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PHystorique- Les Portes du Temps
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11 avril 2023

Noirmoutier en héritage, le Vaillant Guy de la Tremouille et Marie de Sully pendant la Guerre de Cent ans

Vers 1390, nous atteignons au milieu de la Guerre-de Cent-Ans. La lutte continua toujours vive entre Anglais et Français, en Bretagne et sur les côtes du Poitou. De part et d'autre, on pille, on rançonne, on saccage à main armée.

Les fonctionnaires royaux eux-mêmes abusent de l'autorité du souverain et volent au besoin le roi tout le premier, comme ils volent et pressurent ses sujets.

Depuis la mort de Duguesclin le 13 juillet 1380 devant Châteauneuf-de-Randon, Olivier-V-de-Clisson est connétable de France.

À la mort de son père en 1382, Marie de Sully devient l'unique héritière de la principauté souveraine de Boisbelle et des seigneuries de Sully, de La Chapelle-d'Angillon, des Aix-d'Anguillon, de Saint-Gondon, de Châteaumeillant, de Sainte-Hermine, Bois-Pouvreau, de l’ile de Noirmoutier(1), de Saint-Amand-Montrond, d'Argent, de Villebon et d'Orval, les châteaux de Châlus, Courbefy et Châlucet. ==>Octobre 1317 Donation, par le roi Philippe V le Long, en son conseil, à Henri de Sully, boutillier de France, des châteaux de Chalus haut et bas, Chalucet haut et bas, Courbefy et Bré

Par sa mère, elle est également l'héritière de la seigneurie de Craon.

En raison de son statut d'unique héritière de ses parents, Marie de Sully devient l'un des partis les plus recherchés de France.

On ne connait pas la date de la naissance de Marie de Sully sachant cependant que le mariage de Louis de Sully avec Isabelle de Craon, veuve de Guy XI de Laval, fut accompli entre le 2 juin 1357 et le 1er juin 1358 (2), on peut estimer que la naissance de leur fille se fit attendre environ une dizaine d'années.

La splendide fortune à laquelle elle était appelée fit rechercher sa main pour un petit-fils de France.

Jean, duc de Berry, né au bois de Vincennes le 30 novembre 1340 était le troisième fils du roi Jean et de Bonne de Luxembourg; il épousa à Carcassonne, le 24 juin 1360, Jeanne d'Armagnac.

C'est à leur fils aîné Charles de Berri, comte de Montpensier, que fut fiancée Marie de Sully.

Sa mère conclut un contrat le 27 juillet 1381 avec Jean de Berry par lequel Marie est fiancée à son fils Charles de Berry, comte de Montpensier.

Le contrat de mariage semble perdu, mais son existence ne peut être l'objet d'aucun doute puisqu'il est mentionné dans un acte original des archives de la Trémoïlle, passé en dérogation de ses clauses (3).

On ne saurait dire si les fiançailles remontaient à plusieurs années déjà ? Il n'en est pas fait mention dans l'accord du 11 mars 1375, passé entre Jean de Berry et la comtesse d'Etampes (4), accord où une stipulation expresse interdit à celle-ci l'aliénation des fiefs qui devaient revenir à Isabelle de Craon.

Afin de couvrir les frais, Isabeau de Craon cède au duc sa propre baronnie de Châteauneuf. Cependant, Charles de Berry meurt au printemps 1383 avant d'avoir atteint sa vingt et unième année sans que les cérémonies de son mariage avec Marie aient été accomplies.

 

1381, 27 juillet, Angers. Accord entre Isabelle de Sully et de Craon et un mandataire du duc de Berri fixant la valeur de Château-Neuf abandonné à celui-ci à titre de provision en vue du mariage de son fils Charles avec Marie de Sully

(Archives de la Trémoïlle, Contrats de mariages).

Comme en la prolocution et traité de mariage monseur monseur Charles, ainsné fils de monsieur le duc de Berri et d'Auvergne et conte de Poitou, et de mademaisselle Marie de Suli eust esté ordenné et promist certaine provision estre faite audit monseur le duc pour ladite mademoiselle, jusques au temps et en la manière contenue ès convenances dudit mariage des diz monseur monseur Charles et de la dite madamoiselle, de certaines terres qui doivent estre à héritage perpétuel à elle et aux sciens, selonc le contenu ès dites convenances tant seulement et depuis, ait esté acordé entre lesdiz monseur le duc, d'une part, et monseur de Suli et de Craon et madame Ysabeau de Craon, sa fame, dame desdiz lieux suffisamment auctorisée, d'autre part, que pour ladite provision seroint bailléz audit monseur le duc de la terre, chastel et chastellanie de Chasteau-Neuf-sur-Sarte, en la value de sept cens livres tournois de rente, en cas que, par les gens de mondit seigneur le duc et par les gens de madite dame de Suli et de Craon, ladite terre seroit tant trouvée valoir et si moins valloit, ladite madame de Suli seroit tenu la li par faire, en ses aultres terres en Anjou et pour ladite terre apprécier et prendre ou nom dudit monsieur le duc par manière de provision, comme dit est, soit venu par devant madame de Suli et de Craon maistre Pierre Quatrecouls, secrétaire et conseiller dudit monseur le duc, lequel ait esté audit lieu du Chasteau-Neuf, ovecques les gens de madite dame, et pourtant qu'ils n'ont pu bonnement de présent estre à accord de la prisée et valleur de ladite terre, soient retournés par devant madite dame; ladite dame pour elle, et ledit maistre Pierre pour ledit monseur le duc, soient venus finallement à tel acord : que la dite madame baille audit monseur le duc, pour ladite provision et durant le temps d'icelle les dites terre, chastel et chastellenie en la vallour de cinq cens soixante livres tournois de rente ; et, ou cas où il ne plaira au dessusdit monseur le duc, monseur Charles et à ladite madame de Suli et de Craon ceste appréciation de cinq cens soixante livrés dessus diz avoir leur effet, eulx, ou l'un d'eulx, pourroit venir à faire faire assiète et prisée de ladite terre au temps qu'elle sera baillée par héritage à ladite madamoiselle, auxi comme si ceste présente appréciation de cinq cens soixante livres n'eust oncques esté faite.

Et demeure et demeureroit à madite dame, en ladite chastellanie les chouses et pièces qui s'ensuivent : c'est à savoir le four à ban, o touz ses droiz et prouflîz appartenants, touz les prez, toutes les dismes de blez, de vins et d'autres chouses, un cent de pimpeneaux que doit le seigneur de Champeaux, touz les cens de ladite chastellanie, excepté la somme de quatre vins six livres, dont les parties li seront présentement baillés solvable, qui sont comprises en ladite appréciation de cinq cens soixante livres, et doux journaux de terre sis à Boutigné ; promi ce que madite dame de Suli et de Craon paiera cens soubs de charge ancien, qui sont deuz à certaine personne, et sept vingt livres tournois de rente chacun an audit monseur le duc, ou aux gens et servitours de ladite mademoiselle, lequel qu'il plaira audit monseur le duc ladite provision durant; et icelle faillie, et baillant et asaiant ladite terre pour héritaige, ledit monseur le duc prendra lesdites pièces qui à présent demeurent à madite dame, ou partie d'icelles, pour le prins qu'elle pourront valloir, en accomplissant la somme contenue ès dites convenances et, ce ainssin fait, demourra madite dame de Suli deschargée et quite des dites VIIxx livres de rente et de toute ladite provision et li est et sera baillée royalement et de fait tout à plain le chastel, terre et chastellanie de Sainte-More.

Et en tesmoing desquelles chousses, cest présent accord qui fut fait Angers en l'oustel de madite dame, le XXVIIe jour du mois de juillet, l'an 1381, et sellé du scel de madite dame et du scel dudit maistre Pierre Quatrecoulz et signé de sa main.

 

Vers le mois de janvier 1383, Isabeau de Craon et de Sully a marié sa fille, Marie de Sully avec Guy VI de la Trémouille, le Vaillant (5), lui apportant entre autres terres l’île de Noirmoutier.

1382, v. s., 17 janvier, Beaume-sur-Marne. – Le duc de Bourgogne fait don à Guy de vingt mille livres, en considération de son mariage avec Marie de Sully (La Trémoïlle, Guy de la Trémoïlle, p. 250).

 

Guy de la Tremouille

GUY DE LA TRÉMOÏLLE, fils de Guy V (1315-1350) et de Radegonde Guénard, était né en 1343 ; il était donc, en 1383, homme fait et en âge d'aider sa belle-mère, Isabelle de Craon, dans la lourde administration qui lui incombait.

Il était parfaitement apte en même temps à gouverner par lui-même l'énorme fortune de sa femme qui se trouvait à la tête de tous les fiefs de la maison de Sully dont le dernier mâle, son père Louis de Sully, était mort vers le ler janvier 1382, soit un an environ avant son mariage.

Quoique fort jeune encore en 1370, il était qualifié déjà « vaillant chevalier ».

Le 15 octobre 1376, Guy VI de la Trémoïlle avait racheté toute la terre et seigneurie de la Trémouille, mouvante de la baronnie d’Angle, de Louis de Saint-Julien, chevalier, seigneur de Luzuret, agissant tant pour lui que pour son neveu, Jacques de Saint-Julien, moyennant le prix de cinq cents deniers d’or, valant vingt sous tournois la dite pièce ; la vente scellée du sceau établi aux contrats à Montmorillon, pour le duc de Berry et d’Auvergne, comte de Poitou. (Acte recueilli par dom Fonteneau, t. XXVI, p. 297, dans les archives du château de Thouars.)

 

16 octobre 1379 Amortissement en faveur de Guy de la Trémoïlle, premier chambellan du duc de Bourgogne, de deux cents livres de rente destinées à la dotation de plusieurs chapelles.

  • B AN JJ. 115, n° 304, fol. 148 v°
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 126-128

D'après a.

 

Karolus, etc. Inter curas et sollicitudines que nobis ex ministerio regalis dignitatis incombunt assidue cogitare, nos convenit ut ad id summo opere nostre consideracionis versetur acies, per quod possimus Altissimo complacere quodque grata nobis ac nostris exhibentibus obsequia, juxta meritorum ipsorum exigenciam, nos habeamus pretendere liberales.

 Notum igitur facimus, presentibus pariter et futuris, quod, audita supplicacione dilecti et fidelis militis nostri Guidonis de Tremolia, primi cambellani carissimi germani nostri ducis Burgondie, continente quod ipse ducentas libras turonensium annui et perpetui redditus  in fundacione et dotacione cappellaniarum vel alias in devotos et pios usus, insimul vel divisim, prout sibi melius expedire videbitur, convertendas, pro sue et parentum ac benefactorum suorum animarum remedio et salute, acquirere proponit, dummodo ad hoc noster consensus interveniat dictosque redditus admortisare dignemur.

Nos laudabile ipsius Guidonis propositum in Domino commendantes, considerantesque grata et laudabilia nobis et dicto germano nostro per ipsum exhibita, ac in guerris nostris et aliàs multis modis impensa servicia, et ut suffragiis missarum et aliarum devotarum oracionum que fient in locis quibus dicti redditus fuerint assignati, nos, predecessores ac successores nostros participes efficiamur, eidem Guidoni quod ipsas ducentas libras turonensium anno quolibet redduales, ubicunque in regno nostro sibi placuerit, extra tamen feodum et justiciam, acquirere possit et valeat, ac in fundacione seu dotacione capellaniarum aut in usus alios distribuere et conferre concessimus, ac ex certa scientia, de speciali gratia et plenitudine potestatis regie, concedimus.

Volentes et ulterius annuentes quod persone ecclesiastice, in quas prefatus Guido dictos redditus usque ad summam predictam, in toto vel in parte, transtulerit aut concesserit, eosdem ipsos tanquam admortisatos habeant, teneant et possideant, perpetuis temporibus, pacifice et quiete, absque eo quod ipsos redditus vendere, alienare, aut extra manum suam ponere compellantur, ac ex his ipse Guido aut dicte persone ecclesiastice, quibus dictos redditus dederit, insimul vel per partes, financiam aliquam nobis aut nostris successoribus solvere de cetero teneantur.

Quam quidem financiam prefato Guidoni, consideracione dictorum serviciorum ac contemplacione predicti germani nostri, quittamus, remittimus et damus ex liberiori dono gracie liberaliter et omnino.

Dilectis et fidelibus consiliariis nostris super facto domanii nostri et thesaurariis Parisius, ceterisque justiciariis et officiariis nostris, et eorum locatenentibus, ac cuilibet ipsorum, presentibus et futuris, dantes, harum serie, in mandatis quatinus prefatum Guidonem, ac illum vel illos, in quem seu quos predicti redditus fuerunt translati, nostra presenti gratia uti et gaudere pacifice faciant et permittant, ac contra tenorem presentium nullatenus inquietent seu molestent, aut inquietari seu molestari in futurum aliqualiter paciantur.

Et ut premissa robur perpetue stabilitatis obtineant, sigillum nostrum hiis presentibus mandavimus apponi. Salvo in aliis jure nostro et in omnibus quolibet alieno.

Datum in Monte Argi, decima sexta die mensis octobris anno Domini millesimo ccc° septuagesimo nono, et regni nostri sexto decimo.

Per regem. J. Tabary.

 

Charles VI l'employa durant presque toutes ses guerres ; en 1382, il reçoit des mains de ce prince, dans la basilique de Saint-Denis, l'oriflamme qu'il porte cette même année contre les Anglais.

Guy fut un des serviteurs les plus aimés et les plus fidèles de Philippe le Hardi, duc de Bourgogne.

 

La renommée de La Trémoïlle était si grande, que plusieurs souverains étrangers firent avec lui des alliances, dont les traités existent encore. Les comtes de Savoie, Galéas Visconti, duc de Milan, Clément VII, la reine de Naples et de Jérusalem, la duchesse de Brabant, etc., eurent recours à sa vaillante épée.

 

Juillet 1383 Duel interrompu entre Pierre de Courtenay et Guy VI de la Trémoille

Duel interrompu entre Pierre de Courtenay et Guy VI de la Trémoille Siège d'Ypres de 1383

 

Pierre de Courtenay, célèbre chevalier anglais, passa exprès la mer, en 1383, pour venir se mesurer avec lui.

Le combat se livra devant la cour.

Si se passa le dimanche ainsi tout le jour sans rien faire ; et me fut dit que sur le soir, sur bonnes assurances, Jean de Châtel-Neuf et Raymonnet de Saint-Marsen, Gascons, s’en vinrent au logis messire Guy de la Trémoille pour jouer et ébattre, et furent là toute la nuit, et le lundi au matin ils s’en retournèrent à Bourbourch ; mais au départir, messire Guy leur avoit dit : « Toi, Jean, et toi, Raymonnet, vous serez dedans ce soir mes prisonniers. » Et ils avoient répondu que ils avoient plus cher à être à lui que à un pire chevalier.

Ce dimanche étoient venues nouvelles en l’ost que Audenarde étoit prise et emblée, dont messire Gilbert de Lieureghien, qui là étoit et qui capitaine en avoit été la saison, en fut moult courroucé, pourtant qu’il étoit là venu, et la ville étoit perdue ; mais ce l’excusoit que le comte de Flandre, son seigneur, l’avoit mandé. Ce dimanche fit le guet assez près du logis du roi le comte de Blois ; et cuidoit-on le lundi au matin assaillir.

Quand ce vint le lundi au matin, on fit crier parmi l’ost, de par le roi, le connétable et les maréchaux, que nul n’assaillit. Quand ce cri fut répandu parmi l’ost, tous se cessèrent. Adonc se imaginèrent aucuns seigneurs que les Anglois se partiroient par aucuns traités, puisque on avoit défendu de non assaillir. Quand ce vint après dîner, ceux issirent de Bourbourch qui traiter : devoient messire Guillaume Helmen, messire Thomas Trivet, messire Nicole Draiton, messire Matieu Rademen, et tant que ils furent jusques au nombre de quatorze chevaliers et écuyers ; et les amenèrent en la tente du roi, le duc de Bretagne, le connétable de France et le comte de Saint-Pol.

Le roi les vit moult volontiers ; car encore avoit-il vu peu d’Anglois, fors messire Pierre de Courtenay, qui avoit été à Paris pour faire fait d’armes à messire Guy de la Trémoille, mais le roi et son conseil les accordèrent, et ne se combattirent point l’un à l’autre.

 Et pourtant que ces Anglois ont eu du temps passé grand’renommée d’être preux et vaillans aux armes, le jeune roi de France les véoit plus volontiers ; et en valurent trop grandement mieux leurs traités.

Là traitèrent ce lundi en la tente du roi ; et là étoient avecques le roi : le duc de Berry, le duc de Bourgogne, le duc de Bourbon, le duc de Bretagne, le comte de Flandre et le connétable de France tant seulement. Et vous dis que à ces traités le duc de Bretagne fut très grandement pour eux. Et se portèrent les traités que ils se départiroient de Bourbourch et lairoient la ville, et iroient à Gravelines et emporteroient le leur, tout ce que porter en pourroient.

De ce traité furent plusieurs Bretons, François, Normands, Bourguignons, courroucés qui cuidoient partir à leurs biens ; mais non firent, car le roi et son conseil le vouldrent ainsi. Après ces traités, ils prirent congé au roi et à ses oncles, au duc de Bretagne, au comte de Flandre et au connétable ; et puis les prit le comte de Saint-Pol et les emmena souper en sa tente, et leur fit toute la meilleure compagnie que il put par raison faire ; et, après souper, il les reconvoya et fit reconvoyer jusques dedans les portes de Bourbourch, dont ils lui sçurent moult grand gré.

 

Après avoir brisé quelques lances sans avantage de part ni d'autre, le roi Charles VI fit fermer les lices, ne voulant pas que mal advînt à si preux chevaliers.

 

10 juillet 1384, Paris -  Lettres de Charles VI, rendues à la requête de Guy VI, portant rémission octroyées aux habitants de l’île de Noirmoutier, coupables de rébellion envers les officiers du roi et du duc de Berry, chargés d’affermer et de lever les aides du huitième et du sel.

  • B AN JJ. 125, n° 93, fol. 56
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 21, p. 231-233

D'après a.

Charles, etc. A touz ceulz qui ces presentes lettres verront, salut.

Comme nous eussons ordonné les aydes ayans cours en nostre royaume pour le fait de la guerre estre mises sus ou pays de Poitou, et par les commis à ce eussent esté mises sus, et par les esleus du dit pays eussent esté faictes assavoir les bailletes de fermes dudit pays, et eussent esté les dites fermes baillées par les diz esleuz et mesmement l’imposition et huitiesme de l’isle de Noirmoustier (6) estant ou dit pays, et aussi eussent ordené certaines personnes pour lever l’aide du sel (7) ou dit ysle, et ordené certaines personnes pour enroler le sel qui seroit vendu en ycellui ysle, et pour faire paier les diz aydes, eussent commis aucuns de noz sergenz et autres de nostre très chier et bien amé oncle le duc de Berry et d’Auvergne, conte de Poitou ; et il soit ainsi que les diz habitans d’icellui ysle ou queque soit la plus grant partie d’iceulz ont commis et perpetré pluseurs rebellions de fait et desobeissances en la personne des diz fermiers, sergens et commis à faire les choses dessus dictes, et n’ont voulu souffrir les diz aydes avoir cours ou dit ysle ; et pour ce eussent les diz esleuz par devant eulx fait adjourner pour les diz cas pluseurs des habitans dudit ysle qui avoient commis et perpetrez les faiz dessus diz, et aucuns d’iceulx adjournez et en leur absence, par defaut et contumace, les eussent retenuz en grans peines et amendes crimineles et civiles envers nous, et contre aucuns des autres eussent commancié de faire procès pour les faiz et cas dessus diz ; et depuis les diz habitans se soient trays par devers nous, en nous humblement suppliant que les diz cas nous leur voulsissons pardonner, quicter et remettre, et sur ce leur impendre nostre grace et misericorde.

Nous, à la requeste de nostre amé et feal chambellan, Guy de la Tremoïlle, seigneur de Suilly, et afin que yceulx habitans puissent mieulx paier les diz aydes, voulans preferer misericorde à rigueur de justice, avons quictié, remis et pardonné, quictons, remettons et pardonnons, de nostre grace especial par ces presentes, toutes peines, amendes corporeles, criminelles et civiles ès queles eulz et chascun d’eulx puent estre encouruz envers nous, pour cause des cas et deliz, contumaces et defaulx dessus diz, tant celles ès quelles ilz ont, ou aucuns d’eulz, esté condempnez, comme autres amendes ou offenses quelconques.

En imposant sur ce silence perpetuel à nostre procureur, gens et officiers. Si donnons aux diz esleuz et à touz noz autres justiciers et officiers, et à chascun d’eulz, que de nostre presente grace facent et laissent joir et user paisiblement, et les ostent de touz procès en quoy ilz pourroient estre avecques nostre procureur, pour cause des cas dessus diz.

Et que ce soit ferme chose et estable à tousjours, nous avons fait mettre nostre seel à ces [presentes].

Donné à Paris, le Xe jour de juillet l’an de grace mil CCC. IIIIxx et quatre, et de nostre regne le quart.

Par le roy, à la relacion monseigneur le duc de Berry, aucuns du conseil presens. J. le Masle.

 

(Jean Le Masle, évêque de l'abbaye de Maillezais 1385-1419)

 

En faveur du mariage de Guy et de Marie de Sully, Charles VI ordonne, par lettres du 4 novembre 1386, qu'après la mort de Jeanne d'Eu, comtesse d'Étampes, duchesse d'Athènes, dont Marie était héritière présomptive, toutes les terres qu'avait possédées Raoul, comte d'Étampes, connétable de France, frère de Jeanne, passeront à Marie de Sully, dame de La Trémoïlle.

  Après lui avoir accordé de grands biens et l'avoir investi de très-hautes dignités, Philippe le Hardi, duc de Bourgogne l'intitule « son cher et féal cousin, conseiller et grand chambellan », le choisit pour l'un de ses exécuteurs testamentaires, en 1386, ordonnant qu'il soit enterré à ses pieds, aux Chartreux de Champmol-lès-Dijon. (8)

 

 

1386, 13 septembre, Arras. Testament du duc de Bourgogne où il est dit qu'il doit avoir sa sépulture à la Chartreuse de Dijon et que Guy de la Trémoïlle et Guillaume, son frère, doivent y être enterrés à ses pieds  (Sainte-Marthe, Preuves pour la Trémoïlle, t. I, note, p. 95).

 

4 novembre 1386 - Paiement d'un étendard, de pennons et de bannières aux armes de Guy de La Trémoïlle donnés par le duc de Bourgogne

Nous Jehan le Muntre et Jehan de Bellegheem, eschevins en Bruges ou temps que ces choses par devant nous furent faites, savoir faisons à tous ceulx qui ces présentes lettres verront ou orront que par devant nous se comparu en propre personne, comme par devant eschevins, Melchior le paintre, et vallet de chambre monseigneur le duc de Bourgoingne, conte de Flandres, d'Artois et de Bourgoingne, et congnut et confessa avoir eu et receu de Josset de Halle, argentier de mondit seigneur, la somme de quatre vins francs d'or qui deus lui estoient par mondit seigneur pour la vendue d'un estandar grant, de sarge de coustine, contenant quarante aulnes de long à l'aulne de Bruges, de deux pâmions et deux bannières de bateure de cendal, fais à la devise et aux armes de messire Guy de La Tremoille, sgr de Suilly; lesquelx mondit seigneur lui a donné pour armer sa nef pour ce présent voyaige que mondit seigneur entant à faire, à l'ayde Nostre Seigneur, en la compaignie du Roy nostre seigneur en Angleterre.

De laquelle somme de quatre vins francs d'or dessusdiz il se tint pour content et bien payet, et en quita ledit monseigneur ledit argentier et tous autres à qui quitance en appartient ou pu et appartenir.

En tesmoingne de ce avons, nous eschevins devantdiz, [donné] ces lettres séellés de nos séaulx pendans; ce faisant Fan de grâce mil trois cens quatrevins et six, le quatriesme jour de novembre.

Original en parchemin. Archives de la Côte-d'Or. B. 301, cote 4.

 

1388, 18 août. Accord entre Hugues de Chalon, Guy de la Trémoïlle et Marie de Sully se portant forts pour Isabelle de Craon statuant que Hugues de Chalon et Marie de Sully se partageront par moitié l'héritage de la comtesse d'Etampes l'acquiescement de cette dernière est constaté dans l'acte (Archives de la Trémoïlle, Fonds Craon)

1388, v. s., 21 janvier, Paris. Lettres de la comtesse d'Etampes disposant de trois mille quarante livres de rente en faveur pour moitié du seigneur de Coucy et pour un quart chacun pour Jean de Chalon et pour Marie de Sully (Arch. de la Trémoïlle, Fonds Craon).

1388, v. s., 22 janvier. Prise de possession par Guy de la Trémoïlle au nom de Marie de Sully du fief de Saint-Hermine, qui lui est remis par les officiers de la comtesse d'Etampes (Archives de la Trémoïlle, Inventaire de Sully, p. 78, dans Guy de la Trémoïlle, p. 269).

1388, v. s., 21 février Mehun-sur-Yevre. – Lettres de Louis, comte d'Etampes, approuvant celles de la comtesse du 21 janvier 1388, v. s., portant don de ses biens à Jean et Henry de Chalon et à Marie de Sully, épouse de Guy VI (Sainte-Marthe, Preuves pour la Trémoïlle, t. I, p. 121).

 

 

 

 

Les Chroniques de Sire Jean Froissart,  Livre II, Chapitre CCXV

 

Dans le Poitou, l'évolution sociale se poursuit au XIIIe et au XIVe siècle, avant la guerre de Cent Ans <==.... .... ==> 1388 - Les Anglais de Richard, comte d'Arundel débarquent à Noirmoutier, Marans et attaquent la Rochelle

 

 


 

(1) De la maison de Sainte-Maure, la seigneurie de Noirmoutier passa dans celle de Craon, par le mariage d’Amaury III sire de Craon avec Isabelle de Sainte-Maure, fille unique et héritière de Guillaume III de Sainte-Maure, vers 1306.

 Le petit-fils d’Isabelle, Amaury IV de Craon, étant mort sans enfant, l’an 1373, sa sœur Isabelle fut son héritière et porta les biens de la succession de Craon dans la maison de Sully, lorsqu’elle épousa en troisièmes noces Louis Ier sire de Sully.

(2). Voir la note 2 du numéro 535 du Cartulaire où sont donnés les motifs qui fixent à cette période l'époque où le mariage put avoir lieu.

(3). Voir l'acte in extenso au n° 698 du Cartulaire.

(4). No 652 du Cartulaire.

(5). Dom Fonteneau, parmi les copies des pièces choisies par lui dans les archives de l'abbaye de la Colombe, a inséré une note précieuse pour l'histoire de la maison de la Trémoïlle. On la reproduit ici d'après la copie de la Bibliothèque nationale, fonds latin, n° 18380, p. 361.

On y trouve en effet la description d'un blason dont, semble-t-il, aucun sceau n'a conservé la figure on y rencontre en outre le texte des quatre épitaphes qui ont conservé les dates précises du décès des parents et des grands parents de Guy VI.

« En la croisée de l'église de la Colombe, du côté droit, ou de l'épitre, est une fort petite chapelle voûtée où il y a un autel proportionné, au dessus duquel est un tableau de Saint Jean Baptiste. Cette chapelle étoit autrefois ornée de peintures briquetées et de quelques feuillages. Un ceintre en arcade ou ogive forme l'entrée de cette chapelle. Les deux faces internes de cette arcade sont parsemées d'écussons écartelés au 1 et 4 d'or au chevron de gueules à trois aiglettes d'argent deux en chef une en pointe au 2 et 3 lozenbé d'or et de gueules, et en coeur l'écusson au lion d'or rampant en champ d'argent.

Au dessus, et hors des écussons, sont peintes des aigles en grand pour remplir tout autour les intervalles et servir d’ornements au ceintre.

« Hors et vis-à-vis de cette chapelle, sont à peu de distance deux tombeaux des seigneurs de la Trémoïlle, de pierre blanche ; lesquels tombeaux paroissent d'abord n'en former qu'un seul, parce qu'ils se touchent et sont accolés l'un à l'autre. Ainsi réunis ils donnent un carré de sept pieds et demie en long et en large de trois pieds et trois pouces de hauteur. Ces deux tombeaux sont couverts de deux tables à peu près d'égale largeur. Celle de la première adossée au mur de la croisée est de trois pieds neuf pouces et la suivante de quatre. Ces tombeaux ont dû coûter dans le temps parce que la pière est très rare dans le pays, même le moellon. Il fallut faire venir de loin des tables d’une telle grandeur.

Ces deux tables étoient autrefois couvertes de lames de…. incrustées dans la pierre. Les gravures des deux tables laissent entrevoir que ces lames representoient les seigneurs qui étoient inhumés dans ces tombeaux. Aux quatre angtes du carré se voyent encore les gravures dans la pierre où avoient été placés les écussons de ces seigneurs. Il ne reste plus rien du tout de ces lames. Les deux tables sont même rompues en huit ou neuf pièces. Cette profanation arriva dans le temps des guerres de la Religion.

Les Calvinistes voyant dans l'église de la Colombe un mausolée qui leur parut important résolurent de le fouiller, et pour cet effet il fallut briser les tables qui le couvroient. Les bas-reliefs du mausolée n'ont pas été endommagés. On y voit encore tous les ornements dont on les avoit décorés et qui consistent en des espèces de vitraux sculptés uniformément sur toutes les faces. Sur ces tables sont écrites en lettres gothiques à l'entour des bords les épitaphes suivantes :

« Voici celle qui a été gravée sur la table adossée au mur de la croisée

« CY GIST MESSIRE GUY DE LA TREMOILLE CHEVALIER, SEIGNEUR DE CHASTEL GUILLAUME, QUI TRESPASSA l'AN DE GRACE MIL TROIS CENT SOIXANTE LE CINQUIEME JOUR APRÈS LA SAINT DENIS AU MOIS D'OCTOBRE. CY PRIEZ DIEU POUR L'AME DE LUI.

« Et tout de suite

CY GIST MADAME ALIPS DE VOUHET FEMME DUDI MESSIRE GUY DE LA TREMOILLE QUI TRESPASSA LE HUITIÈME JOUR APRES SAINCT JEAN Baptiste AU MOIS DE JUING L'AN MIL TROIS CENT SOIXANTE UN. PRIEZ DIEU POUR L'AME D'ELLE.

« Sur la seconde table on lit l'épitaphe suivante :

CY GIST MESSIRE GUY DE LA TRÉMOILLE CHEVALIER, QUI TRESPASSA A LODUN LE LUNDI AVANT LA SAINT LOUIS AU MOIS DIE AOUST L'AN DE GRACE MIL TROIS CENT CINQUANTE ET NE FUT POINT SEIGNEUR DE CHASTEL GUILLAUME PARCE QU'IL MORUT AVANT SON PÈRE. PRIEZ POUR +

« Et tout de suite :

CY GIST MADAME RAGOND GUENANDE FEMME DUDI MESSIRE GUY DE LA TREMOILLE ET FEMME DEPUIS DE MESSIRE GUILLAUME POT, DAME DUDIT CHASTEL GUILLAUME ET DE LA PRUGNE DONT LEDIT MESSIRE GUILLAUME POT ÉTOIT SEIGNEUR QUI TRESPASSA AUDIT CHASTEL GUILLAUME LE VENTREDI APRÈS LA CONCEPTION NOSTRE DAME L'AN DE GRACE M CCC LXXXVII. »

Cette date est fournie par un seul document, lequel témoigne en même temps de l'affection que le duc de Bourgogne portait aux la Trémoïlle, qui, originaires de l'ouest de la France, étaient venus s'attacher à la fortune de la Bourgogne et occupaient les postes les plus importants à sa cour :

 c'est un mandement du 17 janvier 1383, par lequel Philippe le Hardi fait don à Guy VI de vingt mille livres, en considération de son mariage avec Marie (N° 702 du Cartulaire).

 (6). Rappelons que Guillaume de Sainte-Maure, seigneur de Noirmoutier, dans la première moitié du XIIIe siècle, avait accordé aux habitants de l’île, excepté à huit hommes de divers métiers, la remise entière de toute espèce de cens et de taille, à raison d’une rente annuelle de 450 livres (curieuse charte française, de 1225 à 1250, publ. par P. Marchegay, Cartulaires du Bas-Poitou. Les Roches Baritaud, 1877, in-8°, p. 303), et qu’au siècle dernier encore Noirmoutier passait pour un pays exceptionnellement privilégié en matière d’impôt. « C’est une espèce d’isle fortunée, dit l’abbé d’Expilly. Ses habitants ne payent ni taille ni capitation, ni aucun autre subside, à l’exception du papier timbré et des droits de contrôle et d’insinuation. » (Dict. géographique, historique, etc., in-fol., t. III, p. 859, v° Isle-de-Noirmoustier.)

(7). Voir des Instructions du roi Charles VI, en date du 1er décembre 1383, touchant la levée de l’aide établie sur le sel en Poitou et en Saintonge, publ. dans le grand recueil des Ordonnances, in-fol., t. VII, p. 753.

 (8). Dom Urbain Plancher,Histoire générale et particulière de Bourgogne,  t. III (n. 1), p. 100.

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