En 1174, poursuivant son fils Richard, Henri II Plantagenêt met le siège à Saintes endommageant l'église Saint Pierre

Henri le jeune est adoubé en 1173 par le chevalier Guillaume le Maréchal avant de se réfugié auprès du Roi Louis VII. Il entre alors en rébellion contre son père et entraine facilement à lui ses deux frères Richard et Geoffroy.

En septembre après l'arrestation de sa mère, Richard prend la tête de la rébellion  en Aquitaine.

Aussi le fils d'Aliénor, Richard d'Aquitaine, trouva-t-il de zélés partisans dans la Saintonge du sud.

Toutefois les barons de cette contrée n'avaient pas cessé de voir en lui un Angevin, bien que le sang d'Aliénor coulât dans ses veines, et ils le confondaient, avec son père et ses frères, dans leur haine nationale pour la race des Plantagenet.

 

En marchant sous la bannière du prince, ils songeaient, non à le servir, mais à opposer au roi d'Angleterre un ennemi redoutable, et ils agissaient, selon l'expression d'un chroniqueur, bien moins par amour du fils que par haine du père (1)

Vaincue dans le nord et l'est de l'Aquitaine, la coalition méridionale se dressait encore, audacieuse et menaçante, dans les villes et les châteaux de la haute-Saintonge, où Richard, chassé de toutes ses positions du Poitou, s'était jeté avec un petit nombre des siens.

 Henri II, après la soumission de l'Anjou, avait congédié ses bandes de soudoyers, et était venu à Poitiers célébrer les fêtes de la Pentecôte.

Là, ayant appris que Richard était enfermé dans les murs de Saintes avec son armée, il rassembla une troupe de Poitevins naguère ses ennemis jurés, alors ses vassaux soumis, et entra en Saintonge pour délivrer la capitale de cette province. (2)

La ville de Saintes, outre sa ceinture de murs gallo-romains, était défendue par deux châteaux, l'une en défendait la principale entrée par  son église qui, comme plusieurs autres basiliques d’Aquitaine, pouvait être transformée en citadelle.

L'autre, bâtie sur un rocher au centre de la cité, et appelée la grande - tour, n'était autre chose que l'ancien capitole, reste mutilé mais encore imposant de la puissance romaine, dont les traditions s'étaient perpétuées dans la plupart des villes de la Gaule méridionale.

 

Ces deux citadelles ne suffisant pas à la défense des insurgés, les soldats de Richard, dit un chroniqueur, sans respect pour Dieu et son saint temple, entrèrent, avec des torches et des fanaux, dans l'église épiscopale  et, la remplissant d'armes et de provisions, la convertirent en un château-fort (3)

 

Henri II étant arrivé sous les murs de Saintes plutôt que Richard et ses partisans ne s'y étaient attendus, reconnut bientôt que leurs forces ne consistaient que dans les trois redoutes qui défendaient la place, et résolut de ne rien épargner pour s'en rendre maitre. (4)

D'abord il dressa ses balistes et machines de guerre contre la vieille tour bâtie à l'entrée de la ville et l'emporta d'assaut.

 Entrant alors sans difficulté, il assiégea la grande tour du capitole, et la prit avec non moins de bonheur, ainsi que les chevaliers et servants d'armes qui l'occupaient.  (5)

Richard s'était jeté, en dernier lieu, dans l'église épiscopale bien pourvue d'armes et de soldats.

Henri II entreprit aussitôt le siège de cette église, non pour l'attaquer, pour la violer, pour la souiller, dit un contemporain , mais pour la purger de ses souillures, en l'arrachant aux mains des profanateurs. (6)

Ce poste ne tint pas plus longtemps que les deux autres : il fut pris en peu de jours, et la plupart des chevaliers et sergents qui le défendaient restèrent au pouvoir du vainqueur. (7)

Henri II fit prisonniers, tant dans l'église que dans les deux tours, environ soixante chevaliers et quatre cents archers. !

Raoul de Dizy raconte qu’Henri II d’Angleterre, ayant appris que son fils Richard s’était emparé de Saintes, accourt, trouve transformée en forteresse l’église Saint Pierre.

Henri s’empara des forts et de l’église, il prend d’abord la tour qui était à l’entrée de la ville, puis le capitole, enfin l’église cathédrale : «  Praesidium primum quod in ingressu civitatis fuerat ab antiquo constructum subjugavit inprimis. Deinde progrediens aggressus est fortuna consimili capitolium, praesidium majus sed praesidio primo multo antiquius. Ad ultimum accessit ad majorem ecclesiam……..

Effrayé des rapides progrès de son père, Richard avait évacué la ville et s'était jeté avec quelques-uns des complices de sa rébellion, dans le château-fort de Taillebourg ou Henri II le poursuivit, brûlant, dans sa colère, les habitations des vilains, arrachant les vignes et les arbres fruitiers.

Déjà il s'apprêtait à faire le siège de cette forteresse lorsqu'informé que son fils aîné et le comte de Flandre équipaient des vaisseaux à Gravelines pour passer en Angleterre avec une troupe de leurs partisans, il fut forcé d'interrompre le cours de ses succès en Saintonge, et reprit le chemin de son royaume d'outre-mer à travers l'Anjou et la Normandie , emmenant prisonnières sa femme Aliénor et sa bru Marguerite de France.

 

 

La ville de Saintes se ressentit longtemps de l'assaut qu'elle venait d'essuyer.

 Ses murailles et tours, en partie renversées par le bélier poitevin, n'offraient partout que des monceaux de ruines.(9)

 Parmi les bâtiments qui étaient tombés sous le choc des projectiles lancés par les catapultes et les balistes, se trouvait un moulin appartenant à l'abbaye de Sainte-Marie.(10)

 A la faveur du désordre de la guerre, un certain Enchérius avait fait enlever par ses meuniers, à l'insu de l'abbesse tout le blé qui se trouvait dans ce moulin. (11)

Mais la tranquillité étant rétablie dans la ville, Agnèsde Barbezieux manda Enchérius devant elle, et exigea de lui un gage pour la réparation du forfait qu'il avait commis au préjudice de l'église, ce à quoi il se soumit en étendant, selon l'usage du temps, son bâton sur le chartrier du monastère.

 

 

En juin 1174, Henri II confirme les possessions de l’abbaye Notre-Dame de Saintes, il s’adresse à son sénéchal de Poitou et à tous ses personnels de Saintonge et d’Aquitaine

 

Henricus, Dei gratia rex Anglorum, et dux Normannorum et Aquitanorum, et comes Andegavorum, senescalco Pictavie, et omnibus ministris et fidelibus suis Aquitanie, et precipue Xanctonensibus, salutem.

Mando vobis, et precipio, ut omnes res et possessiones ad abbatiam Sancte Marie de Xanctonis pertinentes, in pace, et libere, et quiete esse permittatis, sicut carte quas inde habent testantur.

Les choses que je vous commande, et je vous dis, que toutes les choses et possessions appartenant à l'abbaye de Sainte-Marie des Saintes, en temps de paix, avec honneur et liberté, et de repos et que vous abandonniez, comme les chartes dont ils ont à qui en témoignent.

 

Nec aliquis in possessionibus earum harbergamentum, aut questam, aut procurationem, aut cabalcatam, aut exercitum, aut quidlibet aliud vi aut terrore ulterius exigat. Set vigeriam de homicidio, de furto, de raptu, de incendio prorsus dimittatis. Precipio insuper vobis, quatinus contra omnes qui possessiones earum inquietaverint, eas manuteneatis et defendatis sicut res meas proprias. Et si quis eis super hoc injuriam aliquam inferre presumpserit, plenariam eis inde sine dilatione justiciam fieri faciatis. T.

(Testibus?) Porteclia senescalco Pictavie, Willelmo Mangod., Hamel. de Mientoir., Gaufrido de Taunai, Teob[aldo] Chabot, Mauricio de Croun ( Craon ), Nivardo de Rochefort, apud Xanctonas.

 

 

 

 <==.... ....==>

 <==.... ....==>En 1179, Richard Cœur de Lion donne l'assaut à la forteresse de Taillebourg et après la victoire ordonne sa destruction.

 

 

 


 

(1)  Plures ejus patriæ principes , potiùs odio patris quàm amore filii, in partem ejus conversi sunt. (Chron. S. Albini, andegav. ap. script. rer. franc. tom. XII. p. 684.)

 

(2) Cùm audisset Ricardi, filii sui, militiam urbem santonicam occupasse , sumptis secum Pictaviensibus , ad eam liberandam cucurrit. (Radulfi de Diceto, chr. ap. script. rer franc. t. XIII p. 194.)

(3) Milites illi , nec Deo nec ecclesiæ sanctæ reverentiam exhibentes , majorem ecclesiam cum facibus et laternis ingressi sunt, et ipsam subitò in castellum redigentes , armis et victuabibus impleverunt. (Radulf. de Diceto, chron. jam. cit.)

(4) Cum autem rex citiùs quàm milites crediderant urbem appropinquasset , et in tribus eam munitionibus confidere edoctus fuisset , ad invadendum totas incubuit. (ibid.) — Et tandem pervenit usque ad santonensem civitatem et eam infregit. (Benedicti Petroburg. abbatis chron. ap. script. rer. franc. tom. XIII. p. 158.)

(5) Præsidium itaque primum , quod in ingressu civitatis ab antiquo fuerat extructum , subjugavit in primis. Deindė progrediens, aggressus est fortunâ consimili capitolium , præsidium majus. (Radulfi de Diceto chron. loc. cit.) - Duas turres in eâ capit , quarum una vocabatur turris major, et multos milites et servientes in eis. (Benedicti Petroburg. abbat. loc. cit.)

 

(6) Ad ultimum accessit ad majorem eccclesiam militibus multis et armatis refertam : accessit, non ut ecclesiam impugnaret , non ut violaret, non ut contaminaret , sed potius ut eam emundaret à sordibus : extraxit ab ecclesiâ violatores ecclesiæ. (Radulfi de Diceto. chron, ap. script. rer. franc. tom. III. p. 194.)

(7) Et obsedit ibi ecclesiam ubi sedes episcopalis erat , quam milites et servientes contra eum munierant , et infrà paucos dies eam cepit, et multos milites servientes in ea. (Benedicti Petroburg. abbatis chron, ibid, tom. XIII. p. 158.)

(8) Capti sunt intùs , tam in hâc munitione quàm in duabus aliis, milites circiter 60 et sagittarii 400. (Radulf. de Diceto, loc. cit.)

(9) Santonas vicepit , Ricardum et illos qui cum eo seditionem fovebant ad munitionem Tabellici fugavit. (Chron. S. Albini apdegav. ap. script, rer. franc. tom. XII. p. 483.) Et vineas et arbores fructiferas extirpare fecit. (Benedicti Petroburg. abb. loc. cit.)

(10) Script. rer. franc. tom. XII. p. 484 et tom. XIII, p. 159. - August. Thierry. Hist. de la conquêt. de P Anglet. par les Norm. tom. III. p. 315 et suiv.

Cùm Henricus, rex Anglorum , urbem xantonicam ferė destrueret, ( Cartul. de l'abb. de N. D. de Saintes.)

(11) Molendinum S. Mariæ ex parte destructum fuit, et tunc En cherius et ministri sui molendinarii bladum , sine consilio nostro, deportaverunt. (Cartul, orig. jam cit.)