Arrêtés du 4 aout 1789 relatifs à l'abolition du régime féodal.
Depuis la prise de la Bastille le 14 juillet 1789 s'est développé en France, notamment dans les campagnes, une vague de révoltes appelée la Grande Peur. Dans certaines régions, des paysans s'en prennent aux seigneurs, à leurs biens et à leurs archives, en particulier les livres terriers qui servent à établir les droits seigneuriaux.
Il est détruit ce chêne antique, dont l'œil voyait de loin les feuillages, sans en apercevoir les racines; le régime féodal n'existe plus en France, quand il couvre encore une partie de l'Europe. Sa suppression tenait à l'établissement d'une constitution libre ; l'homme, qui avait entendu la voix, de la liberté, ne pouvait plus contempler, sans rougir de lui-même, cette chaîne qui l'attachait à la glebe, qui le liait au caprice d'un maître.
Une grande révolution s'est opérée dans le commerce des propriétés foncières; leur nature est maintenant une, toutes ces qualités accidentelles qui différenciaient les terres, les droits personnels et réels, sont effacées; le possesseur d'un domaine sera débiteur, mais ce titre n'aura rien qui l'humilie, rien qui dégrade l'homme, et l'assujettisse à un autre homme.
Le droit de chasser sur son terrain a été rendu au propriétaire ; les Capitaineries sont abolies, le cultivateur naguères encore obligé de partager le fruit de ses sueurs avec un monde d'animaux - privilegiés, ne maudira plus le voisinage des Rois; les justices seigneuriales et tout ce qui en était l'attribut ont été supprimés , nul désormais n'exercera les fonctions judiciaires, qu'il ne tienne son droit de l'élection libre du peuple.
Toutes ces distinctions honorifiques qui annonçaient jusque dans nos temples la présence d'un individu supérieur aux autres, ont été enseveli sous les ruines de l'édifice féodal ; mais au milieu de cette destruction, la main qui abattait, a respecté nombre d'objets qu'il eut été injuste d'anéantir.
Les législateurs ont dit : que le régime féodal soit aboli, et le régime féodal a été aboli; ils ont dit aussi : que les droits qui n'atteignent que les choses et non les personnes, soient exactement payés : mais le mainmortable, le censitaire, en secouant sa chaine, a souvent voulu briser tous les rapports : libre de sa personne, il a cru que sa terre devait participer à cette franchise absolue. Egaré par ces premiers mouvements d'effervescence, par cette espèce d'ivresse qui suivent toujours le passage d'un état qu'on regardait comme oppresseur, à un état qu'on croit meilleur , entrainé par le courant de l'intérêt personnel, trompé souvent par de perfides suggestions, nous avons vu le colon, passer les bornes que lui assignait la loi: vous ne chasserez que sur votre terrain : et il se permettait de chasser dans tout le territoire, de traverser les moissons.
le seigneur ne pourra plus exiger que vous abandonniez des travaux utiles, pour acquitter le service pénible et gratuit des corvées personnelles.. et on a cru qu'il n'était plus rien du aux seigneurs.,.
cette erreur se dissipera sans doute, à mesure que le calme renaitra dans les esprits ; il était difficile, on le conçoit, que les ressorts de la machine féodale, la plupart attachés à l'opinion et n'ayant par conséquent qu'une existence morale, fussent distinctement aperçus par tous les hommes ; …..
A Paris, ces événements de la grande peur qui avaient secoué la France après le 14 juillet, firent voter par l'Assemblée nationale constituante, l'abolition du régime féodal, la suppression de tous les privilèges. Certains nobles donnèrent l'exemple dans la fameuse nuit du 4 aout et furent les premiers à proposer cette suppression. Droits féodaux, justices seigneuriales, jurandes et maîtrises, vénalité des offices, privilèges de naissance, toute l'organisation de l'ancien régime fut balayée par ce vote généreux.
Le marquis Costa avait espéré, qu'après la cessation des troubles dans les campagnes, l'Assemblée constituante reviendrait sur son vote. Il ne pouvait admettre que ces chers droits féodaux, base de la fortune des nobles et pour lequels il avait si longuement et si durement bataillé, fussent supprimés par un simple vote ! Cela lui paraissait un paradoxe inconcevable ! Il écrivait le 8 octobre 1789, à Vincent :
« A la tournure de votre abominable Assemblée nationale, qui devait tant respecter les propriétés, il s'annonce un avenir bien triste pour ceux qui en ont. On espérait une rétraction du terrible arrêté du 4 août, et toute l'Europe, qui a les yeux ouverts sur ces importantes décisions, voit avec indignation que le premier pas de cette Assemblée nationale est un acte d'une criante oppression et d'une tyrannie inouïe qui bouleverse tout, ruine presque toutes les propriétés sans aucun but, puisque les besoins de l'Etat sont oubliés. Malgré les sages et modestes observations du roi, cette fougueuse assemblée y persiste jusqu'au bout. Cela est scandaleux, affreux, désolant. Le parti d'un sacrifice de bonne volonté d'une partie du capital et du mobilier et du revenu est une ressource bien grande et momentanée ; mais le peu de son produit va effrayer pour l'avenir et sûrement, après avoir épuisé les sujets, n'empêchera pas la banqueroute en la retardant. Ce sont les suites funestes de l'esprit de désordre, d'insubordination qui a rompu tous les rapports et bouleversé toutes les hiérarchies. C'est une fatale et funeste révolution dans l'Etat au moral et au physique ».
Arrêtés du 4 aout 1789 relatifs à l'abolition du régime féodal.
Abolition du franc fief.
Décret du 15 mars 1790;
T l T R E 1er. 1 Des effets généraux de la destruction du régime féodal.
Suppression des droits honorifiques, de la noblesse héréditaire, des titres, livrées et armoiries, de la foi et hommage, forme des reconnaissances à fournir par les tenanciers. Suppression des aveux et dénombrements, terriers, gages, pleiges, etc, des saisies féodales et censuelles. Prescription quant au principal et arrérages des droits ci-devant féodaux. Effet des lettres de ratification sur lesdits droits. Suppression du retrait féodal et censuel, du droit de prélation et de retenue seigneuriale, du droit d'ainesse et masculinité. Nouvelle forme des partages des fiefs.
Exceptions à ce sujet. Suppression de la garde royale seigneuriale et du déport de minorité. Formalité du nantissement ce que c'est, ce qui est changé à cet égard.
T I T R E II
Des droits seigneuriaux supprimés sans indemnité.
Suppression de la main-morte, des droits de servitude, taille, et corvées personnelles, etc,, diverses dénominations de ces droits, exceptions. Des droits de péage, minage etc. exceptions. — Droits de voierie —Décrets sur la voierie, et les plantations d'arbres sur les chemins publics. Batardise. Enfans trouva. Epaves, etc. fiefs d'Alsace
T I T R E III.
Des droits, seigneuriaux rachetalles.
Redevances seigneuriales et droits casuels, leurs diverses dénominations, leur perception actuelle, — cas où les archives des seigneurs auraient été incendiées ou pillées, où ils auraient été forcés de renoncer à leurs droits , temps et forme pour se pourvoir.
Décret du 3 mai 1790, contenant 58 articles.
Principes du mode et du taux du rachat des droits seigneuriaux déclarés rachetables.
Faculté du rachat. Maniéré de l'exercer en divers cas. Redevances solidaires. Traités faits de gré à gré.
Qui peut les faire. Quelles personnes ne le peuvent. …..
De la destruction du régime féodal, ou Commentaires sur les nouvelles lois relatives aux droits ci-devant féodaux et censuels, à leur rachat et liquidation ,... par M. Garnier,...
Société savoisienne d'histoire et d'archéologie
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