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PHystorique- Les Portes du Temps
16 juillet 2023

LES FONDATIONS D'ISEMBAUD ABBÉ DE PREUILLY- SUR -GLAISE ET DE L'ÉTOILE EN POITOU

LES FONDATIONS D'ISEMBAUD ABBÉ DE PREUILLY- SUR -GLAISE ET DE L'ÉTOILE EN POITOU

Dans leurs travaux sur le mouvement érémitique et ascétique des XIe et XIIe siècles — à la fois si riche et si complexe — c'est aux grandes réussites que les historiens s'attachent le plus souvent.

A côté des fondateurs de la taille d'un Robert d'Arbrissel ou d'un Géraud de Sales et dans leur sillage, on rencontre cependant des personnalités plus effacées, dont le rayonnement spirituel bien que circonscrit à un secteur régional, a laissé des traces profondes.

 Tel nous apparaît Isembaud, frère de Pierre de l'Etoile fondateur de l'abbaye de Fontgombault, qui après avoir déposé la charge abbatiale de Preuilly-sur-Claise, fonda coup sur coup quatre foyers érémitiques, dont le dernier fut à l'origine de l'abbaye de l'Etoile en Poitou.

Plus simple en apparence que la carrière ascétique des grands fondateurs ses contemporains, celle d'Isembaud n'a pas encore livré tous ses secrets.

— Son identité familiale est un premier problème ; son monastère d'origine en pose un autre. On peut encore s'interroger sur ses fondations érémitiques et tenter d'en dégager les principales caractéristiques ; et enfin se demander quelle place assigner à l'oeuvre d'Isembaud dans le mouvement religieux du Centre et de l'Ouest de la France dans la première moitié du XIIe siècle.

 

L'IDENTITE FAMILIALE

Sur les origines familiales d'Isembaud abbé de Preuilly, et de son frère Pierre premier abbé de Fontgombault, les opinions sont partagées.

 Selon certains auteurs, les deux frères seraient des « gentilhommes bretons » issus de la « maison de l'Estoile » (1) ; pour d'autres, ils eussent appartenu à la famille poitevine des Sénebaud.

 ==> Eon de l'Etoile ermite et prédicateur en forêt de Brécilien Les origines de l’église du Graal de Tréhorenteuc (Saint Eutrope, Sainte Onenne, l’abbé Gillard)

 

FONDATIONS D'ISEMBAUD

De la « maison bretonne de l'Estoile » ?

Si l'on observe que les documents contemporains de Pierre et d'Isembaud n'attachent le qualificatif « de Stella » ou « de Stellis » qu'au seul prénom du fondateur de l'abbaye de Fontgombault (2), on est en droit de penser qu'il s'agit, non du patronyme mais du surnom propre à l'un des deux frères.

 Chercher à rattacher des personnages vivant au XIe ou au XIIe siècle à une famille portant au XVIIe siècle le patronyme de l'Etoile représente un anachronisme : les généalogistes s'accordent en effet à reconnaître que, sauf de très rares exceptions, les noms patronymiques ne sont pas fixés antérieurement au règne de Philippe-Auguste (1180-1223) (3).

 La « noble famille bretonne de l'Etoile » (4), à laquelle plusieurs auteurs des XVIIe et XVIIIe siècles, ont voulu rattacher Pierre de l'Etoile, ainsi qu'Eon de l'Etoile, n'échappe pas à cette constatation : la filiation suivie de cette famille ne remonte pas au-delà du XVe siècle.

Quand au nom de l'Etoile, après avoir reconnu qu'il est celui de nombreuses localités en France, il est intéressant de noter qu'aux XIe et XIIe siècles et encore pendant tout le moyen âge, il a été adopté par plusieurs monastères et qu'il est porté par plusieurs personnages appartenant à des milieux ascétiques de cette époque (5).

En outre, dans le monde érémitique auquel Pierre et Isembaud étaient rattachés, l'anonvmat était de règle.

 Parfois, pour éviter des confusions, on accolait au prénom de certains ascètes, le nom de leur terroir d'origine, ou encore celui de quelqu'une de leurs fondations.

Aussi, dans son « Histoire de l'abbaye de Fontgombault », dom Andrieu s'élève-t-il contre le rattachement du fondateur de Fontgombault à l'« illustre maison de l'Estoile », car dit-il, « les saints ont de coutume de cacher leur naissance quand elle peut leur donner de l'éclat » (6).

 Et lorsqu'Isembaud impose le nom de l'Etoile à sa fondation monastique, aurait-il pu le faire sans manquer aux règles les plus élémentaires de la modestie, si le « de Stella » eût été son patronyme ? (7).

Sénebaud ?

Pierre et Isembaud sont-ils issus de la très ancienne famille des Isembert, qui a fourni à Poitiers une dynastie de grands évêques, et dont plusieurs rameaux, possessionnés aux confins du Poitou et du Bas-Berry à la fin du XIe siècle et au début du XIIe, portèrent le nom de Sénebaud ou de Sendebaud ? (8).

Un moment nous avons fait cette hypothèse, à la suite de Prosper Boissonnade, selon qui l'abbaye de l'Etoile aurait été fondée par « Isembert Sénebaut, abbé de Preuilly et frère de Pierre de l'Etoile, abbé de Fontgombault » (9) ; plus récemment, après une étude approfondie de la généalogie des Sénebaud, nous y avons renoncé.

On lit il est vrai dans « Gallia », que l'abbaye de l'Etoile fut fondée par « Isembert, dit Sénebaud, de la maison des Luzignan » (10).

Mais cette notice liminaire entend désigner, non Isembaud qui en fut le premier abbé, mais le « fondateur laïque ».

 En réalité, cet Isembert ne fut même pas le fondateur laïque de l'Etoile, mais seulement et à une époque plus tardive, l' « augmentateur » (11) du premier fonds cédé en 1124 à Isembaud par Guy de Cenvis (12), et au surplus il n'était pas de la maison de Lusignan (13), mais de celle des Isembert de Châtelaillon en Aunis (14).

Faute de documents, les origines familiales d'Isembaud et de son frère Pierre restent donc dans la pénombre.

Par contre, plusieurs indices permettent de déceler leurs attaches provinciales. Nous voyons Pierre de l'Etoile placer sa toute première fondation érémitique sous le patronage exclusif de saint Julien, l'apôtre du Maine (15), puis son « coenobium » de Fontgombault à Notre-Dame et à Saint Julien du Mans (16).

De plus, il ressort de la « Vita » de saint Bernard de Tiron, que le Maine — lieux et personnes — était familier au fondateur de Fontgombault : à deux reprises Pierre de l'Etoile fit le voyage danS cette contrée pour guider Bernard de Tiron (17).

Ainsi donc, le « Maine » entendu au sens large, pourrait bien avoir été le berceau familial d'Isembaud et de Pierre de l'Etoile.

 

 

ABBE DE PREUILLY ET L'ETOILE

MOINE PROFES DE FONTGOMBAULT OU DE PREUILLY ?

Les premiers pas de Pierre de l'Etoile dans la carrière ascétique nous sont mieux connus que ceux de son frère Isembaud.

On croit généralement que celui-ci fut moine de Preuilly avant d'en devenir l'abbé (18) ; les tenants de cette position font état de deux listes de moines de cette abbaye, sur lesquelles figure un Isembert (19).

Il nous semble plutôt que ce moine Isembert doit être distingué d'Isembaud, l'abbé de Preuilly, car dans tous les documents de cette époque le concernant à coup sûr, le frère de Pierre de l'Etoile est invariablement dénommé Isembaud (20), jamais Isembert. — Et pourquoi Isembaud, en quête de vie monastique serait-il rentré à l'abbaye de Preuilly-sur-Claise, alors que son frère aîné régissait si sagement celle de Fontgombault ?

D'autre part, dans un acte capitulaire émanant de Fontgombault, Isembaud est qualifié de « frater noster » (21) ; le même acte précise qu'Isembaud a reçu à Fontgombault sa formation monastique . «... a nobis in sancta religione nutritus et edoctus est » (22).

Avec dom Andrieu (23) et dom Fonteneau (24), il nous paraît donc plus probable qu'Isembaud fut moine profès de Fontgombault, sous la gouverne de son frère Pierre de l'Etoile.

 Peut-être même avait-il appartenu, avant la fondation du « coenobium » de Fontgombault, à la petite communauté érémitique de le Fontaine-Gombaud, dont son frère était alors le « magister ».

 

ABBE DE PREUILLY-SUR-CLAISE (...-v. 1117)

En 1100, les moines de Preuilly avaient élu pour abbé Araud (Araldus), naguère doyen et prieur claustral du lieu (25).

Le procès-verbal ou plutôt la notification de cette élection, contient en outre une solennelle déclaration de principe. Dans cet acte, les capitulants de l'abbaye tourangelle affirment leur attachement à l'état cénobitique — cette parfaite image de la vie communautaire de l'Eglise primitive.

Tout en reconnaissant à l'érémitisme une priorité dans le temps, c'est en termes à peine voilés que cette déclaration place le monachisme cénobitique au-dessus de la vie anachorétique (26).

Quels événements avaient pu motiver pareil manifeste, sorte d'auto-défense du monachisme traditionnel contre la vie érémitique ou semi-érémitique ? Peu avant cette élection d'Araud, plusieurs religieux de Preuilly avaient-ils pris le chemin du désert, et en 1100, craignait-on de nouveaux départs ? ou bien, lors de l'élection d'Araud, plusieurs capitulants avaient-ils manifesté quelque sympathie pour le monachisme « rénové », mis à l'honneur en plusieurs abbayes de la région, dont celle de Fontgombault ?

En dépit de cette prise de position, signée en 1100 par les 36 capitulants, une évolution assez rapide avait dû se produire dans la vieille abbaye tourangelle, car lorsque le siège abbatial de Preuilly se trouva de nouveau vacant, les capitulants portèrent leurs suffrages sur Isembaud.

— Les moines de Preuilly pouvaient-ils ignorer que l'abbé qu'ils se choisissaient partageait en tous points les conceptions ascétiques de son frère Pierre de l'Etoile : celui d'un monachisme rénové, largement ouvert sur les expériences érémitiques ?

Sur l'abbatiat d'Isembaud nous sommes sans renseignements précis. Il est probable cependant qu'au temps où il gouvernait l'abbaye, les travaux de reconstruction de la grande église Saint-Pierre se poursuivaient, sans que l'on puisse attribuer à cet abbé l'ouverture de ce chantier (27).

Par ailleurs on admet que l'abbatiat d'Isembaud prit fin par une démission spontanée.

L'échec d'une tentative de réforme entreprise dans son abbaye serait la cause de cette démission (28). Mais est-il certain qu'à cette époque l'observance de Preuilly laissât à désirer ? Nous pensons plutôt que l'abbé Isembaud, acquis au monachisme rénové, tel qu'il l'avait connu à Fontgombault, tenta de l'instaurer à Preuilly.

 Ce que préconisait sans doute Isembaud, c'était le retour à la pratique intégrale de la Règle de saint Benoît, avec la remise en vigueur du travail manuel, presque entièrement abandonné par les monastères d'inspitation clunisienne au profit de longs offices choraux surérogatoires.

Cette entreprise n'avait guère de chances d'aboutir dans une abbaye qui, dès ses origines, avait été fortement marquée par les conceptions clunisiennes (29).

Devant l'opposition faite à ses initiatives et jugeant ses efforts inutiles, Isembaud préféra se retirer.

Cette résignation eut lieu vers 1117 (30), au plus tard en 1120, date vers laquelle Preuilly avait un nouvel abbé en la personne de Foucher (31).

 

LA RETRAITE A FONTGOMBAULT

Démissionnaire du siège abbatial de Preuilly, Isembaud se retira à Fontgombault (32). Quelques années auparavant, Bernard de Tiron avait suivi un itinéraire tout semblable (33) mais dans le cas d'Isembaud, Fontgombault représentait un refuge normal, puisque l'abbaye était une création de son frère, et qu'au surplus lui-même y avait fait profession.

Depuis 1114, Pierre de l'Etoile n'était plus (34) ; mais lorsqu'Isembaud revint à Fontgombault, l'abbaye était gouvernée par l'abbé Arraud, personnalité très marquante, qui avait su prolonger et développer l'oeuvre entreprise par son prédécesseur (35).

Pendant le long abbatiat d'Arraud, on se souvenait à Fontgombault de la phase érémitique qui avait précédé la fondation du « coenobium », et on se montrait très favorable à la création de nouveaux déserts (36).

Fut-ce dans ce milieu monastique encore tout brouillonnant de la ferveur de ses commencements, qu'Isembaud se sentit appelé à la vie solitaire ; ou bien était-il venu à Fontgombault avec le dessein d'obtenir des ressources matérielles, et peut-être des sujets, pour l'établissement d'ermitages déjà prémédités ? nous ne saurions le préciser.

 Prémédités ou non, ces projets d'Isembaud trouvèrent un large accueil auprès de l'abbé Arraud, qui en facilita la réalisation de tout son pouvoir.

 

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SEMEUR DE DESERTS (v. 1120-1124)

Moindin

Isembaud quitta l'abbaye de Fontgombault vers 1120 pour créer son premier établissement érémitique à Moindin, dans le Haut-Poitou oriental (37).

Ce domaine, sis à deux petites lieues à l'est du bourg de la Puye et de l'ancienne paroisse d'Archigny (38), avait été donné à l'abbaye de Fontgombault qui, à son tour, en fit la cession à Isembaud pour son ermitage (39). Dès cette époque, il devait être assez étendu (40), pour assurer la subsistance de la colonie d'ascètes qui s'était groupé là autour d'Isembaud.

Celui-ci entreprit d'abord quelques constructions (41) : probablement les cellules des solitaires et un oratoire.

Le recrutement de cette première « laure » dut prospérer rapidement, car lorsque les constructions en furent terminées, on voit Isembaud entreprendre un nouvel établissement pour doubler celui de Moindin, et ce fut l'ermitage de la Perchaie (42).

Moindin continua à prendre de l'importance, au point d'être qualifié d'« abbatia » du vivant même d'Isembaud. Moindin s'accrut encore de la terre de Gastine cédée à Isembaud par un certain « Salvaricus » (Savary ?) (43).

C'était sans arrière- pensée que l'abbé Arraud souhaitait la réussite de l'entreprise d'Isembaud ; il avait poussé le désintéressement jusqu'à laisser partir à la suite d'Isembaud plusieurs de ses religieux de Fontgombault (44) ; mais se souvenant sans doute de l'aventure de Villesalem (45), il stipula dans l'acte de donation, qu'en cas de cessation de l'expérience érémitique de Moindin, le domaine de cet établissement devrait faire retour à l'abbaye ; quant à Isembaud et à ceux de ses frères qui le désireraient, ils seraient libres de regagner Fontgombault ou non (46).

Dans la suite, Fontgombault dut renoncer à cette clause restrictive, car lorsque Moindin cessa d'être ermitage, le domaine fut réuni purement et simplement à la jeune abbaye de l'Etoile.

 

La Perchaie

Isembaud venait d'achever les constructions nécessaires à son établissement de Moindin, lorsqu'il projeta d'en créer un nouveau.

Il est à croire que le fondateur ne voulait pour ses « laures » que des communautés restreintes, et qu'il s'était présenté à Moindin plus de candidats que cet ermitage ne devait en recevoir.

Dans ces conjonctures, l'ancien abbé de Preuilly s'adressa alors à l'abbé Arraud de Fontgombault, qui lui fournit à deux petites lieues au sud de Moindin, le domaine de la Perchaie (47).

Nous ne savons pas qui avait fait don à l'abbaye de Fontgombault du domaine de la Perchaie.

Celui-ci ne représentait d'ailleurs qu'une partie de ce qui un peu plus tard s'appellera le « fief de la Perchaie » (48) ; ce fief sera pleinement formé avant 1194 par le don de nouvelles terres cédées à l'abbaye de l'Etoile par Lannoy de Mirebeau et par son fils Geoffroy, avec l'accord de Guy et d'Aimery Sénebaud (49).

Le domaine de la Perchaie était d'un meilleur rapport que celui de Moindin (50) et l'abbaye de Fontgombault aurait pu y installer un prieuré ; en en faisant don à Isembaud, l'abbé Arraud manifestait tout l'intérêt qu'il portait aux fondations érémitiques de celui-ci.

— Dom Andrieu note à ce propos que « l'abbé Arraud avoit le coeur bien détaché des biens de la terre, puisqu'il donne si facilement le lieu de « Perchea », qui est un fief à six lieues de Fontgombault, proche de la ville de Chauvigny, et qui vaut aujourd'hui 600 livres de rente, y compris les dixmes et les terrages » (51).

L'ermitage de la Perchaie suivit le sort de Moindin ; malgré la clause restrictive qui avait prévu le retour de ces deux domaines à l'abbaye donatrice, Fontgombault les céda plus tard à l'abbaye de l'Etoile, à titre de dotation.

 

Saint-Pierre-en-Vaux

Après avoir installé des communautés d'ascètes à Moindin et à la Perchaie, Isembaud crée un peu plus à l'ouest, dans la vallée de la Vienne et sur l'ancienne paroisse de Bonnes (52) un troisième ermitage.

 Il plaça cette nouvelle fondation sous le patronage de saint Pierre (53) ; elle prit bientôt le nom de Saint-Pierre-en-Vaux (54).

Ce lieu quelque peu retiré (55) avait été cédé à Isembaud par Joscelin Oger (« Otgerii ») (56), membre de la puissante famille Oger, qui avait fait édifier, dans la ville haute de Chauvigny et au sud de l'église Saint-Pierre, un castel auquel ils imposèrent leur nom : la « tour Oger » (57) ; en outre les Oger se trouvaient largement possessionnés dans le pays d'alentour (58).

Comme à Moindin et à la Perchaie, Isembaud édifia une chapelle et des bâtiments (59).

Cette installation dura peu, car après la mort du donateur — voire de son vivant — « de mauvais voisins », pour se rendre maîtres des terres, des bois et des moulins concédés aux religieux, détruisirent les bâtiments et la chapelle de l'ermitage ; et les religieux furent si malmenés, qu'ils durent quitter les lieux (60).

D'après Duchesne, Estiennot, Fonteneau et le mémoire à Jacques Relieux cité plus haut, c'est de là qu'ils partirent pour s'établir un peu plus au nord, dans la vallée de Font-à-Chaux (61).

Au XVIe siècle, Saint-Pierre-en-Vaux retrouva sa destination primitive, grâce à l'initiative de dom Jean-Bernard de Cerizay de Teille, abbé de l'Etoile (62).

 Rentré en possession d'une partie de l'ancien domaine, l'abbé de l'Etoile reconstruisit l'église et un logement (63), dans lequel il installait en 1680 deux « vertueux solitaires » (64), l'un et l'autre de l'« ordre de Saint-Jérôme » (65).

Les noms de ces deux premiers ascètes nous sont parvenus : l'un s'appelait Jacques Relieux (66), et l'autre Bernard Dugué ; ce dernier vécut là pendant 32 ans, y mourut le 11 septembre 1712 « en odeur de sainteté », et fut enseveli dans la chapelle de l'ermitage (67).

En 1791, lors de la vente nationale qui en fut faite, l'ancien ermitage est ainsi décrit : « une maison appelée l'hermitage de Saint-Pierre-en-Vaux, consistant en une chambre basse et une autre cellule à costé ; un grenier et une petite chapelle, un four et autres servitudes » (68). —

Aujourd'hui, la chapelle, qui a été transformée en grange, abrite une statue de saint Pierre. Au bas du pignon ouest, on voit encore le mur en bel appareil, vestige probable du premier oratoire construit par les ermites d'Isembaud.

Font-à-Chaux

Chassés de Saint-Pierre-en-Vaux, les ermites d'Isembaud délaissèrent la vallée de la Vienne, pour se porter à quelques lieues vers l'est et s'installer sur le territoire de l'ancienne paroisse d'Archigny.

 Ils revenaient ainsi à leur point de départ, puisque Moindin, la première fondation d'Isembaud, se trouvait aussi sur Archigny ; cependant, les ermites fugitifs, poursuivant leur route, obliquèrent vers le nord-est et se fixèrent à une demie-lieue de là, dans le vallon de Font-à-Chaux (69), au fond duquel coule un ruisseau qui descend vers le sud en direction du bourg de Sainte-Radegonde.

Dans ce lieu boisé et solitaire, les ermites purent continuer encore quelque temps le genre de vie qu'ils menaient à Saint-Pierre-en-Vaux, avant d'opter pour la vie cénobitique intégrale, régie par le règle de saint Benoît, et de construire un monastère dans le même site.

 

L'ETOILE

L'abbaye bénédictine (1124-1145)

En 1124 ou un peu auparavant, Isembaud avait donc pris le parti de passer, sans changer de lieu, du semi-cénobitisme au monachisme bénédictin (70).

 Au préalable, il lui fallait obtenir la cession en bonne et due forme du terrain que ses ermites occupaient déjà à Font-à-Chaux.

Guy de Cenvis (71), à qui cette terre appartenait, s'y prêta volontiers. « Pour l'amour de Dieu », le seigneur Guy, sa femme Costa, son fils aîné Amaury et ses autres enfants, donnaient « à Dieu, à la Vierge Marie, aux Saintes Vierges, à l'abbé Isembaud et à ses frères le lieu de Font-à-Chaux... pour fonder et construire une abbaye et y assurer le service divin » (72).

Au domaine de Font-à-Chaux dont il précisait les limites, le donateur ajoutait le bois de Tiraud en son entier, plus des droits d'usage et de pacage dans les bois qu'il conservait (73).

Cette concession fut faite avec l'accord de Rorgue et de Simon, seigneurs d'Angles (74).

C'est dans ce document daté de 1124 (75), qu'apparaît pour la première fois le nom de « Stella » et de « Stellensis » attaché à la nouvelle abbaye (76).

Nous avons dit plus haut qu'Isembaud l'avait choisi en souvenir de son frère Pierre de l'Etoile, qui avait été aussi son « père en Dieu », et que cette appellation avait été aussi adoptée par un certain nombre de monastères (77).

Pourquoi Isembaud renonçait-il à l'érémitisme communautaire, pour revenir au monachisme bénédictin et créer une abbaye ?

On a justement remarqué que les grands fondateurs d'ermitages de cette époque n'opposaient pas la vie au désert à celle du cloître bénédictin ; que presque tous, après une phase érémitique plus ou moins longue, convertirent l'un ou l'autre de leurs ermitages en monastère où ils finirent leurs jours.

D'ailleurs, pour tels de ces ascétères dont l'accès mais aussi la sortie était aisée, c'était une condition de survie que d'adopter la règle de saint Benoît.

Enfin, Isembaud avait sous les yeux l'exemple tout récent de Géraud de Sales qui, peu avant sa mort survenue en 1120, avait commué en abbayes bénédictines ses cinq établissements érémitiques du Poitou (78).

Pour l'aider à construire son abbaye de l'Etoile et à assurer la subsistance de sa jeune communauté, Isembaud trouva encore des bienfaiteurs dans les seigneurs du voisinage.

Vers 1130, Isembert Sénebaud, seigneur de Cors, fit don à l'abbé de l'Etoile du fief d'Aiguës-Joignant (79), et avant 1140, Arnaud Brun, obtenait de Pierre Hélie la confirmation de son don du bois de l'Epine en faveur de l'abbé Isembaud, « pour aider Guy de Cenvis à construire l'abbaye de l'Etoile (80).

 Et n'est-il pas touchant de voir le vieux monachisme du Poitou, représenté par l'abbaye de Saint-Savin (81), favoriser aussi cette abbaye d'un nouveau type, en concédant à Isembaud et à ses successeurs abbés de l'Etoile un droit de péage (82) !

Après avoir régi l'abbaye de l'Etoile pendant près de 16 années, Isembaud mourut en 1140 (83) ; on l'ensevelit dans le sanctuaire de l'église abbatiale (84).

L'abbaye cistercienne (1145-1791)

En 1140, l'année même de la mort d'Isembaud, les moines de l'Etoile élirent Bernard, un des leurs, pour lui succéder dans sa charge d'abbé (85).

Pendant plusieurs années, l'abbé Bernard maintint dans son monastère l'observance bénédictine qu'Isembaud y avait instaurée : mais en 1145, il sollicite et obtient du pape Eugène III le rattachement de son abbaye à l'ordre de Cîteaux (86) ; l'Etoile fut alors colonisée par des cisterciens venus de l'abbaye de Pontigny et placée ainsi dans la filiation de cette deuxième fille de Cîteaux (87). — Isembaud avait-il lui-même envisagé pareille intégration ? nous ne saurions l'affirmer ; du moins il est certain, qu'en établissant à l'Etoile la stricte observance de la règle de saint Benoît, qui pour l'essentiel répondait à l'idéal cistercien, il avait préparé ce rattachement.

En passant à Cîteaux, l'Etoile suivait l'exemple de nombre d'abbayes de cette époque issues du mouvement érémitique ; pas plus que celles-ci, la jeune abbaye poitevine n'avait pu résister à la personnalité fascinante de saint Bernard ; d'autre part, les fortes structures de l'institution cistercienne apparaissaient aux fondateurs de ces nouvelles abbayes ou à leurs successeurs immédiats comme Lin moyen assuré pour les maintenir dans la fidélité à la règle de saint Benoît pratiquée « ad unguem ». Enfin le prodigieux essor de l'ordre cistercien dans les provinces du Centre contribuait pour une part à cette attraction.

 L'expansion cistercienne avait été cependant plus rapide dans le diocèse voisin de Bourges — où l'archevêque Vulgrin (1120-37), ami de saint Bernard, l'avait grandement favorisée (88) — que dans celui de Poitiers ; lors du passage de l'Etoile à Cîteaux, le diocèse de Poitiers ne comptait en effet que deux abbayes cisterciennes : celles de Bonnevaux et du Pin (89).

L'abbé Bernard mourut en 1147, peu après avoir reçu d'Eugène III la deuxième bulle (90) ; il fut remplacé la même année par le célèbre Isaac de l'Etoile (91).

A son tour, le nouvel abbé demanda à Eugène III confirmation du rattachement à Cîteaux (92) ; l'abbaye de l'Etoile demeura fidèle à cette appartenance jusqu'à la Révolution.

Au temps de l'abbé Isaac et de ses successeurs immédiats, la renommée de cette abbaye observante provoqua les libéralités des grands seigneurs de la région (93).

Mais dès la fin du XIIe siècle, on constate un certain relâchement dans la discipline (94), qui s'accentue aux siècles suivants.

Au XVIe siècle, les protestants dévastent l'abbaye à plusieurs reprises ; puis le régime de la « confidence » cause de graves désordres à l'intérieur (95).

Aux XVIIe et XVIIIe siècles, l'observance se rétablit quelque peu sous la gouverne de grands abbés réguliers (96) ; puis de nouveau, c'est le déclin (97).

Au seuil de la Révolution, la communauté cistercienne de l'abbaye de l'Etoile se trouve « réduite à l'unité » : elle ne comptait plus qu'un seul moine, dom Jean Adnet, qui s'intitulait « prieur de l'Etoile » (98).

 

LA PERSONNALITE ET L'OEUVRE D'ISEMBAUD

L'oeuvre centrale d'Isembaud est celle de ses fondations érémitiques ; on essaiera ici d'en saisir quelques aspects.

Dans l'acte de cession que l'abbé Arraud de Fontgombault fit à Isembaud du domaine de la Perchaie, celui-ci est qualifié de père des « religiosorum fratrum monachorum et heremetice viventium » (99) ; c'était caractériser d'un trait les établissements ascétiques du frère de Pierre de l'Etoile. Isembaud ne semble pas en effet avoir encouragé ses disciplines à l'érémitisme pur ni l'avoir pratiqué lui-même ; ses fondations au désert ressemblent plutôt à des « laures », dans lesquelles l'anachorétisme se trouvait tempéré de vie communautaire.

Les « frères ermites » des communautés d'Isembaud ne pouvaient être tels sans cellules individuelles ; grâce à l'isolement du gîte il était possible aux âmes ferventes de se livrer à la prière prolongée et aux grandes austérités.

Dans les ascétères fondés par Isembaud, l'élément cénobitique et monastique devait être représenté en premier lieu par des temps consacrés à la prière commune, dans Je cadre d'un oratoire.

Déjà, l'ermitage de Fontgombault, qu'Isembaud avait connu, comportait une chapelle (100) ; pareillement les constructions qu'il avait entreprises à Moindin (101), devaient compter un oratoire ; et il est certain qu'il en édifia un pour ses ermites de Saint-Pierre-en-Vaux (102).

 De plus, il est probable, qu'à la suite de saint Romuald, le grand modèle des fondateurs de « déserts » aux XIe et XIIe siècles, Isembaud avait imposé à ses disciples la communauté de la table (103) ; enfin, comme toute communauté monastique, celles d'Isembaud étaient placées sous la gouverne d'un supérieur ; ici Isembaud ne porte pas le titre de « magister ». mais celui de « pater heremitarum » (104).

A la différence des fraternités de Géraud de Sales qui recrutaient principalement des clercs (105), celles d'Isembaud attirèrent initialement plusieurs moines bénédictins. Dans l'acte de cession de la Perchaie, l'abbé Arraud fait allusion à ceux de ses religieux de Fontgombault qui avaient suivi Isembaud dans son désert de Moindin (106), et il est fort probable que l'ancien abbé de Preuilly attira aussi dans ses fondations quelques moines de cette abbaye (107) ; mais là comme ailleurs, des clercs séculiers et des laïques durent se joindre, par la suite, à ces recrues venues des milieux monastiques. Quelle que fut leur origine, les membres des communautés groupées autour d'Isembaud sont dénommés « frères religieux » (108).

A noter encore que les établissements d'Isembaud jouissent d'une pleine indépendance, même à l'égard des monastères qui les ont pourvu en terres et en sujets (109).

Enfin, c'est dans un secteur relativement restreint, qu'Isembaud installe ses colonies ; la plus grande distance qui les sépare n'excède pas deux lieues (110).

 Grâce à cette proximité, Isembaud pouvait aisément passer de l'une à l'autre pour les visiter et les contrôler (111).

Les créations d'Isembaud sont-elles originales ? — Pas absolument, car en fondant des ermitages communautaires, Isembaud se trouvait, comme ses émules contemporains, tributaire des conceptions de saint Romuald (112).

Mais en n'adoptant pas la vie itinérante et prédicante (113), Isembaud se distingue de la plupart des « semeurs de déserts » de cette époque, notamment des quatre « principes eremitarum » de la forêt du Maine : Robert d'Arbrissel, Bernard de Tiron, Vital de Savigny et Raoul de la Futaye, et encore de Robert de Molesmes et Géraud de Sales.

Par là, il se rapproche d'avantage de son frère et père en Dieu Pierre de l'Etoile, dont l'oeuvre est exclusivement contemplative. Mais on n'aura garde d'oublier, qu'à travers les oeuvres — apparemment si diverses et si changeantes de ces grands ascètes des XIe et XIIe siècle — circulait un même idéal : la recherche de l'union à Dieu la plus haute, dans l'imitation héroïque de la vie pauvre du Christ rédempteur (114).

Quant à l'aire géographique du rayonnement d'Isembaud, reconnaissons qu'elle ne dépasse guère celle de ses fondations.

 Isembaud prend la relève de son frère Pierre de l'Etoile, mort en 1114, et prolonge dans la même zone son oeuvre érémitique.

Aux deux premiers « déserts » fontgombaldiens fondés en Poitou (115), Isembaud on ajoutera quatre (116) ; ces six ermitages se trouveront ainsi groupés dans le Haut-Poitou oriental, tandis qu'à la même époque le bienheureux Géraud de Sales installait aussi les siens en Haut-Poitou, mais à l'ouest de Poitiers (117).

 — On admet cependant que l'oeuvre d'Isembaud a pu exercer aussi une certaine influence sur le mouvement érémitique de la Touraine méridionale (118).

C'est dans cette même zone poitevine qu'Isembaud implanta son « coenobium » de l'Etoile.

Avec cette fondation, c'était une nouvelle abbaye de monachisme bénédictin rénové qui apparaissait dans ce Haut-Poitou (1.19), où prédominait jusque là les abbayes bénédictines de type traditionnel (120).

Enfin, en soumettant son monastère de l'Etoile à la pratique littérale de la règle de saint Benoît, Isembaud préparait le rattachement à Cîteaux d'une abbaye qui deviendra célèbre, au temps d'Isaac de l'Etoile (Isaaci Abbatis Stellensis), son deuxième successeur.

 

 
Revue Mabillon : archives de la France monastique

 

1219 Guillaume [II] de Lezay donne à l'abbaye de l’Étoile le droit d'usage du bois dans la Grande Gâtine, le droit de pacage et le droit de pasnage.

A. Original perdu.

INDIQUÉ : Inventaire de la liasse contenant les titres de la fondation, dotation et augmentation de l'abbaye de l’Étoile, AD 32, I 1337, n°20, p. 10.

Titre de Guillaume de Lezay, par lequel il donne à l'abbaye de l'Estoile et à ses dependances plein usage dans tous les bois de la grande Gastine dont la troisiesme partie luy appartient par droict d'heritage, tant en bois verd qu'en bois sec, en bois vif et en bois mort, pour toutes leures necessitéz, avec droict de pasturage pour tous leurs bestiaux et pascage pour leurs porces, tant dans le dict bois qu'en pleine campagne, ledict titre en datte de l'an mil deux cent dix neuf.

 

Novembre 1239 Vente faite à l'évêque de Poitiers par Guillaume de Senon, chevalier, Aénalde, sa femme, et Jean et Chanalie, leurs enfants, de deux rentes en blé dues par l'abbaye de l'Étoile, l'une de dix-sept mines et demie de froment, et l'autre de onze mines de seigle, pour la somme de soixante-cinq livres tournois

 

Omnibus presentes litteras inspecturis, Guillelmus, humilis abbas de Englia, et Henricus, archidiaconus Pictavensis, salutemin Domino.

A tous présents les lettres des inspecteurs, Guillaume, humble abbé d'Angle, et Henri, archidiacre de Poitiers, salutations au Seigneur.

 Noverint universi quod in mea presentia constituti Guillelmus de Senon, miles, et Aenaldis, ejus uxor, et Johannes et Chanalia, liberi eorumdem Guillelmi et Aenaldis : idem Guillelmus miles de Senon decem et septem minas et dimidiam frumenti, quas Audeberlus de Calopi, armiger, et Guillelmus, fratres, et Agatha, mater ipsorum Audeberti et Guillelmi, habebant singulis annis annui redditus in abbatia de Stella prope Calvigniacum, ad veterem mensuram ejusdem abbatie, reddendas singulis annis apud Calvigniacum in festo sahcti Martini hiemalis, quas minas ipsi Audebertus et Guillelmus et Agatha mater ipsorum vendiderant Galtero Focier, militi, et quas minas frumenti idem Guillelmus miles retraxerat a dicto Galtero Focier jure hereditario, et undecim minas siliginis, quas idem Guillelmus miles emerat a dictis Audeberto et Guillelmo fratribus et Agatha matre ipsorum, quas minas siliginis ipsi fratres et Agatha habebant singulis annis annui redditus in dicta abbatia, ad veterem mensuram ejusdem abbatie, reddendas apud Calvigniacum in festo beati Martini hyemalis memorato, vendidit venerabili patri episcopo Pictavensi pro sexaginta et quinque libris turonensibus quitis et jam solutis, et de quibus seidem Guillelmus miles tenuit se pro pagato; renuncians exceptioni non numeratc et non tradite sibi pecunie; fiducians idem Guillelmus miles quod contra venditionem istam per se vel per alios non veniet in futurum, nec aliquid in predictis rebus venditis in posterum reclamabit vel faciet reclamari; promittens idem Guillelmus dictam fidem et sub ypotheca omnium rerum suarum, quod dictas res yenditas eidem venerabili episcopo Pictavensi liberabit, gariet et defendet erga omnes.

Que tous sachent qu'en ma présence Guillaume de Senon, chevalier, et Aenaldis, sa femme, et Johannes et Chanalia, les enfants du même Guillaume et Aenaldis : le même Guillaume le chevalier de Senon dix-sept livres et demie de blé, qui Audeberlus de Calopi, écuyer, et Guillaume, les frères, et Agatha, la mère d'Audebert et de Guillaume, avaient chaque année une rente annuelle dans l'abbaye des Etoiles près de Chauvigny, selon l'ancienne mesure de la même abbaye, à payer chaque an à Chauvigny dans l'hiver de la fête de Saint Martin, qu'Audebert et Guillaume et Agatha, leur mère, avaient été vendus à Galtero Focier, Chauvigny, et que livres de blé le même Guillaume le chevalier avait retirés dudit Galtero Focier par droit d'héritage, et onze livres de seigle, que le même Guillaume le chevalier avait achetées desdits frères Audebert et Guillaume et Agathe leur mère, lesquelles livres de seigle les frères eux-mêmes et Agathe avaient chaque année une rente annuelle dans ladite abbaye , selon l'ancienne mesure de la même abbaye, à payer à Chauvigny à la susdite fête d'hiver du bienheureux Martin, il vendit au vénérable père évêque de Poitiers pour soixante-cinq livres des Tourones, quittes et déjà payées, et dont Guillaume le chevalier en détenait lui-même sept pour être payé; renoncer à l'exception de ne pas compter et de ne pas se remettre d'argent; faisant confiance au même Guillaume le soldat qu'il ne s'opposera pas à cette vente par lui-même ou par d'autres à l'avenir, ni ne se plaindra ni ne fera se plaindre de quoi que ce soit dans les choses susmentionnées vendues à l'avenir ; promettant au même Guillaume la dite foi et sous l'hypothèque de tous ses biens, qu'il livrera, portera et défendra le dit bien au même vénérable évêque de Poitiers pour tous.

Ipsam vero venditionem ipsa Aenaldis, Johannes et Thomassia sponte, providere (sic), sine metu et violentia voluerunt, laudaverunt et concesserunt, renunciantes omni juri quod in dictis rebus venditis habebant vel habere possunt vel poterant ratione hereditatis, acquisitionis vel alio quocumque modo; fiduciantes quod contra predicta, prout superius sunt expressa, per se vel per alios non venient in futurum.

Mais Aenaldis elle-même, Johannes et Thomassia, de leur plein gré, sans crainte ni violence, ont volontiers, loué et accepté de pourvoir à la vente elle-même, renonçant à tous droits qu'ils avaient ou pouvaient avoir ou pourraient avoir sur lesdites choses vendues à raison d'héritage, d'acquisition ou de toute autre manière ; confiant que contrairement à ce qui a été dit, comme exprimé ci-dessus, ils ne viendront pas à l'avenir ni par eux-mêmes ni par d'autres.

 In cujus rei testimonium presentes litteras, ad petitionem partium, sigillorum nostrorum munimine fecimus roborari.

Actum apud Calvigniacum, die post festum Omnium Sanctorum, anno Domini MCCXXX nono, mense novembris.

En foi de quoi nous avons fait confirmer la présente lettre, à la demande des parties, sous la protection de nos sceaux.

Fait à Chauvigny, le lendemain de la fête de la Toussaint, en l'an du Seigneur 1239, au mois de novembre.

 

 

Les premiers seigneurs de Châtel Aillon de l'an mil <==

LE MONACHISME EN POITOU AU Xe SIÈCLE  <==

==> Jean Belles-Mains, évêque de Poitiers reçoit au château baronnial, Isaac de Stella et Hugues de Chauvigny

Liste des ÉVÊQUES DE POITIERS BARONS DE CHAUVIGNY. <==

 ==> Sur la Terre de nos ancêtres du Poitou - Aquitania (LES GRANDES DATES DE L'HISTOIRE DU POITOU ) <==

 

 


 

(1) Dom Claude ESTIENNOT, Antiquitatum in dioecesi Pictaviensi benedictinarum, Bibl. nat., lat. 12755, f° 648 ; et Abrégé historique des monastères de l'ordre de S. Benoît (copie dans la coll. FONTENEAU, LIII, f° 289, Bibl. mun. Poitiers) ; Jean-Baptiste SOUCHET, Beati Bernardi fundatoris et I abbatis SS. Trinitatis de Tironio, o.s.B., vita, Paris, 1649 ; abbé LALANNE, Histoire de Châtelleraud et du Châtelleraudais, t. I (1859), p. 166; Louis DAMOURETTE, Guide du Pèlerin à Notre-Dame des Grottes de Fontgombaud, dans « Revue du Centre » 1890, p. 103.

 

(2) Le plus ancien document faisant mention de « Petrus a Stella » est la Chronique de Saint-Maixent, dite de Maillezais (Chronicon S. Maxentii Pictavensis, vulgo Malleacense ; original à la Bibl. Nat. lat. 4892, f° 202v ; éditée dans le Recueil des historiens des Gaules et de la France, t. XII (1877), ad an. 1091, p. 402).

Cette Chronique a été compilée vers 1126, avec quelques additions vers 1141 (Cf. Jean VERDON, La Chronique de Saint-Maixent (751-1140), Paris, 1979, p. IX). — Le véritable « surnom » du fondateur de Fontgombault nous paraît être « de Stellis » — « des Etoiles » — qui figure dans un acte capitulaire émanant de l'abbaye de Fontgombault vers 1117, peu après la mort du premier abbé de Fontgombault et du vivant de son frère Isembaud (HMF, Histoire manuscrite de l'abbaye de Fontgombault par dom Nicolas ANDRIEU, Arch. Nat. LL 1011, f° 15 ter) ; ce dernier document nous semble décisif pour trancher entre le « de Stella » et le « de Stellis ». Le « de Stellis » figure encore dans la Vita sancti Bernardi Tironensis, composée à l'abbaye de Tiron par Gofridus GROSSUS entre 1137 et 1149 (BOLLANDISTES, Acta Sanctorwn, Aprilis — II, p. 227, n° 19), et dans la plupart des biographies concernant Robert d'Arbrissel et Vital de Savigny.

(3) Michel de l'Estoile (+ 1941), dans sa Généalogie de la maison de l'Estoile, p. 8 (Arch. du château de La Lande-Chasles, près Baugé (M.&.L.), fait lui-même cette observation.

(4) Au XVIIe siècle, il existait à Langoat, dans l'ancien diocèse de Tréguier, un manoir de l'Etoile et une famille qui en portait le nom ; dès 1660, ce manoir était passé au Geslin de Trémargat (POTIER de COURCY, Nobiliaire de Bretagne, t. I, p. 367 ; R. KERVILLER, Répertoire général de bio-bibliographie bretonne, t. XIII, 1902, p. 269). Cette famille bretonne, qui devait être éteinte dès la fin du XVIIe siècle (elle ne figure pas dans l'Armorial général de France, « Généralité de Bretagne » composé par d'HOZIER après l'Edit de 1696, Bibl. Nat.) avait moins de « lustre » que celle du même nom, qui apparaît au début du XIVe siècle dans la seigneurie de l'Etoile-sur-Somme en Picardie ; à ce tronc picard se rattachent la branche orléanaise aujourd'hui éteinte (celle dont était issu le mémorialiste Pierre de l'Etoile (+ 1545) et la branche angevine, qui subsiste encore (Michel de l'ESTOILE, ouvr. cité).

(5) Pour les monastères portant le nom de l'Etoile, nous en avons compté un de bénédictins, trois de cisterciens, un de basiliens, un de prémontrés, un d'antonins et un de chanoines réguliers. Peut-on voir dans le choix de ce vocable une intention de symbole ? Tel monastère par exemple ne l'aurait-il pas adopté pour se placer sous la protection de la Vierge, très anciennement invoquée sous le titre de « Stellamaris » ? L'hypothèse nous semble légitime. — Quant aux ascètes de cette époque ainsi nommés, on peut citer, outre le fondateur de l'abbaye de Fontgombault. un ermite vivant au XIe siècle à La Bazouge (Ille-et-Vilaine) (GUILLOTIN de CORSON, Pouillé de Rennes, t. III, p. 505), et non loin de Loudéac, le célèbre Eon de l'Etoile, cet illuminé qui lut condamné en 1148 au concile de Reims ; plusieurs auteurs ont avancé sans preuves, à son sujet, que l'Etoile était son nom patronymique.

(6) HMF, f° 4'.

(7) Pour justifier le nom de « Stellensis » donné par Isembaud à son abbaye, l'auteur du Gallia Christiana (II, col. 1352), partisan de l'appartenance des deux frères à la famille de l'Etoile, avance que ce fut « in memoriam pii patris, fratris que Pétri de Stella aut de Stellis ». Il eut mieux valu omettre le « pii patris » qui désigne ici le père d'Isembaud selon la chair, ou bien attribuer ce qualificatif à son frère Pierre de l'Etoile, qui fut véritablement le père spirituel d'Isembaud.

(8) Sur la famille des Isembert et des Sénebaud, voir Léon FAYE, Recherches sur l'ancienne maison de Châtellaillon en Aunis, dans « Mémoires des Antiquaires de l'Ouest », t. XIII (1846), pp. 383 sv ; et surtout Jacques DUGUET, La famille des Isembert, évêques de Poitiers, et ses relations (Xe-XIe s.), dans « Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest », 1971, pp. 163 sv.

(9) Prosper BOISSONNADE, Administrateurs laïques et ecclésiastiques anglo-normands en Poitou à l'époque d'Henri II Plantagenêt (1152-1189), dans « Bulletin de la Société des Antiquaires de l'ouest », 1919-21, p. 187.

(10) « Stella... conditur ad Isemberto Senebaut, e domo Lesigniaca orto » (GALLIA. II, col. 1352).

(11) Isembert Sénebaud, sgr de Cors, céda à Isembaud, plusieurs années après la fondation de l'abbaye de l'Etoile, le fief d'Aiguës-Joignant (commmune de St Hilaire-sur-Benaise, Indre) ; donation qui fut confirmée par ses fils en 1147 (Bibl. nat. coll. DUCHESNE, t. XXII, f° 167v).

(12) « Litterae dotationis abbatiae de Stella, ord. Cisterciensis » par « Guido de Cenuis » (1124) (GALLIA, II, Instr. col. 378).

(13) Cette assertion imputable à Nicolas de SAINTE-MARTHE (Pictavis comitatus historia ecclesiastica (1666), Bibl. mun. Poitiers, ms. 380 (315), fut reprise par Denys de SAINTE-MARTHE, auteur du GALLIA, t. II (col. 1352) : « asserit quoque Nicolaus de Sainte-Marthe, Isembertum dictum de Sénebaud e domo de Lusignem ortum ».

(14) Dom ESTIENNOT, dans sa notice sur l'abbaye de l'Etoile, réfute ce rattachement des Sénebaud aux Lusignan (Bibl. nat. lat. 12755, p. 367) ; en reproduisant le texte d'ESTlENNOT, dom FONTENEAU (LVIII, p. 372) ajoute dans une note marginale : « les noms d'Isembert et de Senebaut n'étaient pas attachés à la maison de Lusignan, mais à celle de Châtellaillon en Aunis ».

(15) « La première chapelle qu'il (Pierre de l'Etoile) avoit bastie du costé du Poitou, qui s'appelle Saint-Julien... » (HMF, f° 7r). — Et pour bien marquer les attaches mancelles de leur établissement, les ermites de Fontgombault placèrent dans les fondations de leur chapelle une monnaie cénomane. Cette pièce en argent, de type Erbertois, qui portait en exergue : COMES CENOM (ani) S, fut retrouvée au siècle dernier par les Trappistes, lorsqu'ils reconstruisirent l'édifice (« Bulletin Monumental », 1889, pp. 232-33).

(16) Le double patronage de Notre-Dame et de Saint-Julien du Mans sur l'abbaye et son église fut retenu jusqu'à la fin du XVIIIe siècle ; et dans l'ancien Fontgombault, la fête de l'Apôtre du Maine, était célébrée le 27 Janvier, avec la même solennité que celles de Noël, Pâques et l'Assomption (HMF, f° 48v).

(17) Vita s. Bernardi Tironensis, Acta SS., Aprilis-II, n° 19-20 (p. 227) et 36-37 (p. 231)

(18) Ainsi LALANNE, Histoire de Châtelleraud et du Châtelleraudais, t. I, p. 166 ; M-A. DIMIER, art. « Etoile » (1'), dans Dictionnaire d'histoire et de géographie ecclésiastiques, t. XV (1963), col. 1287.

(19) Isembert est un des 14 moines de Preuilly cités dans le procès-verbal de l'élection de l'abbé Othon en 1095 (J.-X. CARRE de BUSSEROLLE, Dictionnaire géographique, historique et biographique d'Indre-et-Loire, Tours, t. V (1883), p. 190) ; autre mention du moine Isembert dans la notification de l'élection abbatiale d'Araud en 1100 (Dom MARTENE, Thésaurus anecdotorum, t. I, col. 284).

(20) Outre les deux actes capitulaires de l'abbaye de Fontgombault, contemporains d'Isembaud et dans lesquels il est ainsi nommé (HMF, f° 15 ter et 16v), on peut encore citer une donation faite à son ermitage de Moindin ( « in manu Isembaudi » ; DUCHESNE, op. cit., 1° 1670, la charte de fondation de l'abbaye de l'Etoile en 1124 (GALLIA, II, Instr. col. 378), et cinq autres donations ou confirmations consenties à « Isembaud » abbé de l'Etoile » (DUCHESNE, f- 167; et Arch. dép. Gers, fonds Vergés, série I, n» 1337).

(21) « Ego Airaudus abbas et capitulum nostrum Fontis Gombaudi damus et concedimus fratri nostro domino Isembaudi, olim Pruilliacensi abbati... » (HMF, f° 15 ter).

(22) HMF, f° 15 ter.

(23) «... cette carte nous enseigne qu'Isembaudus frère du Bx Pierre de l'Etoille, étant religieux de Fontgombaud, fut eleu abbé de Priiilli... » (HMF, f° 15 ter).

(24) Abbatum catalogus (abbatiae Stellensis) : «... Is est Isembodus ex abbate Prulliacensi et monacho Fontisgombaldi... » (t. LVIII, p. 377). — Dans son étude sur L'érémitisme dans l'ancien diocèse de Tours au XII siècle (« Revue Mabillon », 1971 p. 48, n. 28), dom Guy OURY n'exclut pas cette hypothèse.

(25) En 1095, lors de l'élection de l'abbé Othon, Araud était prieur claustral de l'abbaye de Preuilly (CARRE de BUSSEROLLE, op. cit., t. V, p. 190) ; dans le procès-verbal de son élection en 1100, Araud est qualifié de « moine doyen » (dom MARTENE, Thésaurus anecdotorum, t. I, col. 284).

(26) «. . quosdam ex his, priorum sanctio patrum heremitas vocitari statuit. Praeter hos, quidam (= monachi) qui pari quidem ratione celestia peterent, sed longe dissimiles, et ut dictum est ferventiore zelo, non sua tantum quererent lucra quam aliorum commoda... » (ibid.).

(27) Dans son Histoire de l'église abbatiale de Preuilly-sur-Claise (Preuilly, 1895, p. 28), PICARDAT fait de l'abbé Isembaud le « fondateur de la basilique ». Il s'agit plus exactement de sa reconstruction, car il ne reste rien de la première abbatiale de Preuilly, consacrée le 5 septembre 1008 par Archambaud de Seuilly archevêque de Tours (mention de cette dédicace dans la donation que Béatrice d'Issoudun, femme d'Effroy seigneur de Preuilly et fondateur de l'abbaye, fit le jour même de cette solennité ; Bibl. Nat., coll. HOUSSEAU, t. II, p. 1). Pour remplacer la première église qui était sans doute de dimensions modestes (elle avait été construite en moins de dix ans : entre 1001, date de la fondation de l'abbaye de Preuilly, et 1008, celle de sa dédicace), une nouvelle fut entreprise sur un plan plus développé. Le tracé des lignes architecturales, les proportions, la sculpture des chapiteaux, le profil des bases des colonnes accusent un édifice du XIe siècle avancé ; les chantiers ont pu s'ouvrir dans les dernières décennies du XIe siècle, pour se clore dans les premières du XIIe.

(28) GALLIA, II, col. 1352, et XIV, col. 303 ; ESTIENNOT, op. cit., p. 350.

(29) L'abbaye de Preuilly, fondée en 1001 par Effroy, sgr de Preuilly et de La Rocheposay, avait été colonisée par des moines de l'abbaye de Maillezais, mais confiée, par le truchement d'Hervé de Buzançais, trésorier de St Martin de Tours, à la tutelle de Gausbert 1er (+ 1007), abbé de S. Julien de Tours, de Marmoutier, de Bourgueil, de la Couture et de Maillezais, puis à celle de Gausbert II, aussi abbé de St Julien de Tours.

Or ces grandes abbayes, tout en retrouvant leur indépendance (cas de S. Julien de Tours qui avait eu pour premier abbé saint Odon, abbé de Cluny, mort en 942) ou en la conservant, avaient été profondément marquées par les conceptions clunisiennes. C'est ce qui advint à l'abbaye de Preuilly, qui après la mort de Gausbert II arrivée en 1025, fut émancipée de l'emprise de Saint-Julien de Tours, grâce à l'intervention d'Arnould, archevêque de Tours (GALLIA, XIV, col. 302).

(30) GALLIA, XIV, col. 304.

(31) Ibid. — « Fulcherius, abbas Pruliacensis » et Isembaud son prédécesseur, figurent dans la charte de donation du domaine de Drouilles, faite par Arraud, abbé de Fontgombault, aux fontevristes de Longefont (HMF, f° 16v).

(32) « Isembaudus, relicto Pruliacensis monasterii regimine quod in melius reformare frustra tentaverat, primum accessit ad abbatem Fontisgombaudi Petrum de Stellis fratrem suum » (GALLIA, II, col. 1352 ; ESTIENNOT, op. cit., p. 350).

(33) Vers 1097, Bernard d'Abbeville, alors prieur de Saint-Savin, craignant d'être élu abbé de Saint-Cyprien de Poitiers, s'était réfugié à Fontgombault auprès de Pierre de l'Etoile ; peu après, celui-ci le conduisit dans le Maine, au « désert » de saint Vital de Savigny (G. GROSSUS, Vita sancti Bernardi Tironensis, op. cit. chap. 3, n° 19 ; et J. de BASCHER, La « Vita » de saint Bernard d'Abbeville, abbé de Saint-Cyprien de Poitiers et de Tiron, dans « Revue Mabillon », 1980, pp. 425-427).

(34) « Obiit Petrus primus abbas t Fontis Gombaudi, cui successif Guillelmus, et post eum Airaudus » (Chronicon S. Maxentii, ad an. 1114 ; Bibl. nat. lat. 4892, f° 205v).

(35) Entre l'abbatiat de Pierre de l'Etoile et celui d'Arraud, il y avait eu celui — assez bref semble-t-il — de Guillaume (cf. la note précédente).

(36) En cela Arraud se montrait le digne émule de Pierre de l'Etoile. Celui-ci en effet, devenu abbé de Fontgombault, avait d'abord cédé, avec l'accord d'Audebert de la Trémoille, le « manse » de Villesalem à deux ermites, Geoffroy Gastineau (Gastinelli) et Bertrand ; puis, lorsque ces solitaires quittèrent les lieux, Pierre de l'Etoile consentit, encore avec l'assentiment des seigneurs de la Trémoille, à céder Villesalem à l'abbaye de Fontevrault, pour y installer un prieuré (HMF, f° 4v-6r).

(37) Il est assez aisé de reconstituer l'ordre des fondations érémitiques d'Isembaud. C'est au sortir de Fontgombault, qu'il fonda l'ermitage de Moindin (ESTIEN-NOT, op. cit., p. 350 ; FONTENEAU, t. LVIII, p. 377 : « primo Mondenii cellulas » (fundavit). — Moindin venait d'être « construit » par Isembaud, lorsque l'abbé Arraud de Fontgombault lui céda le domaine de la Perchaie, pour fonder un nouvel établissement (HMF, f» 15 ter) ; enfin les ermites d'Isembaud furent chassés d'un troisième ascétère installé à Saint-Pierre-en-Vaux, pour en fonder un quatrième à Font-à-Chaux (DUCHESNE, op. cit., f° 167') ; ESTIENNOT, op. cit., p. 350).

(38) Moindin, aujourd'hui hameau de la commune d'Archigny, à moins d'une demie-lieue de l'abbaye de l'Etoile (cf. L. REDET, Dictionnaire topographique du département de la Vienne (1881), art. « Moindin », p. 267). — LALANNE, dans son Histoire de Châtelleraud, t. I, p. 167, et à sa suite plusieurs auteurs, ont confondu cet ermitage de « Mondenium » avec Mondion, commune du canton de Leigné-sur-Usseau, au nord de Châtelleraud.

 

 (39) Nous n'avons plus la charte de donation du lieu de Moindin à Isembaud, mais seulement une allusion à un don antérieur dans celle du domaine de la Perchaie ; l'abbé Arraud envisage en effet le retour éventuel de ces deux domaines à Fontgombault (cf. ci-dessous).

(40) En 1726, d'après la déclaration que l'abbé de l'Etoile fit à l'Assemblée générale du Clergé de France pour sa session de 1730, le fief de Moindin jouissait encore du droit de haute, moyenne et basse justice, et comptait trois métairies, une borderie et une tuilerie ; cependant les terres de ce domaine y sont dites « très mauvaises » et ne produire « qu'à force de grand travail » (Arch. dép. Vienne, G 423) — Vers 1756, Moindin rapportait à l'abbaye de l'Etoile 132 livres 15 sols (Déclaration de dom Joseph DREUX, abbé de l'Etoile ; Arch. dép. Gers, série I, 1345).

(41) «... praedictus Jocus (de Perchea), et alius quem Modeni aedificavit » (HMF, f° 15 ter).

(42) Ibid.

(43) « Salvaricus dat Deo et abbatie de Moyden in manu Isembaudi abbatis antequam Stella inceperetur, terram Gastine » (avant 1124) (DUCHESNE, op. cit., f» 167').

(44) Dans la clause citée ci-dessous, l'abbé Arraud avait laissé entrouverte la porte de son abbaye, dans le cas où ces « fugitifs » souhaiteraient revenir à Fontgombault.

(45) En cédant aux ermites Geoffroy Gastineau et Bertrand le manse de Villesalem, Pierre de l'Etoile n'avait pas posé de conditions ; aussi lorsque les deux solitaires abandonnèrent leur expérience érémitique, ils se crurent propriétaires des lieux et en firent don à Fontevrault ; Pierre de l'Etoile eut alors beaucoup de peine à faire valoir les droits de Fontgombault (HMF, f" 4v-6r).

(46) « Si vero locus ipse (de Perchea) in desolutionem (sic) redactus fuerit... praedictus locus et alius quem Modeni aedificavit, jam dictus Isembaudus ad nos cum fratribus qui consenserint revertetur » (HMF, f° 15 ter). — Quelques années plus tard (en 1138 ou 1139), dans la cession qu'il fit du domaine de Romilly aux Bénédictines de Saint-Avit de Châteaudun, Arraud avait inséré une clause toute semblable (Arch. dép. Eure-et-Loir, H 4416) ; on voit par là, que si l'abbé Arraud avait le coeur large, ce n'était pas un prodigue.

(47) La Perchaie, hameau sur la commune de Saint-Pierre-les-Eglises, situé à environ 3 kilomètres au nord-est de Chauvigny. — Dom ANDRIEU transcrivit vers 1699 l'acte de la donation de la Perchaie par l'abbé Arraud, d'après une copie qui se trouvait dans le chartrier de l'abbaye de l'Etoile, (HMF, f° 15 ter) et qui est aujourd'hui aux archives départementales de la Vienne en 1 H 9, liasse 2.

(48) Le fief de la Perchaie était compris dans la baronnie de Chauvigny, mais relevait directement de la châtellenie d'Harcourt (L. REDET, op. cit. p. 306), au franc devoir d'un gant blanc — valeur de 12 deniers « (Ch. TRANCHANT, Chauvigny de Poitou et ses monuments », Paris, 1884, p. 65).

 Ce devoir avait été consenti avant 1356, à la suite d'une transaction entre Pierre de Béronne, abbé de l'Etoile, et Guy de Gouzon, chevalier, seigneur de Gouzon et du chastel d'Harcourt originaire du Bourbonnais. (Arch. dép. Vienne, 1 H 9, liasse 2 ; et LALANNE, Notice sur l'ancienne abbaye royale de N-D. de l'Etoile, parue dans le périodique « Le Châtelleraudais » (1854), arch. dép. Vienne, carton 34, pièce 14, pp. 4 et 6).

(49) Confirmation (1194) par Guy et Aimery Sénebaud, frères, de la donation consentie antérieurement à l'abbaye de l'Etoile par Lannoy de Mirebeau et par son fils Geoffroy, de partie du fief de la Peichaie et de la Barre (Commune de St-Pierre-les-Eglises), (Arch. dép. Vienne, 1 H 9, liasse 2). — Dans le même acte, les frères Sénebaud ratifient la concession d'une partie de la terre de l'Espinasse (Commune de Saint-Pierre-les-Eglises) faite à l'abbaye de l'Etoile par Guy de Cheneché (« Chenerhec ») et Philippe de Beaumont; l'autre partie de ce domaine avait été cédée à Isembaud, avant 1140, par Barthomé, fils de Renou Sénebaud (DUCHESNE, op. cit., f° 167r).

(50) En 1726, le domaine de Moindrin ne rapportait que 135 livres (Arch. dép. Vienne, 1 H 9, liasse 2).

(51) HMF, f° 15 ter. — Du XIVe au XVIIIe siècle, l'abbaye de l'Etoile eut à soutenir de nombreux procès au sujet de son fief de la Perchaie (cf. Arch. dép. 1 H 9, liasse 2), qui perdit ainsi de son importance. En 1730, il jouissait seulement de la moyenne et basse justice, comprenait une métairie, plus un droit de terrage sur les paroisses de Saint-Pierre-les-Eglises, de Saint-Martial et de Sainte-Radegonde ; le tout était affermé pour 200 livres (Déclaration de l'abbé de l'Etoile à l'Assemblée Générale du Clergé de France ; arch. dép. Vienne, 1 H 9, liasse 2).

 En 1791, le domaine de la Perchaie, estimé en capital à 5.900 livres, fut vendu comme bien national le 25 avril 1791 à Jérôme Ledonné, chirurgien à Chauvigny pour 16.200 livres (Arch. dép. Vienne, Q 2-37, n» 193 ; et G 423).

(52) Commune de Bonnes, à environ 6 kms au nord de Chauvigny.

(53) Ce fut sans doute en souvenir de son abbatiat à l'abbaye Saint-Pierre de Preuilly (cf. Claude GARDA, L'ermitage de Saint-Pierre-en-Vaux, dans « Bulletin des recherches archéologiques ... du pays Chauvinois », n° 9 (déc. 1970), p. 3).

(54) L'abbé LALANNE (Notice sur l'abbaye de l'Etoile, p. 1), ayant lu dans dom ESTIENNOT (op. cit.. p. 350) qu'Isembaud avait fondé un ermitage « in valle Sancti Pétri ad Vigennam » ; a cru qu'il s'agissait de Saint-Pierre-de-Dangé, situé aussi dans la vallée de la Vienne, mais beaucoup plus au nord ; ESTIENNOT avait pourtant précisé : « vulgo Saint-Pierre-en-Vaux ». — Aujourd'hui, l'ancien ermitage, habité par des particuliers, n'est plus connu que sous le nom de « Saint Pierre-d'En Haut » (cf. Cl. GARDA, op. cit., p. 3).

(55) L'ermitage avait été installé sur les pentes d'un vallon solitaire qui débouche sur la rive droite de la Vienne, à environ 1,5 km au nord du bourg de Bonnes.

(56) «... Joscelinus Otgerii, qui dederat aliquando abbati Isembaudo vallem sancti Pétri ut monasterium construeret » (DUCHESNE, op. cit., f° 167r).

(57) Arch. dép. Vienne, G 21, et Ch. TRANCHANT, Touffou et les seigneurs, dans « Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest », pp. 182-183.

(58) Sur la famille Oger, voir Joseph SALVINI et l'abbé LONGER, Le château de Touffou, dans « Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest », 1963, pp. 8990, et Ch. TRANCHANT, op. cit., pp. 182-183. — A l'époque de la donation de Saint-Pierre-en-Vaux, les Oger étaient déjà possessionnés à Bonnes et aux alentours ; au siècle suivant, sur la même paroisse de Bonnes, ils tiennent le fief et le château de Touffou, dont ils sont les premiers seigneurs connus (cf. TRANCHANT, op. cit.).

(59) Un mémoire sur Saint-Pierre-en-Vaux, rédigé au début du XVIIIe siècle par un religieux de l'abbaye de l'Etoile à l'attention du frère Jacques Relieux qui y vivait en solitaire, fait expressément état des premiers bâtiments et de la chapelle construite par Isembaud, dont il y avait encore plusieurs vestiges (Arch. dép. Gers, fonds Vergés, série I, n° 1337).

(60) Des particuliers jaloux « s'emparèrent violemment de ces biens... Ajoutez qu'ils démolirent l'église, les bastimen's, et se saisirent de tous les mathériaux... Ces messieurs vexèrent si cruellement ces bons Pères, qu'ils furent obligés de quitter le monastère de Saint-Pierre-en-Vaux » (ibid.). D'après DUCHESNE (op. cit., f° 167r), ces mauvais voisins auraient aussi contraint Joscelin Oger à annuler sa donation : « mais bientost après, sur quelques difficultés arrivées entre luy et les habitans du voisinage... il (Oger) changea de résolution ».

(61) DUCHESNE, f" 167r ; ESTIENNOT, op. cit., p. 350 ; FONTENEAU, LVIII, p. 377 ; Arch. dép. Gers, série I, 1337.

(62) Dom Jean-Bernard de Cerizay de Teille, visiteur de l'ordre de Cîteaux en Ile-de-France, Brie et Champagne, abbé régulier de l'Etoile depuis 1676, mourut à l'abbaye de la Merci-Dieu le 16 septembre 1702.

(63) Arch. dép. Gers, I, 1337. — A l'époque de la restauration de l'ermitage, il ne lestait plus que le pignon de l'oratoire primitif : « Dieu ne permit pas qu'elle (l'église) fut entièrement détruite, parce qu'ils (les usurpateurs) laissèrent sur pied un pignon où joignait une espèce de clocher » (ibid.). Dom de Cerizay fit « rebastir une chapelle jointe et incorporée à cet ancien pignon, qui fut ensuite consacrée avec toutes les cérémonies requises » (ibid.) — Quant au logis, il fut entièrement reconstruit par cet abbé.

(64) «... il (dom de Cerizay) y joignit un bastiment capable de loger deux très vertueux solitaires, qui y résident encoie actuellement, et y servent Dieu avec piété, sous l'authorité de MM. les evesques de Poictiers » (ibid.).

(65) Cf. Cl. GARDA, op. cit., p. 5.

(66) Le frère Jacques Relieux, installé à Saint-Pierre-en-Vaux par dom de Cerizay en 1682. C'est à lui que fut adressé le précieux mémoire dont nous avons parlé, et qui avait été rédigé entre 1702 (année de la mort de dom de Cerizay) et 1712 (mort de frère Dugué) ; nous ne connaissons pas la date précise de son décès.

(67) Registres paroissiaux de Bellefonds (1648-1725) (Arch. dép. Vienne). Il fut enseveli dans la chapelle, devant l'autel ; sa tombe fut ouverte il y a quelques années : auprès de son squelette se trouvait une sorte de coupelle de verre, destinée sans doute à recevoir de l'eau bénite (cf. Cl. GARDA, op. cit., p. 7).

(68) Arch. dép. Vienne, Q-2/2, n» 149.

(69) Isembaud expulsé de Saint-Pierre en-Vaux « tandem vallem Fontiscalcis, vulgo Fontachaux, advenit » (ESTIENNOT, op. cit., p. 350 ; FONTENEAU, LVIII, p. 377).

(70) « L'abbaye de l'Estoile... s'associe à la congrégation de Cisteaux environ l'an 1145 ; ses religieux étoient auparavant bénédictins » (Mémoires historiques pour servir à l'histoire du Poitou, par Mc BOURGEOIS, avocat au Siège présidial de Poitiers, dans coll. FONTENEAU, XXXII, f" 125).

(71) Guy de Cenvis (al. Cénuis), issu d'une famille qui, au XIIe siècle, possédait à Vicq-sur-Gartempe, la terre aujourd'hui dénommée de Sanvy (H. et P. BEAUCHET-FILLEAU, Dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou, t. II (1895). Cette famille se montra très libérale envers les monastères du Poitou.

(72) ESTIENNOT, op. cit., pp. 648 et 643 ; copie dans FONTENEAU, LVIII, p. 375 ; GALLIA, II, Instr. col. 378. — Le véritable fondateur de l'abbaye n'est pas Isembert Sénebaud, comme il est dit clans GALLIA (II, col. 1352) : « Stella... conditur ab Isemberto dicto Sennebaut », mais bien ce Guy de Cenvis, qui en outre, en fut le « constructeur » (cf. ci-dessus — article « Sénebaud »). Isembert Sénebaud, nous l'avons dit plus-haut ne fut que !'« augmentateur » du fonds primitif, par le don qu'il fit à l'abbaye de l'Etoile du fief d'Aigues-Joignant.

(73) GALLIA, II, Instr. col. 378. — Plus tard, Guy et Pierre de Cenvis firent don à l'abbaye de l'Etoile d'une terre sise près de l'abbaye (v. 1148-67) ; et en 1182, Pierre de Cenvis, partant pour Jérusalem, fit don, avec son frère Hugues et après le décès de son autre frère Renaud, de ce qu'ils possédaient dans le bois de Tiraud (BEAUCHET-FILLEAU, op. cit., II, p. 155) ; ce fut plus probablement une confirmation qu'un don, puisque Guy de Cenvis avait déjà cédé en 1124 le bois de Tiraud « en son entier ».

(74) « Dominus Rorgo et dominus Simon, domini Angliae, hanc eleemosynam concesserunt et laudaverunt » (GALLIA, II, Instr. col. 378).

 — Rorgues de Lusignan, époux d'Almodis, et Simon de Lezay, co-seigneurs d'Angles, étaient fils d'Hugues le Brun, sire de Lusignan, époux de Sarrazine (BEAUCHET-FILLEAU, op. cit., I, pp. 78-79).

(75) « Factum fuit hoc anno ab Incarnatione M.C. XXIV » (GALLIA, II, Instr. col. 378). — Le texte de cette donation-fondation qui nous est parvenu, n'est sans doute qu'une copie postérieure de la charte de 1124, car après la mention des témoins et de cette date, apparaît le nom de Gilbert de la Porrée, évêque de Poitiers, dont l'épiscopat commença en 1142, soit deux années après la mort d'Isembaud, bénéficiaire de cette donation.

(76) «... dedi fratribus Deo ibi servientibus et abbatiae quantum primo nomen Stellae accepit; ... dedi adhuc... abbatiae suae Stellensis... » (GALLIA, II, Instr. col. 378).

(77) Cf. ci-dessus note 5.

(78) Le bienheureux Géraud de Sales avait fondé en Poitou les ermitages de Bonnevaux (arr. de Poitiers), du Pin (arr. de Vouillé) des Alleuds (arr. de Melle), des Châtelliers (arr. de Parthenay) et de l'Absie-en-Gâtine (arr. de Parthenay) (Chronicon S. Maxenlii, ad an. 1120, Bibl. nat. lat. 4892, f° 206r).

Au début, dans ces fraternités Géraldiennes, on vivait à la manière des Pères du désert ; mais à partir de 1117, sous l'impulsion de l'évêque de Toulouse, Géraud impose à ses établissements la règle de saint Benoît avec des coutumes cisterciennes (R.M.O. LENGLET, La biographie du bienheureux Géraud de Sales, dans la revue « Cîteaux » 1978, pp. 9-10, peu avant sa mort, il érigea tous ses monastères. en abbaye (Dom LAPORTE, Aux sources de la vie cartusienne, II-l (1960), p. 283) ; après le décès de Géraud, ses monastères se greffèrent l'un après l'autre sur le tronc cistercien (O. LENGLET, op. cit., p. 39).

(79) Cette donation nous est connue par la confirmation qui en fut faite en 1147, au temps de l'abbé Isaac, par Ranulphe, Guillaume et Foulques, fils de cet Isembert Sénebaud, seigneur de Cors, (DUCHESNE, op. cit., f" 167v) qui vers 1110 avait fondé le prieuré fontevriste de La Puye. — Le fief d'Aigues-Joignant, situé au confluent de l'Anglin et de la Benaise, continua à mouvoir de la seigneurie de Cors jusqu'à la fin de l'Ancien Régime.

(80) « Arnaudus Bruni, qui ad constructionem abbatie de Stella, Guidonem de Cenuis plurimum inerat procuravit et oblinuit confirmationem donationis bocci de Spina a Petro Relie, qui dominus feodi erat, praesente Isembaudo abbate » (DUCHESNE,, f" 167r).

(81) Après avoir été réformée par saint Benoît d'Aniane, l'abbaye de Saint-Savin se trouva être la « grand'mère » de Cluny par le truchement de l'abbaye S. Martin d'Autun qu'elle avait restaurée au IXe siècle.

(82) « Monasterium de Sancto Savino dédit Isembaudo ejusque successoribus... pedagium, habente praedicta terra Sancti Savini... praesentibus Soldano Englae (Soudan, sgr d'Angles) et multis aliis » (DUCHESNE, f° 167r).

(83) ESTIENNOT, op. cit., p. 351 ; GALLIA, II, col. 1352.

(84) Ibid. — ESTIENNOT ajoute que de son temps, à cause des guerres et des incendies, il ne restait plus trace de la tombe d'Isembaud ni de celles des autres abbés de l'Etoile : « Isembaudus praefuit... sepultus que est in basilica sui monasterii, quae cum ter aut quater arserit et belliois furoribus expiata fuerit, nulla in ca modo restant nec Isembodi nec aliorum abbatum ac nobilium monumenta ».

(85) ESTIENNOT, op. cit., p. 352 ; GALLIA, II, col. 1352.

(86) Nous n'avons plus le texte de la bulle rattachement de l'Etoile à Cîteaux. Selon la plupart des auteurs, elle serait de 1145 ; ainsi Gaspard JONGELIN, Notifia abbatiarum ordinis Cisterciensis, Cologne, 1640, lib. I, p. 63 ; de même le P. Ange MANRIQUE, dans Cisterciensium... annalium, Lyon, t. II (1643) ; celui-ci compte pour la seule année 1145 plus de quinze nouvelles abbayes cisterciennes fondées ou rattachées, dont l'abbaye de l'Etoile en Haut-Poitou, et celle de Trisay (Trisagium) en Bas-Poitou ; l'une et l'autre de la filiation de Pontigny (ad. an. 1145, cap. X, p. 21) ; la bulle de rattachement de l'Etoile à Cîteaux serait du 27 juillet (VI kal. Augusti) ; aussi du 27 juillet selon dom BEAUNIER, Recueil historique des eveschés, abbayes et prieurés de France, t. I (1726) p. 178 ; du 25 juillet 1145 selon A. HOSTE, Isaac de l'Etoile. Sermons, t. I (1967), p. 15. — Mais pour GALLIA (t. II, col. 1352) et pour dom BESSE (Abbayes et prieurés de l'ancienne France, t. III (1910) (p. 238), la bulle de rattachement eut été donnée en 1147 par Eugène III, « anno secundo » et au temps de Bernard, deuxième abbé de l'Etoile. Devant ces deux traditions si précises, nous pensons que l'abbé Bernard sollicita et obtint d'Eugène III deux bulles pour son abbaye : la première en 1145 pour entériner îe rattachement de son monastère à Cîteaux, puis une seconde, en 1147, pour confirmer ce rattachement et les privilèges y attachés.

(87) A. MANRIQUE, op. cit., ad. an. 1145, cap. X, p. 21 ; M-A. DIMIER, art. « Etoile » (L'), dans Dictionnaire d'Histoire et de Géographie ecclésiatiques, t. XV, col. 1287.

(88) Au XIIe siècle et en moins de 30 ans, douze abbayes cisterciennes furent fondées dans le diocèse de Bourges (Chan. RENAUDET, Histoire de l'Eglise de Bourges ; Arch. du Grand Séminaire de Bourges, ouv. dactyl., t. I, p. 326), soit autant que ce diocèse comptait d'anciennes abbayes bénédictines.

(89) Ces deux abbayes furent d'abord des ascétères fondées par Géraud de Sales. — Bonnevaux (cant. de Vivonne) devint cistercien avant 1124 (DHGE, art. Bonnevaux) ; et le Pin (cant. de Vouillé), en 1141. Ces deux rattachements à l'ordre de Cîteaux précédèrent la fondation de l'abbaye cistercienne de la Merci-Dieu (1151), et l'affiliation à Cîteaux de l'abbaye des Châtelliers en 1163.

(90) L'abbé Bernard vivait encore le Ier février 1147, date de l'expédition de cette bulle (cf. GALLIA, t. II, col. 1352 : « des calendes de février »).

(91) L'abbé Isaac apparaît cette même année 1147 comme abbé de l'Etoile dans la confirmation, par les fils d'Isembert Sénebaud, sgr de Cors, du fief d'Aigues-Joignant à l'abbaye de l'Etoile (DUCHESNE, f» 167v). — Sur la vie, les travaux et la personnalité de ce moine anglais devenu abbé de l'Etoile et réputé bienheureux, voir Anselme HOSTE, op. cit., t. I (1967), pp. 1-64, avec une bibliographie, pp. 65-66.

(92) Cette nouvelle bulle fut donnée en 1149 (DUCHESNE, f» 167r) ; elle fut délivrée à Châlon (« Cabilone ») le « V des calendes de novembre » (28 octobre), selon GALLIA, t. II, col. 1353, et FONTENEAU, LVIII, p. 369.

(93) Aux XIIe et XIIIe siècles, les principaux « augmentateurs » du fonds primitif de l'abbaye de l'Etoile, sont, outre les descendants de Guy de Cenvis et d'Isembert Sénebaud : Guillaume de la Trémoille (v. 1150), Geoffroy de Mirebeau (v. 1147), Guillaume, sgr de Parthenay, les seigneurs d'Angles-sur-Anglin et ceux de Chauvigny, Robert de Buzançais, et au début du XIIIe siècle : Aliénor d'Aquitaine (1201) (Titres de l'abbaye de l'Etoile, arch. dép. Vienne, 1 H 9/liasse 2).

(94) Dom MARTENE, Thésaurus anecdotorum, t. IV, col. 1252.

(95) Après les guerres de Religion, l'abbaye de l'Etoile eut beaucoup à souffrir de l'emprise de François de la Béraudière, gouverneur du Châtelleraudais. Sous le couvert des abbés confidentiaires François Milon (1590-1616) et Léonard de la Béraudière (1616-21), François de la Béraudière vendit à l'encan les cloches de l'église abbatiale et chassa les moines (GALLIA, t. II. col. 1354 et Animadv.). C'est probablement à cette époque que l'on doit placer l'exode des moines de l'Etoile, dont partie se réfugia à l'abbaye de Preuilly-sur-Claise, partie à Fontgombault, tandis que quelques religieux restèrent à proximité de leur abbaye (cf. Mémoire à frère Jacques Relieux, cité).

(96) Dom Jérôme Petit (1621-35), ancien maître des novices de l'abbaye de Clairvaux, dom Charles Bourgeois (1636-48), dom Placide Petit (1648-67), frère de l'abbé Jérôme et antérieurement abbé de la Chalade en Lorraine ; Claude Petit (166776), neveu des abbés Jérôme et Claude, restaurateur des bâtiments de l'Etoile ; Jean-Bernard de Cerizay de Teille (1676-1702), le restaurateur de l'ermitage de StPieire-en-Vaux (cf. LALANNE, Notice sur l'abbaye de l'Etoile, op. cit. pp. 8-9).

(97) Sous les derniers abbés — François de Chéreil (1702-13), Jean Benoist (1713-38), Nicolas Quesnet (1738-v. 1748), Joseph Dreux (v. 1748-58), Joseph-Marie de la Corne de Chapt (1758-79) et Jean-Thècle de Vergés (1780-90), aumônier du comte d'Artois — l'abbaye tombée dans un extrême besoin, dut procéder à des emprunts, tandis que la communauté se réduisait. Les deux derniers abbés sont des commendataires.

(98) M-A. DIMIER, art. « Etoile », dans DHGE, t. XV. col. 1288. — A la Révolution, dom Adnet expulsé de l'abbaye de l'Etoile, devint curé constitutionnel d'Antigny près de Mirebeau, puis curé de Chauvigny (Marquis de ROUX, Histoire de la Révolution à Poitiers et dans la Vienne, Lyon, 1952, p. 303).

(99) HMF, f° 15 ter. — A cette époque où prolifèrent les fondations érémitiques, semi-érémitiques et monastiques, souvent très différenciées et évolutives, il n'est pas toujours aisé de préciser le sens des termes « ermitages » ou « monastères » rencontrés dans les documents (cf. dom Jean BECQUET, L'érémitisme clérical et laïc dans l'Ouest de la France, extrait de L'eremetismo in Occidente nei secoli XI' XII' p. 185 (Session internationale d'études, tenue à Mendola en 1962). — Les difficultés augmentent et tel est le cas d'Isembaud, lorsque les termes « ermitages » et « monastères » sont associés (cf. ci-après la note 108).

(100) HMF, f° 7v.

(101) «... alius (locus) quem Modeni aedificavit » (HMF, f° 15 ter).

(102) Voir ci-dessus « Saint-Pierre-en-Vaux ».

(103) Voir AMANN et DUMAS, dans Coll. FLICHE et MARTIN Histoire de l'Eglise, t. VIT, la réforme monastique, p. 339.

(104) HMF, f° 15 ter.

(105) Dom MARTENE, Vita beati Geraldi, dans AA.SS. Oct.-X, t. LIX, p. 260, § 23 ; et O. LENGLET, op. cit., p. 39.

(106) Nous avons signalé plus haut que l'abbé Arraud avait envisagé leur retour éventuel à Fontgombault.

(107) Voir Cl. GARDA, op. cit., p. 4 ; et dom Guy OURY, L'érémitisme dans l'ancien diocèse de Tours au XII' siècle, dans « Revue Mabillon », 1971, p. 49.

(108) « fratrum religiosorum monastice et heremetice viventium » (HMF, f° 15 ter).

(109) ne voit pas en effet que les abbés de Fontgombault et de Preuilly se soient intégrés si peu que ce soit dans les fondations d'Isembaud.

(110) Moins de deux lieues entre la Perchaie et Font-à-Chaux ; deux petites lieues également entre Saint-Pierre-en-Vaux et Font-à-Chaux.

(111) Sur ce point, Isembaud suivait encore l'exemple de Géraud de Sales qui visitait ses fraternités (cf. O. LENGLET, p. 9).

(112) A l'ermitage de la Fontaine-Gombault, bien connu d'Isembaud, on pratiquait déjà ce genre de vie érémético-monastique.

(113) Saint Romuald et les ermites calabrais du XIe siècle avaient mis en l'honneur la prédication itinérante (J-B. MAHN, L'ordre cistercien et son gouvernement, des origines au milieu du XIII' siècle, Paris, 1945, pp. 28-29) ; ils firent école dans les milieux érémitiques de la deuxième moitié du XIe siècle et de la première du XIIe.

(114) Dom IAPORTE, Aux sources de la vie cartusienne, t. I de la IIe partie, p. 304.

(115) L'ermitage de la Fontaine-Gombault se trouvait sur la « rive poitevine » de la Creuse, en face du « coenobium » qui fut construit sur la rive droite, en Berry ; quant à l'ermitage de Villesalem, fondé sur un manse cédé aux ermites par Pieire de l'Etoile, il se trouvait sur l'ancienne paroisse de Journet, non loin de la Trimouille. fr. Jacques de BASCHER m.b.

 

 (116) Outre les quatre ermitages dont il a été quesiion ci-dessus, l'abbé LALANNE (op. cit., t. I, p. 167) attribue à Isembaud une part dans la fondation du monastère (grandmontain) de Fontmaure (commune de Vellèches, Vienne), et dans ceile du prieuré de Saint-Jean-de-Bussières, à 2 kms de Dangé-sur-Vienne. Cette assertion est purement gratuite (cf. Cl. GARDA, op. cit., p. 5, n. 12).

— Par contre, on peut se demander si Isembaud, devenu abbé de l'Etoile, n'installa pas une petite communauté d'ermites ou de religieux dans le très important domaine d'Aigues-Joignant (commune de St-Hilaire-sur-Bénaise), qui lui avait été cédé vers 1130 par Isembert Sénebaud, sgr de Cors (DUCHESNE, f° 167v) ; encore aujourd'hui on peut apercevoir les restes d'une très ancienne chapelle dans la cave d'une annexe bâtie au XIXe siècle, tout près de l'ancien manoir fortifié ; on peut faire la même hypothèse pour Font-Hugon, autre dépendance de l'abbaye de l'Etoile, sise dans l'ancienne paroisse de St-Hilaire-sur-Bénaise, qui encore au XIVe siècle, était une grange régie par un religieux convers de l'abbaye de l'Etoile, appelé « magister » (Arch. dép. Indre, H 156, titres divers concernant l'abbaye de l'Etoile).

(117) Voir ci-dessus note 78.

(118) Guy DEVAILLY, Histoire religieuse de la Touraine, 1975, p. 70 ; et dom Guy OURY (art. cité, p. 50). Ce que dom OURY dit de l'érémitisme de Pierre de l'Etoile vaut « a fortiori » pour celui d'Isembaud.

(119) A l'époque où l'abbaye bénédictine de l'Etoile fut fondée, le monachisme bénédictin « rénové » n'était guère représenté en Poitou que par les cinq monastères de Géraud de Sales cités plus haut.

(120) En 1124, avec la création de l'abbaye de l'Etoile, qui s'ajoutait au cinq monastères de Géraud de Sales, la proportion des abbayes à monachisme rénové était presque du simple au double, puisqu'à cette époque et dans le diocèse de Poitiers (limites actuelles), on pouvait compter neuf abbayes de type bénédictin traditionnel.

 

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