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PHystorique- Les Portes du Temps
9 avril 2021

1230 Libération de Geoffroy la Grand'Dent et Aimery de Lusignan, faits prisonniers par Pierre de Dreux, Comte de Bretagne

1230 Libération de Geoffroy la Grand'Dent et Aimery de Lusignan, faits prisonniers par Pierre de Dreux, Comte de Bretagne agissant pour Henri III, roi d'Angleterre

En recherchant les documents historiques qui peuvent s'appliquer à Geoffroy la Grand'Dent, nous en avons trouvé plusieurs qui méritent d'être signalés

On voit dans Rymer (Faedera T. 1, p. 313) qu'en 1230, Henri III, roi d'Angleterre, libéra de prison un Geoffroy et un Aimery de Lusignan, tous deux (faits prisonniers par le Comte de Bretagne, agissant pour Henri III) sur la promesse de Geoffroy de livrer ses châteaux de Vouvent et Mervent.

Il ne peut s'agir ici que de Geoffroy la Grand'Dent, puisque son père Geoffroy 1er était mort dès 1224 ; mais Geoffroy II n'avait pas de frère nommé Aimery, ou du moins aucun généalogiste ne l'a signalé.

On lit d'autre part dans l'Histoire ecclésiastique de Jérémie Collier (T. 2, p. 158), qu'un Geoffroy de Lusignan (sire de Jarnac) et un Aymar (ou Athelmar, nommé Evêque de Winchester), tous deux frères, furent expulsés d'Angleterre en 1260 et malgré le Roi, par une décision des Barons réunis en Parlement, qui imposaient alors leurs volontés mais ces deux frères étaient fils de Hugues X, Comte de la Marche, et demi-frères d'Henri III d'Angleterre par leur mère Isabelle d'Angoulême, veuve de Jean-sans-Terre, remariée Hugues X.

Ce Geoffroy de Lusignan appartenait donc à une autre branche plus jeune, et d'ailleurs il n'était pas seigneur de Vouvent.

 Il parait donc qu'il y a eu erreur sur le nom ou sur le degré de parenté du second prisonnier (Emericus) cité par Rymer, dont voici, du reste, le texte :

(1230), « Sciant pressentes et futuri, quod haec est forma per quam dominus Henricus Rex illustris, filius Regis Johannis deliberavit Galdridum de Lezyniaco, et milites suos cum eo captos a prisona videlicet.

Quod ipse Galfridus, in primis, commisit ipsi Regi castra sua Devonent  (de Vovent) et Mereventer, in tenentiam et securitatem de fideli servitio ; ita quod ipse Rex, quam diu guerra duraverit inter ipsum et Regem Franciae, tenebit castra supradicta in manu sua, ad guerrandum inde inimicos suos.

 Et cum idem Rex habuerit castra praedicta in manu sua, sicut predictum est, tunc faciet idem Galfridus eidem Regi homagium suum de jure suo..

Deliberavit Rex Emericum de Lezyniaco fratrem ipsius Galfridi, et cum eo captum ; ita  quidem quod tota terra sua, quam tenende Emerico de Toarcio, ad opus Regis incurratur ; de voluntate assensu ipsius Emerici de Toarcio, qui hoc manucepit et concessit, si contingat ipsum Emericum de Lezyniaco a fidelitate et servitio Regis aliquando recedere, et inde Cartam suam Domino régi fieri faciet….. etc. »

L'érudit archiviste Paul Marchegay, dans ses Recherches historiques sur la Vendée, a parlé d'un document analogue à celui de Rymer, mais il n'en a donné qu'une traduction incomplète.

 Il dit à ce sujet : Vouvent et Mervent étaient jadis deux noms à peu près inséparables; aujourd'hui ils appartiennent à deux cantons différents Vouvent à la Châtaigneraie, Mervent à Saint-Hilaire-des-Loges.

 

Au commencement du XIIIe siècle, ces deux formidables citadelles avaient pour seigneur un cadet de la maison de  Lusignan, Geoffroy.

Sa fille ainée, Valence «  (erreur, c’était la fille de son second fils Guillaume, P. Marchegay l'a reconnu plus tard » les apporta en 1248 dans la famille de Parthenay.-l'Archevêque, par laquelle elles ont été possédées pendant près de 200 ans.

Geoffroy de Lusignan, a l'exempte de la plupart des autres Barons, combattit alternativement sous les drapeaux du roi d'Angleterre et sous ceux du roi de France.

 

Début mai 1230, le roi d'Angleterre, Henri III Plantagenêt débarque à Saint-Malo

Dès que cette nouvelle fut connue, une profonde agitation se produisit en Poitou.

Les seigneurs se divisèrent : le comte de la Marche resta neutre ; au contraire, le vicomte de Thouars, Savari de Mauléon et beaucoup d'autres coururent au-devant du roi d'Angleterre

Début juillet, Henri III passe la Loire et traverse le Bas-Poitou, le Marais poitevin. Quant à Geoffroy la Grand’dentvicomte de Châtellerault, il prit d'abord parti pour le roi de France, mais il fut fait prisonnier, dans des conditions restées inconnues, par le comte de Bretagne, Pierre Mauclerc, qui le livra à Henri III.

Il arriva en l’Aunis  puis en Saintonge. Le 18 juillet il était à Pons (Lettres Lettres des Rois et Reines, par Champollien-Figeac, I, 36).

Mais l'expédition tourna mal.

 

Le 15 août, il convient d'une trêve de 15 jours avec Hugues de Lusignan, Comte de la Marche, qui avait été force de se soumettre à Louis IX.

Revenu à Nantes avant le 23 septembre, le roi d'Angleterre, malade, dut abandonner son armée.  Henri III ne voulut pas retourner en Angleterre sans laisser des secours, des promesses et des espérances à ses partisans.

 

Il accorda au Duc de Bretagne 400 chevaliers et 100 sergents à cheval (Rymer, I, 198).

 

 

Fait prisonnier par le monarque anglais, il n'obtint sa délivrance et celle de ses chevaliers que par la remise de ses châteaux et en donnant de bonnes garanties de sa fidélité pour l'avenir mais les victoires de Saint-Louis ne tardèrent pas à rendre inutiles les mesures et les précautions consignées dans la charte que nous traduisons ci-dessous et qui figure à Londres parmi les rôles des lettres-patentes de Henri III :

Henri, roi d'Angleterre, à tous ses fidèles sujets.

 « Sachez que nous délivrons Geoffroy de Lusignan de  notre prison sur sa promesse de nous livrer ses châteaux de Vouvent et Mervent; puis cette promesse accomplie, de nous rendre hommage et de donner des garanties suffisantes du fidèle service qu'il doit nous rendre.

Nous délivrons aussi les Chevaliers dudit Geoffroi, à la charge par eux de nous donner les mêmes garanties de leur fidèle service et nous n'exigerons d'eux tous que celles qu'ils pourront et devront raisonnablement fournir.

« Fait en présence du Roi, le 6 juin, XVe année de son règne. Cette année correspond à 1230.

 

Le recueil Royal letters of Henri III (Chronicles of Great Britain during the middle ages, London, 1862, T. p. 378) donne une lettre du 27 Juin 1230, adressée par G. de Wulward à l'Evêque de Chichester, chancelier, dans laquelle il l'informe de ce qu'a fait récemment le Roi, et parle de la libération de Geoffroy de Lusignan (6 Juin 1230) et de tous ceux qui avaient été faits prisonniers avec lui par le Comte de Bretagne (2) mais il ne cite pas Aimeri (Emericus de Lezyniaco) comme le fait Rymer.

Il écrit seulement : Tunc etiam commisit Galfridus de Leziniaco domini regi castra sua de Vevent et Mairevent in Pictavia, tenenda (quam) diu guerra duraverit….. etiam regem franciae, et sub alia quadam conditione, quam longum esset enarrare.

Et sic liberavit ipsum Galfridus dominus Rex a prisona, et milites suos, et alios cum eo captos per Comitem Britanniae, et omnes homagium domino regi fecerunt ....

 

On est donc amené à conclure de l'examen de ces divers textes que le prisonnier libéré par Henri III en 1230 ne saurait être autre que Geoffroy II la Grand'Dent, et que, de plus, s'il n'y a pas d'erreur dans le texte de Rymer, il aurait eu un frère nommé Aymar ou Aimeri dont les généalogistes n'ont pas parlé.

 

Hervé de Velluire se soumit également à Henri III et Savary de Mauléon, son seigneur suzerain, se porta garant de sa fidélité. Enfin Aimeri, frérede GeoffrotdeLusignan, imitant ses compagnons, fit garantir sa soumission par sonsuzerain, Aimeri de Thouars, seigneur de la Roche-sur-Yon et de Lucon, qui, lui aussi, s'était déclaré partisan de Henri III (a), Jean et Raoul de Beaumont, de la maison de Bressuire, et Hugues de Velluire, lui avaient aussi juré fidélité (4).

(3). Royal letters of Henry III, I, 377, 378.- Rymer, I, 197, 196.

(b). Rymer, I, 196.

 

Le 29 septembre il écrivit de Redon à Geoffroy de Lusignan qu'il allait chercher des secours en Angleterre, mais qu'en attendant il laisse sur le continent le Comte de Chester et le Comte Mareschal qui, avec le Duc de Bretagne, ont mission de continuer la guerre, et auxquels il a enjoint de lui donner le secours dont il aura besoin de même qu'il le supplie de vouloir bien apporter son propre concours à ses lieutenants (Royal Letters of Henri III,  T.1 378).

Quelque temps avant de quitter le continent, il écrivait à Geoffroy qu'il comptait sur sa fidélité, sans se faire sans doute beaucoup d'illusions à cet égard.

En effet, l'expédition ayant échoué lamentablement, Geoffroy de Lusignan s'empressa de faire sa soumission au roi de France, mais Louis IX le punit de la déloyauté de sa conduite, en lui enlevant la vicomté de Châtellerault qu'il garda pendant trois ans, ou même plus longtemps.

Il en confia l'administration à Guillaume de Fougères, et celui-ci étant déjà chargé du Poitou et de la Touraine remit la vicomté entre les mains d'un chevalier nommé Aimeri Landrein.

 

Ceci résulte du témoignage même de ce chevalier qui s'exprime ainsi dans une enquête faite au sujet du péage du pont de Longève :

« ... dixit quod vidit dominum Gaufridum de Lezinen, vicecomitem Castri-Eraudi, et ideo quod redidit Vovant et Merevant regi Anglie... rex Francie qui nunc est, cepit in manu sua tribus annis vel amplius vicecomitatum Castri-Eraudi,... et tunc misit rex dominum Guillelmum de Fogere, qui custodivit vicecomitatum et Pictaviam et Turoniam ex parte regis, et idem Aymericus Lendeins moratus fuit serviens apud Castrum-Eraudi, ad custodiendum vicecomitatum et pertinancias ex parte domini Guillelmi de Fogere, quamdiu rex tenuit in manu sua et post reddidit eidem Gaufrido. »

 Archives Historiques du Poitou, VIII, page 122. La confirmation indirecte de ce fait se trouve dans une autre enquête, ordonnée par St-Louis en 1247.

Lorsque le roi de France eut trouvé la punition suffisante, il rendit la vicomté à Geoffroy de Lusignan.

L’insuccès de Henri III, qui regagna l’Angleterre après avoir signé une trêve de trois années, et la défection de plusieurs seigneurs, ses alliés, forcèrent Savari de Mauléon à enfin déposer définitivement les armes et à se retirer dans ses terres, où il put jouis d’une tranquillité, jusqu’au jour de sa mort survenue à Saint Michel en L'Herme, le 29 juillet 1233. Son corps fut enseveli dans le chœur de la grande église de l’abbaye, près de la mer qu’il avait tant aimée.

 

 

Nous avons dit plus haut que Paul Marchegay avait commis une erreur au sujet de Valence, l'héritière des fiefs de Vouvent et Mervent; mais il l’a rectifiée plus tard dans les documents manuscrits qu'il a laissés à la Bibliothèque Nationale (Nouv. Acq. Françaises, n° 5,040, f° 335 et suiv., Collection Marchegay)

Cette erreur a été reproduite par MM. Beauchet-Filleau dans la 1ére édition de leur Dictionnaire des familles du Poitou et par plusieurs autres.

Valence était la petite-fille et non la fille ainée de Geoffroy Ier de Lusignan, qui n'eût que deux enfants mâles, Geoffroy dit la Grand'Dent, et Guillaume dit de Valence (les deux frères qui persécutèrent les moines de Maillezais).

Valence, appelée par erreur Valérie dans Moreri et La Chenaye des Bois, était fille de Guillaume de Valence et de Marquise de Mauléon, et par conséquent nièce de Geoffroy la Grand'Dent, dont elle hérita, puisque lors de son mariage avec Hugues-l'Archevêque, sire de Parthenay, elle lui apporta Vouvent, Mervent, Mouchamp et Soubise.

Marquise, sa mère était fille du célèbre Savary de Mauléon et de Belle-Assez, de Pareds.

 

 

Un accord pour l'exécution du testament de Geoffroy II fut conclu en Juin 1250 (Coll. Dupuy, Manuscr. Bibl. Nat.) entre-Valence et son mari, d'une part, et les exécuteurs testamentaires G. Fort et Fouque Petit, d'autre part, et la date de cet accord indique bien qu'il s'agit de Geoffroy II la Grand'Dent, décédé en 1248, et non de Geoffroy Ier décédé avant 1224.

Parmi les documents qui prouvent que Valence était bien la nièce et non la fille de Geoffroy II, on peut citer un acte du 6 Juin 1242, imprimé dans les Layettes du Trésor des Chartes, T.II, p 473, où l'on trouve cette indication que Geoffroy n'était que le détenteur, à titre de bail sans doute, et non le possesseur réel de la seigneurie de Soubise, laquelle appartenait à sa nièce (villam de Soubise est neptis meae).

 

 

–Un autre intéressant document, c'est le testament de de Geoffroy la Grand'Dent

 Benjamin Fillon et plusieurs autres auteurs ont répété, après le Père Anselme et Moréri, que Geoffroy était mort sans enfants. C'est une erreur, car nous verrons plus loin, par un extrait de son testament, qu'il eût une seconde femme, nommée Aude, dont il réserva la dot, et trois enfants (Arpin, Aaliz et Borgoigne), à qui il fit des legs; mais ce fut Valence, sa nièce, fille de son frère Guillaume, qui hérita des châteaux de Vouvent et Mervent, qu'elle apporta par mariage à Hugues II l'Archevêque, sire de Parthenay, après la mort de Geoffroy la Grand'Dent en 1248.

Nous avons dit qu'ils furent charges tous deux du règlement de la succession avec les exécuteurs testamentaires (acte de 1250).

Le Père Anselme indique bien Humberge de Limoges comme une seconde femme de Geoffroy Ier ; mais il n'en donne aucune à Geoffroy II.

Moréri dit à tort que Clémence de Châtellerault, décédée en 1239, fut une seconde femme de Geoffroy Ier (3).

 Un document de Mai 1224, conservé aux Archives Nationales (Cartulaire de Saint-Louis), établit péremptoirement que Geoffroy II (la Grand'Dent) eut d'abord pour femme Clémence, Vicomtesse de Châtellerault, qu'il épousa en cette même année 1224.

Ce document que nous croyons devoir reproduire ci-après, parce qu'il redresse de nombreuses erreurs, est un aveu de Geoffroy (II) de Lusignan, seigneur de Vouvant, au roi de France (Louis VIII).

Il reconnaît que le Roi l'a reçu en foi et hommage-lige de la vicomté de Châtellerault, à lui advenue à cause de sa femme Clémence, fille de Hugues, jadis vicomte de Châtellerault.

Il lui fait aussi hommage des autres terres que son père (Geoffroy Ier) tenait du Roi Philippe (Auguste).

Il déclare que, lorsque le Roi est en Poitou, lui, Vicomte de Châtellerault, est obligé de consigner entre ses mains le château de Vouvent pour y mettre la garnison du Roi, et qu'il lui doit être rendu quand le Roi sort de la province ; ce qu'il accorde, du consentement du Comte de la Marche, seigneur dominant dudit Vouvent.

De plus, il a quitté (donné) au roi tout ce que sa femme avait droit de prétendre dans le comté d'Alençon, et il en fera passer acte par sa femme :

« Ego, Gaufridus de Lizegnam (4) notum facio universis tam presentibus quam futuris quod karissimus dominus meus Ludovicus, Rex Francie illustris, salvo rachato suo, recepiet me in hominem de vicecomitatu Castri Eraudi qui provenit michi ex parte Clementie uxoris mee (5), filie Hugonis quondam vicecomitis Castri Eraudi, quando meam ad dominum regem adducam uxorem predictam.

Quam si contigerit sine herede decedere, vicecomitatus ille redibit ad heredes proximioes, salvo rachato domini Régis.

Et sciendam quod nec ego nec alius poterit facere novam fortericiam apud Castrum Eraudi nisi de voluntate domini Regis.

Et de hoc vicecomitatu teneor, ego et heredes mei de uxore mea predicta, facere domino Regi et heredibus suis hommagium ligium contra omnes homines.

Et feci eidem domino Regi hominagium de alia terra quam pater meus (6) tenuit de bone memorie rege Philippo (7) genitore suo, quamdiu fuit in ejus servitio, et similiter tenentur heredes mei facere hominagium de eadem terrâ ,domino Regi et heredibus suis.

Quotiens autem et quando dominus Rex erit in partibus Pictavie, teneor tradere castrum meum de Vovent regi vel mandato suo, ad ponendum in eo garnisionem suam quamdiu erit in partibus Pictavie, et, in recessu suo rehabebo castrum meum de Vovent.

 Et sciendum quod convencionem quam feci de castro de Vovent, sicut dictum est, feci de  voluntate et precepto domini mei comitis Marchie de quo teneo castrum Voventi.

Quitavi etiam domino Regi et heredibus suis in perpetuum quicquid juris clamare et habere possum, ex parte dicte uxoris mee in toto eo quod tenet dominus Rex de toto comitatu Alenconis, et hanc quitacionem fieri faciam a dicta uxore mea.

 In cujus rei memoriam et testimonium presentem paginam sigilli mei appositione confirmo.

Actum anno Domini millesimo ducentesimo vicesimo quarto, mense « Mayo ». (Mai 1224), CARTULAIRE DE SAINT-LOUIS. Archives Nationales,J.J,  31, f°74  au verso) (8).

Cet aveu fut le résultat d'un accord préalable conclu à Bourges entre Louis VIII et Geoffroy de Lusignan.

Le Roi posa les conditions de l'accord dont l'aveu de Geoffroy n'est que la copie presque littérale. L'acte vraiment original est donc la charte de Louis VIII qui se trouve dans Martene (Veter. script, ampl. Collectio, T. I, p. 1186). Il n'en a été fait mention par aucun des historiens qui ont parlé de Geoffroy de Lusignan (dit la Grand'Dent), sire de Vouvent et Mervent, Vicomte de Châtellerault en 1224.

Le testament intégral de Geoffroy la Grand’ Dent ne nous est pas parvenu. Nous n'en avons qu'un extrait et une analyse donnes par Jean Besly, l'historien poitevin, conserves dans les manuscrits de la Bibliothèque Nationale.

Geoffroy y désigne certaines terres comme devant fournir pendant un nombre d'années déterminé, de quoi faire des aumônes et payer ses dettes, une fois qu'on aura payé la dot de sa femme et les legs à ses enfants.

Voici, du reste, l'extrait de Besly, avec la traduction en regard :

janvier 1247.

Item volo et praecipio quod de terra mea de Subizia, cum omnibus fructibus et pertinentiis, usque ad duos annos continuos et completos, de consensu et voluntate Hugonis Archiepiscopi domini Partiniaci, qui de hoc tenendo spontaneus fidem dedit, et de Mairevento et Volvento et Muncantorio cum omnibus pertinentiis, redditibus, proventibus et aliis rebus quas ibi habere debeo, usque ad quatuor annos fiant elemosina meaa et emendae et debita mea persolventur ; salva tamen dote Audae, uxoris meae, quae est C. marcarum annui redditus sicut in carta sua, sibi data et tradita, continetur.

Item, je veux et ordonne que de ma terre de Soubise. avec tous ses revenus et dépendances, pendant deux années continues et complètes, du consentement et de la volonté de Hugues L'Archevêque, seigneur de Parthenay, qui a promis sous la foi du serment et de sa libre volonté de donner son consentement et aussi de mes terres de Mervent, Vouvant et Montcontour, avec toutes leurs appartenances et revenus et des autres choses que je dois y avoir, pendant quatre ans, soient faites mes aumônes et amendes, et que mes dettes soient payées réserve faite de la dot de Aude, ma femme, qui est de cent marcs  (d'argent), de revenu annuel, comme il est contenu dans la charte à elle donnée et livrée.

Item lego C. libras Arpino, filio méo ; et similiter C. libras aaliz, filiae maee ; et similiter Borgoigne C. libr. In pecunia numerata.

Eligit sepultutam in ecclesia B. Mariae de Volvento, coram altare Capellaniae et instituit ibi unam capellaniam cum quodam Presbitero.

Item, je lègue cent livres (9) à Arpin, mon fils, et aussi cent livres à Aaliz, ma fille et aussi cent livres à ma fille Borgoigne, en argent comptant (10).

 

 Il a fixé le lieu de sa sépulture dans l’église Notre-dame de Vouvant devant l’autel de la Chapellenie ; et il y a institué une chapellenie desservie par un prêtre.

Item, il est fait mention de chapelle à Chevefaye, Faymoreau, Puy de Serre, Saint Michel le Cloucq, Pissot, Antigné, Saint Maurice des Noues, la Châtaigneraie, Saint Pierre du Chemin, Monde-Noble.

 

Les deux derniers paragraphes sont une analyse de Jen Besly qui a dû voir le testament.

(Bibl. Nat. Manuscr. Nouv acq. Françaises, n° 5,040, folio 337, collection Marchegay (Poitou). Et Manuscr. Dupuy, T.499, f° 54.

 

 

En résumé,

Geoffroy la Grand’Dent,  né vers 1198 et décédé en 1248, était fils d'Eustache Chabot (surnommée Mélusine), et de Geoffroy Ier de Lusignan (2° fils de Hugues VIII) (11).

Il n'est pas allé aux Croisades comme son père, qui s'y était particulièrement distingué mais il a bénéficié de la célébrité de celui-ci, et tous deux ont été confondus dans l'histoire et dans les romans qui racontent leurs prouesses, ainsi que dans les images qui représentent Geoffroy de Lusignan avec une grande dent, un casque à plumes et un brillant costume de guerre.

Geoffroy fils a sans doute pris part, en Poitou, aux luttes qu'eut à soutenir son cousin Hugues X de Lusignan, comte de la Marche (Vouvent était un fief de ce comté), et il fut même fait prisonnier d'Henri III d'Angleterre mais il est surtout connu par les violences qu'il exerça contre l'abbaye de Maillezais, et que son père avait commencées avant lui.

 Il les redoubla au point d'en expulser les religieux, et même d'incendier l'abbaye.

D'un caractère sauvage et emporté, il n'aimait pas les moines et exigeait leur soumission entière, en vertu d'un droit d'avouerie (protectorat) qu'il prétendait tenir de sa mère, Eustache Chabot.

Les Chabot, précédents seigneurs de Vouvent, avaient toujours eu des contestations avec le monastère à ce sujet, et le roi de France (Louis VII) avait dû, par un arrêt du 2 février 1151,  déclarer Maillezais complètement libre de toute juridiction et de tout protectorat.

 Geoffroy se réconcilia plus tard avec l'abbaye, non sans avoir été d'abord excommunié, puis absous par le Pape à Spolète, le 15 juillet 1232.

Quant à la grande dent, elle a probablement été exagérée, sinon inventée, par les romanciers et les peintres.

On a cependant dit que cette singularité, plus ou moins prononcée, avait été remarquée chez plusieurs descendants de la famille des Lusignan, et cela permettrait de penser que l'un des Geoffroy était en effet porteur d'une de ces dents extraordinaires.

 On en a du reste gratifié Geoffroy Ier dans plusieurs écrits relatifs aux Croisades (12) en le confondant avec son fils qui est plus particulièrement appelé la Grand Dent par les historiens du Poitou et les généalogistes Moréri, le père Anselme et autres.

Quoi qu'il en soit, Jehan d'Arras, dans son roman de Mélusine (1387), a choisi un Geoffroy de Lusignan comme type de cette anomalie, dont il avait pu entendre parler (s'il ne l'a pas inventée), et il l'a accentuée pour rendre son héros plus remarquable dans la guerre et vis-à-vis des moines de Maillezais.

Il a, en même temps, mêlé l'histoire du père à celle du fils d'autant plus facilement qu'ils avaient tous les deux molesté les mêmes religieux.

Rabelais vint ensuite rappeler la Grand Dent en visitant l'abbaye, et plus tard Claude Vignon et d'autres artistes, inspirés par ces récits, l'ont représenté avec cette espèce de défense de sanglier) qui lui sailloit de la bouche plus d’ung pouce, dit le roman.

L’un deux y a même ajouté en légende ce vers de Virgile, applicable à Geoffroy Ier, célèbre, en effet, par ses succés militaires :

Insignis fama et felicibus armis (Eneide, liv. VII, v745.)

 

Les anciens sires de Lusignan, Geoffroy la Grand'Dent et les comtes de La Marche : recherches historiques sur le moyen âge en Poitou / par Charles Farcinet,...

 

 

 

 

 

 ==> Sur la Terre de nos ancêtres du Poitou - Aquitania (LES GRANDES DATES DE L'HISTOIRE DU POITOU )

 

 

 


 

(1)   Vouvent, aujourd'hui village dans une vallée très pittoresque, possède une magnifique église romane (monument historique) du commencement du XIe siècle, en partie détruite.

 Sa porte principale, divisée en deux baies est une merveille de sculpture. Elle est divisée par des faisceaux de colonnes en deux baies secondaires en plein cintre, encadrées de la un grand arc orné de feuillages et d'animaux fantastiques. Au sommet de la façade, des sculptures du XVe siècle représentent la Cène et l'Ascension. On remarque également à Vouvant un beau donjon cylindrique du XIIIe siècle, dit Tour de Mélusine, haut de 30 mètres et entouré des ruines d'un remarquable château du moyen âge qui était défendu par une double enceinte dont les traces sont encore visibles.

La ville proprement dite était, également murée et entourée d'une douzaine de tours.

Mervent, On y remarque sur un rocher abrupt dominant la Mére, les ruines du château qu'assiégèrent Jean sans-Terre et Saint-Louis.

Les découvertes archéologiques faites dans la forêt indiquent la haute antiquité de Mervent. Cette forêt, la plus belle du Poitou, dépendait autrefois des baronnies de Vouvent et de Mènent, annexes de la grande baronnie de Parthenay et de la Gâtine du Poitou. Elle passa successivement entre les mains des Chabot, des Lusignan, des Parthenay-l'Archevêque, des Richemond et des d'Orléans-Longueville.

(2)   Pierre de Dreux, surnommé Mauclerc, à cause de sa turbulence et de sa mauvaise foi.

Il prit part à diverses révoltes et ligues contre la régente Blanche de castille et Saint-Louis.

Par son mariage avec Alix, fille de Guy de Thouars et héritière de la Bretagne, il en devint Comte, puis Duc (1213-1237).

On sait qu'Henri III d'Angleterre fit une nouvelle tentative en 1230 pour ressaisir le Poitou.

Il débarqua le 5 mai à Saint Malo (Royal Lellers of Henri III, I, 363), a la tête d'une armée.

Le 6, il est rejoint par son allié le duc de Bretagne, Pierre 1er Mauclerc.

Deux jours plus tard, il se rend à Dinan pour rencontrer Isabelle d’Angoulême passa à Nantes 16 mai (Rymer, I, 156) où il resta quelque temps.

Pendant ce temps, Louis IX travers la Loire à Angers et s’empare de la forteresse de Clisson le 30 mai pour lui couper la route. ==> Saint Louis, Blanche de Castille et toute la cour de France furent reçus au château de Clisson, en mai 1230

(3)   Cette Clémence fut la première femme de Geoffroy II, car, outre le document latin ci-après, Geoffroy confirma par un acte de la même année 1239. le «  don que feue noble dame Clémence, Vicomtesse de Châtellerault, sa femme, avait fait l'abbaye de Saint-Denis de tout ce qu'elle et ses ancêtres avaient possédé dans le prieuré de Vaux ».

 

Et Geoffroy avait, en effet, pris, du chef de sa femme, le titre de Vicomte de Châtellerault, dans un autre acte de 1232, attesté  plus haut, par lequel, avant de partir pour Rome, il fait réparation avaient religieux de l'Absie pour les dommages et les injures que lettres et lui avaient fait éprouver  à l'abbaye : «  A tous ceulx qui ces présentes lettres verront, Geoffroy de Lusignan, Vicomte de Châtellerault, seigneur de Volvent et Mayrevant, salut, etc. » (Dom Fonteneau, I,  309).

Thibeaudeau, hist. Du Poitou, II, 483.Extraits de Gaigniéres (Bib. Nat. Manuscr, fonds Français)

D’après Lalanne (Hist. De Châtellerauld, 1859) Clémence aurait épouse, en 1244, un autre Geoffroy de Lusignan, sire de Jarnac (fils de Hugues X de la Marche) c'est une erreur qui a été reproduite par M. A. de la Porte, dans ses Gens de qualité en Basse-Marche (2e liv. p. 22), de même que, p. 33 il fait de Valence une fille de Geoffroy II : c'était sa nièce.

 (4)   Geoffroy II, de Lusignan, dit la Grand'Dent, seigneur de Vouvent.

(5)    Glémence de Châtellerault, femme seigneur Geoffroy II.

(6) Geoffroy 1er de Lusignan, précédent seigneur de Vouvent.

(7) Philippe-Auguste, que Geoffroy Ier suivit à la 3e Croisade.

(8)   Ce document est imprimé dans les Layelles dit Trésor des Chartes, T.II, p 31. mais c'est par erreur qu'une note indique Geoffroy de Lusignan seigneur de Vouvent (signataire de cette charte et mort en 1248), comme étant un autre Geoffroy de Lusignan, sire de Jarnac, fils de Hugues X de la Marche et d'Isabelle, qui se marièrent en 1220.

 C'est impossible, car ce sire de Jarnac était à peine né en 1224, lorsque Geoffroy la Grand'Deut signa l'acte ou aveu ci-dessus. C'est ainsi que, faute d'attention, les erreurs se propagent et se perpétuent !

(9) Au temps de Saint-Louis, d'après M.deWailIy, la livre tournois valait (valeur intrinsèque) 20 fr. 20cts. Plus tard, elle baissa beaucoup. A la même époque, le marc valait environ 52 fr. en effet, on taillait 58 gros tournois dans un marc, et le gros tournois avait une valeur intrinsèque de20 fr. 90.

(10) Paul Marchegay a écrit dans ses notes manuscrites que ces enfants étaient probablement des bâtards, parce qu'ils n'héritèrent pas de Vouvant et Mervent; mais Geoffroy dit bien uxoris meae, et ces mots ne s'appliquent qu'à une femme légitime.

(11) On peut établir cette généalogie comme suit Geoffroy 1er, second fils de Hugues VIII et de Bourgogne de Rancon, né vers 1145, décédé vers 1220, devint veuf, vers 1202, d'Eustache Chabot, et épousa vers la même époque Humberge de Limoges, qui lui donna son second fils Guillaume, dit de Valence.

Geoffroy II (la Grand'Dent), né de son premier marine vers 1198 et mort en 1248, avait épousé Clémence de Châtellerault après la mort de Geoffroy 1er. il n'en eut pas d'enfants ; mais d'après son testament, une seconde femme, nommée Aude, lui donna enfants, à qui il fit des legs, mais qui n'héritèrent pas de ses fiefs.

Guillaume de Valence, né vers 1203, se maria vers 1225 à Marquise de Mauléon et en ent un fils, mort en bas âge, et une fille, nommée Valence, qui épousa, en 1248, Hugues-L'Archevêque, sire de Parthenay, et fut l'héritière de son onde Geoffroy la Grand'Dent.

On ne peut dresser aucune généalogie offrant plus de certitude; elle est conforme aux anciens documents, et toute autre se heurte à des textes contraires.

(12)M. le Conte de Mas-Latrie, membre de l’institut, a écrit dans son Histoire de l’Ile de Chypre (t. i, p. 8) : « Geoffroy de Lusignan, célèbre depuis sous le nom de Geoffroye à la Grand’Dent, vassal du roi d’Angleterre, à cause de ses seigneuries du Poitou, s’était joint à son frère Guy (1191) au siège de Saint Jean d’Acre. »

Le même auteur (Trésor de chronologie, p, 1631)  indique encore Geoffroy Ier, comte de Jaffa, comme le seigneur à la Grand Dent.

 

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