Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
PHystorique- Les Portes du Temps
24 décembre 2023

Noël 1367 au pays de Jeanne d’Arc - Chronique du Réveillon, L’oie de Noël

Noël 1367 au pays de Jeanne d’Arc - Chronique du Réveillon, L’oie de Noël

En 1367, le roi Charles V se rend à Gombervaux pour la signature du traité de Vaucouleurs, qui rattache la ville au domaine royal de manière officielle.

 L’oie de Noël ! Je vous la présente, escortée de ses renommées légendaires, enguirlandée des stances des vieux poètes ! Horace l’a chantée ! et, Charlemagne, dans ses Capitulaires, a recommandé à ses peuples l’usage de sa chair savoureuse.

Noël ! Noël !

Pendant que les joyeux carillons appellent les foules dans les chapelles mystérieuses, les cuisines retentissent du concert des lèchefrites, et l’oie pansue, gonflée de marrons, tourne à la broche des rôtissoires dans la claire flambée des foyers.

 Noël ! Noël !

La voilà rôtie ! Elle apparaît sur la table au milieu des vapeurs odorantes, dans la scintillation rubiconde des cristaux remplis d’un vieux cru bourguignon.

 Noël ! Noël !

………….

En ce temps-là vivait à Gombervaux, le duc Jean de Lorraine qu'un traité venait de faire l’allié de Charles V.

C’était en 1367, vers Noël.

A l’occasion de ce traité célèbre, eut lieu chez le duc, sire de Gombervaux, de Vaucouleurs et autres lieux, un festin fumeux où Guillaume Tirel dit Taillevent, maître- queux de Charles V, s’illustra par ses combinaisons gastronomiques

 De précieux documents ayant appartenu à l’antique maison de Gombervaux me permettent de donner le menu de ce ban quel moyenâgeux qui marque une des premières manifestations de l’Art culinaire eu France et qui constitue une curiosité peu banale de l’Histoire de la Science de gueule, comme disait Montaigne :

Bancquet du Roy Charles V et du duc Jehan de Lorraine

Es premier mestz

Venoison de sanglier en souppes

Sabourot de poussins

Oyes rosties

Second mestz

Gines, Hayrons, Faisans, Paons

Trimolecte de Perdris

Tiers mestz

Most Jehan, Pâté de merles

Pyjons au sucre

Le Quart mestz

Dariole de cresmes friets

Pasté de poyres

Quint mestz

Amendes. Noysilles. Poyres crues

La chronique rapporte que le roi manqea tout son saoul. Je veux bien le croire.

De beaux pages, suivis d’un varlet diligent, font couler l’hypocras data les hanaps d’argent. Les maîtres-queux servant des sangliers entiers, Des cerfs et des hérons, des faisans, des ramiers, Précèdent au Trouvère au pourpoint de velours ;

(Malheureusement, Taillevent est muet sur le chapitre de la boisson hypocras au miel, vins de Foug et de Bar, sirops, eau-de-vie épicée, eau d'or emplirent plus d'une fois les hanaps des chevaliers; et Geoffroy de Nancy, dame Agnès de Pulligny, tout fiers du grand honneur qui leur était fait, eurent fort à faire pour veiller à la belle ordonnance de ce festin vraiment royal.)

 

 Puis viennent des Jongleurs, Pastoureis et Pasiours, Et les joueurs de luths, de hautbois de buccines. Harmonisent leurs chants aux accords des doulcines.

 Comme on le voit personne ne s'embêtait à Gombervaux la nuit de Noël 1367 sous le plafond de la salle des fêtes du donjon aux armes de la famille de Lorraine qui portait d'argent à la croix engrelée de gueules.

 Vers minuit Taillevent parut en personne portant l’oie de la table royale.

Le roi, le duc Jean et toute l'assistance se levèrent dans un bruissement de brocart, dans un cliquetis d’armes, sans un mot, les yeux sur la volaille, graves comme s’ils eussent assisté, près des fonts baptismaux, à la présentation de l’enfant royal.

Noël ! Noël !

 

Alors les chœurs entonnèrent cet exquis Noël que Bizet a placé dans son Arlésienne:

« Ce matin j’ai rencontré le train

De trois grands rois s’eu allant eu voyage »

La fête bat son plein.

Les menants, les rustauds

« S’ébattent librement à l’abri des préaux

L’écho de leurs clameurs par la nuit des vallons,

Retentit, pois n’éteint dans le lointain des monts »

 

Un conte de Noël ! C'est très bien, me direz-vous, mais la recette?

La voici:

 « Oyez, et préparez selon les rites culinaires, l'oie rôtie farcie de marrons : votre palmipède, choisi parmi les plais jeunes et les plus gras, sera vidé et flambé.

 Avec le foie, le lard, la graisse de la volaille et les fines herbes, le tout finement haché, aromatisé de muscade râpée, vous ferez une farce que vous salerez et poivrerez modérément; mélangez y 150 grammes de chair à saucisse, mouillée d'un petit verre de cognac.

Remplissez l’oie de cette farce; ajoutez y des marrons rôtis, soigneusement épluchés- ; troussez et cousez-là, Embrochez, assaisonnez et faites cuire en arrosant souvent.

 Au moment de servir, parfumez le rôti au jus de citron »

Telle est la recette de Taillevent qui est devenue celle de toutes les bonnes cuisinières.

Le dindon ? me direz-vous. Et je vous répondrai comme Kipling: ceci est une autre histoire.

 Ayant choisi l’an 1367, je ne puis parler du dindon qui ne figurait pas au menu de Gombervaux : l’importation des dindons en France datant seulement de 1450.

C’est à Jacques Cœur qu’on doit le dindon tout comme le rétablissement des finances de la France, sous Charles VII, et c’est aux Jésuites que revient l’honneur d’avoir doté nos basses-cours de ce succulent volatile, les Pères de Bourges ayant élevé dans leurs terres des rives de l’Arnon le premier troupeau de dindons éclos en terre de France.

L’oie servie, il ne reste plus qu’à la manger.

Mangez sans précipitation suivant le précepte de l’Ecclésiastique : Ne comprimaris in convivio.

Buvez peu à la fois, par petits coups, en cassant le boire, suivant l’heureuse expression du marquis de Cussy.

N’attendez pas, en cette heureuse nuit de Noël, d’entrer en digestion pour penser aux apuvres, et faites-leur distribuer le surplus du festin, le surplus des vins.

Et dans la béatitude obtenue, par la bonne chère et la conscience du devoir accompli, dites dans vos cœur : « Mon Dieu, je vous remercie d’avoir fait l’oie…..et les marrons, daignez les conserver et les protéger des destructeurs, j’ai bien soupé, mais je n’ai pas le pouvoir de rassasier tout le monde ; vous pouvez tout, dans votre bonté infinie, ôtez l’appétit à ceux qui n’ont pas de quoi mangers. »

….

C’est fini ! Les seigneurs descendent les coteaux

Par les sentiers fleuris venant de Gonbervaux,

Ils s’en vont chevauchant le vallon sinueux,

Dans la blonde clarté du matin lumineux.

Roger Laval

 

 

 

4 Juillet 1365 LE ROI CHARLES V A VAUCOULEURS<==.... ....==>  6 janvier 1412 : Naissance de Jeanne d’Arc à Domrémy

....==> Domination des Anglais en France.— Traité de Troyes signé en 1420 entre Henri V d'Angleterre et Charles VI de France

 

Publicité
Commentaires
PHystorique- Les Portes du Temps
Publicité
Publicité