Illud etiam condictum est quod si aliqua fortericia, vel castrum aliquod, vel persona alicujus nobilis, durantibus treugis caperetur, vel furtive subtraheretur a rege Francorum sive a suis, et duceretur et teneretur in posse vel territorio regis Francorum, et requisitus super hoc integre non emendaret sine mora, statim nos per nos vei nostros, sine nos mesfacere, poterimus nos juvare; nichilominus tamen dominus castri, fortericie, vel nobilis capti, modis omnibus, sine se mesfacere, contra captorem et contra detentorem poterunt guerreare donec plenarie esset emendatum.
Il était également stipulé que si une forteresse, ou un château, ou la personne d'un noble, était prise pendant les raids continus, ou était volée furtivement au roi des Francs ou à son propre peuple, et était prise et détenue dans la possession ou le territoire du roi des Francs, et n'a pas fait le paiement intégral de la demande sur ce sans délai, nous pourrons nous aider sans délai, si nous voyons le nôtre à travers nous; néanmoins, le seigneur du château, de la forteresse ou des nobles, fait prisonnier, pouvait, par tous les moyens, sans se faire de mal, faire la guerre au ravisseur et au détenteur jusqu'à ce qu'il fût entièrement réformé.
Quod autem dictum est ex parte nostra, si ex parte regis Francorum vel suorum in castro, vel fortericia, vel nobili capto et detento fuerit interceptum , omnino idem concorditer est concessum pro parte regis Francorum : videlicet si ex parte nostra vel nostrorum in castro, vel fortericia, sive nobili capto et detento fuerit interceptum.
Mais ce qui a été dit de notre côté, si de la part du roi des Francs ou de son peuple il était intercepté dans un château, ou une forteresse, ou d'un noble capturé et détenu, la même chose était accordée par accord le la partie du roi des Francs, une forteresse, si un noble avait été capturé et détenu.
Insuper nos et predictus rex Francorum, pro nobis et fratribus nostris, et hominibus nostris et coadjutoribus manifestis, toto tempore treugarum istarum, erimus in seisina eadem in qua eramus aperte illa die qua treuge iste capte fuerunt a nobis, salvo eo quod de insula de Ré et de nostris hominibus et adjutoribus superius nominatis superius est expressum.
De plus, nous et ledit roi des Francs, pour nous et nos frères, et nos hommes et co-adjudants manifestes, pendant tout le temps de ces trêves, serons dans la même seisin dans laquelle nous étions ouvertement le jour où cette trêve nous a été prise, sauf celle de l'île de Ré et de nos hommes et auxiliaires ci-dessus nommés a été exprimée ci-dessus.
Nos autem treugas sepe dicto regi Francorum et heredibus suis a nobis bona fide observandas firmiter jurari fecimus, nobis presentibus, per dilectos et fideles nostros Radulphum filium Nicholai, Petrum Chaceporc, clericum nostrum, et Emericum de Sacy.
Et nous fîmes les troupes de ladite clôture au roi des Francs et ses héritiers jurer fermement d'être observés par nous de bonne foi, en notre présence, par notre bien-aimé et fidèle Raoul fils de Nicholas, Peter Chaceporc, notre greffier, et Aimery de Sacy.
Preterea volumus et precipimus quod heredes nostri treugas jam dicto regi Francorum et heredibus suis observent et ad easdem firmiter observandas ipsos heredes nostros per presentes litteras quantum possumus obligamus.
De plus, nous voulons et ordonnons que nos héritiers observent les alliances dudit roi des Francs et de ses héritiers, et nous obligeons nos héritiers à les observer fermement par les présentes lettres autant que nous le pourrons.
Teste me ipso, apud Burdegalam, vij. die Aprilis, anno etc. xxvij.
Memorandum quod die Mercurii proxima post Dominicam in Ramis Palmarum liberate fuerunt littere regis Francorum de treugis predictis Petro Chaceporco, custodi garderobe Regis, per manum Galfridi de Wulwarda in capella Burdegalensis archiepiscopi apud Burdegalam.
En tant que témoin moi-même, à Bordeaux, vij. le jour d'avril, dans l'année etc. xxvij.
Il faut se rappeler que le mercredi suivant après dimanche dans les branches des Palmiers il y avait une lettre du roi des Francs libéré de la troupe susmentionnée Peter Chaceporco, gardien de la garde-robe du roi, par la main de Galfrid de Wulwarda dans la chapelle de l'archevêque de Bordeaux à Bordeaux.
Ces résultats n'avaient pas été acquis sans peine ; il avait fallu prendre douze places fortes bien défendues, livrer une bataille chaudement disputée, subir les épreuves d'une épidémie meurtrière, mais ils étaient décisifs.
La trêve conclue à Bordeaux, le 7 avril 1243 expirait le 7 avril 1248.
. Parmi les plaiges qui furent désignés, de part et d'autre, pour la garantie de cette trêve, on remarque, du côté du roi de France, les Saintongeois Renauld de Pons, Geoffroy de Tonnay Charente, Geoffroy et Benoit de Mortagne, Ponce de Mirambeau, Foucauld de Matha, seigneur de Mornac, Hélie de Talmond, Hélie Gombauld de Cônac, Itier de Barbezieux, Raymond de Montendre, Geoffroy, Eble et Charles de Rochefort.
Après ces dispositions, le roi Loys, encore souffrant, revint à Saintes où il ordonna de bâtir une nouvelle ligne de murailles pour remplacer la vieille enceinte gallo-romaine qui tombait en ruines. De là il retourna dans sa terre de France
Le traité de Paris (1259) ne fera guère que rendre légale la situation de fait établie par la victoire de Saintes. .
Ch. BÉMONT.
https://www.persee.fr/doc/anami_0003-4398_1893_num_5_19_3118
Histoire de Taillebourg / Abbé P. Billy,...
La chronique Radulfe ou Raoul de Dicé, en relatant les circonstances du siège livré, en 1179, au château de Taillebourg par Richard Cœur de Lion, ne sit pas un mot du pont qui traversait la Charente sous les murs de cette forteresse, ni de la chaussée en maçonnerie qui, partant de ce pont, se prolongeait à l’ouest à travers la grande prairie qui s’étend sur la rive gauche du fleuve. Il est à croire que ni le pont ni la chaussée n’existaient en 1179, et qu’ils ne furent construits que postérieurement, peut-être lorsque les seigneurs de Taillebourg firent rebâtir leur château ruiné par le comte Richard.
Sur la Terre de nos ancêtres du Poitou - Aquitania (LES GRANDES DATES DE L'HISTOIRE DU POITOU ) <==.... ....==> Situation du Poitou à l'avènement d'Alphonse. (Les grandes maisons seigneuriales du Poitou)
(1) La chaussée de Saint-James se developpe sur une longueur de 1,255 mètres. Quelques antiquaires croient qu'elle fut, construite au commencement du XIIe siècle sur une ancienne voie romaine, elle permettait de traverser la prairie marécageuse de Saint-James pour rejoindre Taillebourg par un pont sur la Charente.
Le dernier pont a été détruit dans les années 1960 lorsque la déviation de Taillebourg fut réalisée avec la construction du pont actuel. Maintes fois consolidée et remaniée du XIIe au XXe siècles, la chaussée est toujours utilisée comme voie de secours au moment des grandes inondation, comme celles de 1982 et 1994.
Ses arches sont au nombre de trente. Sa voie avait tout au plus 2m30 entre les parapets, qui étaient d'un mètre de haut.
(2). Voy. la Revue de Saintonge et d'Aunis, 1er septembre 1892. Cette livraison contient un compte rendu de la cérémonie d'inauguration, par M. D. d'Aussy, un rapport de M. Louis Audiat, des poésies de circonstance lues à cette occasion, sans oublier une « chanson » composée aussitôt après la bataille et qu'on a chantée sur la musique de Weckerlin, une conférence de M. le baron A. Oudet sur « Saint Louis en Saintonge. » ANNALES DU MIDI.
(3). A consulter surtout l'édition donnée par l'ancienne Commission des Archives d'Angleterre (1816).
(4). Publiées par Teulet, t. II (1866, Archives de l'Empire).
(5). Tome I, publié par Fr. Michel (1885, Doc. inédits). Plusieurs des pièces qui figurent dans les Rôles gascons ont déjà été publiées, d'après les copies de Bréquigny, dans les Lettres de rois et reines de Champollion Figeac (Doc. inédits). Il faut se défier de cette publication qui est générament détestable.
(6). Publié par Luard, t. IV. (Coll. du Maître des rôles.)
(7). Extraits dans les Histor. de France, XXII, 76-80.
(8). Publié par N. de Wailly (Soc. de l’hist. de Fr., 1876).
(9). Dans les Hist. deFr., XX, pp. 309 et suiv.
(10). Sur la composition et les sources des Gesta Lud. regis, voy. L. Delisle dans les Mém. de l'Acad. des inscr. et belles-lettres, t. XXVII, 2e partie.
(11). Publiées par P. Paris (1838), t. IV, pp. 210-277. 6. Extraits dans les Hist. De Fr., XXII, pp. 181-185.
(13). Publié par N. de Wailly (Soc. de l'hist. de Fr., 1867 ; édit. scolaire, Hachette, 1881.)
(14). Le meilleur texte en a été donné par A. Thomas dans les Annales du Midi ; juillet 1892, p. 362-370, reproduit inexactement dans la Rev. de Saintonge et d'Aunis citée plus haut.
(15). Pour l'itinéraire de saint Louis, voy. Hist, de F., XXI, pp. 412 et L.
(16). Mathieu de Paris est le seul qui donne des détails sur la conduite du comte de la Marche en cette circonstance (IV, 178-181).
(17). Cf. Bémont, dans la Rev. historique, l. XXXII, 1886.
(18). Cf. Berger, dans la Bibl. del'Éc. des Chartes, 1893, livr. 1. -
(19) . Le rôle provocateur de la comtesse-reine Isabelle est accentué surtout par Mathieu de Paris, IV, 211. Ce qu'il dit concorde assez bien avec les détails fournis sur le caractère de cette femme (qu'un seul chroniqueur, le pseudo Mathieu de Westminster, en se permettant un médiocre calembour, appelle Jésabel) par une lettre d'un bourgeois de La Rochelle écrite à la reine Blanche vers la fin de 1241 et publiée par M. Delisle dans la Bibl. de l'Éc. des Chartes, 4e série, t. II, 1856, p. 518.
(20). Layettes du Trésor, cf. Mathieu de Paris : « Regali edicto miliciam Francie convocavit» ; mais le chroniqueur anglais se trompe en disant que la convocation fut faite « quand le roi d'Angleterre eut débarqué », Henri III n'arriva, en effet, que le 20 mai.
(21). Layettes du trésor, II, 471 , traité passé à Chinon « au mois d'avril 1242 » (par conséquent après Pâques qui, en 1242, tomba le 20 avril) entre les deux frères et le comte de Poitiers.
(22). Majus chronicon Lemovicense, dans Hist. 4e Fr., XXI, 765.
(23). Mat. de Paris, IV, 195. On ne saurait affirmer que les chiffres donnés par ce chroniqueur sont exacts. -
(24). Hist. de Fr., XX, 338.
(25). Cette date est fournie par le Majus chronicon Lemov. ; oc. cit.
(26). « In castris ante Fontanetum, mense maio, » Geofroi de Châteaubriant reçoit du roi de France la garde du château de Pouzauges. Layettes du Trésor, II, 472.
(27). Layettes du Trésor, II, 472 : « In castris ante Vouventum, mense maio ». »
(28) Rôles gascons, n° 268 : « Sciatis quod hac die sabbati post recessum nostrum certos audivimus rumores quod rex Francie cepit castrum de Berceres et homagium Radulphi de Bellomonte. » L'acte est seulement daté « ut supra, « ce qui reviendrait à dire : le 30 mai (cf. n° 265). Or, le 30 mai n'était pas un samedi, mais un vendredi ; en outre, il est prouvé par les actes mêmes publiés dans ces Rôles gascons que le roi d'Angleterre resta à Pons jusqu'au 6 juin et qu'il était à Saintes le samedi 7 juin.
C'est donc bien ce jour-là, jour de son départ (post recessum nostrum) qu'il apprit la nouvelle certaine (certos rumores) du traité passé par Raoul de Beaumont.
(29). Layettes du Trésor, II, 473 : « Apud Voventum, mense junio, die veneris ante Pentecosten. »
(30). Cette date est mise hors de doute par un acte des Rôles gascons, n° 7. Le roi d'Angleterre donne des ordres relatifs à ses aumônes et veut qu'elles commencent « a nono die maii, videlicet a die veneris qua rex naves suos ascendit apud Portesmuam. » C'est la date donnée par la plupart des chroniqueurs anglais, à l'exception de Mat. de Paris qui dit expressément : le roi s'embarqua le jour des ides de mai (jeudi 15 mai) ; mais le vent tomba et il ne put partir que le lendemain (16 mai) ; il entendit la messe à l'abbaye du cap Saint-Mathieu le dimanche suivant (18 mai), puis repartit le lundi avec un bon vent et arriva le mardi (20 mai) à Royan.
Il est inadmissible que Paris ait imaginé ces détails si précis, mais le point de départ de son calcul est faux.
(31). Rôles gascons, n° 8 : « Mare, benedictus Deus, placidum invenimus et tranquillum. » Le n° 35 donne le détail assez curieux des approvisionnements emportés par le roi d'Angleterre.
(32). Rôles gascons, n° 9 : « Sani applicuimus in portu quodam Pictavie nomine Ruaunta, et nos divertimus usque Pontem. » Paris, comme on l'a vu, fait arriver le roi « apud Roganum, os Gironde fluvii » (IV, 192), le 20 mai ; il ajoute qu'il y demeura quelques jours avant de se rendre à Pons.
D'autre part, Nangis nous dit (p. 440), qu'à leur arrivée le roi et la reine d'Angleterre reçurent l'hospitalité des sires de Mortagne et de Mirambeau.
Enfin le premier des actes publiés aux Rôles gascons, montre que le roi était déjà à Pons le 20 mai. On pourrait lever cette petite difficulté en faisant au texte de Paris une légère addition, et si on lisait : « rex, igitur, vii idus maii naves ascendens. »
Il serait donc parti le 9 mai, aurait touché à la pointe Saint Mathieu le 11 et serait arrivé à Royan le mardi 13, dates qui concordent parfaitement avec tous les autres éléments certains de cette chronologie.
La rapidité de ce voyage ferait-elle difficulté ?
Les 380 kilomètres que l'on compte de Portsmouth au cap Saint-Mathieu auraient été franchis en quarante-huit heures et les 420 kilomètres du cap Saint-Mathieu à Royan en trente-six heures environ. Est-ce impossible avec de bons voiliers et par une belle mer ?
(33). Les sept comtes étaient ceux de Cornouailles (Richard, frère du roi), de Leicester (Simon de Montfort, beau-frère du roi), de Salisbury (Guillaume Longuépée), de Hereford et Essex (Honfroi de Bohun), de Winchester (Roger de Quinci), de Glocester (Richard de Clare), el de Warwick (Jean du Plessis).
(34). Mat. de Paris, IV, 192.
(35). Rôles gascons, nos 158-163.
(36). Rôles gascons, nos 11, 8.
(37). Rôles gascons, nos 262 et 11. Les quatre plénipotentiaires furent : Raoul, fils de Nicolas, Jean de Lexinton, maître Pierre de Bordeaux et Guillaume Gombaud. On remarquera la formule insolite de salut employée dans la lettre du 24 mai : « Domino suo, quando ei placuerit, Ludovico» »
(38) . Rôles gascons, ne 266 et Rymer, à la date. Ce sont : Honfroi de Bohun, comte de Hereford et d'Essex, Jean, fils de Geofroi, Herbert, fils de Mathieu, Raoul, fils de Nicolas et Pierre de Bordeaux.
(39). Ibid., n° 11 et 267 ; Rymer, à la date...
(40). Ibid., n° 181: « Licet idem rex nunciis nostris satis curialiter respondeat quod... » Cf. Mat. de Paris : « Ipsos cum honore et reverentia suscepit et ad mensam pransuros civiliter advocavit. » (IV, 203). Nangis ne parle pas de ces négociations.
(41). Voir la lettre malheureusement mutilée de saint Louis dans Champollion-Figeac : Lettres de rois et reines, I, 54, d'après le Nouveau Rymer.
(42). Rôles gascons, n° 11 .
(43). Ibid., n° 278 : « Mandavimus hac die lune in crastino octabe Pentecostes régi Francorum quod... nullam treugam ei de cetero tenemur observare. »
(44). Paris, IV, 205. ,
(45). Rôles gascons, n° 6- 13.
(46). lbid.,nos 9, 165, 166.-
(47). Ibid., nos 7, 10, 12, 26, 158- 163, 167- 177.
(48) 16 juin, deux plénipotentiaires sont envoyés à l'empereur, Rôles gascons 284, 289, 290, 296, 324. Samedi 22 juin, l'abbé de la Garde-Dieu part de Saintes en mission auprès du comte de Toulouse, des rois de Castille et d'Aragon. Ibid., n° 467 ; il était revenu avant le 45 septembre (ibid., n° 227).
(49). L'ordre suivi par Mat. de Paris (IV, 24 4) est inadmissible : Frontenay, Vouvent, Villiers, puis Fontenay-le-Comte. Il se peut d'ailleurs qu'il ait confondu Frontenay et Fontenay. Il parle de la première de ces places (p. 202), en des termes qui cadrent parfaitement avec le récit de Nangis ; mais d'autre part c'est pendant le siège de Frontenay qu'il parle de l'ambassade envoyée par le roi d'Angleterre au roi de France. C'est bien difficile à croire.
Le récit de Nangis, confirmé par les chartes citées plus haut, établit en effet que les Français prirent d'abord Fontenay (en mai), puis Vouvent (6 juin), et l'on vient de voir que le roi d'Angleterre commença les hostilités dès le 8 juin.
Il est vraisemblable que le siège de Frontenay commença juste à ce moment, et il se peut qu'avant la déclaration de guerre (16 juin), il y ait eu encore des pourparlers qui auront trompé Mathieu de Paris. En tout cas, ce dernier, malgré l'abondance de ses anecdotes, est un guide moins sûr que Nangis. .
(50). Paris (IV, 202), dit que c'était le fils d'une première femme du comte de la Marche ; mais Hugues X n'eut d'autre femme qu'Isabelle d'Angoulême, et d'autre part Nangis dit que c'était un bâtard. Serait-ce Amanieu de la Marche mentionné dans les Rôles gascons, n° 907 ?
(51). Ces chiffres sont fournis par Nangis ; Paris (p. 214) indique quarante chevaliers et un bien plus grand nombre de sergents.
(52). Nangis est peut-être mal informé quand il dit que les Français voulaient aller trouver « regem Anglie qui in civitate Xanctonensi latitabat. »
Paris, qui pouvait être mieux renseigné sur les déplacements de ce roi, dit qu'après avoir organisé la défense de Tonnay-Charente, où il arma chevaliers deux des fils du comte de la Marche, il revint avec son armée « ad prata contra civitatem Tailleburc, ...et ibi moram per sex dies continuavit » (IV, 209).
Il serait important de déterminer l'emplacement exact à Aucerrium, qui se trouve seulement dans Nangis (Aucerne dans la chron. fr. et dans G. Guiart).
Les identifications proposées : Saint-Acre, Saint- Affaire, Saint-Asserre (H. F.), Saint-Césaire (Rev. de Saint, et Aunis) sont inacceptables.
L'endroit devrait être cherché sur la Charente, entre Taillebourg et Saintes.
(53). Nangis : « Absque magno incommodo propter importunitatem transitus non habito consilio transeundi. »
(54). Nangis : « Rediit in vigilia beate Magdalene (21 juill.) versus Taileburgum, castrum Galfridi de Ranconio. » Il est possible qu'il y ait ici, dans Nangis, une légère erreur. Si, comme le dit Paris, les deux armées se trouvèrent en présence dès le matin de la journée de Taillebourg, il faut supposer que les Français entrèrent dans la place la veille (20 juillet).
Geoffroy IV de Rançon, seigneur de Taillebourg, c'est probablement lui qui fit construire le vieux château de Gencav. Il testa en 1258 et mourut peu après en 1260.
De sa première femme Jeanne vicomtesse d'Aunay, qu'il épousa vers 1200, il eut cinq filles :
1° — Amable de Rançon, mariée vers 1216 à Guillaume V de Parthenay (voir postérité dans la généalogie des sires de Parthenay).
2° — Jeanne de Rançon qui épousa Guillaume II, seigneur de Sainte-Maure dont la postérité est donnée par Fouchier Edmond et par la généalogie de la famille des Brémond d'Ars.
3° — Une fille mariée au seigneur de Mortagne en Saintonge.
4° — Une fille mariée à Jédouin de Doué dont est issue Eustache de Doué qui hérita de la seigneurie de Gençay.
5° — Une fille mariée à Pierre Bordeaux seigneur de Guilhem de ce mariage est issue Marthe de Bordeaux qui épousa Almadieu d'Albret VI duquel sont descendus, en ligne directe, les rois de Navarre et Henri IV roi de France.
(55). Rôles gascons, nos 3, 7, 8, 33, 352.
(56). Rôles gascons, n° 181.
(57). Joinville, ch. 23.
(58). Paris, IV, 240.
(59) La journée de Taillebourg est d'ordinaire placée au dimanche 20 juillet. C'est une erreur que l'on doit à Mathieu de Paris ; encore celui-ci se contredit-il lui-même.
Il dit, en effet, d'abord (p. 210) que le roi de France passa le pont « in crastino diei, scilicet dominice proxime ante festum sancte Marie Magdalene» (lundi 24 juillet) ; un peu plus loin, que c'était un dimanche (deux fois, p. 211).
D'autre part, Nangis dit expressément que le roi de France entra dans Taillebourg la veille de la Madeleine (24 juillet), et que le lendemain il passa le pont et marcha vers Saintes où s'engagea la bataille.
Signalons, en outre, un acte publié aux Rôles gascons (n° 337) ; il est daté « T. ut supra », et le précédent « apud Xanctonan xvij die julii » ; notre numéro 337 ne pourrait pas néanmoins être daté du 17 juillet, car dans le dispositif il est dit que « hac die dominica, in festo sancte Margarete » (dimanche 20 juillet) le roi reçut des bourgeois de La Réole 7,500 sous bordelais qui furent versés le même jour dans la caisse du roi (in garderoba nostra) à Saintes.
Aurait-il eu le loisir de délivrer une charte de cette nature dans une journée comme celle de Taillebourg ? Il faut donc s'en tenir, avec Nangis, à la date du 21 juillet.
Comment se fait-il que les érudits et les archéologues qui ont présidé aux fêtes du cinquantenaire aient fixé cet événement au dimanche 22 juillet ? L'almanach les condamne.
En outre, convaincus par Mathieu de Paris que saint Louis avait employé tout un jour (le lundi) à faire filer ses bagages avant de reprendre la poursuite de l'ennemi, ils ont assigné à la bataille de Saintes la date du 24 juillet, alors qu'il est certain qu'elle fut livrée le mardi 22, jour de sainte Madeleine.
Il était facile de voir qu'ici encore Paris a embrouillé les faits par l'incohérence de son récit.
Quoi ! Il vient, quelques lignes plus haut, de dire que saint Louis consentait à donner à peine quelques heures de répit à l'armée anglaise, et qu'il recommencerait la lutte le matin avec le jour, et il aurait laissé vingt-quatre heures de répit aux Anglais ! Heureusement, les contradictions même de son récit permettent de le corriger et ici la correction se fait à coup sûr.
Dom Vaissete a certainement contribué à perpétuer ces mêmes erreurs quand il a écrit : « Le roi attaqua (20 juillet) les Anglais qu'il obligea de prendre la fuite et de se retirer à Saintes ; il les y poursuivit et les défit entièrement dans une sanglante bataille qui se donna quatre jours après. » (Hist, de Languedoc, nouv. édit., VI, 742.)
(62). Paris, IV, 240.
(61). Paris {ibid.) dit que le roi d'Angleterre avait avec lui 1,600 chevaliers, 20,000 fantassins et 700 arbalétriers, dont 80 seulement étaient Anglais.
Dans sa lettre à l'empereur, le roi d'Angleterre dit qu'il amena devant Taillebourg « paucos de gente nostra anglos bellatores » et qu'il dut battre en retraite « propter potentiam ipsius regis (Louis IX) quam viribus nostris vidimus multo longiorem » ; et de fait, si les Français n'avaient pas été très supérieurs en nombre, comment expliquer les événements de la journée ? Nangis dit qu'Henri était « cum grandi multitudine Anglicorum », obéissant à cette tendance qui pousse l'auteur d'un bulletin de victoire à exagérer le nombre des ennemis vaincus.
(62). Paris : « Aliqui Anglorum pontis transitum custodiebant » (p. 210).
(63). Rôles gascons, n° 181 ; Rymer, à la date fausse du 19 sept. 1232.
(64). Rôles gascons, n° 181.
(65). Paris, IV, 240-212.
(66). Vers 31047-34060.
(67). Li Poitevin, li Gascon, li Anglois
Gardèrent mal le pont de Tailleborc,
Que malgré aus i passèrent François
Et chacerent el mistrent en retor ;
Dusqu'en Saintes n'i firent one estor.
(68). Nangis semble croire qu'Henri III craignait de s'attaquer à son suzerain, scrupule mal placé après tout ce qui s'était déjà passé.
(69). « Per pontem predictum ». Or, il est seulement question plus haut du pont construit près d'Aucerrium . : « cum ibidem prope in quodam maresio pontes faceret elevari. » Version française : « li roys chevaucha après [prope] atout son ost pres d'un marès, et fist lever un pont pour plus legierement passer outre... Les François si firent tantost passer par le pont devant dit v. c. serjenz. ».
(70). Il faut ici corriger la rédaction latine des Gesta à l'aide de la version française qui est moins embrouillée.
(71) . Vers 9362 9404.
(72). Une variante dit qu'ils étaient un contre cent ; une autre, un contre mille. C'est une exagération de langage commune aux soldats qui racontent des faits de guerre. G. Guiart exagère aussi, parce qu'il écrit en vers. Chez lui, c'est de l'amplification poétique.
(73). Saint Louis a-t-il réellement passé le pont avec ses troupes en ce moment ? Joinville est seul à le dire, et Delacroix n'a fait qu'« illustrer » son récit. Mais ce fait est peu conciliable avec le récit de Paris, puisque, d'après lui, Richard de Cornouailles traversa le fleuve pour aller trouver le roi ; c'est ce qui paraît ressortir également du récit de Nangis.
(74). Paris dit que ce passage eut lieu pendant la nuit de ce même jour et qu'à l'aube du jour (summo mane) les Français plantèrent leurs tentes à l'endroit même qu'avaient occupé les Anglais. Mais alors que fait-il de l'armistice accordé à Richard de Cornouailles ?
(75) . Nangis : « Suos usque ad Xanctonas precepit currere forratores. » Paris : « Quidam de Francis discurrebant, emolumentis victualium intendentes, quod vulgariler forrari dicitur. »
(76). Nangis : « Cum Scotis, Anglicis et Gasconibus ». Il n'y avait pas d'Écossais dans l'armée anglaise, irais des Irlandais (Scoti). Cf. Rôles gascons, n° 12.
(77). Alfonse, frère de Sanche II de Portugal, époux de Mathilde, comtesse de Boulogne. G. Guiart (9462) l'appelle à tort « le comte de Bourgoigne».
(78). G. Guiart, 9487-9499.
(79). Nangis.
(80). Paris, IV, 243.
(81). Paris : « Ita quod si numéro eis equarentur, de Francis gloriose triomphassent. » C'est sans doute en transformant cette hypothèse eu réalité que Kennett a pu dire, dans ses Parochial antiquities, que les Anglais avaient triomphé glorieusement à Saintes.
(85). Paris, ibid. Rôles gascons, n° 181.
(83). Bémont, Simon de Montfort, pp. 15 et 341
(84). Nangis ; « Rex Anglie et comes Marchie noctu de civitate Xanctonensi recedentes. » On conclut naturellement de son texte que la retraite eut lieu dans la nuit qui suivit la bataille ; mais le roi dit lui-même : « Nos adhuc in crastino commorantes apud Xanctonam. » (Rôles gascons, nos 181).
C'est donc dans la nuit du 23 au 24 que le roi d'Angleterre évacua Saintes, et le 24 au matin que saint Louis y entra.
(85). Lettre d'Henri III à l'empereur. Rôles gascons, no 181. Nangis dit que la soumission du sire de Pons eut lieu « die martis post festum beati Jacobi apostoli » (29 juillet) ; mais l'itinéraire du roi d'Angleterre nous montre que celui-ci était le 25 juillet à Pons, le 26 à Barbezieux et le 27 à Blaye.
Si, comme le dit Henri III, Renaud de Pons et le comte de la Marche allèrent faire leur soumission au roi « incontinenti et statim ex quo villam [Pons] exivimus, » il faut la placer le 25 ou le 26 au plus tard. Nangis aurait dû dire : « Die sabbati post festum S. Jacobi. »
(86). Paris, IV, 214.
(87). Nangis.
(88). Joinville, ch. 23.
(89). IV, 217-219.-
(90). Rôles gascons, n° 181.
(91). Vers 31107-31120.
(92) . Ce raisonnement ne tient, il est vrai, que si les dates fournies par les Rôles gascons sont exactes. Nous avons déjà dû en corriger deux. Cependant, à moins de preuves contraires, il paraît plus prudent de suivre la chronologie des Rôles que celle des chroniqueurs. Voy. les n° 42, 44, 198.
(93). Nangis. On a parfois confondu Mirebeau de Poitou avec Mirambeau de Saintonge. C'est le sire de Mirambeau, Ponce, qui est cité dans les Rôles gascons, nos 346, 702, 1212, et c'est probablement du gouverneur de Mirebeau que parle Paris, IV, 222.
(94). Layettes du Trésor, II, 447, 478. L'acte est daté seulement « in castris prope Pontes, mense Augusto, » comme la lettre de soumission du comte de la Marche ; c'est Nangis qui donne à ce dernier fait la date du premier août Cf. Paris, IV, p. 224 .
(95). Hist, de Fr., XX, 206-207, note ; XXI, 765, note. Layettes du Trésor, II, 476, 477, 478.
(96). Layettes du Trésor, II, 478, 479. Cf. Paris, IV, 220 : « Usque ad locum qui vocatur Quarta leuca. » C'est Cartelègue, Gir., c. de Blaye. La chronique attribuée à Baudoin d'Avesnes {H. F., XXI, 164) indique encore d'autres soumissions :[celles du comte d'Eu, de Geofroi de Lusignan. Cette chronique, qui cite la bataille de Saintes, est muette sur le combat de Taillebourg.
(97). Henri III était encore à Blaye le 3 août {Rôles gascons, n° 590) ; il était « in castris super Gyrondam » le 4 (ibid., 356). Paris dit à tort qu'il resta à Blaye jusqu'à l'Assomption. Il était encore au camp le 17 août (ibid., nos 55, 209, 377, 382), puis à Bordeaux le 18 (ibid., n° 384). Notons ici une nouvelle incohérence du chroniqueur anglais : cinq lignes après avoir dit que le roi attendit à Blaye jusqu'à l'Assomption que la reine eût accouché, il marque au 25 juin la naissance de leur fille Beatrix. Il est vrai que cette date est fournie par une addition marginale.
(98). Paris, IV, 197, 225. Nangis, XX, 338.
(99) Paris, IV. 226. Louis IX repassa par Saintes ; le 18 août, Henri III faisait écrire à Guillaume Larcheveque de retenir 100 ou 120 chevaliers anglais à Parthenay « si necesse fuerit propter adventum regis Francorum ad vos. » (Rôles gascons, n° 377.)
(100). Layettes du Trésor, II, 480 j Rôles gascons, n° 404. Cf. Paris, IV, 220.
(101). Paris, IV, 234..
(102). Rôles gascons, n° 407 et 430 ; cf. ibid., n° 592, la lettre du comté de Toulouse à ce propos.
(103). Paris, IV, 231.
(104). Layettes du Trésor, II, 484, 484, 487, 488, et Vaissete, nouv. édit., VIII, 4099, 4400.
(105). Le 22 août, Henri III autorisa son frère Richard de Cornouailles à rentrer en Angleterre à la Saint-Michel. Rôles gascons, n° 395. Cf. Taris, IV, 228.
(106). Rôles gascons, n°» 45, 224, 383, 390, 499, 503, 594-599, 602, 725, 1587.
(107). Ibid., n° 477, 479.
(108). Ibid., n 540, 524, 545, 574, 633.
(109). Layettes du Trésor, II, 483, no 2999.
(110). Paris, IV, 198- 199, 238, 242. Cf. Rôles gascons, n° 674, 782.
(111). Ibid., p. 238.
(112). Rôles gascons, n°604, 609, 631, 632,721,794, 831, 844, 1284, 1589.
(113) Layettes du Trésor, Rymer, à la date. Cf. Rôles gascons, n° 1242, 1370.