Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
PHystorique- Les Portes du Temps
16 novembre 2020

LA LÉGENDE DE SAINT LIENNE, disciple de saint Hilaire (Rocca Super Oyonem)

Rocca super Oium Portail de l'ancienne chapelle de Saint Lienne à la Roche sur Yon

En 994, la seigneurie de  Rocca Super Oyonem (la Roche-sur-Yon) ne possédait guère que son château, fièrement campé sur la colline: les premiers arbres de la forêt l'isolaient du reste du pays. Quelques toits de chaume se groupaient à l'intérieur des hautes murailles, abritant les habitants malheureux, dont la vie tout entière se consumait en plaintes sur les calamités passées et en craintes pour celles à venir.

C'est alors qu'Ingélénus obtint les reliques de saint Lienne, en grande vénération dans la ville de Poitiers. Près de la chapelle qui fut construite en l'honneur du saint, s'éleva un monastère et la chétive bourgade devint florissante ; les glorieuses couleurs de France brillaient sur sa bannière, elles flottaient superbes au sommet de ses murailles, semblant attendre l'ennemi et lui dire : « Tu n'iras pas plus loin. »

 

Ecoulez maintenant, habitants de la cité yonnaise, la légende du grand saint Lienne.

 

Saint Lienne naquit, au IVe siècle : nous ne connaissons pas le lieu de sa naissance; tel un ruisseau bienfaisant dont on ignore la source.

Il fut un des disciples de saint Hilaire, le grand évêque de Poitiers, et fit sous sa conduite de tels progrès dans la vertu que le maître, pour récompenser la pureté des moeurs de son élève et les connaissances qu'il avait acquises dans les sciences sacrées lui conféra la dignité sacerdotale. Les belles qualités qu'il montra, dans l'accomplissement des fonctions ecclésiastiques, lui méritèrent l'affection toute particulière de son saint protecteur qui lui ouvrait familièrement son âme et lui confiait ses plus intimes pensées.

C'était le temps où l'empereur Constance persécutait les catholiques par la terreur, la confiscation des biens, l'exil et des cruautés de tout genre, s'ils refusaient d'embrasser l'arianisme.

Hilaire se dressa contre l'erreur, comme un rempart inébranlable, et attira sur lui toute la fureur de l'hérésie. On lui tendit mille embûches, et il fut exilé en Phrygie.

Lienne accompagna le confesseur héroïque, partageant toutes les persécutions qu'il eut à endurer pour la défense de la foi. Il le suivit à Séleucie, ville d'Isaurie, où saint Hilaire fut convoqué à un concile, puis à Constantinople, où le vaillant évêque demanda audience à l'empereur, par trois requêtes publiques, pour y défendre la vérité contre ses adversaires.

Ceux-ci, craignant d'être vaincus, sollicitèrent l'empereur de renvoyer en Gaule l'ennemi de leurs doctrines ; et Hilaire, victorieux, revint dans sa ville épiscopale, avec son disciple Lienne, qui recueillit au passage sa part des transports avec lesquels saint Jérôme embrassa le confesseur du Christ.

Après le retour de son maître dans les Gaules, Lienne l'aida beaucoup à combattre et à déjouer la perfidie des Ariens.

Lienne reprit alors sa place dans le clergé de la ville épiscopale, où il était honoré de la dignité d'archiprêtre, toujours prêt à rendre au saint évêque les services qu'il attendait de son affection.

Le souvenir de saint Lienne étant mêlé intimement aux derniers instants de saint Hilaire, nous allons en traduire le récit d'après le précieux manuscrit du XIe siècle, n° 196, de la Bibliothèque nationale, auquel il faut ajouter les manuscrits 5.296, 5.316 et 14.654, tous des XIIe et XIIIe siècles, reproduisant des auteurs de cette époque, et enfin Vincent de Beauvais (Hist. lib. XIV, c. LXI.)

A peine rentré dans la ville de Poitiers, l'admirable pontife se retira, pour se préparer à la mort, dans la maison où sa femme et sa fille avaient rendu le dernier soupir.

Cette demeure lui était chère. Il y transforma en oratoire le lieu même où sa fille expira entre ses bras. Au milieu de disciples choisis, il aimait à y passer de tranquilles heures, devisant des choses divines ; et c'est là qu'il voulut mourir. Sentant sa fin prochaine, il manda près de lui Lienne, archiprêtre de Poitiers, le confident de toutes ses pensées.

Le soleil avait disparu, depuis longtemps, derrière les collines, et la nuit étendait sur la ville le manteau argenté des étoiles. Hilaire pria son fidèle ami de sortir et de prêter l'oreille, pour savoir si l'on entendait, du bruit dans la cité. Lienne obéit et revint, disant qu'on distinguait le murmure d'une foule immense. Alors, le bienheureux pontife commença avec lui un entretien suprême sur les joies de l'éternelle patrie ; il semblait y puiser de douces consolations et des forces nouvelles, comme avant le combat, le guerrier anime son courage en regardant la couronne promise à la victoire. Une seconde fois, il ordonne à Lienne d'écouter si le calme règne enfin dans la ville. Le disciple docile ouvre la porte, et annonce que tout bruit a cessé. C'était l'heure marquée sans doute par une vision céleste ; car, peu d'instants après, une lumière éblouissante pénètre dans la petite chapelle, et enveloppe, de sa splendeur, l'autel devant lequel gisait le mourant, étendu sur la cendre. Un parfum d'une suavité incomparable remplit ce lieu, mettant au coeur de saint Lienne, de saint Just et des autres clercs, accourus près du lit de leur père, une joie toute céleste.

Puis, la lumière miraculeuse s'éteint, et Hilaire apparaît mort sur le pavé du temple. C’était la nuit du 12 au 13 janvier de l’an 368.

Dès l'aurore, la nouvelle se répandit dans la cité en pleurs Pendant trois jours, le peuple vint contempler, sur le lit funèbre, la figure rayonnante de son évoque. Lienne ne quitta la mortelle dépouille du maître, qu'au moment où elle fut caché sous le sanctuaire de l'église Saint-Jean et Saint-Paul, dans la crypte creusée par les soins d'Hilaire, entre les tombeaux d'Abra, sa fille aimée, et de son épouse, dont la tradition ne nous a pas conservé le nom.

Saint Lienne, privé de son père et de son maître, embrassa alors la profession monastique, et devint le premier abbé de Saint-Hilaire-le-Grand. Nous ne savons pas combien d'années il gouverna sa communauté ; mais, d'après un bréviaire manuscrit de Saint-Hilaire-de-la-Celle, nous sommes certain qu'il ne se borna pas à former à la vertu les religieux soumis à sa paternelle autorité.

A l'exemple de saint Hilaire et de saint Martin, il évangélisa les peuples délaissés de la campagne. Enfin, cédant à l'attrait qui, depuis longtemps, lui faisait désirer une solitude plus profonde, il se relira dans le petit couvent de Saint-Hilaire-de-la-Celle, qu'il avait probablement fondé. Il voulait rendre le dernier soupir dans ce lieu béni, où le sublime docteur, qu'il regardait comme un père, Abra, la fille du saint Pontife, fleur virginale dont le parfum embaumait encore l'humble sanctuaire, dans les murs duquel elle s'était épanouie dans la mort pour le jardin du ciel, où l'épouse vénérée de saint Hilaire, avaient pris leur vol vers la demeure éternelle.

Saint Lienne fit plus encore par ses admirables vertus que par sa parole.

Depuis l'enfance, sa vie n'avait été qu'un chant d'amour envers Dieu. Ainsi l'oiseau, qui doucement abrité sous l'aile de la Providence, dit aux bois et aux vallons la chanson matinale et l'hymne du soir. Sa gracieuse innocence captiva le coeur d'Hilaire ; son humilité, son abnégation, son dévouement à toute épreuve, lui attirèrent l'estime et l'affection de tous. Il avait quitté, pour le service de Dieu un avenir brillant dans le monde ; c'est pourquoi sa retraite dans le cloître produisit une sensation profonde. Il se fit alors autour de la cellule du bienheureux un concours pieux de fidèles, qui venaient lui demander le secours de ses prières et de sa puissance miraculeuse; car d'éclatants prodiges avaient porté au loin la renommée de ses vertus.

Un ange ayant annoncé à saint Hilaire sa fin prochaine, un messager céleste apprit aussi à saint Lienne, de la part de Dieu, le terme de son pèlerinage ici-bas et lui révéla qu'une fièvre violente serait le signal de l'appel divin.

Le docile apôtre attendit le jour de l'épreuve, il la supporta avec une ferveur si pleine amour, qu'il fut, depuis ce temps, invoqué par tous ceux qui souffrent de la fièvre, que Dieu lui donna le pouvoir de guérir. Il s'endormit, un soir, souriant à son rêve, qu'il acheva dans les joies de l'immortalité, le premier jour de février, vers l'an 380.

Son corps fut inhumé dans l'église de Saint-Hilaire-de-la-Celle, non loin du lieu où avait reposé, avant et après la mort, son père et maître vénéré. Il fut aussi le premier, qui eût la dévotion de choisir sa sépulture, près du lit de saint Hilaire selon l'expression usitée dans ces siècles de foi naïve, où l'on considérait.la mort comme un sommeil.

Gy-finict la légende très véritable du grand saint Lienne ; chrestïens, faictes l'aumône d'une prière à celui qui l'escrivit.

 

La ville de Poitiers, qui conserve encore de chers et nombreux vestiges du pontife qui fut sa gloire, a vu disparaître, au contraire, tous ceux de son fidèle disciple.

C’est ainsi  que cinq siècles après la mort de Saint Lienne, un seigneur de la Roche sur Yon obtint la permission de faire transporter sur ses terres, les restes dans un prieuré. La charte de fondation du prieuré Saint Lienne, datant de 1090, est l’un des documents les plus anciens conservés aux Archives départementales.

Nous espérons faire revivre, à la Roche-sur-Yon, son culte jadis florissant ; puissent ces humbles lignes ressusciter aussi son souvenir vénéré, dans la capitale du Poitou.

 

Que devint le corps de saint Lienne ? Fut-il détruit avec le tombeau ou la châsse qui le renfermait pendant la guerre de Cent Ans ? Fut-il partagé entre différentes églises ? Autant de questions dont nous n’avons pas de réponse satisfaisante.

Toutefois il semblerait que, vers la fin du XVIIIème siècle, on conservait encore à La Roche un ossement assez important d’un bras de saint Lienne et chaque année, le 12 juin, en souvenir de la translation, on y célébrait solennellement la fête du saint confesseur.

Une foire dite "assemblée de Saint Lienne" se maintint au XIXe siècle le dimanche suivant la fête du saint après la disparition du culte et du sanctuaire.

 Cette fête attirait une foule considérable de pèlerins qui venaient demander, par l’intercession de saint Lienne, la guérison de la fièvre, de la goutte et principalement des écrouelles. Ce qui est certain, c’est que l’église saint Lienne resta debout jusqu’à la révolution qui l’a ruinée en partie.

A la Roche, le vieux château qui donnait asile, eu son enceinte, au petit sanctuaire de saint Lienne a été renversé ; les pierres de la chapelle dispersées ; à leur place des casernes sont construites, et un soldat, accomplissant aussi un devoir sacré, poursuit sa marche régulière et monotone, là où jadis le moine priait dans les grands cloîtres sombres.

Après la destruction de l’église on alla encore prier sur ses ruines, mais la plupart des pèlerins se rendit à l’église saint Pierre des Moutiers (aujourd’hui l’église du Bourg sous La Roche) où l’on avait érigé une statue de saint Lienne.

 

Découverte sarcophage Saint Lienne l'Hermenault

Découverte Archéologique

 Au printemps 2011, un propriétaire récoltant a effectué un labour de la parcelle afin de planter du tournesol. Il a heurté deux sarcophages dont l’un avait son couvercle partiellement conservé. Il a dégagé le pourtour de l’un et a constaté le remplissage par des éléments squelettiques humains. Il a prévenu un ami agriculteur qui fait partie du Groupe Vendéen d’Etudes Préhistoriques et qui es passionné d’histoire.

Lors de cette découverte fortuite, deux sarcophages d’époque médiévale ont été dégagés. ils sont encore en place dans un espace dédié, selon la tradition, à une chapelle Saint Lienne (Fief de Saint L’Hienne proche de l’Hermenault)

Le retable de la chapelle du Bois-Vert fut transporté dans la chapelle de la maison que les comtes Savary de Beauregard possédaient à l'Hermenault. La chapelle fut offerte aux soeurs de Momaison, puis détruite en 1960 pour construire une cantine.

Les Eglises de Poitiers et de Luçon ont toujours célébré la fête de saint Lienne.

 

 

 

 

La légende de saint Lienne : hagiographie vendéenne / par l'abbé L. Rousseau

 

Les Archives départementales de la Vendée ARCHIVES ANTÉRIEURES A 1790.  <==..... .... ==> Castrum de Rocha super Oyonem (la Roche sur Yon) prieuré saint Lienne

 

 


 

1 Au moment où l'on vient, clans le but d'y restaurer son culte, de placer dans l'une des chapelles de l'église de la Roche-sur-Yon la statue de son ancien patron saint Lienne, nous ayons pensé faire oeuvre d'actualité en empruntant ce joli chapitre au tout récent ouvrage de notre distingué collaborateur, M. l'abbé Rousseau, dont nous signalons d'autre part le très vif intérêt. N. D. L. D.

 

Publicité
Commentaires
PHystorique- Les Portes du Temps
Publicité
Publicité