L’évêque de Poitiers Guillaume V échange le château d'Harcourt de Chauvigny à Charles d'Anjou, vicomte de Châtellerault

Chauvigny constituait le plus important fief épiscopal, et sa possession seule aurait suffi à mettre les évêques de Poitiers au range des grands seigneurs de la province.

Mais sur le promontoire commandant le passage pas moins de quatre châteaux s'étaient accrochés dès le haut moyen âge :

Le château épiscopal, château d'Harcourt, château de Mauléon, château de Gouzon.

 

Le principal était celui des évêques ; cependant malgré les nécessaires ménagements entre ces copropriétaires de la butte, des difficultés ne pouvaient manquer de se produire entre les châteaux.

Les châteaux de Mauléon et de Gouzon avaient déjà été acquis par les évêques de Poitiers.

 

 

Guillaume de Charpaignes s'employa à éliminer le vicomte de Châtellerault dont le donjon jouxtait celui des évêques.

 

 Il dut longuement négocier, et dépensa plus de 1000 livres au paiement de ceux qui « traictèrent la besoigne ».

 Jean VII d'Harcourt venait, le 17 décembre 1445, d'échanger avec Charles d'Anjou, sa vicomté de Châtellerault pour la baronnie de la Ferté-Bernard ; le 27 mars 1447 il vendit également à Charles d'Anjou, pour 6000 écus d'or comptant, « le chastel, terres et seigneuries d'Arcourt assis à Chauvigny » .

Charles d'Anjou n'avait aucune attache de tradition avec Chauvigny, et il ne se refusa pas à un échange qui lui permettait de regrouper ses terres autour de Châtellerault.  Lorsque la vicomté est transmise à un membre de la famille royale, Châtellerault devient un duché et le château une ‘’demeure royale’’.

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Le contrat d'échange fut passé le 21 mai 1447, l'évêque étant assisté par maître Jean Pelant, chantre et chanoine de l'église cathédrale, représentant le chapitre ; Jean d'Harcourt usufruitier du château, avait donné son consentement, et Charles Ier d'Anjou ratifia le traité le 16 août 1447.

Guillaume de Charpaignes acquérait le château d'Harcourt, — « qui vault de revenue environ VIIC frans » —, et les terres de Conflans et de la Pérate. Il versait comptant 4000 écus, et remettait au vicomte de Châtellerault » certaine terre qui ne valoit environ que IIe frans », à savoir Thuré, Saint-Christophe et la Tour-d'Oiré.

Signalons toutefois que la partie adverse contesta absolument l'utilité de cette acquisition, affirmant que le châteaux d'Arcourt — qu'elle déclarait s'appeler en réalité « le chastel Achart » — n'était qu'un « vieil chastel ruineux tenu en plein fief lige de l'évesque » et de mince revenu.

 

 

 

L’évêque de Poitiers Guillaume V échange le château d'Harcourt de Chauvigny à Charles d'Anjou, vicomte de Châtellerault

 

Lettres portant union à la vicomte de Châtellerault, sous un seul hommage, des terres et seigneuries de Thuré, Saint-Christophe et la Tour-d'Oiré, cédées par l’évêque de Poitiers Guillaume V Gouge de Charpagnes à Charles d'Anjou (Charles V du Maine), vicomte de Châtellerault, en échange du château d'Harcourt à Chauvigny. (JJ. 178, no 206, fol. 1l8 vo.)

Juin 1447.

Charles, etc. Savoir faisons, etc., nous avoir receue l’umbles supplicacion de nostre très chier et très ainé frère et cousin Charles -d'Anjou, conte du Mayne et viconte de Chastelterault  (1) contenant que, combien que nostre amé et feal conseillier l'evesque de Poictiers, auquel à cause de son temporel de son dit eveschié compettoient et appartenoient les terres et seigneuries de Thuré, de Saint Christofle et la Tour d'Oiré, estans en la viconté de Chastellerault, lui ait de nouvel cède, transporté et délaissié à tousjours mès perpetuelment, pour lui, ses hoirs et successeurs et ceulx qui de lui auront cause ou temps avenir, lesdictes terres et seigneuries de Thuré, de Saint Christofle et la Tour d'Oiré ; moyennant lequel transport nostre dit frère et cousin a pareillement cedé, transporté et delaissié à nostre dit conseillier et à ses successeurs, evesques du dit lieu de Poictiers, le chastel de Harecourt lez Chauvigny, appartenant à icellui nostre frère et cousin, et tenu en fief de nostre dit conseiller, à cause de son dit chastel de Chauvigny (1) ;  neantmoins nostre dit frère et cousin doubte que, soubz umbre de ce que les dictes terres et seigneuries de Thuré, de Saint Christofle et la Tour d'Oiré, qui paravant le dit traictié estoient admorties et le propre heritaige d'icellui nostre conseiller et de ses successeurs evesques, sont de present hors de la main de nostre dit conseiller, qui les a transportées comme dit est, on le vueille contraindre à nous faire d'icelles terres et seigneuries foy et hommaige à part, oultre celui qui à cause d'icelle viconté de Chastelleraut nous est deu, qui seroit en son grant prejudice et dommaige, si comme il dit.

 Requerant humblement qu'il nous plaise lui octroyer que les dictes terres et seigneuries de Thuré, Saint Christofle et la Tour d'Oiré, qui sont assises et situées en et au dedans de ladicte viconté de Chastelleraut, comme dit est, il puisse tenir de nous, soubz les foy et hommaige qu'il nous est tenu faire à cause de sa dicte viconté de Chastelleraut, et icelles terres et seigneuries joindre et unir avec icelle sa viconté, tant en ressort que juridicion, sans ce qu'il ou ses successeurs en soyent tenuz faire hommaige à part, et sur ce lui impartir nostre grace.

Pour quoy nous, ces choses considerées et les grans, notables et agréables services que nostre dit frère et cousin nous a faix en plusieurs et diverses manières, le temps passé, fait encores de jour en jour, et esperons que plus face ou temps avenir, aussi la grant proximité de lignaige en quoy il nous attient, à ieellui nostre frère et cousin, qui sur ce nous a requis, avons octroyé et octroyons, de grace especial, plaine puissance et auctorité royal, par ces presentes, que les dictes terres et seigneuries de Thuré, de Saint Christofle et la Tour d'Oiré, il et ses diz hoirs et successeurs ayent et tiennent doresenavant soubz l'ommaige que nostre dit frère et cousin nous est tenu faire pour raison de sa dicte viconté de Chastellerault, et icelles terres et seigneuries avons joinctes et unies, joingnons et unissons par ces dictes presentes à la dicte viconté et soubz le ressort et hommaige d'icelle, pour estre ung mesme fief, sans qu'il ne aucun de ses diz hoirs, successeurs et autres qui de lui auront cause ou temps avenir, soient tenuz d'en faire hommaige, à part, pourveu que les dictes terres de Thuré, Saint Christofle et de la Tour d'Oiré courront en rachat envers nous, comme fait la dicte viconté, quant le cas y escherra.

 Si donnons en mandement par ces mesmes presentes à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans nostre Parlement, gens de noz comptes et tresoriers, au seneschal de Poictou et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans, presens et avenir, et à chascun d'eulx, si comme à lui appartendra, que de noz presente grace et octroy facent, seuffrent et laissent nostredit frère et cousin, ensemble ses diz hoirs, successeurs et çeulx qui de lui auront cause, joir et user plainement et paisiblement, sans en ce leur mettre ou donner, ne souffrir estre mis ou donné aucun destourbier ou empeschement, ores ne pour le temps avenir, ains, se mis ou donné leur avoit esté ou estoit, le reparent et mettent ou facent reparer et mettre incontinant et sans delay au premier estat et deu.

Et afin, etc., nous avons, etc. Sauf en autres choses, etc.

Donné au Bois sire Amé, ou mois de juing l'an de grace mil cccc.xLvn, et de nostre règne le xxv

Ainsi signé Par le roy en son conseil. E. Chevalier.Visa. Contenter.

 

 

 

Recueil des documents concernant le Poitou contenus dans les registres de la chancellerie de France, publiés par Paul Guérin,...

 

 

 

 

  Château d'Angles-sur-l'Anglin - Guillaume Gouge de Charpaignes Evêque de Poitiers (1441-1448) par Robert FAVREAU <==

 

 


 

Liste des ÉVÊQUES DE POITIERS BARONS DE CHAUVIGNY.

Peu après le fameux An mille, au moment où se forma la Féodalité, les maîtres de Chauvigny étaient les évêques de Poitiers qui s'installèrent dans le château baronnial par la force dominante de l'Eglise, arrivée à son apogée.

 

  1. Charles d'Anjou, comte, du Maine et de Mortain, beau-frère de Charles VII, avait acquis la vicomté de Châtellerault depuis peu de temps. Les auteurs ne sont pas d'accord sur, la date ni sur les conditions de ce transport. La Roque dit, d'après Le Féron, que Jean VII, comté d'Harcourt (mort en 1452. à l'âge de quatre-vingt-deux ans), vendit Châtellerault au comte du Maine « environ l'an 1440 », sans autre renseignement. (Généalogie de la maison d'Harcourt, in-fol. t. I,p. 411.)

Le P. Anselme prétend que l'acquisition comprenait, avec la vicomté de Châtellerault, la seigneurie de Mézières-en-Brenne, le comté d'Aumale, etc., que le comte d'Harcourt échangea, par contrat du 17 décembre 1445, contre la Ferté-Bernard et autres terres, avec Chartes IV, comte, du Maine, roi de Naples, de Sicile et de Jérusalem; le fils de Charles IV d'Anjou, comte de Mortain et du Maine (Hist. généal., t. I, p. 234), ce qui est une erreur manifeste.

 Par contre, la date du 17 décembre 1445 parait assez exacte, car on sait de bonne source que Charles d'Anjou fit hommage de Châtellerault à Charles VII, comme comte de Poitou, le 26 janvier 1446 n. s. et rendit son aveu le 3 février suivant.

 

 

Un inventaire officiel des titres du comte du, Maine relatifs à la vicomté de Châtellerault, dressé les 5, 6 et 7 janvier 1482, en vertu de lettres de Louis XI données à Thouars, le 31 décembre 1481, et déposé à la Chambre des comptes, contient ces renseignements et plusieurs autres qui peuvent servir à éclairer la question.

La première pièce inventoriée est ainsi désignée: «  Instrument de certains appointemens pourparlés entre MM. les comtes du Maine et d'Harcourt en la presence de M. Renault de Drenezay (du Dresnay), chevalier, et autres, donné à Chastellerault, le xxv 'janvier 1445 » (1446 n. s).

S'agit-il du contrat d'acquisition ou d'un règlement de points accessoires ? Vient ensuite un aveu de Jeanne, bâtarde d'Harcourt, qui confesse tenir, sa vie durant, de M. le comte du Maine, seigneur et propriétaire de la vicomté de Châtellerault, les terres et seigneuries de Mézières-en-Brenne et de l'Isle-Savary, aveu daté du 11 juillet 1446.

Jean VII, comte d'Harcourt, avait alors soixante-quinze ans.

 Son fils Jean VIII avait été tué à la bataille de Verneuil (17 août 1424), et il n'avait d'autres héritiers que deux filles, la première, Marie, comtesse d'Aumale, mariée à Antoine de Lorraine, comte de Vaudémont, et la seconde, Jeanne, qui épousa d'abord Jean, sire de Rieux, puis, l'an 1434, Bertrand de Dinan, sr de Châteaubriant.

Celles-ci se considérèrent comme lésées par le contrat de vente ou d'échange de la vicomté de Châtellerault et se pourvurent, pour en obtenir l'annulation ou au moins pour en faire modifier les conditions.

 

 

Cette contestation fut réglée par un accord amiable passé à Chinon, le 21 mai 1449, contenant l'appointement fait entre le comte du Maine, présent en personne, d'une part, Jean de Lorraine, en son nom et comme fondé de procuration des comte et comtesse de Vaudémont, ses père et mère, l'évêque de Rennes, représentant Mme de Rieux, et Guillaume Boyn, procureur du comte d'Harcourt .

La cote d'inventaire n'indique rien de plus, mais on voit par deux quittances qui figurent à la suite, l'une du 30 septembre 1450, l'autre du 28 février 1452 n. s., que Charles d'Anjou, par la transaction de Chinon, s'était engagé à payer à chacune des deux filles de Jean d'Harcourt la somme de 20.000 écus d'or.

Le château et la terre de Nouvion en Thiérache avait été baillée comme garantie du paiement à effectuer au profit du comte et de la comtesse de Vaudémont. (Arc.  nat. P 1340, cote 498.)

Dès lors le comte du Maine jouit sans conteste de la vicomté de Châtellerault.

Dans un acte du 12 mai 1454, il s'intitule comte du Maine, de Guise, de Mortain et de Gien, et vicomte de Châtellerault ; c'est une déclaration portant que la contribution que le chapitre de Saint-Hilaire de Poitiers lui avait accordée dans les paroisses d'Asnieres et d'Ouzilly, pour lui faire plaisir, ne tirerait point à conséquence pour l'avenir. (Coll. Dom Fonteneau, t. XII, p: 81.)

Charles d'Anjou mourut le 10 avril 1473.

Son fils Charles IV, comte du Maine, roi de Sicile; de Naples et de Jérusalem, hérita de la vicomté de Châtellerault et en jouit jusqu'à son décès, survenu le 11décembre 1481.

Comme il avait institué Louis XI son héritier universel, Châtellerault fut réuni au domaine de la couronne.

Pierre de Rohan, seigneur de Gyé, maréchal de France, chargé de la liquidation de cette succession, reçut les titres qui se trouvaient au Mans et en fit dresser l'inventaire dont il vient d'être question.

Cependant Jean d'Armagnac, duc de Nemours, et Louis d'Armagnac, comte de la Marche, réclamèrent l'héritage du roi de Sicile, leur oncle maternel; ils furent mis provisoirement en possession de Châtellerault, en 1483, et Charles VIII leur en fit la restitution expresse par lettres du 29 mars 1491.