Procession du Cortège du Roy, 1429, Sacre de Charles VII (Gilles de Laval - Les Otages de la Sainte Ampoule)
La journée du sacre fut remarquable pour Gilles de Rais, à raison du rôle qu'il y joua et de la charge de maréchal qu'il obtint. Désormeaux, après le P. Daniel, assure que Gilles y représenta l'un des pairs de France, et que le roi l'éleva à la dignité de comte : « Jean d'Alençon ; Charles, duc de Bourbon ; Louis de Bourbon, comte de Vendôme ; Gilles de Laval, sire de Rais; Georges de la Trémoille, baron de Sully, et André de Laval, représentaient les six pairs laïques de France » *. Monstrelet omet Louis de Vendôme et André de Laval, et nomme Beaumanoir et Mailly (Maillé), seigneur de Touraine ; Vallet de Viriville conserve Vendôme et Laval. Mais il réunit les comtes de Clermont, pour ajouter le seigneur de Maillé ; M. Wallon enfin accepte Beaumanoir pour rejeter de Maillé. Le P. Daniel et Désormeaux ont probablement avancé que Gilles de Rais représenta l'un des six pairs laïques sur la foi d'une lettre écrite par trois gentilshommes angevins à la femme et à la belle-mère de Charles VII, Yolande d'Aragon, duchesse d'Anjou.
On dirait dans cette lettre que les auteurs furent surtout préoccupés de signaler le rôle des sires de Laval au sacre de Charles VII. Elle nous apprend, en effet, plusieurs détails importants sur ces deux gentilshommes ; or, ils nomment parmi les pairs « les jeunes seigneurs de Laval ,; c'est peut-être sur ce passage que le P. Daniel et Désormeaux ont appuyé leur assertion.
On pourrait en trouver la preuve dans leurs paroles, lorsqu'ils disent que Gilles de Rais fut élevé, ce jour-là, à la dignité de comte. Mais il ne faut l'entendre que de la baronnie de Laval, par la raison que celle de Rais ne fut érigée en comté que bien des années après la mort de Gilles de Rais.
Ces auteurs sont plus sûrement dans le vrai en racontant qu'il fut élevé dans cette circonstance à la haute dignité de maréchal de France. Le maréchal de la Fayette était absent, comme le connétable de Richement, par suite d'une disgrâce.
Gilles de Rais, qui, depuis le commencement de la campagne, s'était distingué parmi tous les autres capitaines, fut promu à cette haute charge, « à cause de sa valeur, » dit Monstrelet, et remplaça le maréchal de la Fayette à la cérémonie du sacre : il avait vingt-cinq ans à peine. Mais il était brave ; de plus il était fort riche, et par le luxe, qu'il aimait à étaler en toute occasion, digne de représenter l'armée à la cérémonie du sacre.
Les historiens ne s'entendent pas sur l'époque où Gilles fut promu au grade de maréchal de France. Nous ne parlerons, que pour en faire mémoire, de l'opinion de Du Paz **, d'après lequel Gilles n'aurait été créé maréchal qu'en 1433, après la mort du maréchal de Rieux. A moins de prétendre que tous les historiens et tous les documents soient dans l'erreur, lorsqu'ils mettent sur le compte du maréchal de Rais ce qui, en réalité, serait le fait du maréchal de Rieux, l'opinion de Du Paz est inadmissible.
M. Armand Guéraud, dont la courte notice sur le maréchal de Rais a fourni maintes assertions aux historiens contemporains, recule jusqu'au commencement de l'année 1428 la promotion de Gilles au grade de maréchal, et il en donne cette preuve que, privé de l'appui du connétable par la disgrâce du comte de Richemont, le roi voulut au moins s'associer le puissant baron de Rais, et, en lui conférant la dignité de maréchal, l'empêcher de s'éloigner de la cour de France. Il va plus loin encore et voit dans le rôle de Gilles, pendant les sept mois du siège d'Orléans, pendant l'expédition de Jeanne d'Arc sur les bords de la Loire, et jusqu'à Reims, la marque d'un pouvoir élevé et d'une autorité supérieure, qui font croire que les historiens ne lui donnent pas sans motif, dès cette époque, le nom de « maréchal de Rais. »
Mais toutes ces raisons n'ont ancune force contre un témoignage précis, et l'on n’écrit pas l'histoire en sautant par-dessus les affirmations les plus nettes, pour les subordonner à de simples preuves de convenance et à des suppositions hasardées.
La lettre des trois gentilshommes angevins, dont nous avons déjà parlé plus haut, dit en termes très précis et très clairs : « Aujourd'hui ont été faitz par le roy contes les sires de Laval et le sire de Sully, et Ilays mareschal ***. » Il serait oiseux de faire ressortir la force de ce témoignage, écrit, de Reims, le jour même du sacre, à la belle-mère et à la femme du roi de France. Certainement, les auteurs de cette lettre n'écrivaient pas à ces princesses sans en avoir reçu l'ordre ou la commission spéciale, et l'on ne mande rien à de telles personnes que l'on ne sache parfaitement. Il est vrai que le fait, dont il s'agit, ne se trouve pas dans l'Histoire généalogique du P. Anselme, qui atteste, au contraire, sur l'autorité des comptes de cette année, que Rais était maréchal dès le 21 juin 1429. Mais M. Quicherat répond très justement sur ce point, que les comptes n'ayant été rendus qu'à la fin de septembre, on conçoit qu'on ait appliqué au maréchal de Rais, pendant toute la durée « de l'exercice 1428-1429 le titre, qui lui fut accordé seulement dans les derniers mois de cet exercice. » L'auteur des comptes y désigne naturellement Gilles de Rais par le titre qu'on lui donnait au moment où il écrivait; et il en faut dire autant des historiens qui lui donnent constamment ce titre avant le jour du sacre.
Cet exemple n'est pas rare dans l'histoire des hommes célèbres : il est tel héros qui prend ainsi, dès son berceau, le nom dont furent illustrées ses dernières années. Rien ne détruit donc la valeur historique qu'il faut reconnaître au témoignage des trois gentilshommes angevins. Ainsi ont sagement pensé, entre autres, Maurice de Sourdeval, Vallet de Viriville, et enfin M. Wallon, dans son Histoire de Jeanne d'Arc.
Sacre des Rois de France -17 juillet 1429 - Charles VII est sacré à Reims <==.... ....==> L’origine céleste de la Sainte Ampoule de Saint Remi
==> Généalogie: Gilles de Rais seigneur de Champtocé, Machecoul, du château de Tiffauges, Pouzauges