Sentier des crêtes - Sauvegarde de la chapelle des Alouettes séance du 3 mai 1921
Les Herbiers, petite ville de la Vendée, il ne faudrait chercher l'origine, de ce nom ni dans Herbauges, dont nous avons souvent parlé, ni dans les mots latins Herberta, de Herbertis, que lui donnent les Pouillés modernes. C'est pourtant une ancienne localité romaine, comme l'attestent encore les vestiges très reconnaissables de la voie romaine qui se prolongeait de Poitiers à Nantes par Mazières, Saint-Pierre-du-Chemin, Pouzauges, Saint-Michel-Mont- Mercure, et de là gagnait les Herbiers, jusqu'à Saint-Philbert- de-Grand-Lieu pour remonter au nord vers Rezé, vis-à-vis de Nantes.
Les lieux traversés ainsi par ces grandes artères de viabilité avaient toujours une importance relative, et il n'est pas douteux que la ville des Herbiers n'ait eu la sienne.
Au reste, ces heureuses chances ont dû lui venir, aussi bien que son nom, des merveilleux aspects dont elle s'entoure, et qui lui sont propres; car, bâtie dans une plaine gardée par les hautes montagnes de Pouzauges et de Mont-Mercure, elle apparaît de ces hauteurs et des collines qui s'abaissent de toutes parts au-dessous d'elle; de là, elle semble posée comme une corbeille de fleurs sur un massif de verdure qu'embellissent encore, par un délicieux contraste, les innombrables clochers qui surgissent au loin et qui y attestent la vie du moyen âge.
Outre les preuves déjà données que ce lieu date de plus loin, on sait pertinemment qu'il fut à l'époque gallo-romaine un des principaux cantons du pagus ou pays d'Herbauges, dans la vaste étendue duquel il se trouvait.
Il dut avoir antérieurement un nom celtique perdu depuis longtemps dans celui qui lui mérita le charme pittoresque de sa ravissante végétation.
Quant au moyen âge, dont les commotions politiques après les ravages des Normands nous ont privé des renseignements locaux, on ne le voit figurer aux Herbiers qu'à partir de 1106, époque de la plus ancienne charte qui nous en reste, mais qui en suppose de plus anciennes, puisqu'elle confirme une donation des seigneurs du lieu par leur fils Jucaël à l'abbaye récemment fondée de la Grenetière.
Ces malheurs des guerres avaient porté les seigneurs à fortifier leur ville ; elle l'était déjà en 1130, et il fallait qu'ils eussent alors une puissance seigneuriale bien établie et qui n'avait fait que s'accroître, car, en 1278, ils accordèrent à cette même abbaye de la Grenetière, qu'ils continuaient d'aimer, un droit de haute justice confirmé dans le siècle suivant par un seigneur de Mortagne, plus grand seigneur encore, et qu'une alliance avait rendu possesseur des Herbiers.
Vers le même temps, Guy des Herbiers recevait de Hugues de Thouars, seigneur de Montaigu, des droits que sa famille avait laissé périmer sur sa terre même, moyennant l'hommage, et quinze jours de garde annuelle au château de Montaigu.
Cependant, entre le XIVe et le XVe siècle, des vicissitudes causées par la guerre locale avec les Anglais avaient dépossédé l'antique famille.
La seigneurie avait passé à une famille de Foucher, dont le chef, Jean, céda en 1409 aux nécessités de la guerre en consentant que le château qu'il avait fait bâtir fût démoli après sa mort.
On retrouve néanmoins au XVIIe siècle la famille des Herbiers possesseur de la terre voisine de l'Etanduère, qui lui appartenait déjà dès le XVe, et elle avait fait rebâtir le château dont on ne voit plus que des ruines.
En 1569, un Jean des Herbiers s'était renfermé à Poitiers sous la conduite du gouverneur Guy de Daillon pour défendre la ville assiégée par Coligny. Mais alors ces gentilshommes n'avaient plus que le nom de leur ancienne seigneurie.
La famille Fouscher, qui n'avait pas cessé de posséder ce domaine jusqu'à la fin du XVe siècle, l'avait fait entrer en 1493, par un mariage, dans la famille de Jean Guérin, écuyer et maître des requêtes du roi Louis XII.
On est peu renseigné sur les événements religieux qui intéressèrent les Herbiers dans le cours du moyen âge.
On sait cependant par la tour romane de l'église Notre-Dame qu'au XIe ou XIIe siècle, une église lui fut donnée, de belles dimensions et digne des seigneurs qui alors s'établissaient solidement derrière les murs de leur ville.
Cette église était construite en dehors des murs, sur le territoire nommé du Petit-Bourg, et était un prieuré de l'abbaye de Saint-Michel-en-l'Herm.
Elle a été rebâtie à la fin du XVe siècle.
Un autre prieuré de Saint-Pierre existait aussi dans la ville et était déjà entièrement disparu au XVIIIe siècle. Il appartenait au Chapitre de Luçon.
— Au XVIe, le baron du Landreau possédait la moitié de la ville et tout le Petit-Bourg, où il avait maintenu le culte catholique malgré les efforts des huguenots.
La Révolution a fait beaucoup de mal aux Herbiers, qui fut le centre des opérations militaires en 1793.
— Que de faits héroïques se passèrent alors sous les vieux restes de ce donjon qu'on y voit encore couvert de lierres et contrastant de loin avec les formes rajeunies des châteaux de Pouzauges et de Mesnard, et celles de la montagne des Alouettes, où la première chapelle gothique élevée en France aux souvenirs de la Monarchie est devenue tout à coup une ruine sous celle de 1830, et ne doit d'exister encore qu'à la Société des Antiquaires de l'Ouest, qui a obtenu sa conservation.
Sauvegarde de la chapelle des Alouettes séance du 3 mai 1921
« Messieurs, le département de la Vendée est propriétaire depuis 1827 de la chapelle bâtie sur le mont des Alouettes en souvenir du passage de la duchesse d'Angoulême en Vendée.
Cette chapelle n'a jamais servi au culte et n'a jamais été entretenue par le département, mais a été réparée de façon sommaire par la famille du Landreau.et M. de Bermond.
« Ce dernier nous propose actuellement d'acquérir la construction et le terrain de 4 ares qui l'entoure moyennant la somme de 3.000 francs.
« Votre Commission a considéré que ce petit monument, en fort mauvais état, n'a d'autre intérêt que celui qu'il doit à sa situation pittoresque, et qu'à ce titre le département ne saurait consentir à le vendre qu'à la condition que son entretien et sa conservation soient assurés par l'acquéreur.
Nous nous proposons donc de demander nous-mêmes, préalablement à la vente, le classement.de cette chapelle comme monument historique ou tout au moins comme site pittoresque.
« De cette façon, en vertu de l'article 9 de la loi du 4 janvier 1914, le monument sera placé sous la garde du Ministre des Beaux-Arts ; il ne pourra être détruit, et devra être réparé par le propriétaire avec la surveillance de l'administration des Beaux-Arts, ce qui en assurera la conservation indéfinie, conformément aux voeux du Conseil général.
Quand nous aurons obtenu ce classement, nous pourrons examiner avec tout l'intérêt qu'elle comporte la proposition d'achat de M. de Bermond.
« Le Rapporteur,
« JEANNEAU. »
M. PARIS :
Je m'associe pleinement aux conclusions de M. le Rapporteur.
La chapelle des Alouettes en effet se trouve dans un site merveilleux et il serait fâcheux qu'elle pût disparaître un jour ou peut-être faire l'objet de spéculations ; nous sommes tous mortels et qui nous dit que, le futur acquéreur disparaissant, la chapelle ne sera pas de nouveau mise en vente pour passer dans les mains d'un acheteur que l'on ne connaîtra pas.
Ce monument, comme les moulins qui l'avoisinent, fait partie du domaine historique du département; nous avons le devoir d'en assurer la sauvegarde.
M. LE RAPPORTEUR:
C'est pour cela que la Commission propose avant tout d'obtenir le classement et nous demandons à M. le Préfet de vouloir bien faire hâter les formalités par le Ministère des Beaux-Arts.
Le mont des Alouettes rappelle non seulement les souvenirs de la Restauration, il est, par les moulins qui le surmontent, un témoignage encore vivant des guerres de Vendée
C'est tout un ensemble, patrimoine de l'histoire de notre pays, qui doit être sauvegardé.
Que si d'ailleurs l'Administration ne voulait pas considérer comme un monument historique une chapelle qui n'a jamais été consacrée au culte, tout au moins pourrait-on la classer comme site pittoresque et en assurer la conservation entre les mains des possesseurs futurs quels qu'ils soient.
M. DE CHABOT:
Contrairement à ce que disait M. Paris, je ne m'opposerai pas quant à moi à la vente immédiate de la chapelle des Alouettes.
En effet, si M. Comte et à la comtesse de Bermond d'Auriac, dernière héritière du Landreau a proposé d'en faire l'acquisition au département, ce n'est pas pour la démolir, mais bien au contraire pour y procéder, avec le concours de quelques amis, à des réparations indispensables pour empêcher l'édifice de tomber en ruines.
Néanmoins, le classement sera une sécurité de plus qui n'empêchera pas le futur acquéreur de remettre le monument en un bon état digne du site qu'il domine.
M. LE RAPPORTEUR:
Cette question des réparations nécessaires pourra en effet être également soulevée par le Ministère des Beaux-Arts saisi de notre demande de classement. On pourra se refuser à classer tant que les réparations n'auront pas été effectuées et nous aurons alors à voir dans ce cas à quelle solution il conviendra de s'arrêter.
M. LE PRÉSIDENT :
Puisque M. de Bermond et ses amis se proposent d'acheter la chapelle pour la réparer, peut-être ne se refuseront-ils pas à ce moment à faire faire les travaux nécessaires; et puis, après classement, ils s'en rendront acquéreurs.
(Les conclusions du rapport sont adoptées.)
Le château du Landreau sert d’hebergement à Catherine du Puy du Fou, pendant la restauration du château du Puy du Fou <==.... ....==> 50e anniversaire de l'achèvement de la chapelle des Alouettes samedi 28 avril 2018