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PHystorique- Les Portes du Temps
17 décembre 2023

Le 1er juillet 1172, Agnès Chabot Fondatrice du Couvent de Bernardins dans l'îlot du Pilier rattachée à Noirmoutier

1172 Agnès Chabot Fondatrice du Couvent de Bernardins dans l'îlot du Pilier (Noirmoutier)

En 1141, Conan duc de Bretagne, qui avait fondé l'abbaye de Buzay, oublia les donations qu'il avait promises à saint Bernard : Domnus Bernardus considérons eumdem locum... constructum et aedificatum sed pêne desolatum, supra modum yehementer doluit (Martène, Thésaurus novus anecdotorum, t. I, p. 393. Privilegium Conani ducis Britanniae, de fundatione Buzeensis).

 

Buzay donne naissance à trois nouvelles abbayes.

L'îlot du Pilier, situé à environ cinq kilométrés à l'Ouest de l'île de Noirmoutier, est une petite île d'une longueur de 600 mètres, sur 100 mètres de largeur moyenne, environ. Sa superficie est de six hectares. Elle est formée d'un solide massif granitique recouvert d'une faible couche de terre végétale, et, d'après la tradition, elle aurait, autrefois, fait partie de l'île de Noirmoutier.

On aurait même trouvé, sur les hauts fonds qui séparent l'île de l'îlot, et à une assez grande distance des côtes, des assises de briques liées par du ciment. Dans tous les cas, au commencement du XIIe siècle, les deux îles, paraît-il, étaient reliées l'une à l'autre par une digue.

Ile du Pillier Noirmoutier

Au XIIIe siècle, une abbaye de Bernardins, appelée l'Abbaye de l'Ile-Dieu, existait dans l'îlot du Pilier.

Le 1er juillet 1172, Agnès Chabot  Fondatrice du Couvent de Bernardins dans l'îlot du Pilier

Agnès, fonda,  dans l'îlot du Pilier, un couvent de Bernardins auquel elle donna, entre autres choses, son moutonnage de Bouin, c'est-à- dire un droit perçu sur chaque tête de mouton ou de brebis. (Luneau et Gallet, l'île de Bouin, p. 66.)

Elle fut transférée dans l'île de Noirmoutier (appelée alors Héro), sans doute par suite de la destruction de la digue.

 On lit dans l'acte de fondation de la nouvelle abbaye, dédiée à Notre-Dame de la Blanche :

« Ego Petrus Garnapia Deo et abbatial insuloe Dei Cest. Ord. quam in insula de Piliers primo fundatam, profiter difficultatem loci in Hero insula, divina inspirante gratia, transtuli, dono et concedo, etc. »

Le fort circulaire, qui se trouve à une extrémité de l'îlot, a été bâti sous Louis XIV. Il est entouré d'un fossé de 200 mètres de circonférence et de 10 mètres de largeur. Un phare d grande dimension s'éléve à l'autre extrémité de l'îlot, à côté de l'ancien phare abandonné. (Cavoleau, Statistique de la Vendée, annoté par de la Fontenelle, p. 204.)

 

 En effet, comme l'ont établi La Fontenelle et l'abbé Baudry, et après eux M. le docteur Viaud-Grand-Marais, l'Ile-Dieu, Insula Dei est bien le nom véritable de l'îlot du Pilier, habité par les moines Bernardins, de 1172 à 1205, époque à laquelle Pierre de la Garnache fonda pour eux l'abbaye de la Blanche, dans l'île de Noirmoutier, sous le nom de Notre-Dame-de-l'Ile-Dieu, de Insula Dei,

Et, d'ailleurs, l'abbaye de la Blanche conserva, pendant quelque temps, ce nom de Monastère de l'Ile-Dieu.

Le nom de Blanche lui fut attribué à cause du costume des moines de Citeaux, qui est blanc, et ce nom se trouve mentionné dans une bulle du pape Grégoire IX, du 8 août 1236, qui met l'abbaye sous la protection du Saint-Siège et confirme toutes les donations faites ou à faire.

 

Mais il apparaît au bout de trente-trois ans que ce lieu est trop exigeant, et les moines choisissent en 1205 de se rapatrier sur l'île de Noirmoutier, plus grande et plus accueillante, pour y construire l'abbaye dite de la Blanche (à cause de la couleur des coules monastiques), grâce à un don du seigneur Pierre V de La Garnache.

 La mer l'atteint à l'époque des grandes marées : ce qui indique un réel affaissement du sol, prouvé d'ailleurs en ce point, de façon plus démonstrative encore, par la séparation de Noirmoutier de l'îlot du Pilier, jadis réuni à cette pointe rocheuse à une époque historique (en 1200, J. Piet).

Pour Noirmoutier, tous ces faits sont d'une explication facile, l'île étant très basse et soumise à des alternatives d'effondrement et d'exhaussement très remarquables et encore persistants. 

Les documents du moyen âge relatifs à Noirmoutier sont rares; les quelques chartes éparpillées dans les cartulaires ne nous fournissent aucune précision quant au dessin des rivages.

Il faut regretter la non-publication du cartulaire complet de l'abbaye, conservé dans une collection privée (1).

  Cependant quelques lueurs nous sont permises sur le passé de l'île grâce aux récits de nos plus anciens annalistes et chroniqueurs.

Une tradition s'est perpétuée jusqu'à nos jours en Poitou et en Saintonge, d'après: laquelle, vers le VIe siècle, «une submersion subite et générale», aurait apporté de profonds bouleversements dans la topographie de ces régions (2).

 Nous ignorons quelles modifications en résultèrent pour l'île que nous étudions.

C'est vers cette date que saint Philbert ou Philibert fonda le monastère célèbre qui conserva son nom.

Ce monastère se trouvait sans aucun doute dans l'île du Pilier (3), entre les deux têtes des Chevaux.

 Les découvertes faites en ce lieu par M. Charier-Fillon en font foi (4).

 Nous en pouvons déduire que l'île du Pilier était alors plus étendue vers l'Ouest.

Mais, d'un autre côté, tous les historiens de ces âges reculés ne parlent jamais que d'une île d'Er ou Hérius (5).

Nous sommes donc portés à admettre que le Pilier pouvait être relié alors au noyau noirmoutrin (5)

L'histoire de la translation de saint Philibert nous apprend également que l'île de Noirmoutier était pourvue d'un bon port, ce qui favorisa grandement les incursions des Normands, qui maintes fois la ravagèrent (6).

 Ce port, ou Conche des Normands, était situé au nord-est de l'île, non loin du lieu où sera édifiée l'abbaye de la Blanche (7).

Cependant il apparaît que l'île du Pilier ne devait point être d'accès facile.

Les coups de mer devaient rompre l'espèce de digue qui reliait le monastère au noyau noirmoutrin, ou bien le flux empêchait les moines de passer du monastère dans l'île principale (8).

 Je croirais volontiers que le Pilier ressemblait à l'île d'Enet ou à l'île Madame, dans le bassin charentais, lesquelles sont réunies au continent par un platin, submergé de haute mer.

 C'est dans ce sens qu'il conviendrait, à notre avis, de comprendre le passage suivant d'Ermentaire :

 «Quia ipsa insula ledonibus maxime impedientibus non semper accessibilis esse potest nostratibus, cum Northmannis cunctis temporibus quibus mare tranquillatur, inaccessibilis esse minime dignoscatur», ce que Chifflet traduit : « Étant détachés de la terre ferme et presque inaccessibles en certains temps, ils n'y pouvaient être secourus (les moines), le flux et le reflux y mettant le plus grand empeschement de tous. Ainsi parle Ermentaire, en la préface du second livre, après le glossaire d'Isidore, où nous lisons : «Ledo, maris aestuatio » (9).

Cette explication permettrait d'accorder le texte d'Ermentaire avec la réalité des faits, alors que, de toute évidence, il ne saurait s'agir du passage de Fromentine, qui était alors un large détroit.

Les chroniqueurs nous signalent, pendant plusieurs siècles, les descentes des pirates du Nord dans l'île, et la résistance des moines qui n'y séjournaient qu'une partie de l'année, ayant fondé un second couvent à Déas, ou Saint-Philbert-de-Grandlieu. Pour le reste, ils sont très sobres d'éclaircissements.

Quoi qu'il en soit, le séjour du Pilier, ou plutôt des Chevaux, devenait de plus en plus difficile.

Les moines quittèrent donc en 1200 l'île, «propter difficultatem loci», pour s'installer dans Noirmoutier (10).

Leur déplacement fut autorisé par Pierre V de la Garnache, qui leur octroya une charte en 1205 et les combla de bienfaits.

 Cette charte de fondation de N-Dame la Blanche nous renseigne un peu sur l'état de l'île au début du XIIIe siècle.

 Au Nord s'étendait une forêt assez importante (11). Des landes et des terrains incultes couvraient une partie de Noirmoutier (12).

 Barbâtre existait déjà (13) ; il est également fait mention du Clos de Dom Gelosse, des Islées.

 La mer avait empâté le rivage oriental de l'île, car il est déjà question de lais de mer, «retractas maris» (14).

Ces alluvionnements ne se produisaient pas, d'ailleurs, sans que l'Océan tentât de regagner ses domaines perdus.

On voit en effet, un siècle plus tard, en 1392, des salines florissantes,, des marais et même les terres envahis par les flots (15).  

On peut se demander, d'un autre côté, s'il était possible de communiquer avec le continent de pied ferme.

 Nous lisons en effet, dans la Chronique de Saint-Brieuc, «Christiani per abdita insula fugerunt » et «mari rétracta de insula Herio exeuntes » (16).

Ne pourrait-on supposer qu'à la suite d'une grande marée, les platins, de la baie de Bourgneuf et de Noirmoutier aient découvert, comme nous constatons aujourd'hui le fait pour le rocher des Mannes, situé dans la baie de Fouras, et qui d'ordinaire est couvert de huit mètres d'eau ? (17).

L'Homme préhistorique : revue mensuelle illustrée d'archéologie et d'anthropologie préhistoriques

 

 

DESTINATION L'ILE D'HER - NOIRMOUTIER EN L'ILE (Histoire et Visite Virtuelle) <== 

Les Romains et les Gallo-Romains à NOIRMOUTIER <==

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 La légende de Châtelaillon (Mélusine) - L’ancienne cité, appelée Chastel-Aillon <==

Nous étions Vikings... l'histoire des Vikings dans le Poitou  <==

==> 1205 Charte de Fondation par Pierre V de Garnache, de l’abbaye Notre-Dame de la Blanche de Noirmoutier

 

 

 


(1). Le Cartulaire de la Blanche, copié au XVIIe siècle, est conservé dans la bibliothèque de Sir Thomas Philipps à Clieltenham. C'est un manuscrit de 1123 pages, de 355 centimètres sur 295. Cf. OMONT, Bibl. de FEcolc des chartes, 1889, p. 199.

(2).  dans Bulletin de la Société des Amis des sciences naturelles, Rouen, 1875, in-8°, p. 230.  

(3). Puylorson dit que l'île du Pilier est l'île des Pucelles, «insula Puellarum», ancienne résidence, des femmes Samnites (p. 17).

(4). Aux Chevaux, entre les deux têtes saillantes de l'Est, débris considérables de terres cuites, fragments tégulaires, morceaux de vases bruts ou vernissés. Peut-être les derniers débris du monastère du Pilier. CHARIER-FILLON, Mouvementé du sol; p, 9.

(5). Er (Dictionnaire de géographie comp.), Her, Ner, Heri, Herus, Herio, etc., Historiens de. France, passini, et E. AILLERY, Pouillé de l'évêché de Luçon, Fontenay, 1860, in-4°.

En 1100, «insula que vocatur Her», Acte d'Aimery de Thouars, Sire de Machecoul, dans Dom LOBINEAU, Histoire de Bretagne, II, p. 175.

— « Prieuré de l'Isle-Dieu», c'est l'île du Pilier, Pouillé D'ALLIOST, 1648, dans AILLERY, déjà cité. — «L'île de Noirmoutier appelée, avant le VIe siècle, l'Ile d'Hério ou du Désert». PUYLORSON, p. 1.

(5). Puylorson disait : «L'île du Pilier doit avoir fait partie de Noirmoutier» (p. 10). Plus loin on lit : «Plusieurs îlots, depuis ce temps-là submergés, et situés sur une plage de la côte armorique qui est entre la Loire et le Pilier. Ce dernier îlot n'était pas encore entièrement séparé de l'île de Noirmoutier ou, du moins, la communication de l'un à l'autre était facile» (p. 16).

(6). «Qui (Northmanni) cum ad praefatae insulae portum saenpius convolarunt», Historia translationis S. Filiberti, dans Historiens de France, t. VI, p. 307, et Acta ord. S. S.Bened., part. 1, saec. 4, p. 539.

(7). «Ad portum qui Conca dicilur invenît», ERMENTAIRE, Vie de saint Philibert, dans Pierre François CHIFFLET, Histoire de l'abbaye royale et de la ville de Tournus, Dijon, 1664, in-8°, preuves, p. 121. — «Ad nostrae insulae portum qui Concavocatur». Ibid., Preuves, p. 128. — «Praefatae insulae portus», ERMENTAIRE, liv. II, dans CHIFFLET, p. 87.

(8). Puylorson s'est demandé si la séparation du Pilier et de Noirmoutier aurait été due à un tremblement de terre ou à l'action d'un volcan. Puis il ajoute : «Mais la violence des tempêtes qui battent la côte occidentale de cette île, la fureur des flots poussés par les vents et par la rapidité des courants de l'Océan en conflit avec le confluent de la Loire, ont plus probablement détaché et détrempé les terres qui liaient et couvraient les rochers dont la chaîne réunissait le Pilier à l'Ile de Noirmoutier» (p. 31).

(9). CHIFFLET, ouvr. cité, p. 67.

(10). «Abbatia in insula de Pyllers primo fundata, propter difficultetem loci, in Hero insula translata.» Charte de fondation de Notre-Dame la Blanche, de 1205, accordée par Pierre V de la Garnache, dans PIET, p. 683.

 — ALLARD DE LA REISNIÈRE (Errata de l'abrégé de l'histoire du Poitou, 2e partie, p. 107-108) traduit Piblers par Peupliers. — L'abbé qui présida à la translation, Robert, est désigné dans le Spicilegium de D'ACHERY, en 1198, sous le nom de «Roberlus, abbas lnsule Dei», et figure en 1201 dans une charte de Buzay, comme «frater R. de Piglero» , VIAUD-GRAND-MARAIS, ouvr. cité, p. 95.

(11).  «Dono et concedo tantum de nemore meo in quo sita est quantum durat a capella B. M., dicto nemori maximo, usque ad finem dicti nemoris inferius cum tota riparia maris sibi contigua et cum dicta insula de Piblers.» Ch. de 1205. PIET, p. 685.

— «Cette île, suivant la tradition du pays, était véritablement un désert couvert de bois dans la partie septentrionale, qui est la plus élevée». PUYLORSON, ouvr. cité, p. 288.

(12). «In desertis sive tandis Hero insulae», Ibid, p. 685.

(13). Le Grand Gauthier, du commencement du XIVe siècle, parle de S. Nicholai «de Barlato, alibi de Barbatre». Abbé ÀILLERY, Pouillé de Luçon.

(14). «Clodicium de Barbastre, et totum clodicium meum de Hero insula quod vocatur clodicium-Domme Geloose, et terras quae dicuntur les Isleas cum clodicis proximis, necnon et totas retractas maris, dictis clodiciis et terris contiguas», et plus loin : «totas retractas de la Bosse secus oroest sitas».

(15). 1392. «Les diz habitans ont esté en telle perplexité et nécessité de vivre par fortune et orage de temps et élévation de la mer qui naguères a tellement surmonté les terres et maroys de la dicte ysle que tant en sel et béates comme aultre choses les dits habitans à présent demourans on ycelle ysle ont presque tout perdu le rendu de leurs diz biens.» GUÉRIN, Documents concernant le Poitou des Registres de la Chancellerie de France, dans Archives historiques du Poitou, t. XXIV, p. 90.

— Se trouve dans les Ordonnances des Rois de France, t. XVIII, p. 460, ainsi que les confirmations de 1431 et 1472.

(16). Chronique de Saint-Brieuc, dans PIET, ouvr. cité, p. 692.

(17). La position insulaire de Noirmoutier est nettement marquée dans Petrus VESCONTE, 1313 (Petrus Vesconte d'janua fecit ista tabulas anno Dmi M° CCC° XIII°) , Bibl. Nat., Cartes, Ge DD 687.

Une île porte le nom de «Labaia». Noirmoutier (Nermoster) est indiquée seulement au voisinage de son emplacement, et le nom est inscrit sur le continent. De même, Laur. GADDIANO, 1351, dans NORDENSKJOLD , Periplus, Stockholm, 1892, in-fol., carte 13, et ONGANIA, Raccolta di mappamondi e carte, nautiche del XIII al XVI secolo, Venise, 1881, in-fol., en l5 fascicules.

— Dans la carte, de Francesco PIZIGANI , 1373 (ONGANIA, fasc. 6), Bibl. Nat., Cartes, Ge FF 1172 , entre Noirmoutier et Yeu figure un nom d'île illisible. D'un autre côté, sur la Basse-Loire, on voit un lieu appelle Puliarno. M. G. PASSERAT (Etude sur les cartes des côtes de Poitou et de Saintonge, Niort, Clouzot, 1910, in 80, p. 12) l'identifie avec le Pellerin. Ne serait-ce pas le Pilier, avec une transposition de la place où aurait dû être inséré ce nom? Saint-Gilles (Angiles) est indiqué sur le golfe de Bourgneuf. La première transposition correspondrait à la seconde; L'île Noirmoutrine est appelée «Baia», «Labaya» dans l’Atlas Catalan de 1375, Bibl. Nat., ms. esp. 119 (galerie des chartes). — «La Bahia» dans Portulan anonyme du XIVe siècle, Ch. Navigatoria PINELLI-WALCKENAER, dans NORDENSKIOLD, Periplus.

 

 

 

 

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