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PHystorique- Les Portes du Temps
12 avril 2023

1388 - Les Anglais de Richard, comte d'Arundel débarquent à Noirmoutier, Marans et attaquent la Rochelle

1388 - Les Anglais de Richard, comte d'Arundel débarquent à Noirmoutier, Marans et attaquent la Rochelle

On trouve dans l’histoire des guerres entre la France et l’Angleterre que, de 1387 à 1388, Richard, comte d’Arundel, a commandé les troupes anglaises débarquées en Poitou.

 Il est probable que c’est de cette époque que date la Tour d’Arundel au pied de laquelle on voit encore les débris d’un château qui servait à défendre l’entrée du port.

L'appellation "Tour d'Arundel" est plutôt récente puisqu'elle n'est utilisée qu'au XIXe siècle en remlacement d’une ancienne tour fanal présente jusqu'au XVIIIe siècle.

Une autre tour, qui n’existe plus, avait été élevée sur le territoire actuel de la ville, vis-à-vis de la magnifique plage situé au sud ; elle communiquait à un chemin couvert, de plus de mille mètres de longueur, destiné, en cas de descente des ennemis, à sauver les sentinelles échelonnées sur la côte.

Richard FitzAlan (1346 – 21 septembre 1397), 4e comte d'Arundel et 9e comte de Surrey,  pourvu par Richard, II d'Angleterre, du gouvernement de Brest, lieutenant en Bretagne , puis lieutenant et capitaine général de la flotte en mer, il était venu ravitailler cette place, avec une flotte puissante, levée en Grande-Bretagne portant mille hommes d'armes, et trois mille archers ;

Ce comte, après avoir mis à la voile de Southampton le 20 mai, n'avait cessé de parcourir les côtes de Bretagne et de Normandie, comme s'il s'attendit à y voir quelque nouveau partisan se déclarer pour lui.

Sa tâche achevée en Bretagne, cette flotte, trop exposée près des côtes armoricaines, descendit le long des rivages du Poitou et de la Saintonge.

 Elle était composée, dit Froissart, de « six-vingts voiles, et uns et autres, et montée avecques grand foison de chevaliers, d'escuyers et autres gens d'armes d'Angleterre. »

Elle leva l'ancre de l'île de Bréhat, où elle était mouillée, se jeta sur l'île de Batz, qu'elle ravagea et brûla, puis entra dans la Baie de Bourgneuf et se présenta, au nombre de 140 vaisseaux en rade du Bois-de-la-Chaise.

Les Anglais débarquèrent beaucoup de troupes sur l'île de Noirmoutier.

Les habitants, trop faibles pour les en empêcher, se réfugièrent dans, le château avec tout ce qu'ils purent réunir d'approvisionnements de bouche et de guerre. Les ennemis les y assiégèrent et leur livrèrent plusieurs terribles assauts.

Mais le courage des insulaires, condamnés à contempler impuissants, du haut des tours de la forteresse, le sac de leurs biens et les déprédations de toutes sortes, dont ils étaient victimes, ne se démentit pas et les fit triompher de leurs adversaires.

Les Anglais, désespérant de les réduire, redoutant d'ailleurs pour leurs navires les bancs et les écueils, de la Baie, prirent le parti de se retirer. Ils brûlèrent presque toutes les maisons du pays, détruisirent les vignes, les moissons et emportèrent autant de butin que le pillage put leur en fournir.

Ils traitèrent de même Ouessant, Ré, Oléron, Marans, La Rochelle, donnèrent la chasse à tous les vaisseaux français et bretons qu'ils rencontrèrent.

 

 

Chapitre CVIII – Comment le comte d’Arundel et ses gens eurent conseil ensemble comme ils se maintiendroient ; et comment Perrot le Béarnois et ses compagnons se mirent sur les champs pour aller devers le comte d’Arundel ; et comme le dit comte alla prendre terre à Marant près la Rochelle avec son armée marine.

Quand le comte d’Arundel et les seigneurs qui avecques lui étoient, se furent départis des bendes (cotes) de Bretagne, ils singlèrent, à l’entente de dieu et du vent, à plein voile devers la Rochelle.

 Car ils avoient le temps, et la marée pour eux : et faisoît si bel et si joli, et vent si à point, que grand plaisance étoit de voir ces vaisseaux sur mer, car ils étoient environ six vingts voiles, uns et autres : et voloient ces estrannières (étendards), tons gentement armoyées des armes des seigneurs qui resplendissoient contre le soleil.

Ainsi s’en vinrent-ils, tout nageant et flottant, parmi cette mer qui lors étoit haitée (calme), et montroit qu’elle eut grand’plaisance d’eux porter. Ainsi comme un cheval agrené et sejourné, quand il est hors de l’étable, il a grand désir de cheminer : ainsi la mer, avecques l’aide du vent qui étoit si à point comme à souhait montroit pleinement : « Cheminez ; ce pouvoit-elle dire par figure, liement et hardiment ; je suis pour vous. Je vous mettrai en port ou en havre et sans péril. »

Ainsi de grand’volonté s’en vinrent ces seigneurs et leurs navies (flottes), frontoyant (côtoyant) Poitou et Saintonge : et entrèrent en la mer de la Rochelle, et au propre hâvre, voire au lez (côté) devers Maurant (Marans).

Et là dessous la Rochelle, si comme je vous dis et montre, ancrèrent et arrêtèrent aucuns compagnons aventureux. Pourtant que la marée venoit et pas n’étoit encore pleine, entrèrent en barges plus de deux cents , uns et autres : et s’en vinrent à rames, et avec la mer, jusques en la ville de Maurant.

 Le guet du châtel de Maurant d’amont avoit bien vu la navie (flotte) d’Angleterre prendre port au hâvre, et aussi les barges venir, tout le fil de l’eau, avecques la mer.

Si avoit corné d’amont et mené grand’noise, pour réveiller les hommes de la ville et sauver le leur : si que hommes et femmes grand’ foison de leurs meilleurs choses sauvèrent et portèrent au châtel : et ce leur vint à point, autrement ils eussent tout perdu.

Quand ils virent le fort, et que Anglois leur étoient aux talons, si laissèrent le demeurant (reste), et entendirent à sauver leurs corps. Anglois archers, et autres, qui là étoient venus, issirent hors de leurs barges, et entrèrent en la ville, et entendirent au pillage, car pour pèlerinage n’étoient-ils là venus ; mais petit y trouvèrent, fors que grandes huches toutes vuides.

Tout le bon étoit retrait (retiré) au châtel. De blés, de vins, et de bacons (porcs) salés, et d’autres pourvéances, trouvèrent-ils assez, car il y avoit plus de quatre cents tonneaux de vin en la ville.

Si s’avisèrent qu’ils demeureroient là, pour garder ces pourvéances qui leur venoient grandement à point, et à leurs gens aussi, car, s’ils se départaient, ils supposoient bien et de vérité, que la greigneur (majeure) partie seroit retraite (retirée) au fort, ou éloignée par la rivière même, jusques à Fontenay-le-Comte, où les François ce qu’ils ne pourroient sauyer gâteroient

 Si demeurèrent cette nuit en la ville, car ils étoient là venus à heures de vêpres, et se donnèrent du bon temps : et mandèrent leur état à leurs gens, et la cause pourquoi ils étoient là demeurés.

Le comte d’Arundel et les autres chevaliers s’en contentèrent : et dirent qu’ils avoient bien fait.

Cette nuit se passa. Au lendemain, quand la marée commença à retourner, toutes gens s’appareillèrent : et se désancrèrent petits vaisseaux : et furent mis, des gros vaisseaux dans les petits, et dans les grosses barges, tous les harnois qui aux armes appartenaient : et laissèrent là leurs grosses nefs qui la rivière de Maurant (la sèvre Niortaise), pour le petit de parfond (profondeur), ne savoient et ne pouvoient passer.

Encore ordonnèrent-ils cent hommes d’armes et deux cents archers, pour garder la navie (flotte) : qui étoit au hâvre, et là gisoit à l’ancre à l’embouchure de la mer.

Puis, quand ils eurent tout ainsi ordonné, ils nagèrent tant qu’ils vinrent à Maurant : et là prirent-ils terre tout à grand loisir, car nul ne leur dévéoit (empêchoit) et se logèrent tous sur terre, entre Maurant et la ville de la Rochelle, laquelle sied à quatre petites lieues de là.

Ces nouvelles s’épandirent sur le pays, que les Anglois étoient arrivés à Maurant, et pris terre : et étoient bien quatre cents combattans, parmi les archers.

Si furent le plat pays, les villes et les châteaux, tous effrayés et sur leur garde : et commencèrent ceux des villages à fuir devant eux et à retraire (retiter) leurs biens dans les forêts, en Soubise et ailleurs, là où le plus tôt ils se pouvoient sauver et trouvoient recueillette,

 

Chapitre CIX. - Comment ceux de Rochelois allèrent escarmoucher aux Anglois, près Maurant : et comment les Anglois, après avoir pillé le pays d’environ, se retirèrent en leurs vaisseaux sur la mer avec leur pillage : et comment Perrot le Béarnois se retira semblablement en son fort avec son grand butin.

 

Si les Anglois eussent eu chevaux a leur aise pour courir le pays de Rochelois, ils eussent grandement fait leur profit, car le pays étoit tout dégarni de gens d’armes : voire pour eux aller au devant.

 Bien est vérité que le sire de Parthenay, le sire de Pons, le sire de Lanières, le sire de Tonaybouton, messire Geoffroy d’Argenton, le sire de Montendre, messire Aimery de Rochechouart, le vicomte de Thouars, et plusieurs chevaliers et écuyers de Poitou et de Saintonge, étoient au pays : mais c’étoit chacun en son hôtel et en son fort, car le pays n’étoit pas avisé de la venue des Anglois.

 S’ils en eussent été signifiés, en devant un mois, ou environ, et qu’ils eussent sçu de vérité que les Anglois arriveroient en tel jour à Maurant, ils y eussent bien pourvu, mais nenny. Cette chose leur vint soudainement sur les mains ; pourquoi ils en furent plus effrayés. Et mettoit chacun peine et entente de garder le sien, et les bonnes gens du plat pays à moissonner hâtivement les blés, car il étoit entrée d’août. Avecques tout ce, il n’y avoit nul chef au pays qui les émût.

Le duc de Berry qui étoit sire et souverain de Poitou étoit en France.

 Le sénéchal de Poitou étoit venu nouvellement à Paris. Le sénéchal de Saintonge n’étoit pas aussi en sa sénéchaussée.

Le sénéchal de la Rochelle, messire Hélyon de Lignac, n’étoit pas à la Rochelle ni au pays, mais grandement embesogné pour le duc de Berry, allant et retournant, en ces jours, sur le chemin de Bayonne et de France : et par ces raisons le pays en étoit plus foible. Car, qui défaut (manque) de bons chefs, il défaut (manque) de bon moyen, et de bon pied : et, qui n’a bon pied, il ne peut faire chose qui vaille.

Aussi étoient les terres dessus dites effrayées par deux manières, car ils avoient les Anglois devant eux, l’armée de mer, si comme vous pouvez ouïr ; et d’autre part, les nouvelles leur venoient fort, des parties de Berry et de Limousin, que Perrot le Béarnois chevauchoit et menoit plus de cinq cents combattants : et jà étoient entrés en Berry. Si ne savoient auquel entendre ; fors à garder le leur, car renommée couroit que ces deux osts se trouveroient et rencontreroient, fût en Poitou ou en Saintonge. Telle étoit l’imagination de plusieurs.

Vérité est qu’en la ville de la Rochelle étoient pour ces jours que les Anglois prirent terre à Maurant, deux vaillants chevaliers de la nation de Beausse.


L’un appeloit-on messire Pierre de Joy, et l’autre messire Pierre Taillepié : lesquels messire Hélyon de Lignac avoit mis, laissés et établis, à son département, en la Rochelle, pour garder la ville et le pays ; et ils s’en acquittèrent à leur pouvoir loyalement.

Quand ils sçurent, et les nouvelles leur furent venues à la Rochelle, que le comte d’Arundel et l’armée de mer dont on avoit parlé toute la saison avoit pris terre dessous Maurant, et que là ils se logeoient, si dirent à ceux de leur charge et au maieur (maire) de la Rochelle, et aux bonnes gens, car c’est une ville assez peuplée :

« Il nous faut aller voir le logis et le convenant (arrangement) des Anglois. On nous a dit qu’ils se logent et amassent en ce pays. Nous voulons, moi et mon compagnon, aller querre (chercher) leur bien venue : ou ils la payeront, ou nous la leur payerons. Mais blâme nous seroit et reproche grand, au cas que nous avons à garder pour le présent cette ville et le pays, si paisiblement nous les y laissons arrêter : et si y a un point moult bel pour nous, c’est ce que ils n’ont point de chevaux ; ce sont gens de mer. Nous serons tous bien montés, et envoyerons nos arbalétriers devant qui les iront réveiller, traire (tirer) et blesser : et, quand ils auront fait leur envahie (attaque), ils retourneront. Les Anglois saudront (sortiront) tous dehors. Ils sont tous de pied.

Nous remettrons nos arbalétriers derrière qui le pas retourneront vers la ville : et ces premiers nous recuillerons aux fers des lances : et aurons nous, qui serons sur nos chevaux, grand avantage de leur porter dommage. »

Tous ceux qui ouïrent les chevaliers parler les tinrent à sages et bien vaillants hommes : et s’accordèrent à ce conseil : et mirent ensemble les arbalêtiers et les gros varlets : et en trouvèrent bien douze cents, que uns que autres.

Quand ce vint au matin, droit à l’aube du jour, ils furent tous appareillés dedans la ville de la Rochelle : et s’assemblèrent-ils en la place : et se partirent tout premièrement les arbalétriers et les gens de pied : et se mirent au chemin, de bon pas, pour venir au logis des Anglois.

Endementiers (cependant) s’ordonnèrent et appareillèrent ceux de cheval : et étoient bien environ trois cents, car il y avoit des chevaliers et des écuyers, qui venus étoient en la Rochelle si tôt comme ils ouïrent dire que les Anglois étoient arrivés à Maurant.

Si issirent (sortirent) les hommes de cheval, et les deux chevaliers devant qui les menoient. Certes, si par aucune inspiration les Anglois eussent sçu la venue des Rochellois, et qu’ils pussent avoir mis sus une belle embûche de deux cents archers et de cent hommes d’armes, il n’en fût jà pié retourné.

Quand les archers et les arbalétriers de Rochellois vinrent sur le logis de Anglois, il étoit encore assez matin : et tant y eut de bon pour eux que le guet qu’ils avoient fait la nuit jusqu’au soleil levant étoit retrait (retiré).

Les arbalétriers commencèrent à tendre leurs arcs en approchant les Anglois, et puis à traire (tirer) ; les sagettes (flèches) passoient parmi ces feuilles. Donc les Anglois qui étoient en leurs logis, ou se reposoient sur litière d’estrain (paille) qu’ils avoient faite, s’émerveilloient dont ces traits venoient. Si en y avoit beaucoup de blessés, avant qu’ils sçussent que ce fussent les François. Quand ils eurent trait environ six coups chacun, ils se mirent au retour le bon pas, ainsi que ordonné étoit. Adonc approchèrent les gens d’armes, lesquels étoient tous bien montés, et se mirent entre les logis des Anglois et leurs gens.

Lors se commença l’ost à estourmir (mouvoir), et chevaliers et écuyers à eux armer et archers à issir (sortir) hors de leurs logjs et venir sur les champs, et eux mettre ensemble et amonceler.

Quand les capitaines François virent que l’ost s’estourmisoit (mouvoit) si au vrai, et que chevaliers et écuyers se recueilloient sur les champs, si suivirent leurs gens : qui s’en r’alloient le bon pas : et jà étoient les premiers moult près de la Rochelle, car ils doutoient (craignoient) le trait des Anglois.

Ainsi, en hériant (harcelant) et trayant, et les gens de cheval gardants leurs gens, furent les Rochellois amenés et poursuivis jusques bien près de la Rochelle : et alors véez-ci venir le comte d’Arundel et plus de quatre cents hommes d’armes qui avoient poursuivi le grand pas, chacun son glaive en ses mains ou sur son col là fut grand l’empêchement des hommes de pied, et la presse moult grande au rentrer en la Rochelle.

Messire Pierre de Joy et messire Pierre Taillepié ouvrèrent (agirent) comme vaillants gens, car, en défendant et en gardant leurs gens, ils se mirent derrière : et firent tant toutes fois qu’ils vinrent aux barrières : et toujours les poursuivoient les Anglois.

Là furent en grand’aventure les deux chevaliers d’être morts où pris en faisant armes.

Car l’assemblée étoit plus sur eux, que sur nul des autres : pourtant (attendu) qu’on véoit bien que c’étoient les maîtres, dont il avint que messire Pierre de Joy eut mort dessous lui son coursier : et à grand’peine fut-il tiré de leurs gens, dedans les barrières : et messire Pierre Taillepié fut féru (frappé) d’un glaive tout outre la cuisse, et d’une flèche parmi le bassinet ; jusques dedans la tête : et vint mourir le cheval sur quoi il seoit dedans la porte, à ses pieds.

A l’entrer en la ville y eut grand’occision, et blessés plus de quarante. On étoit monté en la porte : si traioient (tiroient) canons et bombardes sur les Anglois, par lesquels traits ils se reculoient tant qu’ils n’osoient approcher ni bouter dedans. Ainsi se porta cette première escarmouche des Rochellois et des Anglois. Quand ils eurent escarmouché jusques bien près de nonne, le comte d’Arundel fit sonner la retraite.

Adonc se trairent (retirèrent) moult ordonnément et par bon arroi gens d’armes et archers et tout le pas, jusques à leurs logis : et là se désarmèrent et pensèrent d’eux car bien avoient de quoi. De vins et de chairs étoient-ils bien pourvus, car moult en avoient-ils trouvé sur le pays.

Si se tinrent ces seigneurs et chevaliers d’Angleterre là, environ Maurant et la place où le droit port et hâvre est, plus de quinze jours ; toujours attendants les armes et les aventures : mais depuis n’issirent (sortirent) point de la Rochelle nuls gens d’armes, pour escarmoucher ni éveiller les Anglois, car ils véoient bien que les Anglois se maintenoient et portoient sagement : et aussi leurs deux capitaines étoient blessés : pourquoi les autres avoient bien cause d’eux tenir tous là.

Bien est vérité que le comte d’Arundel envoya par quatre fois courir sur le pays de Rochelois, vers Soubise, et en la terre de Thouars messire Guillaume Helman (Elmham) : et y portèrent, ceux qui envoyés y furent, grand dommage, dont le pays fut moult effrayé ; et encore eussent les Anglois fait autre exploit d’armes, s’ils eussent eu chevaux : mais ils nuls n’en avoient, fors qu’un petit (peu) et encore les avoient-ils trouvés sur le pays.

 Plenté (beaucoup) ne fut ce pas, car si tôt que le plat pays fut informé de leur venue, tous se retrairent (retirèrent) à garand (sûreté) : et s’encloyrent (enfermèrent) ès bonnes villes, eux et le leur. Quand l’armée de mer, si comme je vous conte, eut été et séjourné sur le pays de Rochellois environ quinze jours, et qu’ils s’y furent bien rafraîchis, et ils virent que nul ne venoit à l’encontre d’eux, pour eux veer (empêcher) ni chalanger (disputer) terre, et que vent bon et propice leur fut venu, ils se retrairent (retirèrent) vers leurs navies, et les rechargèrent de grand’foison de vins qu’ils avoient trouvés sur le pays et de chairs fraîches : et puis entrèrent en leurs vaisseaux.

Si se desancrèrent, étants leurs nefs toutes chargées : et avalèrent leurs voiles : et le vent se bouta dedans : si singlèrent en éloignant la terre : et prirent le profond : et entrèrent en la mer : et encontrèrent, en ce propre jour, douze nefs de Bayonne qui s’en alloient en Angleterre, et menoient vins de Gascogne et autres marchandises.

Si se conjouirent tous grandement les uns aux autres, et s’entrefirent moult grand’fête, quand ils se furent avisés et connus ; car ils étoient tout un, et tout d’une alliance ; et donnèrent les Bayonnois au comte d’Arundel, deux pièces de vin de Gascongne en cause d’amour et de rafraîchissement ; et puis passèrent outre, et les autres demeurèrent sur la mer, toujours vaucrant (errant), et vallant, et attendant les aventures.

Or vous parlerai de Perrot le Béarnois et de sa route (troupe).

En ce propre termine (temps), que l’armée d’Angleterre fut à Maurant et en Rochelois, étoit Perrot le Béarnois et sa route (troupe) où bien avoit quatre cents lances, et autant de pillards sur les champs : et passa parmi Limousin : et vinrent en Berry : et levèrent, en un jour, toutes les marchandises de la ville du Blanc en Berry, où pour ces jours il y avoit foire : et eurent là grand profit de ces compagnons des routes (troupes) et des bons et riches prisonniers : et puis passèrent outre : et vinrent jusques à Selles en Berry : et fut la ville toute pillée et robée.

Ainsi se maintinrent Perrot le Béarn et le bourg (bâtard) de Compane et Aimerigot Marcel et Olim Barbe et les autres, et chevauchèrent moult avant sur le pays : et y portèrent grand dommage, car nul ne leur alloit au devant, et en fut le pays tout effrayé delà la rivière de Loire et deçà, et jusques en la comté de Blois et en Touraine, car on ne pouvoit savoir ni imaginer que ces deux armées, qui se tenoient sur les champs, avoient en pensée de faire.

Les aucuns disoient que la chose se tailloit que ils devoient eux trouver ensemble : mais non firent, car l’armée de mer se retrait (retira), comme je vous dirai, et aussi firent Perrot le Béarnois et sa route (troupe).

 

3 mai 1389 : Le roi reprend le pouvoir et remplace Richard comme amiral et capitaine de Brest le 18 mai.

 (1390). Après le départ des assaillants, les malheureux habitants se trouvèrent dans une telle misère qu'un grand nombre d'entre eux se disposaient à abandonner l'île de Noirmoutier.

Les Seigneurs de Noirmoutier écrivirent alors au roi Charles VI, pour solliciter de lui confirmation des anciens privilèges dont la jouissance avait été enlevée depuis longtemps au pays par l'avidité de certains officiers de la Couronne.

Le roi accueillit favorablement leur supplique et accorda, dans les termes suivants, aux habitants, des lettres d'exemption des aides, tailles et toutes autres impositions de guerre ayant ou devant avoir cours dans tout le royaume : (1)

 

 

1392 « CHARLES, par la grâce de Dieu roi de France, à tous ceux qui les présentes verront ;

« Ouié la supplication de notre amée et féale cousine la dame de Craon et de Sully et de notre amé et féal conseiller et chambellan Guy, seigneur de la Trémoille et des habitants de l'île de Noirmoutier, hommes sujets des dessus dits, contenant que, comme ladite île soit toute environnée de mer et en frontière de nos ,ennemis, tellement que toutes et quantes fois qu'il leur a plu et plaît, ils ont pu et peuvent venir et arriver en icelle de jour et de nuit ; laquelle chose ils ont; fait plusieurs fois, notamment depuis peu de temps ; qu'en çà, iceux ennemis ont amené jusqu'au nombre de sept-vingts vaisseaux d'armes et qu'ils sont arrivés, et descendus en grand nombre en ladite île et, de fait, ont assaillit et donné plusieurs grands et terribles assauts au châtel et forteresse d'icelle en s'efforçant de les prendre et occuper.

Lequel châtel lesdits habitants, qui s'y étaient retirés, gardèrent alors et défendirent de tout leur pouvoir à rencontre desdits ennemis, lesquels, non contents dudit assaut, boutèrent le feu en toutes les maisons de ladite île, et l'agâtèrent et détruisirent avec la majeure partie des vignes d'icelle ; prindrent beaucoup et emportèrent tous les biens qu'ils trouvèrent dans ladite île, tellement que lesdits habitants sont si grevés et appauvris que grand nombre d'iceux en sont partis et partent chaque jours, par pauvreté.

« Et en outre, lesdits habitants ont été en telle perplexité et nécessité de vivres, par fortune et orage des. tems, par l'élévation de la mer qui naguerres a été surmonter tellement les terres et marais de ladite île que, tant en sel qu'en bestiaux et autres choses, lesdits habitants, à présent demeurant en icelle, ont presque tout perdu le résidu de leurs biens, pourquoi grande partie d'iceux ont été en voie de mourir de faim par aucun tems ; et combien que ès autres îles voisines, de ladite île de Noirmoutier, et: spécialement ès îles d'Yeux et Bouin et aucunes autres étant au pays de Poitou et en frontière, comme est ladite île de Noirmoutier, n'aient cours les aides, subventions quelconques ayant cours en notre royaume pour le fait de la guerre ; que nobostant, le gouverneur de La Rochelle, les élus et receveurs sur le fait des aides au pays de Poitou et aucuns autres, se disant commissaires de par nous en cette partie, se sont autrement efforcés et s'efforcent de jour en jour mettre sur, cueillir et lever en ladite île lesdits aides, et de contraindre ou faire contraindre lesdits habitants à présent demeurant en icelle à les payer et à contribuer à iceux, et pour ce les menacent et démènent tellement chaque jour qu'ils sont sur le point de partir de ladite île et laisser icelle inhabitée et vuider ; pourquoi le châtel d'icelle île, qui est l'un des plus forts, spacieux, notables et : anciens de toute la contrée et du pays d'environ où il était de très- grand secours, serait en péril d'être pris et occupé par lesdits ennemis ; ce qui serait la destruction de tout le Poitou et Xaintonge, desquels pays ladite île et autres îles sont confrontières et assises et dont, pour occasion de ce, très grands dommages et inconvénients en pourraient arriver et ensuivre en notre royaume et à la chose publique d icelui.

Et, comme ils disent; requêrent humblement que, ces choses considérées et les inconcevables pertes et dom- mages que les dits habitants ont soufferts et souffrent chacun jour, comme dît est, et que tout tems, du moins de tel qu'il n'est mémoire du contraire, iceux habitants et leurs prédécesseurs ont été exempts de contribuer aux aides ; considéré aussi que ces dites îles voisines de ladite île de Noirmoutier étant au pays de Poitou et en pareille frontière comme elle est, n'ont eu et n’ont aucun cours ses aides et subventions dessus dites, NOUS, y voulant pourvoir de notre grâce, sçavoîr faisons qu'en considérations desdites choses, et afin que ladite île ne soit dépeuplée et demeure inhabitée, aux dits suppliants avons octroyés, et octroyons de grâce spéciale par ces présentes, que dorénavant lesdits habitants de ladite île de Noirmoutier soient et demeurent quittes de contribuer aux aides imposés et à imposer en notre royaume pour le fait de la guerre, ainsi qu'en sont quittes les habitants des dites autres îles et que les dites aides n'aient aucun cours en icelle, non plus que dans les autres îles susdites.

« Si, nous donnons en mandement par les présentes à nos amés et féaux les généraux, conseillers sur le fait des aides ordonnées pour la guerre, au gouverneur de La Rochelle et aux élus et receveurs et autres commis et députés sur ledit fait au pavs de de Poitou et au diocèse de Poitiers et Xaintonge et chacun d'eux, si comme à lui appartiendra, que lesdits suppliants et chacun d'eux fassent, souffrent et laissent jouir et user pleinement et paisiblement de notre présente grâce et, contre la teneur d'icelle ne les molestent, travaillent, empêchent, ne fassent ou souffrent molester ne empêcher en aucune manière ; mais tout ce qui serait au contraire mettent et ramènent, fassent mettre et ramener sans délai au premier état et dû.

« En témoin de ce, nous avons fait mettre à ces présentes notre scel.

« Donné à Paris, le vingtième jour d'octobre, l'an de grâce mil-trois-cents-quatre-vingt-douze, et de notre règne le treizième.

« Signé : CHARLES ».

 

Tels sont ce que l'on a appelé Les Privilèges de Noirmoutier.

Ils furent confirmés dans la suite par Charles VII, en 1431 ; — par Louis XI et Charles VIII en 1478 et 1486, à la demande du frère Guillaume Izoard ou Izori, prieur du Monastère de Saint-Filibert ; — par Loias XII, en 1512 ; — par François Ier, en 1517 ; et par Henri II, en 1551.

Ils furent continués, sous les règnes de François II, de Charles IX et de Henri III ; puis de nouveau confirmés : par Henri IV, en 1609 ; — par Louis XIII, en 1614 et par Louis XIV, en 1646.

Cette dernière confirmation, rédigée en termes analogues à ceux employés par Charles VI, contient cependant le passage ci-dessous, que nous croyons devoir transcrire :

« ... Notre très cher et bien aimé cousin, le sieur, de la Trémoille, marquis de Noirmoutier... et les habitants, hommes, sujets et vasseaux de l'île et marquis de Noirmoutier, nous ont fait dire et remontrer que ladite île est en pleine mer et loin de la terre ferme de près d'une grande lieue pour y aborder et aussi très importante pour le bien de notre royaume ; et est ladite île sujette à de grandes inondations de la mer qui ruinent souvent la plupart des habitants d'icelles, comme est avenu par trois ans depuis l'année 1638, et notamment le premier jour de l'année dernière, 1645, y ayant eu plus de deux lieues de ladite île inondées et submergées. .

Lesquels habitants, pour empêcher que ladite île ne soit, envahie par nos ennemis, ont de grandes sujétions et sont obligés à y faire de grandes dépenses, soit pour la conservation d'icelle à notre service, soit pour la garantir des inondations. A l'occasion de quoi, etc... »

Cette pièce, contresignée par Roux, est scellée du grand sceau de cire verte sur lacs de soie de la même couleur.

 

 

Le 14 juin 1391, l'attentat perpétré à Paris contre Olivier de Clisson, par Pierre-de-Craon, seigneur de Sablé et sénéchal d'Anjou, qui avait voulu assassiner le connétable à sa sortie de l'Hôtel-Saint-Paul, où se trouvait le roi, manqua d'avoir pour Noirmoutier des conséquences désastreuses.

Dom Morice a écrit dans son Histoire-de-Bretagne :

« Pierre-de-Craon, après son crime, s'était réfugié à Sablé, puis en Bretagne et, de là, se dirigea vers l'Espagne. Il fut pris par les Aragons et emmené prisonnier. »

En réalité, il n'en était rien, et la lettre de la reine Yolande d'Aragon, informant Charles VI que Pierre était détenu à Barcelone, n'était qu'une fausse, piste, indiquée par les amis du criminel.

Commard de Puylorson, bien placé, comme on va le voir, pour connaître la vérité, le rétablit dans un récit dont nous allons donner la substance :

Les Commart, (ainsi écrit le chanoine) d'origine Bretonne, possédaient un château dans la paroisse de Ploubalay.

Lorsque Pierre-de-Craon vint chercher refuge en Bretagne pour éviter les suites de sa tentative de meurtre contre le connétable, le duc Montfort demanda à Jehan Commart de recevoir chez lui le coupable, réclamé par le roi de France. Tandis que l'on faisait courir le bruit que Pierre était passé par mer à Barcelone et qu'il y était prisonnier, le duc, tout en répondant au roi de France qu’il ne savait ni ne voulait savoir ou était le meurtrier, le faisait adroitement, évader.

La Seigneurie de Noirmoutier appartenant à un membre de sa famille, Pierre-de-Craon s'y réfugia simplement, dans le dessein d'user du droit d’asile que le pape Grégoire IX avait accordé à l'abbaye de la Blanche.

Jehan Commart lui avait donné le second de ses fils pour l'accompagner, le cadet des Commart, appelé Urbain, premier du nom, gagna l'estime de Guy de la Trémoille qui le retint dans l'île et lui donna deux petites terres dont l’une fut érigée en fief.

Le jeune homme fit souche dans le pays, et telle est l'origine de la branche des Commart, de Noirmoutier (ou plus précisément de Barbâtre) qu’illustre le discret chanoine.

« L'histoire n'a pu donner, ces détails, dit ce dernier, parlant de Pierre-de-Craon, parce que l'historien de France les ignorait et que celui de Bretagne ne pouvait dévoiler un secret que le duc Montfort eut grand soin de cacher au roi de France. »

Si, Charles VI fut abusé par le stratagème du duc de Bretagne, il ne semble pas que Clisson s'y soit laisse prendre.

Souverain de Noirmoutier comme seigneur de la Garnache, il donna l'ordre de saisir les biens de l’Abbaye Blanche sur toutes ses terres pour punir l'abbé Daniel (ou peut-être l'abbé Jean IV, indiqué, en 1398, par Puylorson seul), et les religieux de, soustraire à sa vengeance la personne de son assassin, protégé contre ses revendications par la bulle pontificale.

Pierre sortit de s'a retraite, lorsque la folie du roi Charles VI et la disgrâce du connétable lui donnèrent à penser qu'il n'avait plus rien à craindre de ceux qui le menaçaient.

Olivier de Clisson, qui ne fut jamais seigneur utile de Noirmoutier, mourut dans son château de Josselin, le 23 avril 1407, laissant à l'une de ses filles, Béatrix, mariée à Alain VIII, vicomte de Rohan, la seigneurie de la Garnache avec seulement quelques terres dans l'île, tenues par Olivier Pasquier et Yon de Lesnerac. (2)

Le connétable avait, depuis quelques années, rendu, par ordre supérieur, à l'abbé Etienne, que nous voyons mentionné en 1406, les biens dont il avait, dépouillé les moines de la Blanche à la suite de l'incident de Pierre-de-Craon.

 

 

 

Noirmoutier en héritage, le Vaillant Guy de la Tremouille et Marie de Sully pendant la Guerre de Cent ans <==.... ....==> En 1396, Gui de La Trémoille lance la construction du donjon de Sully-sur-Loire

 

 


 

1622 Louis XIII et la défaite de Soubise - Prise du Château de la Chaume - tour d'Arundel (bataille de l'île de Rié) 

Soubise, chef des Protestants, après sa capitulation à St-Jean d'Angély (1621), obtint le pardon royal en promettant paix et fidélité. Mais, pour des causes diverses, les Rochelais reprirent bientôt les hostilités et " l'armée le Soubise " s'apprêta à mettre le siège devant Les Sables-d'Olonne pour enlever au Gouvernement une sérieuse base navale.

 

(1)   Piet. — Recherches sur Noirmoutier.

(2). Il existe à Noirmoutier un marais appelé Josselin. L'analogie de ce nom avec celui du château de Clisson permet de supposer qu'il pouvait appartenir à cette famille.

 

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