Archéologie : Ruines et légende du château de Bélesbat de la cité engloutie dans le Pagus d'Herbauges.
A quelques kilomètres du château de Talmont se trouvent deux petits bourgs: Jard et Saint-Vincent, reliés par un territoire auquel on a donné le nom de Bélesbat, c’est-à-dire : Ville de plaisirs.
Cette dénomination n’était pas sans fondement, car nul lieu sur terre ne rivalisait avec Bélesbat pour la débauche et le libertinage. Les fêtes s’y renouvelaient sans cesse, et des curieux de tous pays y accouraient en foule. Les orgies succédaient aux orgies, et comme autrefois, les cinq villes coupables, Bélesbat appelait sur elle la colère du ciel. Le feu qui détruisit Sodome et Gomorrhe avait encore là une proie à saisir.
Voici ce que raconte la légende :
Un jour, une grande fête est organisée à Bélesbat. On en parlait à vingt lieues à la ronde, et un nombre considérable d’étrangers s’y étaient donné rendez-vous. Au milieu des gens heureux, se rencontre toujours quelque misérable.
Un pauvre pêcheur, ce jour-là, presque mourant de faim, espérant trouver bonne aubaine, vient frapper à l’une des portes de cette ville enchanteresse. On le reçoit avec un vif empressement. Le malheureux se sent soulagé déjà par cet excellent accueil. On l’introduit dans une des salles tout resplendissantes d’or, de pierreries et de lumières. Il parvient ainsi jusqu’à un brillant appartement, où un festin somptueux attend de nombreux convives. L’étranger reste seul, pendant que les gardiens vont chercher de nouveaux visiteurs. Un sentiment de curiosité anime le pauvre pêcheur, si peu habitué à un tel luxe. Il oublie sa faim dévorante, et passe en revue le lieu où il se trouve. Tout d’abord, une petite porte dérobée attire son attention; sans bruit il l’entr’ouvre seulement. Quelle est sa stupeur!
Cette porte donne accès sur de vastes cours, entourées de hautes murailles.
Là, sont jetés pêle-mêle des ossements humains: jambes, bras coupés par morceaux, cadavres mutilés, têtes sanglantes, etc... Le sol en est jonché. Le pauvre homme, à cette vue, sent ses jambes fléchir. Quel sort l’attend dans ce lieu du crime? Qu’est-il venu chercher au milieu de ces cadavres? la mort, sans aucun doute.
Il ne perd pas un instant; avec un sang-froid étonnant en pareille circonstance, il va prévenir ses hôtes et leur déclarer qu’il veut d’abord ramasser en lieu sûr ses filets de pêcheur, — toute sa fortune, — puis il reviendra sur l’heure prendre son repas.
Une fois sorti de ce lieu maudit, l’infortuné visiteur se précipite dans la forêt, pousse un cri d’alarme, réclame le secours de toutes les autorités divines et humaines. Cette voix se fait entendre au loin, et de tous côtés arrive une foule énorme, impatiente de cerner Bélesbat. La ville est promptement envahie.
Les druides en tête la parcourent en tous sens, appelant sur cette société coupable les châtiments célestes. Aussitôt la mer, obéissant à l’ordre du grand Créateur, commence à s’agiter, à bouillonner, et, soulevée par une soudaine et effroyable tempête, engloutit en un instant la cité infâme.
Le feu du ciel consume ce qu’il en reste, et une pluie de sable achève sa destruction... La ville de Bélesbat n’a jamais été rebâtie. La main foudroyante de la mort y planera, sans doute, jusqu’à la fin des siècles Les palais renversés ont fait place aux ronces, aux chardons, aux broussailles.
Seuls, les esprits ou farfadets y viennent encore chercher la trace des richesses englouties Des pierres druidiques attestent que ce pays fut autrefois habité.
Les apôtres de l’antique Vendée, S. Martial, S. Hilaire de Poitiers et Saint Martin du Vertou venaient, dans ces régions, dresser leurs autels et bâtir des temples au vrai Dieu.
Tout près de là, au bourg de Jard, M. de Rochebrune découvrit, le 29 juillet 1878, la curieuse sépulture d’un légionnaire romain.
Des restes de construction témoignent aussi de l’existence d’une station romaine, en cet endroit.
La commune de Saint-Vincent garde encore le souvenir de l’ancien culte druidique, dans les noms de la Garne, du Champ des fées et de la Chapelle des fées.
Il est donc difficile de méconnaître sous ces ruines de Bélesbat, les vestiges d’une grande cité antique, maintenant enfouie sous des montagnes de sable, foudroyée par le Dieu vengeur, qu’on ne brave pas impunément.
Selon certains érudits, la cité de Bélesbat n’a point été submergée par les eaux vengeresses. Elle n’a même jamais existé.
Pour nous, humble et crédule disciple des vieux légendaires, nous répétons : Si quelque enseignement se cache en cette histoire, Qu’importe, il ne faut pas la juger, mais la croire. La croire ! Qu’ai-je dit? Ces temps sont loin de nous ! Ce n’est plus qu’à demi qu’on se livre aux croyances. Nul, dans notre âge aveugle et vain de ses sciences, Ne sait plier les deux genoux.
En Vendée : nouvelles soirées vendéennes, portraits, récits, légendes / l'abbé F. Charpentier
DÉCOUVERTE du Manoir de Bélesbat en Saint-Vincent-sur-Jard.
Depuis que l'Abbé F. Baudry a signalé, en 1864, l'existence des ruines de Bélebat sous les dunes actuelles de Saint-Vincent-sur-Jard, plusieurs hypothèses furent émises à ce sujet sans que l'on ait pu avoir d'autres précisions que celles apportées par le Docteur Marcel Baudouin, lors de ses fouilles de 1905 et consignées dans son remarquable travail sur Bélébat (Revue du Bas-Poitou, 1924).
Le propriétaire de l'emplacement du château, M. Gaillard Ferdinand, demeurant au bourg de Saint-Vincent-sur-Jard, n'ayant pu récolter sur le penchant nord et le sommet de la butte, où M. Baudouin avait découvert des murs, se décida à fouiller ce terrain, afin d'en extraire les pierres dont il avait besoin pour construire des dépendances de sa maison.
C'est ainsi qu'avant la guerre, il avait déjà démoli une partie du château !
Voulant faire édifier, au bourg, une maison pour son fils, il se mit, à la fin de novembre 1931, à démolir le reste. M'étant aperçu, quelques jours plus tard, de ces travaux de destruction, j'ai suivi attentivement la suite de ses fouilles, notant et mesurant.
D'après mes observations et les renseignements fournis sur place par le propriétaire, son fils Gaillard Eugène et son gendre, Vrignaud Théophile, qui ont travaillé à celle démolition, j'ai pu établir un plan de l'ensemble du Château (Vig. 1.).
Fig. — Plan du CHATEAU DE BÉLÉBAT, à Saint-Vincent- sur-Jard, dressé par M. C. Delaire (1931). — Echelle : 1/2 cent. par mètre.
Les murs restants avaient une hauteur de 2 mètres environ dans la partie sud et de 1 mètre à 1 m. 30 au nord. Une couche d'environ 0 m. 40 les recouvrait. Ils étaient construits avec des galets de mer, liés par de l'argile (argile grise pour le mur ouest ; « terre rouge » pour le mur nord). Il y avait très peu d'éboulis en dehors des murs ; mais l'intérieur en était rempli.
Ce petit manoir ne comprenait au rez-de-chaussée qu'une vaste salle composée :
1° d'une partie carrée de 4 m. x 4 m. formant avant-corps au sud, entièrement dallée en pierres calcaires et contenant, dans le mur sud, une cheminée et un évier qui montrent qu'il sagissait de la cuisine ;
2° d'une partie rectangulaire de 9 m. 45 sur 6 m. 15 qui devait être la salle à manger. Rien ne séparait cette pièce de la cuisine. Peut-être, la colonne de granulite trouvée par M. Baudouin en 1905, avait-elle sa place à la séparation des deux salles ? Le pavage de la grande pièce était formé de lignes de dalles en pierres blanches de 0 m. 33 de large, longeant les murs et dessinant à l'intérieur six carrés de 2 m. 60 de côté, carrelés en diagonale avec des petits carreaux de brique rouges de 0 m. 11 de côté.
La portion de mur au sud de cette salle contenait des vestiges d'une cheminée : deux pierres de granite à plat et deux rangées de deux pierres semblables posées sur champ dans le fond. Cette cheminée était large de 1 m. 50 environ. Le mur nord était creusé de trois renfoncements de 1 m. 95 d'ouverture et 0 m. 66 de fond, aux parois faisant un angle de 120°. Ces parois étaient revêtues d'un mortier de chaux, peint en gris bleuté. Dans les éboulis, on a trouvé aussi en divers endroits de petits morceaux de mortier de chaux. Le premier de ces renfoncements, à l'ouest, n'était pas carrelé. Pourquoi ?... Celui du milieu l'était, avec les mêmes carreaux rouges que la salle ; le troisième avait été démoli il y a 20 ans.
Le pied des murs ne descendait pas plus bas que le carrelage, mais à l'extérieur on remarquait une couche de sable pur de 0 m. 30 à 0 m. 40 d'épaisseur ; le carrelage était donc au-dessous du niveau du sol.
Dans la partie des fouilles que j'ai surveillées, il n'y avait ni fenêtre ni porte et M. Gaillard affirme n'en avoir vu aucune trace dans tout ce qu'il a démoli. Etait-ce une salle fortifiée ou la porte obstruée par des éboulis lui est- elle passée inaperçue ? Aucune trace d'escalier.
A l'angle sud-ouest de ce DONJON, se trouvait une tourelle, d'environ 3 m. 50 de diamètre extérieur et 1 m. 25 de diamètre intérieur, sans communication avec l'intérieur du château ; pas de marches, des éboulis à l'intérieur ; pas de pavage, du sable très propre dans le fond. Il semble que cette tourelle ait servi de décor et de contrefort.
A l'angle nord-ouest, les deux murs se prolongeaient en se retrécissant. Celui allant vers l'ouest s'arrêtait à 1 mètre environ, l'extrémité ayant été démolie jadis. L'autre, allant vers le nord, se terminait par une pointe formant un angle de 60° à 2 m. 90 du mur du château.
Les fondations se relevaient d'environ 0 'm. 40 vers la pointe, ce qui indique bien que le sol à l'extérieur était plus haut que le carrelage. D'autre part, les trois pierres seulement, qui restaient l'une sur l'autre à la pointe, étaient posées un peu en retrait. Il s'agissait certainement d'un contrefort, et ce retrait de 0 m. 07 sur une hauteur de 0 m. 25 (en admettant qu'il se prolonge en ligne droite) permet de calculer approximativement la hauteur de ce contrefort : 0m 25 x 2m 90 divisé par 0m 07 = 10 m. 35.
Le contrefort ayant une dizaine de mètres, on peut évaluer la hauteur du donjon à douze mètres environ.
Je n'ai pu avoir de détails précis sur le côté Est, démoli depuis longtemps ; mais un détail a frappé M. Gaillard : l'existence de quatre cellules, carrées, ayant chacune environ un mètre de côté à l'intérieur, et des murs de 0 m. 80 environ d'épaisseur, sans aucune ouverture.
Elles formaient une sorte de tour carrée percée de quatre puits, qui, d'après M. le Docteur Baudouin, devaient être des silos à grains pour les réserves de blé. Il restait encore de ce côté, à 1 m. 60 du mur de la cuisine, un pied de mur de 2 m. 20 de long et 0 m. 75 d'épaisseur, orienté du nord au sud, assis sur du sable propre à un mètre environ au-dessus du carrelage avec, à l'extérieur, une couche de sable de 0 m. 70 surmontée de 0 m. 25 d'éboulis. Ce mur finissant nettement aux deux extrémités pouvait peut-être se rattacher au mur de la cuisine dont il était séparé par des éboulis.
Dans tous ces éboulis, peu d'objets, si ce n'est des débris nombreux de la toiture : ardoises trouées de diverses épaisseurs ; tuiles plates trouées, et tuiles creuses analogues à celles que l'on fait encore dans notre région.
J'ai cependant trouvé des morceaux d'un grand pot de terre décoré de 0 m. 38 de diamètre à l'ouverture, et dont le rebord de 0 m. 06 de large est percé de deux lignes de trous dont ceux du rang extérieur débouchent à l'intérieur du pot et ceux du rang intérieur vont vers l'extérieur. A 20 centimètres du bord, le « ventre » de ce pot mesurait environ 0 m. 80 de diamètre ; et le fond, 0 m. 50. Il semble que ce soit un pot servant à faire la lessive et que l'on nomme une « ponne » dans la région. Il y avait des débris d'un autre vase analogue.
Nous avons trouvé deux gonds et quelques clous, mais aucune trace de boiseries. Dans une couche de cendres de 0 m. 20 environ d'épaisseur, adossée au mur nord et comprise entre deux couches d'éboulis de 0 m. 40 environ chacune, j'ai découvert quelques os, un couteau, et quelques débris de poterie.
Le manoir a donc dû être vide avant sa démolition, les grands pots (victimes du déménagement peut-être) étant seuls restés à l'intérieur.
Du côté extérieur des murs, on n'a trouvé nulle trace de carrelage.
D'autres observations montrent encore que ce château se réduisait à ce qui est décrit ci-dessus. M. Gaillard m'a déclaré qu'au sud, à deux ou trois mètres du mur de la cuisine, se trouvait un trou très profond dont le sable avait été rejeté sur le château, et qui descendait plus bas que le carrelage découvert. Il s'agissait sans doute de fouilles malheureuses. M. Gaillard l'a comblé pour planter sa vigne.
A trente mètres au sud, de l'autre côté du chemin, se trouve encore aujourd'hui un trou, profond de 1 m. 30 et au-dessous du niveau du château (encore une fouille improductive sans doute).
Toujours au sud, mais du côté de la tourelle, il y avait un énorme talus de 40 mètres environ de longueur, venant du chemin dans la direction N.-S., jusqu'à 6 ou 7 mètres de la tourelle, et que M. Gaillard a défriché jusqu'à la terre sans trouver aucune trace de construction. Ce talus obliquait ensuite vers l'ouest où il a été défriché de même sans plus de résultat. D'ailleurs, du côté ouest, à 5 mètres de la tourelle, la vigne actuelle est au-dessous du carrelage. A l'est, à 15 mètres, se trouve une ancienne carrière de sable, qui n'a révélé aucun indice de construction.
Du côté nord, à 4 mètres de la pointe du contrefort, le terrain est encore au-dessous du château. Tout autour d'ailleurs, le sable est absolument propre et ne renferme aucune trace de démolition. Comme dépendances, M. Gaillard n'a démoli que deux murs distants de 1 m. 50 environ formant comme un couloir remontant la pente nord sans qu'il puisse en préciser l'emplacement.
Peut-être ce corridor aboutissait-il à un escalier donnant accès à l'étage ?
Le four, signalé à l'est de l'abreuvoir comme four romain, avait peut-être été restauré pour servir au châtelain. L'abreuvoir existant au nord, que l'on dit dallé et dans lequel se déversait la fontaine (aujourd'hui comblée) alimentant le château, ne pouvait être une chambre du château, puisqu'il est au milieu d'un marécage. Il est plus vraisemblable de penser que ce dallage avait pour but d'y maintenir de l'eau propre.
Un mur bâti avec de l'argile, situé à l'est, à 200 mètres environ, allant du sud au nord et qui, d'après des témoignages certains, se prolongeait vers le nord, puis tournait à l'ouest, semble avoir été le Mur d'enceinte.
Si l'on ne retrouve aux archives aucune trace de ce manoir sous le nom de Bélébat, il serait peut-être intéressant de faire des recherches au sujet de la Ferme d'Avaud (dont tout le territoire de Bélébat dépendait), qui a été vendue sous la Révolution comme bien national.
Dépendant sans doute d'une seigneurie assez importante, cette ferme pourrait servir de point de départ pour obtenir quelques renseignements nouveaux.
Les précisions que nous avons maintenant sur ce petit manoir du moyen-âge ne nous renseignent guère sur la ville engloutie qui fait l'objet des légendes dont certaines sont encore inédites.
J'ai idée que des fouilles opérées dans la forêt de l'Etat, où se trouvent de nombreux murs, à la pointe de Raniette et aux Murailles, pourraient donner des résultats intéressants, car il serait possible, contrairement à ce qu'a écrit M. le Docteur Baudouin, que ce soit là l'emplacement du petit port phénicien, dont les bateaux rejoignaient la côte actuelle à la limite nord du jardin de Clemenceau.
Cyrille DELAIRE,
Instituteur à Saint- Vincent-sur-Jard.
Fig. 2. — Situation des DEUX MURAILLES, mises au jour à BELESBAT, au cours des fouilles de 1905. — Echelle ; 1/100.
Fig. 3. — Découverte de deux murailles à Belesbat, au cours de fouilles de 1905.
Fig. 4. — Schéma donnant une idée de la constitution de la Chambre, mise au jour à Belesbat en 1915. — Echelle : 1/200.
Les Trouvailles faites au Château de Belesbat à Saint Vincent sur Jard (1931).
Cyrille DELAIRE ET Dr Marcel BAUDOUIN.
I. — CONSIDÉRATIONS GÉNÉRALES.
Depuis la publication de notre Mémoire (1) sur les Légendes de Belesbat à Saint-Vincent-sur Jard (2), il s'est passé par là-bas des phénomènes nouveaux (Fig. 1 ).
Des travaux géologiques importants (3) ont été publiés sur le sous-sol de ce pays (4) et des découvertes archéologiques d'un intérêt très spécial ont été faites à l'endroit même où nous avions découvert les Ruines du vieux CHATEAU, totalement disparu et ignoré !
Il est étonnant qu'on n'ait aucune Donnée Historique sur un monument aussi récent et d'une telle importance! Et cela prouve bien que la région a été très bouleversée depuis la construction, récemment mise au jour...
Fig. 1. — La situation topographique de BELESBAT, commune de SAINT-VINCENT-SUR-JARD (Vendée). — D'après la Carte d'état-major au 1/50.00). —
Aussi croyons-nous utile, avant de taire connaître les trouvailles récentes, de revenir sur l'état des lieux et leur topographie au début du Moyen-Age.
Ailleurs, nous parlerons de ce qui existait à l'époque préromaine et aux périodes préhistoriques, au demeurant digne d'une étude particulière.
LE LIEU-DIT BELESHAT. — Au Cadastre, les parcelles de terre qui portent le nom de BELESBAT sont les suivantes, de la section G, du numéro 2435 à 2439 (Fig. 2).
Numéro 2436, Pièce contenant l'Abreuvoir A, avec l'ancien ruisseau (Fig. 3).
Fig. 3. — L'ancienne Fontaine de BELESBAT.
Numéro 2437, Lagune où l'on voit une amorce de chemin sur la Dune et où est la Source (S.-O.). Vigne.
Numéro 2438, Lieu où l'on a trouvé du Gallo-romain (Four, etc.).
Numéro 2439, Grande pièce de terre, recouverte d'une forte Dune, coupée en deux, du nord au sud, par le chemin du Bourg, plus récent.
Une partie du numéro 2439 est en vigne. C est le point où sont les ruines moyenageuses, au nord, près du chemin, parallèle au mur nord-sud du château.
Cette vigne appartient à M. Gaillard (de Saint-Vincent- sur-Jard).
A l'ouest est le tènement dit Les Trous. Les Petites- Bl1chettes sont au nord (près le numéro 2435).
Ces quatre pièces, jadis, dépendaient évidemment du Château ; et c'est là où devaient se trouver les communs du dit château, au moins au sud de l'abreuvoir et de la source.
Etymologie du nom
— Ce qui justifie ma façon de comprendre l'étymologie de Bel-Esbat, ce sont les nombreux noms de lieux français commençant par BEL et où il est difficile de reconnaître toujours l'adjectif a Beau » Je citerai seulement les noms des communes suivantes : Bel-an ; Bel-arga ; Bel-abre; Bel-Air (5); Bel-le eraud ; Bel-aye ; Bel-lièze ; Bel-bœuf ; Bel-caire ; Bel-Castel ; — Bel-cadère ; Bel-esta ; Bel-eymas ; Bel-fays ; Bel-fahy ; Bel-nou ; Bel-Fonds ; Bel-Fort ; Belhade ; Bel-homert ; Bel-ignat ; Bel-igneux (6) ; Bel-mont, etc.
Sans parler de tous les noms commençant par Belle (Ex. : Bellecombe ; Bellefontaine ; Belle-Garde, etc.).
Il ne faut oublier, de plus, le Belus (Landes), inexplicable par l'adjectif Bellus ; et le Bellebat (Gironde), qui doit-être une variante spéciale de Bel-Esbat.
Ce Bellebat se retrouve près de Pithiviers (Grande Plaine), également (7).
LA CITADELLE.
— Le tènement qui s'étend à l'est du chemin de Saint-Vincent à Belesbat (8) jusqu'à la Maison de Clemenceau, qui appartenait à M. Luce de Trémont (d'Avrillé) (9), porte le nom curieux et caractéristique de La Citadelle, qui d'ailleurs n'est pas au cadastre.
Il est très probable qu'il y a eu là autrefois des restes de fortifications anciennes, qui doivent dépendre de la ville engloutie plutôt que du château moyenageux.
Ce tènement va de l'Anse de La Raniette à l’ouest jusqu'à la Pointe de la Veille ou Vieille (ou de l 'Aveugle), à l'entrée du Goulet, côté ouest; il comprend les Vignes, placées de chaque coté du chemin de la Maison Clemenceau, à l'entrée des Dunes (10).
La Citadelle se trouve donc sur l'éminence qui sépare les deux ruisseaux disparus, parallèle à la côte actuelle.
L'un est sous-dunaire : c'est celui qui longe la Citadelle ; parti de la Raniette, il passe par les Trous, la Lagune, L'Abreuvoir, traverse la Dune de M. Linyer et va déboucher entre le Goulet et la Maison Clemenceau. Mais ce ne peut pas-être ce ruisseau qui s'appelait le Jard !
S'agit-il d'une Citadelle, qui serait sous une grosse Dune à l'est, en bordure de la mer?
S'agit-il du Donjon lui-même dont le mur de ceinture devait passer à toucher cette Dune du côté de l'ouest?
Impossible de le dire, sans des fouilles méthodiques sous cette Dune.
En tout cas, c'est ce Chemin de la Maison Clemenceau qu’on appelle dans le pays le Chemin de la Citadelle.
On a d'ailleurs trouvé des boulets de 0 m. 10 de diamètre environ dans cette contrée, qui a dû être attaquée par mer au temps des guerres religieuses et plus tard, lors des guerres avec l'Angleterre au XVIIIe siècle (11).
LES JARD.
— Il existe dans cette contrée un grand nombre de lieux-dits qui s'appellent le Jard.
En voici une liste assez complète.
Longeville ; rive est du Jard.
Le Jard, Ferme de la Marzelle (devant les maisons) :
N° 352, Le Jard, section B 61 ares N° 351, Le Petit Jard, section B 108 »
No 348, Le Grand Jard, section B 281 »
N° 353, Le Jard du Milieu, section B 49 »
Total 499 ares ou 5 hectares.
Saint-Hilaire-la-Forêt ; au nord :
N° 195, Pré du Jard, section A, 42 ares. Bien plus au nord, dans la vallée !
Saint- Vincent-sur-Jard :
La Jarriette, section C, n 598 à 603 (12).
Ces différents lieux sont le long de la vallée qui remonte vers Avrillé. C'est donc le petit fleuve qui leur a donné son nom !
Commune de Jard, au milieu du bourg, il y a aussi : Le Jard, champ, section A, n° 25. Mais je crois qu'il ne faut pas voir là la source du ruisseau sous-dunaire qui passe à Belesbat et se jette dans le Goulet, au nord de la Maison Clemenceau.
Le Jard est bien le ruisseau qui prend sa source à La Cornetière et à La Guignardière d'Avrillé, et dont l'embouchure, la Goule (Gula), est devenu le Goulet (13).
FORÊT DE CHÊNES VERTS (Forêt noire).
— La Grande Forêt, dite Forêt noire du Veillon, s'étendait jusqu'à Saint-Hilaire-la-Forêt et Saint-Vincent-sur Jard.
Voici les noms des tènements qui, dans cette dernière commune, où ils sont peu nombreux, indiquent l’existence de restes de cette Forêt, jadis très importante. (Documents Delaire)....
ETAT DES LIEUX AU XIe SIÈCLE.
— Pour comprendre la raison pour laquelle on a construit ce Château, il faut connaître quelle était la disposition des lieux aux environs de l'An Mille.
A ce moment, la Dune existait à peine, parce que le rivage était plus au large, peut-être à plusieurs centaines de mètres, s'il n'allait plus jusqu'à l’Islatte, rocher submergé désormais (Fig. 4).
Les Ruisseaux disparus.
— a) Il existait une petite Vallée, parallèle au rivage actuel, allant de l'ouest à l'est ; et les eaux de ce ruisseau, aujourd'hui submergé, s'écoulaient vers l'embouchure du Jard, c'est-à-dire vers le Goulet (Démonstration Pr Peneau), au sud de la Maison Clemenceau et de la Pointe de l'Aveugle.
Fig. 4. — L'Etat du Goulet du Jard à l'Epoque antéhistorique avec une subsidence supposée de-5 mètres pour le rivage.
A ce moment, l’Islate et les Vendeurs étaient terre !
Légende : G, Château Moyen-Age; — R, Château Régent;
A, Embouchure; — R, Rochers; — S, Sable; — F, Falaise ? — D, Dune; — G. R., Ruines Gallo- romaines.
b) De plus, il y avait un autre ruisseau, presque parallèle, sur la même rive du Jard, aujourd'hui comblé par les sables et désormais sous-dunaire. La démonstration en a été faite par M. C. Delaire, à l'aide du Puisard (n° 2439) de Clemenceau (fond d'argile), l'abreuvoir (n° 2437) (ancien Etang) du château, la lagune à l'ouest de cet abreuvoir ; et le dépôt d'argile, sur la rive droite du Goulet, au nord ' de la Maison Clemenceau.
A ce moment, le Jard avait son Goulet plus au sud-est au niveau de la plaque d'argile, qu'on voit sur la plage à marée basse (Fig. 4).
Il en résulte qu'entre ces deux Affluents ouest du Goulet du Jard il y avait un petit COTEAU (n° 2439 du Cadastre), allongé de l'ouest à l'est, situé entre ces deux vallées, qu'il surplombait au nord et au sud.
Dès lors, on comprend qu'on ait pu construire dans un lieu un peu élevé et aussi favorable une Maison quelconque....
Mais, depuis, la côte a été rongée ; la mer s'est avancée dans les terres !
Une énorme Dune s'est produite au Moyen-Age, qui peu à peu a submergé la base du Château démoli, sans doute vers 1628, sur une hauteur de plus de 3 mètres (no 2439).
II. — DÉCOUVERTES FAITES EN 1931
PAR M. C. DELAIRE.
Un grand nombre d'objets ont été recueillis par M. Delaire, l'instituteur public de Saint-Vincent-sur-Jard, au cours de la Démolition des substructions du CHATEAU- DONJON......
d) DÉBRIS DE FER. — Les Débris de Fer indiquent une construction assez récente. Aucune trace de Bois.
On a recueilli un gond et quelques clous. Le tout est très rouillé et très altéré.
A) Les pièces, examinées, comprennent seulement :
1° Un GOND, à manche aplati en hauteur, et non en largeur, d'un type très ancien.
2° Une PATTE-FICHE à palette, très courte, du modèle actuel.
3° Une TARGETTE de petit verrou, à tige ronde.
4° Une TARGETTE de verrou, à tige plate.
6° Un petit CLOU, rond, un peu courbe.
Les deux sortes de buttoir de targette sont différents de forme, mais semblables aux modèles actuels.
a) GOND. — Le gond vu par nous, par la forme de la lame qui le fixe à la muraille, a un certain intérêt. En effet, à l'heure présente, les gonds ont cette lame très aplatie d'avant en arrière. Or, ce spécimen a, au contraire, un support en forme de lame aplatie du haut en bas ! Cette pièce pèse 230 grammes.
Fig. 5. — Le GOND EN FER, découvert au Château de Belesbat (1931). — Echelle : 1/2 grandeur.
Nous nous sommes procuré des dessins de gonds depuis le XIe siècle jusqu'à nos jours.
Or, ce gond de Belesbat (Fig. 5) est semblable en somme à un gond du XIe siècle, et non pas à ceux du XIIIe siècle (Fig. 6) !
Il faut en conclure que cette pièce qui est rare, suffit à elle seule à dater le début de la construction du Donjon.
C'est là un fait capital !
Jamais, jusqu'à présent, nous n'avions découvert dans nos fouilles de châteaux ou de souterrains un objet aussi caractéristique et aussi ancien !
Fig. 6. — Un GOND, daté du XIe siècle.
Il faut donc admettre que le Château de Belesbat remonte au moins au XIe siècle, sinon au Xe siècle.
b) COUTEAU DE FER. — C'est dans une couche de cendres, de 0 m. 20 environ d'épaisseur, placée contre le mur nord, à l'extérieur, et comprise entre deux couches d'éboulis de 0 m. 40 chacune d'épaisseur, que M. Delaire a trouvé un Couteau, intéressant, avec quelques débris de poterie et quelques os. Cette découverte précise est capitale.
En effet, ce couteau, qui présente une lame en fer et un manche formé de lames de fer et d'os d'animal, semble extrêmement récent, vu le mode d'articulation de la lame.
Comme il est très petit, on dirait un objet ayant appartenu à une femme Il a environ 80 millimètres de longueur. D'ailleurs une lamelle d'os du manche présente deux petits dessins : une sorte de petit poisson, en haut ; et au-dessus une sorte de blason, formé d'un ovale pyriforme avec des rayons tout autour (16), et deux traits en bas.
a pièce étant extrêmement rouillée, il n'a pas été possible de la décaper et de bien dégager les gravures sur l'os (17).
Ce couteau (18) date certainement de l'époque de démolition du château, et ne peut guère être, vu sa forme, que de la fin du XVIIe siècle.
Les débris de fer, qui ressemblent singulièrement à des pièces modernes, ont été recueillis dans l'intérieur même du donjon, et à proximité des placards trapézoïdaux du mur nord, à l'exception du couteau.
Par conséquent, ils ne peuvent que dater de la période d'occupation, ou, à la rigueur, de l'époque de construction du château.
Toutefois, les objets ressemblent tellement à leurs semblables actuels qu'on ne peut y voir qu'un matériel correspondant à la vie terminale de la dite construction, sauf exception.
Ainsi la targette du verrou rond et la targette à lame plate, et la patte-fiche.
Mais le gond, vu sa forme, doit être bien plus ancien ; d'où son réel intérêt.
Ces objets sont extrêmement rouillés et altérés, mais non détruits, leur forme étant facilement reconnaissable.
Ils se sont donc très bien conservés par suite de leur enfouissement dans la dune de sable.
c) VESTIGES DIVERS.
— 1° CHAUX. — On a trouvé, tombé à l'intérieur des ruines, un morceau de chaux, venant sans doute de l'étage supérieur. Cela prouve qu'au haut de la construction, peut-être au cours de la restauration du XVIe siècle, on a employé un tel mortier.
2° ENDUIT DES MURS. — On a pu détacher un fragment de l'enduit qui recouvrait la face intérieure au niveau de l'un des placards du mur nord.
Une surface a été lissée avec une sorte de main de bois. Elle était légèrement bleutée. Peut-être cette couleur est- elle le résultat de la décomposition de sels cuivriques qui se trouvaient sans doute dans l'argile jaune employée pour ce revêtement ? Mais c'est peu probable.
II doit s'agir d'une peinture. Il faut en conclure que celle-ci existait sur tous les murs, à l'intérieur ; ce qui n'a rien d'étonnant, vu la perfection du carrelage de la grande chambre.
3° OSSEMENTS D'ANIMAUX.
— a) On a découvert une mandibule droite de jeune CHÈVRE, avec trois prémolaires en place et trois dents libres, le tout dans de l'argile.
C'est là une pièce qui rappelle les mandibules de Capra hircus, du pied des Menhirs (Dépôt cultuel).
Il est possible qu'elle provienne, en tant que totem partiel protecteur, de la muraille elle-même, comme cela s'observe pour les Os de Poulets ou les Silex taillés et les Haches polies.
b) En plus, un fragment d'Humérus, de Porc probablement.
MUSÉE.
— Ces diverses pièces sont cataloguées au Musée d'Archéologie de la Vendée sous le numéro 2.196 ; celles de 1905 sous le numéro 2.06').
COMPARAISONS.
— Les pièces, recueillies avec Gaston Bastard dans le souterrain de son Châlet des Douves, à Jard, qui s'en va sous l'église (19) et dépend de l'ancienne Abbaye (20), permettent de dater par un autre procédé le Château de Belesbat.
En effet, j'ai trouvé là une tuile plate à deux trous, presqu'entière, tuile qui mesurait 0 m. 15 de largeur à la base pour une hauteur de 0 m. 11 seulement.
Or, elle est tout à fait semblable aux débris récoltés par M. Delaire. Il y avait là une céramique vernissée, très avancée; j'en possède une vingtaine de débris, dont certains très intéressants. Cette poterie étant tout à fait distincte de celle des Souterrains carolingien (21), il est évident qu'elle est bien postérieure à l’An Mille (22).
EPOQUE DE CONSTRUCTION.
— Il faut à nouveau rappeler ici que, parmi les premières poteries recueillies en 1905, à Belesbat, il y a des fragments qui se rapportent à un vase très élégant, à paroi mince, très bien vernissée à l'extérieur (n° 2.060.8), qui rappelle une belle céramique trouvée dans les fouilles de Saint-Nicolas-de-Brem, et qui, par conséquent, font remonter assez haut l'époque de construction, et certainement au XIIe siècle (23).
D'autre part, les superbes Ardoises à Ecailles, recueillies jadis par Gaston Bastard, avant 1900 (n° 2.060), sont si typiques et si grandes, qu'elles dépassent en beauté celles du Souterrain des Blétières et ressemblent à celles du château de La Cour, à Soullans (24).
CONCLUSIONS.
— On doit conclure de là que certainement le début du Château de Belesbat remonte au moins au XIIe siècle, et même au XIe, car Les Blétières ne peuvent être postérieures à cette date.
J'insiste, d'autre part, sur la présence d'un Jeton taillé à dessein dans une ARDOISE MINCE, mais percée à la mode primitive, qui prouve que même ces ardoises remontent certainement au XIVe siècle, car, aux Jacobins de Fontenay, nous avons découvert des jetons analogues (n° 2.060.1 ) !
-Dans ces conditions, nous ne devons pas hésiter à dater ce Donjon du XIe siècle ; et ne pas craindre de vieillir le Château, si nous sommes obligé d'admettre qu'au XVIIIe siècle il n'était pas encore recouvert par la dune !
Les Murées de la Dune de Belesbat
En 1861 (25), B. Fillon a mentionné, dans les dunes de Belesbat, une série de petites Murettes, en pierres sèches, qu'il a décrites de la façon suivante, en insistant sur leur aspect en Enceintes.
« La présence, au milieu (26) des sables, sur une vaste étendue, de petites ENCEINTES (27) de galets de mer (28), paraissant avoir une origine celtique (29), montre que la tradition [de Belesbat] a quelque chose de vrai, et qu'une population assez nombreuse a jadis resté là. Les ouragans terribles, qui ont passé, il y a quelques années, sur nos côtes, ont mis à découvert ces vestiges, en décapitant les dunes, où ils étaient ensevelis depuis des siècles. »
Il ajoutait que la station néolithique « était à plusieurs mètres, au-dessous de ces vestiges » (B. Fillon).
En 1905, nous avons voulu retrouver ces restes et constater la réalité de l'existence de ces amas de pierrailles. Grâce à des blocs de pierres, épars çà et là sous le sable, cela a été aisé !
Nous avons fouillé à leur niveau, pour nous rendre compte de leur mode d'agencement et de leur importance.
En dégageant ces sortes de fausses murettes, par ablation de la légère couche de sable dunaire qui les recouvrait encore, nous avons pu constater, en plusieurs points isolés, qu'elles formaient des LIGNÉES, presque DROITES, toujours d étendue assez courte et de quelques mètres seulement de longueur.
Nous avons alors photographié les deux principales, dégagées ; et nous reproduisons ici ces clichés pour la première fois (Fig. 1). — Mais jamais nous n'avons retrouvé de véritables Enceintes, c'est-à-dire de lignées circulaires ou rectangulaires (30) fermées!
Ces murailles, en pierres sèches, PLACÉES DEBOUT à la suite les unes des autres, et n'ayant guère que 0 m. 35 à 0 m. 50 de hauteur maximum, reposaient directement sur UNE DUNE assez épaisse (2 à 3 mètres) et par conséquent étaient très superficielles désormais. Elles n'étaient donc pas véritablement enfouies dans la Dune! Ce qui prouve que leur édification est postérieure à cette dune et, somme toute, assez récente ; en tout cas sûrement post-romaine.
Nous n'avons rien découvert entre les pierres, que du sable dunaire apporté par le vent, malgré des recherches suivies. Mais ce résultat négatif ne prouve rien, bien entendu.
Il est par suite probable que ces Murettes ont été dressées au Haut Moyen-Age, à l'époque du début du Chàteau de Belesbat, c'est-à-dire une fois la Dune bien
Tout se tient donc : Murées et Château constituée et fixée définitivement. Actuellement, elles sont au ras du sol.
Fig. 1. — SAINT-VINCENT-SUR-JARD. — Les Dunes de la partie Ouest de Beleshat. — Découverte, en 1905, des MURÉES DE PIERRES sèches de la surface. — Phot. M. Baudouin, faites à l'Ouest.
Légende : I. — Photogr. d'une MURÉE (n° I), à pierres TRÈS ÉCARTÉES. — Les Pelles de fer donnent rEcbelle. Murée perpendiculaire au rivage.
II. — Photogr. d'une MURÉE, à pierres TRÈS PRESSÉES les unes sur les autres, et plus hautes (n° II). Le manche de la pelle montre que cette Murée est plus épaisse et plus haute que la précédente. — Murée parallèle, à la première découverte.
Au voisinage, blocs épars, déplacés sans doute par le vent.
il est donc probable qu'elles ont été édifiées pour consolider le Sable et non pas pour délimiter les terrains, car elles sont toujours interrompues, presque parallèles ou perpendiculaires au rivage, et presque toutes parallèles entre elles. Nous n'avons pas trouvé la moindre trace d'une Enceinte quelconque, malgré les dires de B. Fillon et d'autres (31).
Sur la photographie 1 de la Figure 1, on voit à la façon dont sont enfoncées les pelles des terrassiers que les pierres sèches, TRÈS PLATES, à bords usés, ne dépassent guère la hauteur de la pelle en fer elle- même.
Certaines plaquettes, vues de face, montrent que leur largeur ne dépasse guère 0 m. 1A Mais parfois elles ont presque une épaisseur aussi forte.
Bien entendu, il s'agit de PLAQUETTES de CALCAIRE, provenant du rivage de la mer et de rochers plats submersibles, avec quelques forts galets de mer du Callovien ou du Bajocien. Parfois, les blocs sont assez espacés les uns des autres par des amas de sable (Ph. no I) ; mais, en d'autres endroits (Ph. n° II), les pierres sont bien tassées les unes sur les autres et semblent pressées, à dessein, assez fortement, pour empêcher les déplacements.
D'ordinaire, il y a peu de pierres éparpillées au pourtour; on en a donc déplacées que très peu depuis le Moyen-Age ; et, d'ailleurs, le vent a pu à lui seul produire ce phénomène, qui n'a plus désormais d'intérêt !
On a émis plusieurs hypothèses sur ces constructions.
Il ne faut pas y voir de véritables Murgers, c'est-à-dire des AMAS DE PIERRES en vrac et en tas, comme il en existe en certains pays.
Les Murettes se rencontrent au pourtour des Conches, c'est-à-dire à la courbe qui les entoure.
On constate qu'elles ont été édifiées au niveau ou, dans ces dépressions, se produisent les « Ventouses », où des appels de vent arrachent d'ordinaire les sables et les emportent.
On dirait qu'elles ont été établies pour protéger des plantations de vignes dans les parties les plus basses.
Il ne s'agit pas d'un Mur vrai, à pierres placées les unes sur les autres, mais de ce qu'on appelle dans le pays un « quarrage » sur la Dune (Plaquettes placées debout, appliquées les unes contre les autres). Il n'y a aucun mortier argileux, aucune terre, entre ces plaquettes ; c'est donc d'une construction absolument sèche qu'il s'agit.
Comparaisons.
— Je ne puis pas comparer ces lignées avec celles en gros Galets de mer arrondis (quartz blanc, granite schisteux, orthophyre, grès cénomanien, etc.), que j'ai découvertes, en 1915, sur la Pointe de la Grosse Terre, à Saint-Hilaire-de-Riez, en face Pilours.
Là, en effet, il ne s'agit plus de Murettes à pierres plates, mais simplement de lignes de Galets, très gros, placés les uns au bout des autres.
De plus, la Dune est, ici, Néolithique, et présente des silex taillés du type côtier indiscutable ; par conséquent, ces lignées sont aussi Néolithiques, puisque cachées à la base de la dune.
Je les ai d'ailleurs rattachées à deux Menhirs, voisins, très importants, dont elles m'ont paru n'être que des formations annexes, indiquant au demeurant des directions méridiennes ou solaires. Et je ne les compare pas aux Murées de Belesbat, qui elles sont bien des Murettes à pierres disposées en écailles de poisson, comme dans certains camps de l'Age du Fer (Gard ; Provence ; etc.).
J'ai vu, par contre, dans les Dunes de Noirmoutier, un peu partout, des Murées, en pierre calcaire tertiaire et en galets de granulite de L'Herbaudière, qui paraissent identiques à celles de Saint Vincent-sur-Jard.
Là, les Murées n'ont que des pierres de 0 m. 20 de hauteur ; mais les plaquettes placées debout reposent sur une couche de galets ou pierrailles, disposés presque à plat, ayant 0 m. 50 de hauteur.
Conclusions.
1° Le fait, sur lequel il faut insister, c'est qu'actuellement ces lignées de pierres affleurent le ras de la dune, c'est à-dire la surface du sol, car cette constatation en fait une construction récente et certainement pas antérieure à l'An mille.
2" De plus, ce sont, bel et bien, de réelles Agrée s, à Belesbat, murées en pierres sèches et de vraies murettes, très peu hautes, incapables de délimiter quoi que ce soit !
3° Ces pierres, pressées les unes sur les autres, pouvaient parfaitement sinon arrêter, du moins modérer le déplacement des sables, à une époque où la Dune était importante et les vents violents.
4° Cependant, la découverte des substructions du Château prouve que, depuis le XIIe siècle, cette dune n'a pas diminué notablement d'épaisseur. — B. Fillon a donc exagéré, quand il a dit que là les tempêtes d'avant 1860 avaient enlevé beaucoup de sable !
Il ne faut pas faire les choses plus tragiques qu'elles ne sont....
Le mystère, qui entoure les ruines désormais certaines du Donjon du Goulet de Jard, est assez impénétrable, même aujourd'hui, pour ne pas tenter de le rendre encore plus inexplicable, en admettant des phénomènes qui n'ont pas existé !
<==.... ....==> Georges Clemenceau et la Vendée (lieu-dit « Bélesbat » à Saint-Vincent-sur-Jard)
Il y a 204 millions d'années, à la limite du Rhetien (fin du Trias) et de l'Hettangien (début du Lias inférieur), la flore était essentiellement constituée d'une végétation de l'ordre des coniférales, révélant une certaine aridité du milieu, sans doute liée à la salinité.
Lorsque Jules-César voulut soumettre les peuples de l'Armorique, qui s'étaient révoltés, et notamment les Venètes, il marcha d'abord vers Nantes, ville importante par sa position, sur la rive gauche du Liger (la Loire). L'effroi devança la marche rapide des légions Romaines ; une foule de Nantais abandonnèrent leur citè pour se soustraire au joug de vainqueur.
En 536, on est au tout début du Moyen Âge, les superstitions païennes n'avaient pas encore complètement disparu de la Gaule, et les quelques écrits, notamment ceux des moines, nous racontent surtout les événements hors du commun, comme les éclipses.
Paul-Alexandre Marchegay naquit tout près d'ici, à Lousigny, commune de Saint-Germain-de-Prinçay, le 10 juillet 1812. En 1823, il obtenait le 2ème prix d'histoire au concours général des collèges de Paris. Licencié en droit en 1835, puis pensionnaire de l'école des Chartes, il fut reçu archiviste paléographe en 1838 et attaché jusqu'en 1841 aux travaux de la Bibliothèque royale.
(1) Rédigé à la demande de Georges Clemenceau.
(2) Marcel Baudouin. — La Légende de la ville détruite de Bélesbat (Becciacum) et les deux Saint-Vincent-sur-Jard et sur Graon (V.). — F. le C., Rev. B.-Poit., 1921, p. 93-105; 168-177; 1922, p. 32-77; 120-124; 261-267; 1923. - Tiré à part, 1924, in-8°, 46 p., 7 fig.
(3) J. Péneau. — Observations géologiques sur la côte Sud vendéenne. — Bul. Soc. Se. Nat. Ouest-France, Nantes, 1923, p. 57-78; nombr. pl. hors texte et figures.
(4) J. Péneau. — Etude du Jurassique du Nord du Bassin de l'Aquitaine, Bull. Soc. Géol. et Min. de Bretagne, 1923, p. 249, pl. X.
(5) J'ai souligné les noms où l'on peut soutenir la possibilité de l'adjectif Bellus.
(6) Il semble qu'ici on doive admettre le radical Ignis, feu ; or, le « feu de Bel », c'est-à-dire le feu de Joie [Jouis, Jupiter], est plus logique qu'un « beau feu », car « beau feu » ne signifie pas grand'chose! [Voir étymologie du mot Belinière].
(7) Près de Pithiviers, en effet, existe une grande Plaine, dite de Bellebat.
(8) On remarquera qu'il existe aussi, sur le bord de la Brière, qui fut une mer intérieure à l'époque gauloise, un CHATEAU DE BELEBAT, situé au Sud-Ouest de Crossac (L.-I.).
Cette dénomination indique là certainement une occupation phénicienne, comme en Vendée.
Les navigateurs ont donc pénétré dans cette mer de la Brière, où les vaisseaux de J. César devaient plus tard se montrer.
(9) La propriété appartient en grande partie à M. Luce de Trémont du côté de la maison Clemenceau et de la station préhistorique. Mais le château est dans la vigne de M. Gaillard.
Actuellement, la Propriété Clemenceau est devenue Propriété Nationale; et le MUSÉE DU SOUVENIR DE BELESBAT, dont l'initiative nous revient incontestablement, est Propriété nationale. Il faut remercier M. Guiet, qui nous a secondé en l'espèce, de tout cœur, de son dévouement à la petite Patrie en cette occasion.
(10) Au cadastre, il n'y a que les Dunes, parce que celles-ci ont tout recouvert depuis 300 ans. Mais le peuple a conservé le souvenir de ce qu'on voyait avant l'apparition des sables.
Cette survivance est très remarquable. De même, à l'Ouest, dans la forêt, il y a un lieu- dit Les Murailles, qui ne figure pas non plus au cadastre. Mais ces Murailles peuvent ne correspondre qu'à ce qu'on appelle les « Murées », ou à un reste de village détruit par les sables.
(11) Le littoral Jardais souffrit beaucoup du bombardement de la flotte anglaise à cette époque, d'après la monographie de M. Charrier.
(12) La Jarriette, dans la Commune de Saint-Vincent-sur-Jard, se trouve 1 B, 271-271, 280-322; D, 2062 à 2076.
(13) Cf. Gulam Jardi.
(14) Il faut remarquer, toutefois, qu'à Belesbat la tige n'a pas été surajoutée à la lame. Cette variété doit être plus ancienne (Fig. 5) que le modèle de comparaison que nous représentons (Fig. 6).
(15) Ce document nous a été adressé par M. l'Abbé Legros, curé d Arconnay (Sarthe).
(16) Ce décor est nettement gallo-romain.
(17) Il y a le mot « Dune », écrit au crayon, au-dessous [Ecriture moderne].
(18) Le Couteau de chasse en Fer du Château de Beaumanoir, en La Barre de Monts, avait au contraire sa lame toute rongée et dépendant il n'avait pas plus de 300 à 400 ans. Mais il se trouvait dans de la terre arable et non dans du sable fin. [Cf. le Château de Beaumanoir, 1931, couverture].
(19) Cette Eglise est du XIe siècle; mais elle peut avoir remplacé une construction plus ancienne. Les souterrains y correspondent.
(20) Créée par sainte Radégonde, après 732.
(21) Tels ceux du Moulin-Neuf, à La Roche-sur-Yon; de la Minerie, à Girouard ; de Malvoisine, au Bourg-sous-la-Roche (fouilles vierges, etc., etc.
(22) Pourtant on a trouvé dans ces souterrains des sarcophages, cercueils, sans doute carolingiens,
(23) Le petit couteau à lame articulée sur le manche était déjà connu des Romains, mais simplement sous forme de Canif (Sealprum) des Copistes (Librarii), destiné à tailler les roseaux, avec lesquels on écrivait les manuscrits. Celui qui a été découvert à Rome, dans des fouilles, a été figuré par A. Rich (Dict., p. 559). Mais ici, le manche est tout en os, et la lame, en se fermant, pénètre dans une Rainure préparée. De plus, le manche est bien plus perfectionné, puisqu'il est formé d'une lamelle d'os, appliquée sur des lames de fer, articulées en bas et en haut par des tenons fixes en fer. Il y est vrai que plus de mille ans séparent les deux objets.
(24) On a déjà découvert en Vendée un couteau à virole gallo-romain du type de celui cité par A. Rich. Il a été trouvé par B. Fillon dans la célèbre villa de Saint-Médard-des-Prés. Cet archéologue la figuré dans Poitou et Vendée (t. I, art. Fontenay, p. 126).
Ce petit couteau avait un manche en cèdre fait au tour avec beaucoup de délicatesse et la lame était oxydée. Il avait 0 m. 085 de longueur. Il ressemblait à ceux qu'on fabriquait encore en 1860 à Pouzauges (Cf., note 1, p. 126). La figure de B. Fillon est très démonstrative, au point de vue « lame articulée sur le manche ».
Celui que j'ai recueilli à Apremont est tout différent. (Nécrop. à Puits fun., 1907, p. 32) ; mais il était aussi articulé.
L'Abbé Baudry a découvert divers couteaux au Bernard. Dans le Puits n8 XXXII de Troussepoil, nous avons aussi trouvé un couteau (B. S. A., Paris, 1907, 7 mars).
Il faut rapprocher tous ces couteaux gallo-romains de ceux des Tombes marniennes (B. S. P. F., 1905, p. 110).
(25) B. Fillon et 0. de Rochebrune. — Poitou et Vendée, F.-le-C. et Niort, 1861, in-4°. — Art. Jart (p. 7), tome II.
(26) En 1905, ces vestiges étaient sur les Sables, et non ail milieu d'eux ! De 1861 à 1905, une épaisse couche dunaire avait donc dû être enlevée par les vents et disparaître.
(27) Nous n'avons pas trouvé de véritables Enceintes en 1905; mais des lignes presque droites ! Cependant, il est possible que B. Fillon ait constaté l'existence d'Enceintes véritables en 1861.
(28) Il y a là, certes, des galets de mer, ou plutôt des plaquettes de pierres, roulées par les eaux de l'Océan. Mais nos figures montrent que la plupart des pierres n'étaient pas de vrais galets roulés; ce sont des fragments des rochers du rivage délités par les eaux.
(29) Nous montrerons plus loin que cette théorie n'est pas possible, car la dune est en ce point post-romaine certainement (Abbé Baudry) !
(30) En 1905, la station néolithique était, comme en lM1. a environ 3 mètres au-dessous de la surface de la dune et par suite des Murées de pierres, élevées sur elles, comme le Château lui-même, au demeurant.
(31) Un auteur a écrit :
« Les enceintes de pierres sans Ciment, tantôt rectangulaires, tantôt circulaires, entourant de vastes Excavations, qu'on rencontre dans les dunes de Saint-Vincent-sur-Jard et près de Belesbat ne sont nullement préhistoriques, comme on l'a cru. Elles sont beaucoup plus récentes ! »
C'est exact. Mais je n'en ai pas vu de circulaires.
(32) On m'a dit qu'au niveau de La Raniette, là où il y a eu une Vigie optique (XVIIIe siècle), il y avait une Ancienne Eglise détruite, enfouie sous la Dune.
Je n'en ni pas retrouvé la trace en 1905. Mais, en ce point, M. Delaire a fait, plus récemment, des constatations intéressantes.