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PHystorique- Les Portes du Temps
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9 mai 2024

1er JANVIER 1259 Testament de Simon de Montfort earl of Leicester

Carcassonne 1er JANVIER 1259 Testament de Simon de Montfort earl of Leicester

L'original de ce curieux document se trouve à la Bibliothèque nationale (n° 1188 de Clairembault, ancien 78 du Saint-Esprit), dans un volume qui contient plusieurs autres actes originaux et les copies d'un assez grand nombre de pièces concernant le comte de Leicester, ses fils, et en général la famille des Montfort.

Il offre plusieurs particularités intéressantes. La mention de l' « eveesque de Nicole, Richard dans ce document daté x le jor de la Circoncision Nostre Segneur en l'an Nostre Segneur millésime CC° Lme viij », prouve que le style français de Pâques était employé dans la chancellerie du comte de Leicester à l'exclusion du style alors le plus commun en Angleterre, selon lequel l'année commençait à Noël. Richard de Gravesend, évêque de Lincoln, fut en effet consacré à Canterbury le 3 novembre 1258 (2).

Le comte de Leicester désigne pour servir de conseiller à sa femme l'évêque Richard et frère Adam de Marsh. Dans son introduction aux lettres de ce dernier personnage (3), M. Brewer pense qu'Adam mourut en 1258 c'est une erreur. Le testament de Simon de Montfort prouve qu'il vivait encore le janvier 1259.

Mais ce qui me semble encore plus digne de remarque, c'est le fait que ce testament a été écrit de la main même de Henri, fils aîné du comte. Il le dit lui-même dans l'avant-dernière phrase de l’acte :

 « E je, Henris, fiuz au devant dit Simon, ai escrites ces lettres de ma mein…. ».

Les autographes sont rares au moyen âge; nous en possédons ici un bien authentique. L'écriture est ferme et régulière, mais sensiblement différente du type ordinaire de l'écriture des chartes à la même époque. Notons aussi certaines particularités orthographiques, telles que les différentes formes du mot pouvoir poer et puer, poair et puair, du mot je veux veil, vuel, vueil, voeil, du mot tout tuz, toz, tuit, tuot (comp. uo pour ou, cuot pour cout), etc. Une telle incertitude dans la notation de certains sons ne se rencontrerait sans doute pas sous la plume d'un clerc employé dans la chancellerie de Simon de Montfort.

En dehors de ces menus détails, le testament du comte de Leicester n'apporte aucun fait nouveau à l'histoire générale. On peut y relever cependant certains traits qui honorent le caractère du comte. Il veut que toutes ses dettes soient payées; les créanciers justifieront leurs créances soit en représentant des titres authentiques, soit en produisant des témoins; mais le comte veut que l'on croie aisément les gens quoi qu'il en coûte (ke que il cuot), « kar, dit-il, je ne vuel demorer an dete ne an supecon de dete vers nuli ». Plus loin, il songe à « la povre gent » de sa terre, et prie la comtesse sa femme qu'ils soient « pourvus du sien », et particulièrement les fermiers, dont il avait pris maintes fois les biens. On reconnaît dans l'expression de ces pieux sentiments l'ami et le correspondant d'Adam de Marsh et de Robert Grossetête, evêque de Lincoln.

Ch. BEMONT.

 

Au nun du Pere, e du Fil et du Seint-Esperit. Je, Simon de Munfort, cuens de Leycestre, faz mon testament, e comant et devis ke li tort ke je e fet en quel maniere, uo an quel pais ke ço sait ke l'en puisse savoir, sayent amendé, e mes detes saient paiées ausi par tuot, e noméement les detes des servises ke l'en m'a fez saient rendues a ceus qui m'unt servi, a qui je sui tenuz por leur servise, kar ce tyen-je a la greygneur dete e totes ces choses saient fetes selunc ce ke l'en mieuz les porra savoir ou par mes lettres ou par temoinz ; e veil ke asez legierement saient les genz creuz qui riens me dernanderunt, por qaie ke il dient teles resuns par kaie ilsanble mieux ke il dient voir ke mançonge, kar je veil ke la ou il aura aucune dote, ke ele sait bien fete clere par devers moie, ke que il cuot, si ke je an saie bien delivres, kar je ne vuel demorer an dete ne an supeçun de dete vers nuli.

E totes ces choses qui apartienent a mon testament, je les, e devis a fere, e en charche la cuntesse ma fame (4), e faz de lui mon aturné, e lui pri e requier é comant an la faie ke ele me dait, ke ele le face en tele maniere corne bone dame le dait faire pur son segneur qui en lui se fie; e ce ke ele fera de ces choses, face par le cunseil le eveesque de Nicole Richart, e de frère Adan des Marais (5).

 E se elle morayt avant ke ces choses fusent acunplie(e)s, je faz mon aturné de fere ou de parfere ce ke ele n'aurait fet, de Henri mon fyuz (6), en tel manyere ke tut ce ke il an fera face par le conseil monseur Piere de Monforti (7), e monseur Hue le Despansier (8), e monseur Ernaut du Bois (9), ne en nul maniere riens ne face de ce, se par le cunseil nun de ces trais, se il en nule maniere les i puet avoir, e se il ne puet toz, ne face riens sanz les deus ou sanz l'un, se plus n'en puet avoir.

E par desus tuz voeil e comant ke il craie le cunseil aus devant diz le eveesque et frere Aden, e en nule maniere ne sayt riens fet sanz le conseil de ces deus, se il vivent, e, se li uns morait, de celi qui demurra.

E se Hanris morait avant ke cete chose fut tote parfete, je voeil e devis ke icic (sic) traie (sic) qui sunt desus nomé, P., H., E., aient autel poer cume Henris eust, se il vesquit.

E se il tuit traie (ms. tarie) n'i poeient estre ou por mort ou por grief esoyne, les deus ou l'un aient ou ait le puair ke tuz trais aurient s'il estaient ensanble, mes ke tutes choses saient fetes par le conseil e l'ordenement des deus desus diz, le eveesque e frere Aden, ou de l'un d'eus, se li autres morait, ou de leur atornez a ceste chose fere se il moraient, les qieus atornez je veil qu'i aient leur puer a ceste chose fere.

Je les, e ator toz mes muebles, e toz mes chatieus, e totes mes gardes, e ce ke a moie apartient de la valuue de ma terre treque a l'aage de mun ayr, selounc l'otraie qe li rais m'en a fet, si come l'en puet voeir en ses lettres (10), e ce ke demorra de ces chastieus e de totes ces choses ke je les por fer mon devis, quant ce sera acumpli qui est ci devisé desus, ou ke l'en trovera par epres ou epecial comandemant ke je en aie fet ou face uncore ou par lettres ou en autre certeine maniere, je veil ke tot le remenant sait gardé par l'ordenement la cuntesse ma fame e par sa volenté.

E ele par le conseil aus devant diz le eveesque et frere Adan, premierement purvaie de ço ke la povre gent de ma terre saient porveu du mien, si ke il ne saient an perilieuse defaute, e nomement les gaaneuors de qui biens je e eu meinte foyz, e je dot bien k'aucune partie mal (sic) (11), e deu remenant face et devist a fere ce ke ele verra ke mieuz sait.

E je veil ke ele ait plein poair ke tot ce ke ele en fera ou ordonera ou devisera a fere apres li par le conseil de ces deus preudes homes devant dyz ou de l'un, sait ferm e estable ausi cume se je le avoie fet.

E il me senble ke se il i avait chose de remenant qui geres de lieu peut tenir a nos enfanz, boen serait ke la mere leur fait selonc ce ke ele quiderait ke bon fut, si ke par ce leur fut, en leur venir a terre, 1’achesun detorbée de grever leur genz; ce di-je ou por tuz ou por une partie ou por l'un, se l'en vaait ke il convenist ke il fust charcyz des autres.

E je pri mon chier pere Richart, par le grace de Dieu eveesque de Nicole, ke il, por greneur seurté de ceste chose, mete sun seel an cest escrit (12); e je, por ce meesmes, i met le mien.

E je, Henris fiuz au devant dit Simon, ai escrites ces lettres de ma mein, e otraie e promet a mon segneur mon pere ke je a bone faie e a tot mon poer tendré ce ke est ci escrit.

Ce fu fet le jor de la Circuncision Nostre Segneur, en l'an Nostre Segneur millésime CCe vjij (13) ; en l'amur de Nostre Segneur Jesu Christ. Amen.

 

==> Amaury VII comte de Montfort et connétable de France (1192 – 1241)

==> 1211 Croisade des Albigeois, Savari de Mauléon à la rescousse du comte de Toulouse Raimond VI

==> 1258 - 1259 - Le Traité de Paris entre Louis IX et Henri III Plantagenet

 

 

 

Janvier 1211, Narbonne. Hommage de Simon de Montfort à Pierre II, roi d'Aragon, pour la ville de Carcassonne. « Comes, flexis ante Regem genibus, suum hominium humiliter offerebat. Tandem Rex, victus precibus, acquievit et recepit Comitem in hominem de civitate Carcassone, ut illam Comes civitatem teneret a Rege. »

 

«  Simon de Montfort, comte de Leycester, vite comte de Béziers et de Carcassonne.

Le Seigneur ayant livré entre mes mains les terres des hérétiques, peuple incrédule, c'est-à-dire ce qu'il a jugé à propos de leur enlever par le ministère des croisés ses serviteurs, j'ai accepté humblement et dévotement cette charge et cette administration, dans la confiance de son  secours, à l'instance, tant des barons de l'armée, que du seigneur légat, et des prélats qui étaient présents »

Simon de Montfort qui avait reçu de la conquête et de la donation de 1211 le titre de vicomte de Béziers et de Carcassonne , des conciles de Montpellier et de Latran , ainsi que du pape Innocent III et de Philippe-Auguste , en 1214, le titre de comte de Toulouse, mourut en 1218 sous les murs de cette ville fidèle à ses princes.

 

Son fils aîné, Amaury de Montfort, ne put soutenir la lutte contre les forces du comte Raymond, et, vers l'an 1222, il déclara remettre entre les mains du roi de France toutes les terres confisquées sur les Albigeois et leurs adhérents , heureux de recevoir en échange la charge de connétable. La cession de 1222, faite en faveur du fils de Philippe-Auguste, fut confirmée en 1229 au profit du roi Louis IX, et de là date la réunion de l'Albigeois à la couronne.

 

 

(1). Ces originaux sont les suivants : 1° Nomination de Simon de Montfort au gouvernement de Gascogne pour sept ans (ler mai 1248) ; 2° Règlement de comptes entre Simon de Montfort et son petit-neveu Esquivat de Chabanais, comte de Bigorre (3 juin 1253); 3° Concession du comté de Chester par le roi Henri III à Simon de Montfort (20 mars 1265) ; 4° Paix conclue entre Simon de Montfort jeune et le prince Édouard (15 janv. 1266); 5° Constatation d'alibi délivrée par l'évêque de Padoue, l'archiprêtre et le chapitre, le prieur et le couvent des Prêcheurs, le gardien et le couvent des Mineurs, les docteurs et écoliers de l'Université de Padoue, en faveur d'Amaury de Montfort accusé de complicité dans le meurtre de Henri d'Allemagne (17 avril 1271) ; 6° Lettre de Raimond Roger, doyen du Puy, au roi Édouard, pour la mise en liberté d'Amaury de Montfort (avril 1282) ; 7° Cinq pièces concernant Amaury de, Montfort et les héritiers de Guillaume « de Basquervilla. »

 

(2). Mat. Paris. Ed. de Wats, 1640, p. 979. On pourrait songer aussi au style du 25 mars mais une charte datée de Nonancourt « die mercurii proxima ante festum d. resurrectionis » prouve qu'il faut admettre le style de Pâques. Cette charte en effet est postérieure à deux autres des 22 et 23 nov. 1258 nous sommes donc en 1259, année où Pâques tombe le 13 avril la charte est donc du 9 avril, ce qui exclut l'emploi du style du 25 mars. Ces trois chartes se retrouvent en copie dans le volume susdit de Clairembault.

 

(3)..Monumenta franciscana, dans la collection du Maître des Rôles.

 

(4). Aliénore, fille du roi Jean Sans Terre et sœur de Henri III roi d'Angleterre.

Née vers l'an 1212, elle avait épousé en 1224 Guillaume, comte de Pembroke, qui mourut le 15 avril 1231. Simon de Montfort l'épousa secrètement le 7 janvier 1238. Elle mourut en 1275 dans le couvent des Sœurs de Saint-Dominique, près de Montargis (Voy. Green, Lifes of the princesses of England, vol. II).

 

(5). Moine franciscain et docteur en théologie. L'archevêque de Canterbury le nomma à la place de l'évêque élu d'Ely dont il cassa l'élection, mais appel ayant été interjeté devant le pape, l'élection de l'évêque fut confirmée, et la nomination d'Adam annulée (Voy. Nicolas Trivet, dans le Spicilége de Dachery, 111, 195).

 

(6). Fils ainé du comte de Leicester et d'Aliénore; il naquit le 28 nov. 1238 à Kenilworth, et fut tué aux côtés de son père à la bataille d'Evesham le 4 août 1265.

 

 (7). Un des plus fidèles partisans de Simon de Montfort. Voy. Dugdale, Baronage, au mot Montfort. Il n'existait entre Simon et Pierre de Montfort aucun degré de parenté.

 

(8). Autre partisan dévoué de Simon de Montfort qui le fit nommer justicier d'Angleterre en 1264. Il fut tué à la bataille d'Evesham.

 

(9). Je n'ai pas rencontré ce nom ailleurs.

 

(10). Par un acte du 20 février 1257, le roi autorisa le comte à disposer, dans son testament, de tous ses biens et revenus. Royal letters, pub. par Shirley, II, 392.

 

 (11). Il y a peut-être ici plusieurs mots passés dans l'original.

 

(12). L'original porte encore un fragment du sceau de l'évêque de Lincoln, il ne reste rien de celui de Simon de Montfort.

 

(13). Ce testament fut fait en France, où le comte de Leicester avait été envoyé par le roi d'Angleterre pour traiter de la paix avec saint Louis; les évêques de Lincoln et de Worcester, et Roger Bigot, maréchal d'Angleterre, lui avaient été était encore en France vers la Saint-Hilaire (13 janvier) 1259. Voy. Mat. Paris, p. 979 et 982.

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