Aujourd'hui que la Vendée est sillonnée de superbes routes, cette curieuse et historique contrée est devenue plus accessible à l'étude, et les amis des arts du moyen âge pourront désormais admirer à l'aise les trésors d'architecture enfouis dans le sein de son pittoresque bocage. Un d'eux, peu connu encore des archéologues et cependant digne d'attirer plus particulièrement l'attention, est sans contredit l'église Saint- Hilaire de Foussay.
Nous disons l'église, et pourtant ce n'est guère que du portail que nous entendons nous occuper, car c'est le seul débris roman qui soit resté de l'ancien édifice. Il se recommande tout à la fois par son âge respectable, l'ensemble harmonieux de sa décoration et le cachet particulier empreint sur chacun de ses détails.
La nef actuelle semble appartenir au xv' siècle, et n'offre à l'étude qu'un assez médiocre intérêt.
Entre ce portail du beau temps de l'école romane et cette nef qui déjà touche à la renaissance, il y a sans doute tout un abîme de catastrophes, d'incendies, de fureurs, de dilapidations, qui ne forment que trop souvent le fond de chaque histoire locale. Mais il n'entre pas dans le plan de cette notice de pénétrer au sein de ces tristes annales; nous essayerons seulement de découvrir le secret de la présence de cette œuvre si remarquable dans un bourg à peu près ignoré de la Vendée. Ce secret, nous le trouverons dans le nom même de la riche et puissante communauté religieuse dont relevait l'église de St-Hilaire de Foussay.
Le recueil de dom Fonteneau nous apprend en effet que Foussay (Fusciacum) était un prieuré dépendant de l'abbaye de Bourgueil, communauté de l'ordre de Saint Benoît, fondée vers 962 environ sur les bords de la Loire.
Ce fut Emmeline (Emma ) de Blois, femme de Guillaume IV dit Fier-à-Bras, duc d'Aquitaine et comte de Poitou, qui jeta les premiers fondements de cette communauté religieuse et la dota des premiers biens nécessaires à son existence.
Dès le commencement du XIe siècle, Foussay et quelques fiefs des environs dépendaient déjà de Bourgueil.
En effet, à la date de 1063, une charte de Gui Geoffroy, duc d'Aquitaine, remet à l'abbaye de Bourgueil une charge injustement imposée à cette communauté par son frère et prédécesseur Guillaume, laquelle charge consistait dans l'obligation de nourrir chaque année, et aussi longtemps qu'ils le jugeraient à propos, deux hommes et trois chevaux, charge imposée à diverses propriétés, villas ou mansions dépendant de cette abbaye, et notamment à celle de Foussay.
Quant aux richesses et à la puissance de l'abbaye bénédictine de Bourgueil, qui lui permettaient de décorer avec luxe, eu égard à cette époque reculée, l'église d'un simple prieuré établi au milieu de la campagne, il suffira de citer quelques faits pour en donner une idée suffisante.
Dès le Xe siècle, elle possédait l'église et les dépendances de St-Christophe-de-Longesve à St-Michel-le-Cloux et quelques maisons à Fontenay. ( Charte de Guillaume d'Aquitaine, septembre 989.)
Au milieu du XIe siècle, en 1051, Raymond, abbé de Bourgueil, achetait des deniers de la communauté un terrain important, et y fondait l'église et le prieuré de St André de Mirebeau.
En 1068, Goscelin, archevêque de Bordeaux et trésorier de St-Hilaire de Poitiers, fait don à l'abbaye de Bourgueil, avec l'assentiment d'Isembert II, évêque de Poitiers, et de Geoffroy, duc d'Aquitaine et abbé de St Hilaire, du monastère de St-Porchaire de Poitiers.
Au commencement du XIIe siècle, les droits de l'abbaye de Bourgueil sur l'église de Migné sont constatés par un arrêt du concile tenu à Reims en 1119, sur les contestations survenues au sujet de cette église entre Bourgueil et Montierneuf de Poitiers.
La puissance et les richesses de cette abbaye ne cessèrent de s'accroître en avançant dans les siècles. Il est dit dans un aveu rendu en 1534 par François de Blanquefort, baron de Mirebeau, qu'il avait doté Bourgueil de la seigneurie de Vouzailles, avec les droits de haute justice. Enfin, au XVIIIe siècle, nous retrouvons cette communauté encore pourvue d'un revenu évalué à 14,000 livres environ.
Toutes ces richesses territoriales, tous ces revenus n'étaient point établis sur des titres équivoques et qu'on pût mettre en suspicion, mais sur des chirographes authentiques et sur de bonnes chartes scellées et attestées par les plus grands personnages du temps et les familles entières des donataires.
De terribles anathèmes et des amendes considérables menaçaient tous ceux qui auraient été tentés d'en disputer à l'abbaye de Bourgueil la légitime possession.,
Donc la situation prospère de cette abbaye pouvait lui permettre d'élever à l'entrée de l'une de ses églises le curieux portail roman que nous allons décrire, et de le faire en partie décorer par un religieux de l'abbaye de St-Jean-d'Angély, qui dépendait de l'abbaye de Cluny.
Le travail de ce religieux nous est attesté par une inscription contemporaine du bas-relief, gravée au bas de l'un des tympans.
(Théodelin de l'abbaye de Maillezais - Geoffroy II de Lusignan dit Geoffroy la Grand Dent, seigneur de Vouvant et Mervent.)
Il n'est pas inutile de faire remarquer que cet échantillon du style roman le plus pur est à peu près isolé sur la limite du bocage et de la plaine, et n'offre que peu d'analogie avec les constructions religieuses qui s'élèvent dans un rayon de quelques lieues autour de lui, tandis qu'il rencontre plus d'analogie avec les édifices voisins de St-Jean-d'Angély, la célèbre église d'Aunai entre autres.
Vouvant et Nieul sur l'Autize appartiennent cependant à peu près au même siècle que lui, au moins par leurs façades; mais Nieuil, d'une part, est plutôt imposant dans son ensemble et ses proportions qu'il n'est orné dans ses détails, et Vouvant, d'autre part, offre trop fréquemment dans sa décoration un mélange du XIIe et du XVe siècle, pour qu'on puisse le mettre exactement en parallèle avec Foussay.
Maillezais avec ses arcades du XIVe siècle, et Fontenay avec sa flèche pyramidale, ses clochetons tout fleuronnés et ses pignons aigus, véritables types de l'architecture du XVe siècle, forment avec Foussay un contraste encore plus complet.
Ce qu'était autrefois la façade de cette dernière église, nous ne saurions le préciser aujourd'hui; le pignon nu et peu gracieux qui surmonte son portail fut sans doute substitué au pignon primitif pour répondre aux constructions plus récentes de la nef; aussi allons-nous nous occuper seulement du portail inférieur et négliger le reste.
L'ensemble du portait de Foussay est empreint d'un remarquable reflet des lois qui présidèrent à l'architecture des arcs de triomphe romains.
Sa triple arcade, que supportent des faisceaux de colonnes montées sur des piédestaux assez élevés, est couronnée sur toute la largeur de l'édifice par une étroite corniche appuyée sur des modillons.
Des archivoltes plates, plus ou moins richement ornées, encadrent les arcades, dont les tympans sont occupés par des bas-reliefs historiés. Le ciseau d'un sculpteur ingénieux, parfois habile, a brodé avec amour chacun des détails de cet ensemble harmonieux. Tels se présentent aussi la plupart des arcs de triomphe que le sol des anciennes Gaules, de la Germanie et de l'Italie nous laisse encore admirer.
Que l'on jette un coup d'œil au hasard sur quelques-uns d'entre eux, sur l'arc de Cavaillon, sur la porte noire de Besançon, ou les arcs de Constantin, de Titus, d'Orange, de Bénévent, etc., et l'on ne pourra s'empêcher de reconnaître un air de famille bien prononcé avec nos portails romans. En pouvait-il être autrement?
Quand le XIe et le XIIe siècles se réveillèrent du long engourdissement dans lequel les populations avaient été plongées pendant les luttes de la barbarie, leurs artistes naissants ne pouvaient chercher de modèles que sur les édifices restés debout au milieu de tant de ruines, et ces édifices n'étaient autres que ces inébranlables constructions romaines dont la masse avait bravé les efforts destructeurs du temps et des hommes.
Leur nombre, on le sait, était encore fort grand au commencement du moyen âge, puisque nos premières églises leur empruntèrent des colonnes, des chapiteaux, des bas-reliefs, et que les murs d'enceinte de certaines villes ne furent pour ainsi dire élevés qu'avec leurs débris entassés confusément.
Toutefois, si l'école romane se modela en grande partie sur l'architecture païenne des Gaules, elle y apporta, en se l'appropriant, quelques modifications assez importantes.
L'architecte romain étageait les arcades de ses arcs de triomphe à des niveaux différents, le cintre du milieu dominant la plupart du temps les cintres latéraux; l'architecte roman préféra les soumettre à un seul et même niveau, et toutes ses lignes s'assujettissant à cette même loi, il en résulta pour ses constructions un caractère remarquable de calme, de noblesse et de solidité, en harmonie avec les destinées à venir d'une religion désormais maîtresse du monde.
L'architecte romain faisait porter ses corniches sur des chapiteaux de colonnes ou de pilastres isolés et équidistants; l'architecte roman, surtout au XIIe siècle, imagina d'accoupler deux colonnes dans un seul faisceau, soit pour leur faire supporter de légères arcatures, soit pour les élancer de la base de l'édifice jusqu'à l'origine de la corniche supérieure.
Notre Dame-de-la-Coudre à Parthenay, St-Jouin de Marne, Airvault, Notre-Dame de Chauvigny et de Poitiers, et St-Hilaire de Foussay et de Melle offrent toutes cette disposition.
L'école romane aurait donc dans cette voie précédé de plus de cinq siècles le créateur de la colonnade du Louvre, dont l'Italie elle-même nous envia le génie.
L'architecte du portail de Foussay imagina, pour obéir à la loi rigoureuse qui lui prescrivait de courber ses arcades au même niveau, une disposition ingénieuse qu'il importe de signaler.
On sait que, sur la plupart des façades romanes, les cintres des fausses arcades ont été modifiés dans leur forme primitive par un surhaussement qui leur a donné l'aspect d'un fer à cheval ou d'une ogive obtuse, afin que leurs claveaux supérieurs arrivassent au niveau des clefs de voûte de la grande arcade centrale.
A Foussay, les arcades latérales n'ont pas été déformées, elles ont conservé leur forme cintrée, mais l'architecte les a soulevées sur un double étage de colonnettes partagé dans le milieu de la hauteur par une longue corniche qui se rattache aux retombées de l'arcade centrale. Cet heureux artifice a donc permis de conserver aux cintres toute leur pureté de forme, et de 'se conformer en même temps à l'harmonie des lignes horizontales.
Sur la façade de Foussay (pareille en cela aux autres églises romanes), il semble que certaines parties ont été plus particulièrement réservées à l'exposition de telle ou telle pensée, mais qui toutes concourent néanmoins au développement de l'histoire du dogme et de la morale du christianisme.
C'est ainsi que les modillons saillants et les métopes plates qui les séparent, et garnissent le dessous de la longue corniche supérieure du portail, sont revêtus des images emblématiques des vertus et des vices constamment opposées l'une à l'autre.
Il semble donc qu'on ait gravé sur le frontispice du temple saint la partie pratique, morale de l'enseignement religieux, celle qui doit nous diriger dans la vie au milieu de nos semblables, et qu'il est important pour nous de ne jamais perdre de vue.
Autour de la grande arcade centrale, celle qui donne seule entrée dans la nef, se déroule le tableau de la redoutable sentence qui sera prononcée au moment de la mort sur chacun de nous, et à la fin des temps sur le genre humain tout entier.
Nous ne pouvons donc pénétrer dans l'église sans penser forcément à cette terrible épreuve que nous devons subir un jour, et sans nous y préparer convenablement par la prière.
Les deux fausses arcades latérales offrent sur leurs tympans quelques-uns des principaux traits de la prédication et de la passion du Christ. Ils accompagnent le jugement dernier, pour nous rappeler que le souverain juge nous a prodigué ses avertissements, ses conseils et jusqu'à sa vie pour nous aider à faire notre salut. Enfin chacun des détails qui accompagnent les scènes principales que nous venons d'indiquer concourt, comme nous le verrons bientôt, à compléter chaque pensée et chaque scène du drame sacré exposé par le sculpteur sous les yeux des fidèles.
Les tympans et, à leur défaut, les archivoltes centrales des arcades, semblent plus spécialement affectés aux personnes divines, aux anges, aux prophètes, aux patriarches, aux apôtres et aux saints, tandis que les cordons extérieurs et les parties qui les avoisinent, telles que les chapiteaux, les modillons, les métopes, etc., ne reçoivent que les sujets accessoires, et contrastant avec la paix et l'harmonie qui régnent sous les voûtes.
D'un côté, les vertus récompensées et la vraie grandeur des élus reposent en paix sous les courbes des archivoltes figurant les zones concentriques des voûtes byzantines, image des cieux; de l'autre, le génie du mal et les passions qui en émanent, représentées sous la figure d'animaux féroces et hideux, rôdent et rugissent à l'entour.
Il semble que le sculpteur ait voulu prouver aux fidèles qu'il n'y avait de salut pour eux que sous l'égide de la religion.
Les emblèmes répandus sur les modillons et les métopes, qui ouvrent la série des décorations du portail de Foussay, offrent les types habituels des vertus et des vices adoptés par l'école romane. Toutefois, en les étudiant, nous aurons l'occasion de signaler quelques particularités et même plus de transparence dans quelques-uns d'entre eux qu'il n'est habituel d'en rencontrer ailleurs. Malheureusement ces bas-reliefs, comme la plupart de ceux qui composent la décoration de Foussay, ont éprouvé quelques mutilations, et nous-aurons à y regretter plus d'une lacune. Ces dégradations, ces effacements nous rendront, on le comprend, très-circonspect dans nos explications de détail, et ne nous permettront tout au plus que de rendre un compte satisfaisant de l'ensemble.
Les vertus qui nous paraissent le plus clairement figurées sur les modillons et les métopes sont les suivantes :
La DOUCEUR ÉVANGELIQUE, l'esprit d'abnégation et de sacrifice, par un agneau portant sa croix. C'est l'image habituelle du Christ.
La foi la plus complète, sans arrière-pensée, par cette figure agenouillée qui rend hommage à Dieu les deux bras élevés vers le ciel.
La FORCE soumise, peut-être même la chasteté, par cet éléphant couvert de son harnais que l'appareilleur, par mégarde sans doute, a placé les pieds en l'air. Ces figures d'éléphants ne sont pas rares sur les monuments de l'époque romane, et nous en avons trouvé de beaux modèles à Saint-Nicolas de Civray, à St-Pierre d'Aunai et ailleurs encore.
Cette figure qui sonne de l'oliphant n'est-elle pas l'emblème des avertissements salutaires que les prophètes, les apôtres et tous les hommes inspirés de Dieu n'ont cessé de prodiguer au monde ? On la rencontre sans cesse sous les corniches et sur les modillons de la même école. Ce centaure décochant des flèches nous semblerait volontiers une image de la VIGILANCE, si nécessaire au chrétien pour repousser les attaques de l'esprit du mal sous toutes les formes qu'il revêt.
A Nieul-sur-Autise, dans un cloître accolé à l'église nous avons, en effet, remarqué un double centaure, c'est-à-dire deux de ces figures adossées sur le même chapiteau, et décochant des flèches, d'un côté sur un oiseau de proie, et de l'autre sur un lion dressé et menaçant. N'est-ce point là un emblème assez clair de la vigilance ? Il ne nous parait pas que le centaure isolé de ses compagnons ordinaires du zodiaque puisse figurer le sagittaire et symboliser à lui seul l'année ou la perpétuité du temps.
Les vices sont plus nombreux, et leurs symboles plus transparents que ceux des vertus, par suite peut-être des mutilations que nous avons déplorées; car ils devraient être en nombre à peu près égal, d'après le système d'antagonisme adopté par l'école romane. Certains emblèmes très-complets nous ont même servi d'explication, de commentaire pour deviner le sens de quelques figures très-obscures sur d'autres monuments.
Sur la façade de St-Nicolas de Civray, par exemple, nous avions en vain cherché la signification des barils sculptés sur les modillons à Foussay, cette signification est devenue fort claire pour nous à la vue d'un homme accroupi et qui boit tout à l'aise à la bonde même d'un tonneau qu'il soulève au-dessus de sa tête. On ne peut guère désirer une image plus claire de l'INTEMPERANCE.
Le rapprochement des divers emblèmes consacrés sur les monuments romans est peut-être le seul moyen d'arriver à les éclairer tous les uns par les autres; c'est là précisément une des parties essentielles de l'étude à laquelle nous nous livrons en ce moment sur l'iconographie de l'Ouest.
Une des figures les plus spirituellement conçues et exécutées par le décorateur de Foussay est sans contredit t celle de la PARESSE. L'artiste, en effet, l'a représentée sous les traits d'un homme accroupi qui s'arrache d'un air piteux et avec toutes sortes de précautions, une épine du pied. Il n'y a pas moyen de s'y méprendre à cet air de tête si dolent, à cette pitié profonde que le pauvre homme prend de son mal, assez léger sans doute, il est facile de voir qu'on a représenté un homme sans énergie, sans courage, qui ne demande qu'un prétexte pour se livrer à la PARESSE, son péché favori.
Tout à côté, et pour obéir à la loi des contrastes, on pourrait voir l'emblème de la SCIENCE et du travail dans cette figure de géométrie, sorte de jeu de compas familier à cette école.
L'IMPUDICITÉ et la MALICE sont plus sûrement caractérisées par ce singe aux formes lubriques.
La COLÈRE, par cet homme qui s'apprête à frapper violemment quelqu'un de son lourd maillet.
L'ENVIE n'est-elle point figurée à son tour par cette laide tête qui nous tire la langue avec une horrible grimace ?
A Vouvant, elle nous a paru encore mieux exprimée par une tête qui en dévore une autre plus petite., à peu près comme la calomnie détruit la vie morale, la réputation du prochain.
L’ORGUEIL et les tristes conséquences de l'aveuglement dont il nous frappe sont figurés sous les traits du superbe Nabuchodonosor encore revêtu de riches habits, et paissant à quatre pattes au milieu des animaux sauvages.
Remarquons à ce propos que certaines têtes fréquemment reproduites sur les façades romanes pourraient bien être l'équivalent de la figure de Nabuchodonosor, elles ont en effet comme lui les cheveux nattés, la barbe peignée avec soin; et à Vouvant, pour mieux rappeler sa chute, on a même ajouté au masque deux oreilles hautes et pointues qui conviennent fort à un homme changé en bête.
D'autres têtes qui accompagnent aussi fort souvent celle-là ont les yeux hagards, la barbe et les cheveux hérissés; leurs dimensions sont généralement assez fortes. On pourrait y voir la tête de Goliath vaincu par David, et suspendue, dépouille opime, à la porte du temple saint, comme une image du triomphe des élus de Dieu sur la puissance et la force purement humaines.
Parmi les figures d'animaux qui décorent les métopes de la corniche supérieure, il en est qui sont trop peu caractérisées pour être soumises à une interprétation quelconque, si ce n'est peut-être un griffon, emblème de la ruse et de l'hypocrisie, et un pourceau, emblème des goûts immondes et dégradants.
Du frontispice du monument nous descendrons à l'arcade centrale, la plus vaste et la seule qui donne entrée dans l'intérieur de la nef c'est à elle que le sculpteur a réservé la scène la plus importante; et, comme le tympan est occupé par la porte même de l'église il a déroulé son tableau du jugement dernier sur l'archivolte centrale, encadrée entre deux bandeaux accessoires. L'un est tout constellé d'étoiles, comme pour indiquer que le drame sacré s'accomplit dans le ciel; l'autre présente un cercle de bêtes féroces tapies et rugissant sous le feuillage, images des démons que les Ecritures nous peignent rôdant sans cesse autour de nous.
Les claveaux de l'archivolte centrale sont occupés par vingt-sept figures d'hommes ou d'animaux, qui toutes concourent à compléter le sens et l'exposition de la grande scène du jugement.
Le juge souverain est assis au sommet de l'arc, comme il doit au grand jour trôner au haut des cieux; il porte cette robe talaire à larges manches si souvent reproduite par la sculpture romane. Sur ses genoux est ouvert le redoutable livre sur lequel sont écrites, en face l'une de l'autre, les bonnes et les mauvaises actions des hommes. Autour de lui sont rangés les quatre évangélistes sous la figure ordinaire de l'ange, de l'aigle, du lion et du bœuf pourvus d'ailes, mais sans nimbes.
Au- delà de ce groupe central, on distingue d'un côté la figure suppliante de l'humanité sollicitant l'indulgence du juge redoutable, et de l'autre l'effigie du vénérable patron de St-Hilaire de Foussay.
Puis viennent à droite et à gauche les figures de quelques apôtres, des prophètes des patriarches, des Pères de l'Eglise, parmi lesquels on ne reconnaît avec quelque certitude que saint Pierre, aux clefs qu'il porte à la main, et Moïse, aux tables de la loi et à la verge dont ses mains sont chargées.
La présence de ces figures autour du Christ, au moment où il va prononcer la sentence solennelle, nous semble destinée à rappeler aux hommes que dans tous les temps Dieu leur a prodigué ses avertissements et ses conseils par l'organe de ses élus, afin de les maintenir dans la bonne voie. Ils ne pourront donc prétexter d'ignorance, quand le grand jour du jugement sera venu.
Pour compléter sa pensée, l'artiste semble avoir rempli les retombées de l'arc par une sorte de commentaire des causes sur lesquelles la sentence suprême sera basée. Les figures qui les décorent reproduisent, mais sous une forme un peu différente, quelques-uns des vices et quelques-unes des vertus déjà signalés sur les métopes et les modillons supérieurs.
Du côté gauche on aperçoit d'abord l'IMPUDICITÉ, la luxure, trop grossièrement caractérisée pour que le moindre doute puisse planer sur son identité. Une figure couverte de son bouclier et qui repousse la luxure du bois de sa lance est sans doute l'image de la continence et de la chasteté.
La DISSIPATION, la légèreté, l'oubli des convenances, sont peut-être cachés sous les traits de cet homme richement vêtu qui se livre à des contorsions ridicules; en vain le prophète placé près de lui sonne-t-il de son oliphant pour le rappeler à de meilleurs sentiments.
L'INCRÉDULITÉ pourrait être figurée par cette femme au corps reployé sur lui-même et dont la tête repose entre ses pieds, image du scepticisme qui renverse toute croyance, tandis que la foi serait caractérisée par ce personnage qui serre avec ardeur une croix sur sa poitrine en élevant au ciel ses regards inspirés.
Du côté droit, les emblèmes nous semblent un peu plus difficiles à interpréter, un musicien jouant du rebec, un saltimbanque exécutant ses tours, un animal femelle allaitant un enfant, une sirène au corps écaillé qui élève au-dessus de sa tête deux poissons, enfin un énorme crapaud tapi contre le mur, telles sont les figures qui forment le pendant de celles de gauche.
– Ce crapaud est-il l'emblème des goûts bas et immondes ? cette sirène, au contraire, l'aspiration de l'âme vers les grandeurs de la religion ? cet allaitement bizarre d'un être humain par une bête, une allusion à sa source matérielle ou nous puisons nos besoins et nos vices? ce saltimbanque, l'image du désordre et de l'inconduite? et enfin ce musicien, l'hommage que les justes rendent à Dieu?
Nous ne saurions rien affirmer à cet égard. Toutefois il est clair que sous ces emblèmes, sujets à des interprétations variées, il est permis de retrouver le complément de la scène développée au sommet de l'archivolte.
Un des épisodes principaux de cette scène ne doit pas être passé sous silence, car il caractérise à notre avis l'intelligence et la profondeur de pensée que les artistes romans apportaient dans l'exécution de leurs tableaux. Au moment où le Christ, feuilletant de la main gauche le livre ouvert sur ses genoux, lève déjà la droite pour condamner ou pour absoudre les pécheurs, un ange placé près de lui semble intercéder en leur faveur; sa bouche est rapprochée de l'oreille attentive du Christ, et il présente à son divin maître un calice chargé de l'hostie, emblème transparent du sacrifice qu'il accomplit sur le Golgotha pour le salut des hommes. La sentence du Christ si plein d'amour pour l'humanité ne saurait plus être que le jugement porté par un père sur les fautes de ses enfants, c'est-à-dire nécessairement empreint d'indulgence.
Ce n'est pas le seul trait qu'on pourrait citer du profond sentiment qui domine souvent les œuvres de l'école romane.
Tout le monde connaît le fameux chapiteau de St-Pierre de Chauvigny, sur lequel le diable, pesant les âmes avec St Michel, emploie tous ses efforts pour attirer à lui le plus gros lot. Sur un des chapiteaux voisins, l'artiste, voulant exprimer tout à la fois la hauteur et l'amertume de la divine mission qui va être confiée à la Vierge Marie, dans la scène de la salutation angélique, fait présenter à la mère de Dieu une petite croix par l'ange Gabriel. Ce simple trait de ciseau ne vaut-il pas à lui seul tout un long commentaire?
Les entablements, les dés des chapiteaux, les entrecolonnements qui supportent les archivoltes de l'arcade centrale, sont embellis à l'ordinaire de rinceaux de feuillages, de zigzags et de rangs de perles ou d'oves. Sur les montants qui encadrent la porte, des anges dans l'attitude de la prière sont étages du haut en bas; enfin on distingue sur les deux chapiteaux qui les surmontent deux figures couvertes d'un bouclier et armées d'une lance, qui font bonne garde de chaque côté de l'entrée de l'église. Les Byzantins peignaient également à l'intérieur des portes de leurs monastères et de leurs églises des effigies de St Michel, de St Georges et de Gabriel, pour les placer sous la protection de ces gardiens célestes.
Les fausses arcades latérales du portail de Foussay sont revêtues d'une ornementation singulièrement riche, et dont le style général est de beaucoup supérieur par l'exécution à celui de l'arcade centrale.
L'arcade de droite, celle qui répond au côté de l'épître, est principalement consacrée aux scènes de la prédication qui précédèrent la passion du Christ
Son tympan est divisé en deux parties dans sa hauteur par une triple arcature surmontée de pignons brisés et de toits imbriqués rappelant l'architecture de Notre-Dame de Poitiers.
Deux personnages occupent la scène supérieure. L'un deux, reconnaissable au large nimbe crucifère placé derrière la tête (qui a disparu), est le Christ. Devant lui s'incline respectueusement une femme également décapitée le Christ est couvert d'amples vêtements largement drapés la femme porte une robe à manches traînantes.
On peut, à notre avis, retrouver dans cette scène l'interprétation de ce verset du chapitre X de St Luc a Jésus, étant en chemin, entra dans un bourg, et une femme nommée Marthe le reçut dans sa maison, a si on veut regarder ces figures comme la préface, le frontispice de la scène du repas qui est sculptée au-dessous. Toutefois la présence du palmier fleuri et d'un autre arbre, peut-être un figuier, qui s'élèvent entre les deux personnages, pourrait indiquer la rencontre de Jésus et de la Samaritaine auprès de la fontaine de Jacob, près de Sichar, ville de Samarie.
Les gestes, les attitudes de l'une et l'autre figure se prêtent également à l'une et à l'autre hypothèse. Quatre personnages composent la scène inférieure. Trois d'entre eux, le Christ au milieu, sont assis devant une longue table chargée de mets; le quatrième (c'est une femme) est étendu tout de son long aux pieds de Jésus.
Est-ce le repas de Jésus dans la maison de Lazare, chez Marthe et Marie, ou celui qu'il prit chez le Samaritain ? Le lecteur pourra choisir, car, au fond, l'esprit de la scène est toujours à peu près le même.
Dans l'un des cas, la femme prosternée, versant des parfums sur les pieds du Christ et les essuyant, serait Marie, sœur de Marthe, qui écoutait attentivement les paroles de son divin maître. Dans l'autre cas, elle serait cette femme de mauvaise vie qui, ayant appris l'entrée de Jésus dans la maison du Pharisien, était venue lui rendre hommage et arroser ses pieds de parfums et de ses larmes, et à laquelle Jésus avait beaucoup remis et pardonné parce qu'elle avait beaucoup aimé.
Quel que soit le personnage assis à la gauche du Christ et qui discute avec lui, il est impossible de se méprendre à l'objet de leur controverse, à la vue des gestes expressifs que le sculpteur a rendus avec un rare bonheur.
Un des disciples assis à la même table que le MAITRE a les pieds nus, tandis que l'autre est chausse de brodequins cette circonstance semblerait militer en faveur de l'opinion qui expliquerait cette scène par celle du repas chez le Pharisien.
Les figures accessoires qui encadrent les curieuses scènes de ce tympan représentent l'incrédulité, la malice, l'hypocrisie, que la pureté et la profondeur des doctrines du Christ doivent confondre. Ce sont des animaux renversés, contournés et grimaçants, tels que des singes, des caméléons ou des hommes placés dans des postures grotesques ou la tête en bas.
Autour de cette belle composition, le sculpteur s'est plu à prodiguer toute la fécondité de son ciseau; il l'a richement encadrée dans un cercle de feuillage que supportent les troncs de deux palmiers et les fûts tordus en spirale de deux colonnes torses, reposant elles-mêmes sur d'élégants rinceaux, comme l'école romane les savait fouiller dans la pierre.
La fausse arcade du côté de l'évangile, moins ornée dans ses détails extérieurs, n'offre à l'œil qu'une seule scène occupant toute la surface de son tympan c'est le crucifiement, au moment ou les disciples viennent détacher de l'instrument du supplice le corps de leur divin maître pour lui rendre les honneurs de la sépulture.
Les bras de la croix, à laquelle le Christ tient encore par la main gauche, sont placés à la hauteur de l'entablement qui reçoit la retombée des archivoltes, et c'est une nouvelle preuve du respect de l'architecte pour l'harmonie des lignes de la décoration du portail de Foussay. Au-dessus sont placés deux bustes mutilés, élevant une draperie des deux mains, comme pour se voiler le visage en signe d'affliction.
Sur l'un des nimbes qui entouraient leurs têtes mutilées, il semble qu'on distingue des rayons divergents; cette circonstance indiquerait l'effigie du soleil, et l'image opposée serait la lune, que le moyen âge a volontiers fait assister l'un et l'autre au supplice de l'Homme-Dieu. Un ange planait peut-être au sommet de la croix, mais ses traces sont trop effacées pour qu'on puisse rien préciser à cet égard.
La partie inférieure et principale de la scène est remplie par cinq figures debout; une seule a conservé sa tête, c'est l'effigie de Joseph d'Arimathie, à qui les sculpteurs romans ont toujours accordé l'honneur de recevoir dans ses bras le corps du Christ. Ce dernier est encore appuyé contre l'arbre de la croix; Nicodème est placé à sa gauche; puis vient St Jean, le disciple bien-aimé, reconnaissable à son nimbe, au livre fermé qu'il porte sur son bras, et à ses pieds nus.
A la droite du Christ et au-delà de Joseph d'Arimathie, est la vierge Marie, dont la tête est ornée d'un large nimbe, et qui, saisissant le bras droit de son divin fils, le seul détaché de la croix, semble sur le point de le porter à ses lèvres. Ce geste ne permet guère de douter de l'identité de cette image avec la mère du Christ, identité sur laquelle, au premier abord, on serait tenté d'hésiter à la vue des pieds nus que l'artiste a donnés à sa figure, contre l'usage iconographique de cette époque. Ces articulations des doigts de pied ont-elles été fouillées postérieurement à l'exécution primitive du bas-relief, et quand les idées des sculpteurs et des peintres s'étaient modifiées à ce sujet? c'est ce que nous ne saurions décider ici.
Rien n'est plus riche, plus élégant et plus sévère en même temps que les draperies jetées sur tous ces personnages, dont le style appartient à ce qu'on pourrait appeler l'école hiératique ancienne.
La Vierge porte une robe à larges manches pendantes, et qui semblent faites d'un tissu de larges mailles le corsage et les manches au-dessus du coude sont, au contraire, étroitement serrés au corps et aux bras, et divisés dans leur hauteur par de larges bandes horizontales qui donnent à ce vêtement quelque ressemblance avec les armures romaines appelées loricae. Un large galon reployé en forme de V orne le col et la poitrine, tandis que trois étages de riches broderies contournent les plis du jupon et complètent la magnificence de ces vêtements.
Les costumes de Joseph d'Arimathie et de Nicodème ont la plus grande analogie avec celui de la Vierge, à la longueur près de leur tunique, qui est moindre. Elle est serrée à la taille par une ceinture pendante. Leurs pieds, chaussés de bottines de forme allongée, annoncent déjà la célèbre mode qui persista pendant près de quatre siècles, malgré les anathèmes des prédicateurs.
La seule tête demeurée à peu près intacte, celle de Joseph d'Arimathie, est pourvue de longs cheveux et d'une barbe régulièrement divisée en deux pointes; elle est couverte d'une sorte de bonnet phrygien à longue queue propre à l'époque romane, et qu'on remarque notamment sur les peintures murales de la crypte de St-Savin.
St Jean est vêtu d'une longue robe, par-dessus laquelle est jeté un riche manteau.
La draperie qui couvre les hanches du Christ et retombe jusque sur ses genoux est décorée d'un galon élégamment brodé qui suit toutes les ondulations minutieuses de ses plis.
Cette régularité parfaite, affectée même, cette richesse dans les ornements, les filets de perles qui décorent les bras de la croix, suffiraient à eux seuls pour assigner une date certaine à tout le bas-relief, si le caractère des figures ne l'avait déjà indiquée, nous voulons dire le beau temps de l'école romane.
Une double archivolte ornée de pointes de diamant et de gracieux enroulements adossés et deux colonnes torses à chapiteaux historiés forment l'encadrement de cette scène.
Les figures sculptées sur les chapiteaux se rattachent, suivant l'nsage du temps, au sujet principal sur l'un d'eux, un personnage, les bras levés semble rendre des actions de grâces au ciel à la vue de deux autres figures qui s'embrassent en signe de réconciliation. La mission du Christ sur la terre n'était- elle pas en effet une mission de paix et de concorde pour les hommes?
Sur l'autre chapiteau, l'archange St Michel, image du Christ, triomphe du démon. La mort du Christ n'a-t-elle pas en effet délivré les âmes captives des limbes, et préparé le salut à venir du genre humain ?
Fait assez rare dans les œuvres de ces temps reculés, pendant lesquels les artistes semblaient avoir fait abnégation de leur individualité pour se confondre dans leurs immenses corporations, le bas-relief du crucifiement est signé, et signé du nom d'un sculpteur né dans le voisinage.
On lit en effet à la base de ce tableau, en caractères de la fin du xii" siècle ou du commencement du XIIe que nous traduisons ici, faute de mieux, en capitales romaines, les mots suivants disposés sur une seule ligne
RAVDVS AVDEBERTVS DSCO IOHE
ANGEHIACO ME FECIT
Ce bas-relief est donc l'œuvre d'un artiste de St-Jean-d'Angély, du nom d'Audebert ou Aldebert (son nom de baptême est tronqué par une mutilation).
Le monastère de St-Jean-d'Angély portait effectivement au moyen âge le nom de ANGELIACUM, seu INGERIACUM, quod ANGELIACUM vulgus appellat, dit Mabillon.
Or, le monastère de St-Jean-d'Angély, de l'ordre des bénédictins, riche fondation de Pepin, roi d'Aquitaine, brûlé par les Normands au Xe siècle, réédifié au commencement du XIe, était placé sous l'autorité d'abbés sortant de l'abbaye de Cluny, ou élus sous son influence, et sait que l'école clunisienne fut la mère du style roman orné du XIIe siècle.
Dès le premier coup d'oeil jeté sur le portail de Foussay, l'observateur le moins exercé ne tarde pas à s'apercevoir que les sculptures de ses diverses parties appartiennent à deux époques et à deux faires entièrement distincts le faire naïf, simple, presque maladroit, tel qu'on pouvait l'attendre de sculpteurs inexpérimentés, plus riches d'intention que d'exécution, elle faire savant et châtié, assujetti à des règles traditionnelles qui prenaient leur source dans l'école byzantine.
Les modillons et leurs métopes, les archivoltes de l'arcade centrale et des arcades latérales, enfin les chapiteaux, appartiennent essentiellement au premier, tandis que le second peut réclamer les bas-reliefs des tympans des deux fausses arcades latérales. Rien, en effet, n'est plus élégant, plus richement orné, plus complètement assujetti à certaines règles de symétrie presque tyrannique, que les figures de la scène du crucifiement et du repas décrites un peu plus haut. Si on observe, en outre, que ces tableaux en haut relief semblent ajustés après coup dans leurs cadres de pierre, on aura l'explication de ce fait en apparence assez bizarre du rapprochement sur la même façade d'œuvres appartenant à des siècles et à des manières différentes.
Ce fait, du reste, nous en avons trouvé souvent la trace dans nos investigations archéologiques les églises de St-Jouin de Marnes, St-Jean de la Villedieu Notre-Dame de Poitiers, et bien d'autres, sont décorées, dans certaines parties de pièces rapportées, incrustées dans les murs postérieurement à leur construction.
La déduction logique de cette observation c'est qu'il existait sans doute certains centres religieux où les artistes exécutaient les figures et les scènes principales des décorations romanes, et que les détails accessoires étaient exécutés sur place par des membres de ces corporations ambulantes appartenant au sol, et qui transportaient d'un lieu à un autre leur industrie plus riche de bonnes intentions que de vrai talent.
La signature de l'auteur du bas-relief du crucifiement nous laisse même soupçonner que Cluny pouvait bien avoir formé quelques adeptes dans l'abbaye de St-Jean d'AngéIy, et cela expliquerait comment à quelques lieues de là à Aunay et à Melle, par exemple, on rencontre des portails d'église qui offrent dans leurs décorations la plus complète analogie avec celle de Foussay.
Nous ne pouvons, en terminant cette notice rapide sur le portail de cette église, nous dispenser de faire remarquer qu'entre les figures décorant l'un et l'autre tympan des fausses arcades il existe encore une différence assez sensible celles qui composent la scène du crucifiement sont plus guindées et drapées avec une symétrie plus minutieuse que les figures du tympan de l'épitre. A celles-ci appartiennent la noblesse des poses, l'élégance et la précision du geste, la largeur des draperies, et, n'était le corps roide et les habits étriqués de la femme prosternée aux pieds du Christ on ne croirait pas ces tableaux sortis du même atelier que celui du crucifiement. Mais, pour expliquer cette apparente anomalie, il est peut-être bon de ne pas oublier que, vers la fin du XIIe siècle, Alexis IIn'ayant pu protéger les familles latines établies en grand nombre à Constantinople contre les fureurs de la populace grecque qui s'empara de leurs biens, celles-ci furent obligées de s'embarquer pour retourner dans leur patrie, emportant avec elles une immense quantité d'objets d'art qu'elles pillèrent par représailles sur toutes les côtes de l'empire Ces modèles, diptyques ou autres, durent nécessairement se répandre dans toute l'Europe, et les centres bénédictins, toujours en relation avec les établissements de l'Italie, y puisèrent sans doute de nouveaux modèles.
En somme, la décoration du portail de Foussay participe dans sa composition de la LEGENDE, ou exposé sommaire de la religion, développé sur les archivoltes et les tympans de ses arcades; de l'ANTAGONISME, également propre au génie de l'Occident, par ses modillons, ses métopes et quelques parties des archivoltes, et enfin tout à la fois de l'école INDIGÈNE et de l'école BYZANTINE par le faire de ses diverses parties. L'ensemble de cette décoration peut être rapporté, à notre avis, à la seconde moitié du XIe siècle, tandis que les tableaux des tympans n'appartiennent guère qu'à la fin du XIIe ou aux premières années du XIIIe siècle, comme l'indiquent le style de leurs figures et la forme des caractères composant l'inscription que nous avons rapportée.
L’architecture intérieure.
Le plan de l’église Saint hilaire (43,50m x 15m) s’articule en deux vaisseaux aux travées inégales. La nef principale correspond vraisemblablement à l’emprise de l’église romane, dans le prolongement du portail. Le chevet est plat comme à la cathédrale Saint Pierre de Poitiers. Les voûtes, détruites au XVIe siècle pendant les guerres de Religion, ont laissé place à un plafond charpenté repris au XIXe siècle. Les arrachements en tête de piliers laissent percevoir le niveau des coûtes initiales. Le vitrail de la nef principale, signé Julien-Léopold Lobin, de Tours, représente Saint Hilaire de Poitiers et Saint Abre, sa fille, ainsi que Saint Radegonde de Poitiers, reine de France. L’autre grand vitrail de l’église est consacré à des scènes de la vie de la Vierge.
Le Mobilier
Derrière le sac de la petite porte est accroché un grand tableau du XIXe siècle, reproduction du célèbre tableau de Véronèse Le Repas chez Simon dont l’original, datant de 1573, se trouve aujourd’hui au château de Versailles.
La peinture murale
Etant donné l’état fragmentaire et très usé, il est difficile de définir la nature exacte du récit illustré. Cependant on peut y voir la représentation d’une scène de chasse. L’illustration, qui permet de mettre en valeur une activité de prestige, allie de manière très codifiée sport, divertissement et discourt moral, c’est pourquoi elle se retrouve dans un grand nombre d’églises. Elle confère un sens chrétien aux valeurs morales représentées dans le combat du Bien et du Mal. Ce type de représentation iconographique de « seigneur chassant » apparait sur de miniatures datant des XIVe et XVe siècles, durant la période du bas Moyen-âge en France.
Notice descriptive de l’église de Saint-Hilaire de Foussay par M. De Longuemar
Plaquette de l’église de Foussay-Payré Du XIe siècle à la restauration du XXIe, 1000 ans d’Histoire.
Le Prieuré de Foussais à Foussais-Payré (moines de Bourgueil - Guillaume Fier-à-Bras)<==.... ....==> Joseph d'Arimathie scène de la Passion la Descente de la croix Foussais-Payré
Les Gaulois habitant le Poitou s'appelaient les Pictons; de là le nom de Poitou, Poitiers. Avant l'occupation romaine, la région est peuplée par les Pictaves ou Pictons qui nous ont laissé des grottes préhistoriques, menhirs, dolmens, etc. que nous retrouvons un peu partout, tant dans la Vienne que dans les Deux-Sèvres....
Le rôle de la femme, trop rarement mis en lumière jusqu'ici, apparaît non négligeable au Xe et XIe siècles. Il est certes difficile à cerner, en raison de la rareté et de la dispersion des documents, mais dans le cadre régional il peut être plus facilement appréhendé.....
En 1232, Geoffroy II de Lusignan, vicomte de Châtellerault, seigneur de Vouvent et de Mervent, dont la légende a fait Geoffroy la Grand'Dent , se disposait à aller à Rome pour régler certains litiges pendants entre l'église de Maillezais et lui.