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PHystorique- Les Portes du Temps
12 juillet 2021

Oiron, Tombeau de Guillaume Gouffier de Bonnivet mort à Pavie en 1525 sous le Règne de François Ier

Mort de l’amiral de Bonnivet à la bataille de Pavie, le 24 février 1525, durant la première guerre de Charles Quint contre François Ier

 Guillaume Gouffier de Bonnivet, le dernier des enfants de Guillaume Gouffier et de Philippe de Montmorency, plus connu sous le nom d'amiral de Bonnivet, destiné à être seigneur de Bonnivet, de Crèvecœur, de Thoix, etc., chevalier de Saint-Michel, grand amiral de France, gouverneur du Dauphiné et de la Guyenne, né en 1488, fut élevé avec François Ier, qui avait pour gouverneur Arthus Gouffier, frère aîné de Guillaume.

Ce dernier, suivant un auteur, avait avec le prince une trop grande ressemblance en beaucoup de points, qualités ou défauts, pour ne pas rester son favori.

En 1506, Guillaume épousa Bonaventure du Puy du Fou, fille unique de Geoffroy, seigneur d'Amaillou, et de Marguerite de Saint-Gelais.

Il se signala au siège de Cènes, en 1507, à la bataille de Guinegate ou Journée des Éperons, en 1513, contre les Impériaux et les Anglais; il ne tourna bride qu'à la dernière extrémité, s'efforçant de rallier les fuyards.

En 1513, il obtint du Sénat de Venise la concession du fief de Casabella, dans le territoire d'Asola, ainsi qu'on le voit par les lettres suivantes

« Monseigneur de Bonnivet, par l'intermédiaire des illustres ambassadeurs de Sa Majesté tres chrétienne auprès de nous, a fait de vives instances pour obtenir la possession de Casabella dans le territoire d'Asola, et tout récemment encore, cette possession était l'objet de pourparlers entre lui et notre ambassadeur auprès de Sa Saincteté, comme il appert des lettres lues dans ce Conseil.

« Par considération pour lui-même et pour Monseigneur de Boisi, son frère, personnage d'une très grande influence auprès de S. M. très-chrélienne, et eu égard aux circonstances actuelles  qui conseillent une réponse favorable à la demande du dit seigneur;

« Le Sénat décrète :

« Qu'il soit répondu par notre Prince Sérénissime aux susdits ambassadeurs, que notre seigneurie est heureuse de faire plaisir à Monseigneur de Bonnivet, et de lui accorder la possession de Casabella à titre de fief direct, noble et gracieux, avec toutes ses dépendances. Mais comme la propriété en appartient de droit aux héritiers du comte de Pitigliano, notre ancien capitaine général qui l'a acheté de ses propres deniers, Notre Seigneurie, pour que la justice soit sauvegardée, fera en sorte de l'avoir moyennant une compensation équivalente.

En attendant, les susdits ambassadeurs sont autorisés à regarder la chose comme faite et à en informer Monseigneur de Bonnivet, qui recevra en son temps, suivant qu'il est d'usage de le délivrer, l'acte authentique qui garantit son privilège afin que le dit seigneur n'ait qu'à se louer de notre Seigneurie. Monseigneur voudra bien, pour reconnaître ladite concession, prendre l'engagement d'offrir tous les ans à l'église de Messire Saint-Marc, notre Patron, le jour de sa fête au mois d'avril, un cierge de dix livres. »

(Archives générales de Venise. Délibérations secrètes du Sénat. I c. cxlvi). – Traduction française.

Il devint l'un des plus intimes favoris de François Ier, qui dans la suite eut beaucoup à se repentir de lui avoir donné toute sa confiance.

Dès 1515, Gratifié par François Ier de bienfaits considérables, Bonnivet a eu l’opportunité de consacrer cette fortune à la construction d’un château à sa démesure, sur ses modestes terres de Bonnivet, près de Poitiers.

Il fait bâtir un château flambant neuf, sans prendre appui sur le modeste édifice qui préexistait probablement. Il adopte résolument un parti très moderne, abandonnant tous les signes distinctifs traditionnels de la demeure noble. Il signifie par- là que toute sa fortune lui vient du roi, et de lui seul.

François 1er le fît en 1516 premier gentilhomme de sa chambre, à la place de Charles de Rochechouart, sgr de Montpipeau, le nomma l'un de ses commissaires pour se trouver à l'assemblée des trois états de Normandie, tenus à Rouen au mois d'août 1517.

 Devenu veuf, on ne sait au juste à quelle époque, Guillaume Gouffier épousa en 1517 Louise de Crèvecœur, fille et unique héritière de François, sgr de Crèvecoeur, et de Jeanne de Rubempré, et l'année même de son mariage il fut envoyé en ambassade en Angleterre, afin de déterminer Henri VIII à quitter le parti des Impériaux, pour se rattacher à la France.

 Pour y parvenir, l'essentiel était de gagner le cardinal Wolsey, archevêque d'Yorck, son premier ministre. « Gouffier, dit Brantome, y alla très grandément et magnifiquement accompagné, ainsi que c'est la coutume des favorys des roys; mais entr'autres somptuosités est qu'il avait 23 mulets de coffres, harnachés très superbement et les couvertes toutes de velours cramoisy, avecque ses armes toutes en broderies d'or et d'argent, que le roy d'Angleterre et sa cour admirèrent fort ».

Son faste et ses présents captivèrent Wolsey, et on crut bien que le but qu'on se proposait était assuré.

Aussi, à son retour (31 décembre 1517), Guillaume Gouffier fut-il nommé grand amiral, et à partir de ce moment est-il le plus souvent désigné sous le titre d'amiral de Bonnivet.

L'empereur Maximilien d'Autriche étant mort un an plus tard (janvier 1519), François Ier crut pouvoir disputer la dignité d'empereur à Charles-Quint, petit-fils de l'empereur défunt, déjà roi d'Espagne, des Deux-Siciles, des Pays-Bas et de Rome.

Plein de confiance dans la souplesse et l'habileté de l'amiral comme diplomate, il l'envoya en Allemagne auprès des électeurs afin de les gagner en sa faveur; mais déjà Charles-Quint s'était à peu près assuré la majorité des voix.

François Ier regarda cet insuccès comme Je résultat d'événements majeurs, et il n'en conserva pas moins ses bonnes grâces à Bonnivet, qu'il nomma l'année même gouverneur du Dauphiné et de la personne du Dauphin; il l'envoya de nouveau en Angleterre auprès de Henri VIII, afin de ménager entre eux une conférence sur laquelle il fondait les plus grandes espérances, ne se doutant pas que Charles-Quint, plus habile, se rendait, vers le même temps, en personne à Douvres, et engageait le cardinal Wolsey dans son parti, par la promesse fallacieuse de la tiare.

Le projet de conférence entre François 1er et Henri VIII n'en fut pas moins arrêté. Elle devait avoir lieu entre Ardres et Guines.

Bonnivet fut chargé d'en faire les préparatifs. C'est probablement en se rendant à cette conférence, que François Ier, avec une partie de la Cour fit à l'amiral une de ces visites dont il voulut bien l'honorer, en son château de Crèvecœur.

On déploya tant de faste, de luxe dans cette rencontre des deux rois, qu'elle est restée à jamais célèbre sous le nom d'Entrevue du camp du drap d'or.

 « Plusieurs, dit du Belloi, témoin oculaire, « y portèrent leurs forêts, leurs prés et leurs moulins sur leurs épaules. »

En réalité, la réunion n'aboutit qu'à de ruineuses magnificences. On s'y donna des fêtes mais on ne conclut rien (1520).

Henri VIII, avant de repasser en Angleterre, alla à Gravelines rendre à Charles-Quint la visite qu'il lui avait faite. Celui-ci acheva là ce qu'il avait entrepris à Douvres. Il obtint la neutralité du monarque anglais, et par récompense, il céda à l'insatiable Wolsey les revenus de deux duchés espagnols avec l'espérance illusoire de la tiare.

La guerre ne tarda pas à éclater.

L'étincelle qui l'alluma fut un procès entre les maisons de Croüy et de Bouillon, touchant un territoire sans importance dans les Ardennes.

Pendant que Charles-Quint envahissait la France par la Flandre et que le comte de Nassau, son général allait mettre le siège devant Mouzon, puis devant Mézières (1531), Bonnivet, récemment nommé gouverneur de la Guyenne, prenait le commandement de l'armée qui devait conquérir la Navarre.

Parti de la Picardie vers la fin de septembre avec six mille lansquenets et trois ou quatre compagnies d'ordonnance, il recueillit les débris rassemblés par d'Estissac, des troupes que Lesparre (parent des Albret, en faveur duquel François Ier revendiquait la Navarre) avait en grande partie sacrifiée pour la conquête éphémère de cette province; et faisant semblant de se diriger sur Pampelune, il se porta sur Fontarabie, se bornant à s'emparer du château-fort de Béhaubie, qui pouvait gêner ses opérations.

Il dressa lui-même ses batteries contre ce fort, et tira avec tant de justesse, que le premier boulet enfila une canonnière et brisa la plus grosse pièce d'artillerie, dont elle tua les servants. Les assiégés terrifiés se rendirent à discrétion.

Cet obstacle écarté, l'amiral investit Fontarabie. Après quelques décharges d'artillerie, un pan de muraille, ayant commencé à s'écrouler, Bonnivet donna le signal de l'assaut et les Navarrois s'y ruèrent avec une grande impétuosité, mais aussi avec un grand désordre. Arrivés aux remparts, ils reconnurent que la brèche était insuffisante et revinrent précipitamment se mettre à l'abri dans leurs tranchées. Bonnivet prit alors ses dispositions pour renouveler une attaque décisive; mais les Espagnols comprenant qu'ils ne pourraient plus résister longtemps, demandèrent à capituler; l'amiral, agissant avec générosité, leur permit de se retirer sans conditions.

Claude, comte de Guise, conseillait à Bonnivet de raser Fontarabie qui pourrait revenir tôt ou tard aux Espagnols, mais celui-ci, les uns disent par vanité et pour faire parade de sa conquête, les autres, parce qu'il savait que François Ier tenait personnellement à conserver Fontarabie pour en faire une base d'opérations, ne se rendit point à l'avis qui lui était donné; et comme cette forteresse devint, dans la suite, un des objets des guerres interminables qui eurent lieu entre les Français et les Impériaux ceux dont les faveurs exceptionnelles accordées par François Ier à Bonnivet excitaient la jalousie, ne manquèrent pas de mettre la conservation de Fontarabie au nombre de leurs griefs, sans peut-être se demander suffisamment si, comme pour d'autres griefs, il avait été libre d'agir différemment. Cependant t la guerre se poursuivait avec des chances bien moins avantageuses en Italie.

Charles de Bourbon, deuxième fils de Charles-Montpensier Gonzague, à qui Anne sa femme, fille de Pierre de Beaujeu et de Anne fille de Louis XI, sœur ainée et plus tard régente du roi Charles VIII, avait apporté en dot les plus grands fiefs du royaume, après avoir été nommé par François Ier cumulable et gouverneur du Milanais, à la recommandation de la reine-mère Louise de Savoie, étant devenu veuf, et celle-ci désirant l'avoir pour époux, avait été rappelé en France; et à la sollicitation de la comtesse de Chateaubriand, réputée maîtresse du roi, remplacé par le comte de Lautrec à la fois frère de celle-ci et de Lesparre.

Mais Charles de Bourbon, n'ayant pas cru devoir accepter la main qui lui était offerte et ayant mêlé à son refus quelques mots de railleries, devint excessivement odieux à la fois à la mère et à son trop faible fils, et fut en butte à toutes sortes de rigueurs et de tracasseries.

Le roi paraissait affecter de ne tenir aucun compte des privilèges de sa dignité de connétable, tantôt décidant des choses de la guerre sans lui demander avis ou tout-à-fait contrairement à son avis, tantôt confiant à quelqu'autre chef le commandement de l'avant-garde de l'armée.

Ne se croyant point encore suffisamment vengée par ces mesures vexatoires, la reine-mère, profitant de ce que Louis XI avait stipulé, qu'à défaut d'héritier direct, les domaines donnés en dot à Anne, sa fille, feraient retour à la couronne, avait, à force d'intrigues, obtenu du Parlement, après onze mois de débats, un arrêt qui mettait sous séquestre les biens du connétable.

Charles-Quint, devinant combien celui-ci devait être irrité d'être condamné à une ruine presque complète pour ne pas condescendre à devenir, à 24 ans, époux malgré lui, d'une femme de 45 ans, offrit à Charles de Bourbon, dans ses états, un asile contre les persécutions de la mère et la connivence du fils. Le connétable, poussé à bout, n'eut pas la force de résister; il accepta de s'associer aux généraux de l'empereur pour le commandement des troupes alliées. Assurément les torts qu'on avait pu avoir à son égard ne sauraient le justifier de s'être joint aux ennemis de sa patrie, mais ils n'expliquent que trop cette funeste décision.

Déjà Lautrec, son successeur comme gouverneur de Milan, après avoir perdu cette ville contre le marquis de Pescaire et la bataille de la Bicoque, malgré l'héroïsme de Bayard (1522), avait été à son tour privé de son commandement nonobstant les instantes prières de la comtesse de Chateaubriand, sa soeur, et quoiqu'il fut fondé à répondre, comme il le fit avec une ferme dignité, à François Ier qui l'abordait par ces mots: « puis-je voir d'un bon œil un homme coupable de la perte de mon duché de Milan?» « Sire, je dirai à votre Majesté que c'est elle a seule qui en est la cause; votre gendarmerie a servi dix-huit mois, sans rien recevoir. »

Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on a des motifs de dire: « Pas d'argent pas de Suisses. Lautrec s'étant trouvé dans l'impossibilité de payer à temps la solde de dix mille Suisses qu'il avait sous ses ordres, parce que la reine-mère avait accaparé les quatre cent mille ducats destinés à l'armée d'Italie, avait dû céder à l'opiniâtreté avec laquelle ils réclamèrent l'assaut de Milan dans l'espoir de se dédommager par le pillage mais l'attaque ayant échoué, les Suisses, à qui leur solde échappait, avaient déserté pour retourner dans leurs montagnes et l'échec tourna en véritable désastre.

Bonnivet, nommé commandant en chef de l'armée, à la place de Lautrec, se heurta bientôt aux mêmes difficultés que lui. En fort peu de temps il s'était emparé de Novarre, de Vigevano et de toutes les places de la Lomelline ; les ennemis avaient établi leur camp de l'autre côté du Tessin.

L'amiral fit traverser un peu plus haut la rivière à gué à une partie de son armée pour se porter sur Milan; mais trompé par quelques faux transfuges du général Colonne, il crut que la ville lui serait ouverte par la faction Guelfe, et qu'en tout cas, en ruinant les villages environnants et en détournant les ruisseaux qui amenaient l'eau dans la ville, il ne pouvait tarder de la réduire par la famine; mais il s'aperçut bientôt que n'ayant pu investir complètement la place, des secours lui arrivaient journellement par la route de Lodi il comprit qu'il fallait donner l'assaut sans plus tarder, et il en intima l'ordre à Bayard.

Les ennemis, de leur côté, pour faire diversion, se portèrent sur Vigevano et le pont du Tésin, dans l'espoir, en s'en rendant maîtres, d'affamer les assiégeants eux-mêmes dans leur camp.

Pour échapper à ce danger, Bonnivet, quoiqu'il sût l'importance des postes de Lozi et de Monza, en détacha Bayard et Renzo pour les envoyer à Vigevano avant l'arrivée des ennemis.

 On était alors en plein hiver (décembre 1523) la peste s'était mise dans l'armée; les troupes mercenaires, les Suisses en particulier, murmuraient tout haut parce qu'on ne les payait point suffisamment. Dans ces fâcheuses conjonctures, force fut à l'amiral de quitter une position avantageuse et de repasser le Tésin. Il s'éloigna donc mais lentement et en bon ordre, suivant la tactique indiquée sur ses armes: « Festina lente commençant par retirer son artillerie.

Puis, comme il crut n'avoir plus pour le moment à redouter une attaque sérieuse, il établit son camp de façon à pouvoir placer ses quartiers d'hiver au milieu des ennemis, dont il serait très facile de surveiller les mouvements. Cependant la solde des troupes était toujours en retard, et les .murmures de mécontentement devenaient de plus en plus menaçants. Afin de pouvoir subsister au moins jusqu'à ce que la saison devînt un peu moins rigoureuse, Bonnivet prit le parti de licencier une partie de ses troupes, puis ayant quitté son camp, il était allé se retrancher à Mortare.

Là, trois jours consécutifs, il présente la bataille à ses adversaires; mais, ceux-ci quoique deux fois plus nombreux, ne veulent point en venir aux mains, comptant bien que les Français, dans un bref délai, seront obligés de se rendre à discrétion. L'amiral avait déjà réclamé du secours à plusieurs reprises, mais toujours en vain.

Voyant le cercle de fer dans lequel il se trouvait comme enserré, se rétrécir de jour en jour davantage, quelque dangereuse que pût être une retraite en pays ennemi et en présence d'une armée supérieure en nombre, il s'y détermina et l'exécuta avec tant de précautions et de diligence qu'il avait pu, pour un moment, se croire hors d'atteinte de ses ennemis; mais ceux-ci l'atteignirent à Romagnano, au moment où les troupes commençaient à s'engager sur le pont établi sur la Sesia.

 Il eût encore été possible pour le moment de se mettre en mesure de reprendre l'offensive contre les Impériaux avec de sérieuses chances de succès mais les Suisses, agissant comme précédemment avec Lautrec, au lieu de franchir la rivière et de s'unir aux Français, s'éloignent, protestant que François Ier a manqué de parole à leur égard.

Bonnivet, que cette défection mettait hors d'état de résister aux troupes impériales, pressa le passage de la rivière et se porta à l'arrière-garde pour protéger ce qui lui restait d'infanterie. Il communique à ses soldats l'ardeur qui l'anime.

Charles de Bourbon lance à l'instant sur lui une masse de cavalerie soutenue par douze cents arquebusiers espagnols. Le choc est terrible, un furieux combat s'engage.

L'amiral, qui s'expose comme un simple soldat, tombe grièvement blessé; malgré le sang qu'il perd à flot, il veut persister; mais bientôt réduit à se faire déposer sur une litière pour être transporté à l'avant-garde, il confie l'armée au comte de Saint-Pol, à Vandenesse et à Bayard.

Oubliant la vivacité avec laquelle ce dernier, quelque temps auparavant lui avait envoyé un défi, parce que le renfort qu'il avait demandé au généralissime ne lui ayant point été envoyé, il avait essuyé à Rebec la première défaite de sa vie; et plein d'admiration pour la générosité et la valeur qu'il avait montrées malgré tout durant toute cette retraite de la Biagrasse, il lui remit son bâton de général en chef, en lui disant: « Je vous prie et conjure pour la gloire du nom français, que vous défendiez aujourd'hui l'artillerie et les enseignes que je vous remets et consigne entièrement à votre fidélité, valeur et sage conduite, puisqu'il n'y a personne dans l'armée du roi qui en soit plus capable que vous, soit pour la valeur, l'expérience ou le conseil. »

« C'est bien tard, dit le chevalier sans peur et sans reproche; mais n'importe, mon âme est à Dieu et ma vie au roi, je sauverai l'armée aux dépens de mes jours. »

En effet, il s'élance à l'arrière-garde et rétablit le combat, Vandenesse ne tarde pas à être tué et Bayard supporte tout le poids de l'attaque, il est lui-même frappé mortellement d'une pierre de hacquebouze, qui lui brise l'échiné. « Jésus! s'écria-t-il, hélas!  mon Dieu, je suis mort » et portant à ses lèvres la poignée de son épée en forme de croix, il dit tout haut: « Miserere mei, Deus, secundum misericordiam tuam ;» « il se fait descendre par ung jeune gentilhomme, son maistre d'hostel, et déposer soubz ung arbre, le visage tourné vers l'ennemi», «.parce que, dit-il, ne lui ayant jamais tourné le dos, il ne voulait pas commencer à sa dernière heure », « et se confessa le bon chevalier à son povre maistre d'hostel par faulte de prebstre. »

Le connétable de Bourbon étant arrivé sur ces entrefaites: « J'ai grand pitié de vous, lui dit-il, vous voyant en cest estat, pour atoir été si vertueux chevalier. Monseigneur, lui dit le « capitaine, ne faut avoir pitié de moi, mais de vous qui estes armé contre voire roi, votre pays et votre foi. Je prends la mort en gré et n'y ai aucune desplaisance. »

Le comte de Saint-Pol acheva la retraite et trouva à Suse un secours qui, arrivé quinze jours plus tôt,, eût prévenu ce désastre et ceux qui suivirent.

Cependant, Charles-Quint, sachant que le roi d'Angleterre envahissait la Picardie, avait établi Marie Sforce à Milan.

 Malgré l'envahissement de ses Etats, François Ier, à l'instigation de Bonnivet et de plusieurs autres, se décide à faire une nouvelle expédition en Italie; il franchit les Alpes à la tête de quatorze mille Suisses, six mille lansquenets, et dix mille autres fantassins français et italiens et fond sur Milan qui ouvre ses portes.

 Alors, obsédé par le désir de conquérir le royaume de Naples, il envoie dans cette contrée une partie de ses troupes au moment où il avait plus besoin que jamais de toutes ses forces pour investir Pavie, 1525. On mit néanmoins le siège devant cette ville.

Bonnivet, dit l'historien Henri Martin, prit de bonnes dispositions, mais soudain les Impériaux se présentèrent en présence des Français. Comme ceux-ci n'étaient plus en nombre, les plus vieux capitaines conseillèrent d'éviter la bataille et de lever le siège, mais le roi resta sourd à ces avis.

Alors Bonnivet, se levant au milieu du Conseil et s'adressant à ceux qui voulaient fuir devant Charles de Bourbon « Quelle honte, Messieurs, leur dit-il, proposez-vous à votre brave Roy, « si vaillant et si courageux, de se retirer d'ici et en lever le siège ? Nous autres, Français, n'en avons jamais refusé et n'avons jamais accoutumé de faire la guerre par de petits subterfuges et astuces militaires, mais de belles guerres découvertes, et mesmes quand nous avons un brave Roy et vaillant nostre pour général, lequel doit faire combattre les plus poltrons, car les Roys portent communément cet heur avec eux, non a pas seulement cet heur, mais les victoires tout-à-faict, comme fit votre petit Charles VIII, au Taro, et notre roy Louis XII, à Aignadel tant la présence des roys en cela est bonne et nécessaire et profitable Et ne faut pas douter que le voyant aller le premier au combat (car il nous montrera le chemin), que sa brave gendarmerie, qu'il a ici, face de mesmes, et ne passe sur le ventre à toute cette chétive de l'ennemy qui se présentero. Parquoy, Sire, donnez la bataille, allons ! (2).

 « Si ce conseil, poursuit Brantôme, ne fut pas bon et utile, il partait d'un brave cœur et généreux et fort digne d'honneur. »

Ces quelques mots peignent l'amiral mieux que tous les éloges.

Il fut décidé qu'on ne se retirerait point, et le 24 février 1525 la bataille s'engagea.

Le combat parut d'abord favorable aux Français. Le grand-maitre de l'artillerie Galiot-Genouillac dirigeait avec tant de précision le feu de ses batteries, que chaque décharge emportait des lignes entières, de sorte que les Espagnols, effrayés, rompirent leurs rangs et se précipitèrent partout où ils espéraient trouver un abri.

Le roi, craignant qu'ils ne lui échappassent et ne pouvant se résoudre à paraitre hésiter devant un vassal rebelle, se mit à poursuivre les ennemis à la tête de sa cavalerie, quoique Galiot Grenouillac lui représentât que l'artillerie, qui pouvait les détruire en grande partie, allait, en changeant de position, être mise dans l'impossibilité d'agir.

Le roi ne voulut rien entendre, tant il était impatient de payer de sa personne. Cette faute, que d'autres chefs d'Etat ont trop souvent renouvelé depuis, contribua beaucoup à la perte de la bataille pour comble de malheur, le duc d'Alençon, l'époux de Marguerite, sœur du roi, fait sonner la retraite sans combattre, en abandonnant le roi à son courage.

Les Suisses, découverts par la fuite du duc d'Alençon, tournent le dos à leur tour et prennent en désordre le chemin de Milan. Bonnivet, qui s'était battu comme un lion, faisant à la fois l'office de capitaine et de soldat, voyant le duc d'Alençon s'éloigner à toute bride « Que faites-vous, Monseigneur ? lui cria-t-il. Vous le voyez bien, tout est perdu, je fuis. Eh bien moi, voilà comment je reste, répond l'amiral. «Et, après qu'il eust essayé tout ce qu'il peut, de rallier le reste des Suisses et quelque cavalerie, et n'y ayant pu gaigner, se résoult de mourir en disant « Non, je ne seaurais survivre, ceste grande désadventure ni destruction pour tout le bien du monde il faut aller mourir dans la meslée » (3) il bondit à' l'instant au milieu de la bataille, frappe autour de lui, immole tous ceux qui se trouvent à sa portée et succombe enfin accablé par le nombre.

Plusieurs historiens racontent que le connétable de Bourbon, ayant trouvé son cadavre, aurait dit « Ah! malheureux, tu es cause de la ruine de la France et de la mienne. »

 « Il y combattit, ce jour-là, très vaillamment, dit Brantôme, faisant office de capitaine et soldat : et voyant après qu'il bastoit mal pour nous, et que la fortune et victoire panchoit pour l'ennemy, après qu'il eust faict tout ce qu'il peut de rallier le reste des Suisses et quelque cavallerie, et n'y ayant rien pu gaigner, se resoult de mourir …..et, haussant la visière de sa sallade, selon la coustume des capitaines qui commandent………… opposa sa gorge aux espées, et mourut. Belle fin et résolution, et de galant homme certes, pour fuir la honte et le reproche qu'on luy eust faict de son conseil et de sa faute ! »

 

Un certain nombre d'auteurs, bien peu en garde contre les sentiments de jalousie excités par les faveurs dont François ler s'était montré peut-être un peu trop prodigue envers Guillaume de Bonnivet, le jeune frère de son gouverneur et son camarade d'enfance, ont, à la suite de ses envieux, attribué à son peu de capacité, les insuccès de ses missions diplomatiques et militaires, et à ses adulations les mesures les plus regrettables prises par le roi contre les avis de ses plus sages conseillers et tout particulièrement la guerre d'Italie, la révocation de Lautrec et celle plus déplorable encore du connétable de Bourbon; mais on a pu voir, par l'exposé seul des faits, que s'il est permis de penser que si Bonnivet fut flatté d'être appelé à certaines dignités, rien n'autorise à croire qu'il ait employé des moyens déloyaux pour y parvenir, et qu'en ce qui concerne la défection du connétable de Bourbon et les revers des armées, il ne parait pas douteux que l'animosité et la cupidité de la reine Louise de Savoie et l'excès de condescendance du roi pour les faiblesses de sa mère joint à son imprévoyance et à sa témérité à la guerre, y ont eu la plus large part.

En tout cas, si l'amiral de Bonnivet a pu avoir quelques torts, sa mort héroïque doit les faire oublier et pardonner ensuite. N'at-elle pas permis, ainsi que celle de tant d'autres héros, à François 1er, obligé de se rendre prisonnier après avoir été couvert de blessures, d'écrire à sa mère pour lui annoncer ce désastre « Madame, tout est perdu, fors l'honneur »

 

 Le corps de Bonnivet fut transporté à Oiron (Deux-Sèvres), pour y être inhumé auprès de sa mère, Philippe de Montmorency et de Artus Gouffier, son frère, dans la sépulture de sa famille, en la collégiale de ce village.

 

 Le tombeau, restauré par M. Segrétain, architecte à Niort, était eu marbre noir, sauf la table supérieure et les médaillons ornant les côtés qui étaient en marbre blanc.

Ces médaillons représentaient le dauphin entortillé autour d'une ancre avec la devise de l'amiral

 

Festina lente » (Hâtez-vous posément)

« Festina lente » (Hâtez-vous posément).

 

Son effigie le montre casque en tête, la visière levée et ouverte, l'épée au côté dans le fourreau.

Oiron, Tombeau de Guillaume Gouffier de Bonnivet mort à Pavie en 1525 sous le Règne de François Ier

On y lit l'inscription suivante :

 « Cy gist messe Guille Gouffier, en son vivat chir de l'Ordre, seigneur de Bonnivet et de Crèvecœur, grand a amiral de France, qui trespassa en la bataille devat Pavie, le 24 février 1524 (4)  Priez Dieu pour luy. »

 

Quoique l'église de Crèvecœur n'ait pas eu l'avantage de posséder les restes de l'amiral de Bonnivet, un cénotaphe fut érigé en son honneur sous les fenêtres du sanctuaire du côté de l'Evangile. M. de Cambry, qui en a recueilli les débris après la grande révolution, avec le buste de l'amiral, assure que le monument en partie de marbre blanc, était fort remarquable par la forme et la sculpture, à en juger par ses seules ruines. Il ne subsiste aujourd'hui que quelques vestiges du rinceau sculpté dans la pierre qui en formait l'encadrement.

De son mariage avec Bonaventure du Puy-du-Fou, sa première femme, l'amiral Gouffier de Bonnivet avait eu Louis Gouffier, seigneur de Bonnivet, tué, sans avoir été marié, dans un voyage que M. de Lautrec fit à Naples, en 1527.

De Louise de Crèvecœur, sa seconde femme, il eut 1° François Gouffier, l'aîné, seigneur de Bonnivet; 2° un autre François; 3 Gouffier, chevalier de Malte, nommé à l'évêché de Béziers, l'an 1547, mort en 1548, après avoir été ambassadeur extraordinaire en Angleterre ; 4° et enfin François Gouffier, dit le Jeune, qui hérita de la seigneurie de Crèvecoeur après l'amiral.

 

 

 

 Camp du Drap d'Or juin 1520, rencontre entre François Ier et Henri VIII d'Angleterre (Reconstitution Historique) <==

 Panorama 360° de Oiron et Historique des seigneurs du château <==

 ==> Gargantua a-t-il détruit le château de Bonnivet de Guillaume Gouffier, amiral de France et Bonaventure du Puy du Fou

 

 


 

L'histoire de Pierre Terrail, seigneur de Bayard, le chevalier sans peur et sans reproche; le Tournoi d'Aire sous Charles VIII 

Après Jeanne d'Arc et du Guesclin, voici, mes enfants chéris, l'histoire de Bayard, le chevalier sans peur et sans reproche. Pour la troisième fois j'inscris votre nom en tête de ces récits qui rappellent les héros de la France.

 

(1) L'amiral Guillaume Gouffier de Bonnivet porte de gueules à trois chevrons d'or, le premier brisé d'un croissant d'azur pour Des Querdes, bailli d'Amiens.

(2) Brantôme, discours xxsvu. édition Buchon.

(3) Mezerai.

(4) « On sait que c'est 1525, ce doit être une inadvertance du graveur », dit M. Hubert, dans son Histoire de Crèvecoeur. L'inadvertance vient de lui. Jusqu'à l'édit de Charles IX, en 1564, ordonnant de commencer l'année au 1er janvier, elle continua de commencer à Pâques au mois de février, on était donc en 1524. Ce n'est qu'après 1564 que les historiens pour faire concorder les faits, ont écrit 1525, ce que ne pouvait faire le graveur quelques mois après la mort de Bonnivet.

 

 

 

 

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