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PHystorique- Les Portes du Temps
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21 avril 2025

LA COURSE DES COQS A PONS, EN SAINTONGE. Procès-verbal de 1702.

Dans notre siècle, où l'on ne rit guère, les coutumes drôlatiques, les excentricités, les facéties, les grosses farces de nos pères, si elles n'ont plus droit de cité, conservent encore un privilège : celui d'éveiller singulièrement l'attention des curieux. Il y a chez elles une mise en scène et une couleur gaillardes qui nous tirent l'œil, un sens philosophique et une moralité qui nous tirent l'esprit.

Au nombre des usages les plus grotesques et les plus divertissants de la vieille France, nous signalerons la Course des Coqs à Pons, en Saintonge.

Une publication récente, la Bibliothèque de poche, éditée par Paulin et Lechevalier, dans le volume intitulé : Curiosités historiques [Paris, 1855], au chapitre des Impôts singuliers, consacre quelques lignes à cette fête étrange ; mais l'auteur n'a fait que mettre en abrégé une notice de Jouyneau des Loges, tirée des Mémoires de la Société des Antiquaires de France [Paris, 1817] (1). Jouyneau lui-même se recopiait ; il se contentait de donner à cette époque la description qu'il avait autrefois — avant la Révolution — insérée dans les Affiches de la Rochelle, dont il était le principal rédacteur (2).

La description de Jouyneau se recommande par la véracité des détails, —il était contemporain de la cérémonie —; s'il n'y a point assisté, dans tous les cas, il a puisé son récit à bonne source ; de plus, une heureuse occasion lui avait mis sous les yeux la copie du procès-verbal de la course de 1613, le seul document de ce genre qu'il ait été possible de retrouver dans le pays. Ce devait être en effet une pièce très-rare, même au temps où écrivait Jouyneau, puisque, depuis un grand nombre d'années déjà, l'usage du procès-verbal de la fête était tombé en désuétude.

Après le journaliste rochelais, nous n'eussions guère songé à remettre en lumière la bouffonnerie pontoise, s'il ne nous avait point paru intéressant de publier, pour la première fois, un de ces singuliers procès-verbaux que nous tirons de notre bibliothèque saintongeaise.

A son frontispice, nous placerons d'abord une relation de la cérémonie, d'autant plus que celle des auteurs des Curiosités historiques est très-incomplète, et que nous avons à relever maintes particularités ignorées de Jouyneau et empruntées à notre procès-verbal lui-même.

La ville de Pons en Saintonge, avec son château fort, ses trois églises paroissiales, ses trois hôpitaux et sa commanderie de Saint-Jean de Jérusalem, était le siège d'une sirerie importante dont relevaient cinquante-deux paroisses et environ deux-cent-cinquante fiefs. Son nom a été brillamment porté par une lignée de hauts-barons, cousins des rois de France, feudataires de la couronne, maîtres d'un immense territoire, race belliqueuse dont nos annales du XIe au XVIe siècle ont gardé la trace profonde.

Ville et seigneurs se donnaient la fantaisie de remonter jusqu'au fils de Pompée, Ælius Pontius. L'onomatopée seule a fait les frais de cette origine. Le nom de Pons, en latin de Pontibus, semble provenir des ponts qui, de toute antiquité, servaient en cet endroit à passer la Seugne.

Les armoiries de la maison de Pons en retenaient d'ailleurs quelque chose : d'argent à la fasce de gueules chargée de trois bandes d'or. C'était, suivant la légende, l'image d'un fleuve ensanglanté traversé par trois ponts : il y avait là comme le souvenir d'une bataille (3).

 

La course des coqs devait aussi rappeler quelque fait ancien, particulier à la ville de Pons et spécial à la corporation des sergents, — les huissiers d'autrefois. Nous avons là-dessus interrogé vainement la tradition et l'histoire. Même silence sur l'époque de son institution.

 

Contentons-nous donc de raconter.

 

Tous les ans, le lundi de Pâques, dès l'aube du jour, le sire de Pons et sa maison, le juge-sénéchal, les officiers de la justice, savoir : le procureur fiscal, le greffier, le prévôt, les notaires, les i procureurs et les sergents, allaient entendre la messe dans la chapelle du château placée sous le vocable de Saint-Gilles (4).

Au moment de l'offrande, le syndic des bouchers remettait un » denier à chacun des assistants ; mais, malheur aux absents! ceux-là payaient cinq sols d'amende ou étaient condamnés à une livre de cire. L'amende, au reste, joue un grand rôle dans tout le cours de la fête.

Jouyneau ne relate point ces détails préliminaires ; mais il remplace la messe par un déjeuner que le sénéchal donnait à la noblesse des environs, — dames et seigneurs, — aux officiers de la juridiction, sans oublier les sergents : à ces derniers, en effet, tous les honneurs du repas, mais aussi toutes les fatigues de la journée. Le déjeuner se prenait debout ; les sergents seuls devaient s'asseoir. Ils étaient servis à une table particulière. Un convive qui eût pris un siège, un sergent qui se fût levé du sien, eût encouru une amende de cinq sols.

La messe entendue, ou le repas terminé, on se mettait gravement en route, dans un ordre ainsi réglé : d'abord, les sergents à pied, et en costume, avec leur casaque de livrée, puis le prévôt à cheval, en tête d'une cavalcade composée du juge et de tous les officiers de la: justice, le greffier fermant la marche. Chacun d'eux tenait une gaule à la main. Jouyneau dit qu'elle était de houx ; notre procès-verbal n'en spécifie pas la nature : il se tait pareillement sur cette double obligation : au cavalier point d'éperons, au cheval la queue pendante; l'inobservance de l'une ou de l'autre de ces formalités était punie d'une amende.

Qu'allait donc faire la justice en si grand appareil? Elle allait processionnellement quérir certaine redevance dont étaient tenus vis-à-vis du seigneur, à pareil jour, bon nombre d'habitants de la ville : cette redevance était un coq, vif, entier et garni le toutes ses plumes.

Commençant par le quartier bas, on faisait la première visite au prieuré de Saint-Vivien. Le prévôt, à haute voix, audiençait le prieur, et celui-ci en personne, ou par l'intermédiaire d'un membre de la confrérie, apportait son coq.

Le procureur fiscal l’examinait avec soin, et quand il l'avait reconnu conforme aux prescriptions, quand enfin il l'avait accepté, le juge-sénéchal le lui prenait des mains et le lançait en l'air.

Alors se passait la scène la plus burlesque, la plus extravagante qu'il fût possible de voir : les sergents, comme une meute en furie, se précipitant sur le volatile; celui-ci, effrayé par le vacarme, fuyant à toute volée ; les sergents à ses trousses; la foule, à peine maintenue par les archers du sire de Pons, suivant le drame à pas de course.

Qu'un sergent fût sur le point de saisir l’animal empenné, c'était des cris, des : Il l'aura, il ne V aura pas! vociférés par mille bouches à la fois. Le coq, bien souvent, trompait les efforts et l'adresse de ses adversaires; il s'envolait à travers les rues, à travers les champs, par-dessus les murs, se perchait sur les auvents, sur les toits ; mais qu'importe? nul repos pour lui, les sergents étaient obligés de courir sus; ils le traquaient si bien, qu'à la longue, le pauvre coq, vaincu par la fatigue, se laissait prendre. Alors les cris, les battements de mains redoublaient à tout rompre. On prenait à ces luttes l'intérêt le plus vif; les paris s'ouvraient : on mettait sur l'adresse, sur l'agilité d'un sergent, l'enjeu que, de nos jours, on place sur tel ou tel cheval, au sport de Longchamps.

Quelquefois la course prenait des proportions imprévues, d'un grotesque sublime ; le coq s'envolait au- delà du fleuve. Que faire alors? Point d'hésitation, monsieur le sergent, jetez-vous tout habillé dans la Seugne, et, malgré vos membres trempés de sueur, traversez l'eau; elle est très-froide, et souvent même glacée, un lendemain de Pâques; mais l'usage est inflexible, et vos compatriotes vous contemplent.

Voilà le sergent au sein de l'onde, nageant à la poursuite de son coq.

Quelle vue pour les spectateurs de l'une et l'autre rive ! ce suppôt de Thémis en robe noire, piquant une tête, sortant du fleuve, tout imprégné d'eau reprenant sa course, qu'il ne cessera qu'après la capture du rebelle.

Cet usage de la traversée de la Seugne peu à peu passa de mode. Il est présumable que ce fut à la suite de quelque accident, de quelque fluxion de poitrine qui aurait mené de vie à trépas un malheureux sergent, victime de son intrépidité !

Au commencement du XVIIIe siècle, un des sergents était désigné pour opérer le passage de la rivière; il se ménageait à l'avance, et sans qu'il en résultat pour lui autre chose que la prise d'un bain hors de saison, il s'acquittait de sa corvée. Plus tard, on la supprima entièrement. Les sergents se contentèrent de mettre les pieds dans l'eau, et, munis d'un poêlon, d'asperger le pont de la ville, à trois reprises, en criant : De la part de monseigneur de Pons.

Une fois saisi, le coq était passé par les armes.

Alors la cavalcade reprenait sa route dans le même ordre ; elle s'arrêtait, avec le même cérémonial que nous avons décrit plus haut, devant le logis des vassaux imposés. L'animal fourni, accepté et jeté en l'air, la course recommençait.

Nous voyons, par notre procès-verbal, qu'en 1702 il y eut jusqu'à sept stations, et par conséquent sept courses distinctes ; huit coqs y périrent.

Les contribuables avaient été, cette année-là, le prieur de Saint-Vivien ; les héritiers de Jean Gout, le droguiste, au canton de la Voûte; ceux de Jean Lunaud et de Jean Renaud, en la rue Bladière; ceux de Jean Bossion, et autres habitants du canton des Esparades, de la rue du moulin Conteau et du faubourg des Aires; enfin, les prieurs de Saint-Martin et de l'Hôpital-Vieux; ceux-ci pour leurs maisons, ceux-là pour leurs monastères.

Les courses terminées, on retournait au prieuré de Saint-Martin. ! Là, le prieur fournissait deux fagots de brande auxquels il était imposé, et, séance tenante, on chauffait le sergent qui avait passé l'eau.

A la suite de cet acte d'humanité, on entrait dans l'église; on y entendait la grand'messe, que le prieur était dans l'obligation de dire ce jour-là. A l'offrande, les propriétaires du moulin Conteau et ceux du moulin de Lavergne présentaient des gâteaux, selon i l'usage, et de toute la cérémonie était rédigé un procès-verbal circonstancié.

Enfin les sergents, héros et bouffons de la journée, rentraient chez eux, épuisés, rompus de lassitude; il est vrai que les coqs leur appartenaient — ils les avaient bien gagnés—; ils se vengeaient sur eux à pleines dents du mal qu'ils leur avaient coûté.

Jouyneau dit plaisamment que l'on pourrait appeler cette fête la Guerre des coqs; «vraisemblablement, ajoute-t-il, la Révolution leur a donné la paix.»

Nous trouvons, avec autant de justesse, qu'elle l'a donnée aux sergents. Certes, les huissiers respirent maintenant à leur aise; nulle part en France, même à Pons, ils ne font la chasse aux coqs ; il leur reste celle des débiteurs, et ceux-là y perdent bien aussi leurs plumes.

Le bon temps que celui où, au moins une fois l'an, les huissiers faisaient rire !

Chercherons-nous une explication à l'énigme voilée sous cette facétie? L’acharnement du sergent après sa proie est, ce nous semble, tout à fait caractéristique; c'est bien la profession dans son exercice habituel.

- Le coq étant d'ailleurs une redevance, une dette, représente au mieux le débiteur. La scène donnée en plein jour au peuple, ne pouvait-elle pas avoir été à l'origine une leçon de morale, qui allait à son adresse, comme la plupart des soties du moyen âge?

Celle-là lui disait :

Fais honneur à tes engagements, ou sinon tu seras traité comme ces malheureux volatiles.

Nous n'insistons pas sur notre explication ; nous en reconnaissons i d'avance toute la fragilité.

Arrivons à notre procès-verbal; il est original, sur papier marqué au timbre de la généralité de la Rochelle, et comprend sept pages in-4°. Comme orthographe, c'est un spécimen trop curieux de négligence et même de barbarie, pour que nous ne respections point soigneusement sa forme. Nous prendrons toutefois le parti de semer ça et là les points, les virgules et les apostrophes omis par l'expéditionnaire pontois, de rétablir les grandes lettres en leur vraie place, les v au lieu des ù, et vice versa, de supprimer enfin toutes les majuscules parasites et les abréviations qui contrarient la lecture de notre document.

 

Procès - verbal de la course des coqs, le lundy de Pasque 1702.

Auiourd'huy lundy douziesme avril mil sept cent deux et la landemin de la faiste de Pasque, après que la maise a esté sélébrée à l'aube du jour en la chapelle de Sainct Gille du chastau de la prézente ville, à la deligence de Estienes Estenau, maistre boucher et sindicq des autres maistre bouchers de la prézente ville, à la manière acoutumée, à laquelle doive assister monseigneur de la cour de céan (5), tous les officiers de sa justice, domestique de sa maizon et autres, alla à l'offrande et donna à chaicun un denier à paines contre les contrevenen ou deffaillants d'une livre de sire ou cinq solz d'amande; ce requerant maistre Pierre Boullanger, procureur fiscal de la cour de céan; nous François Mossion, advocat en la cour, et juge sénéchal chastelein siuil criminel et politicq des ville et sirrie de Pons, ayant avecq nous maistre Helis Chemin, Pierre Caille, Jozept de la Capmeziou, Jean Benaste, Jean Foucher, Jean Grellàud, Henry Carville, Jacque Chappeau, Mathurin Tapissier, notaire et procureurs au siége du dit Pons, et maistre Jean Anthoine Heudebourg, notre grefier, ayant des gaulle à la min, estant à cheval, marchand devent nous Pierre Tillet, notre prevos, Jean Arnaudet, Jean Salmon, Daniel Hubideau et Pierre Bardy, nos sergens ordinaire, ayant leurs cazaque de livrée (6) ; nous serions acheminez en la place où est la croy proche l'églize du fauxbourg de Saint Vivien, où estant aurions fait audiencer par nostreprevos le prieur de Saint Vivien, pour £ lequel auroit conparu (7)            ; lequel pour ledit prieur nous a reprézenté un cocq vif que ledit sieur prieur doibt annuellemant à pareil jour à mondit seigneur; lequel ayent esté treuvé entier avecq ces plumes, l'avons du consentemant dudit prieur accepté et icelluy jetté en l'air ; après lequel lesdits :3 sergents auroits coureus comme ilz sont obligés, icelluy pins et tué; et a ledit         déclaré (8)

Et ce fait, nous serions avecq tous les sudits acheminés au canton de la Vouste de la prézente ville, où estant aurions fait audiencer les héritiers Jean Gout, marchant droguiste, comme propriataire d'une grande maizon située audit canton; faizant le coin de la rue de celle de Saint Jacque au couven des père Jacobains, sy devent pocedée par le sieur Bertin ; pour lesquelz héritiers a conparu , et ont reprézenté un cocq qu'ilz doive anuelemant à pareil jour à mondit seigneur, à cauze de laditte maizon; lequel cocq ayant esté treuvé entier avecq toute ces plumes auroit par nous esté receu du consentemant dudit sieur procureur et esté jetté en l'air ; après lequel lesdits sergents ayants courus commes ilz sont obligés, l'auroits prains et tuée; et

Et de là sommes tous allés avecq les sudits à l'entrée de la ruee Bladière, autremant la ruee aute, et proche la halle de la boucheriee, où estant avons fait audiencier les héritiers de Jean Lunaud et Jean Renaud, au lieu de Jacque Guillon, auroit conparu ; lequel a reprézenté un cocq vif qu'ilz doivent anuellemant à pareil jour, à cauze de leurs maizons située à main droite allent de laditte halle de la boucheriee à la ruee Bladière et joignant l'un et l'autre, et faizant, celle desdits Brunaud, le coin de la rue Bladière; et ledits cocq ayent esté treuvé entier avecq toutte ces plumes, a esté par nous receus, et du consantemant dudit sieur procureur a esté jetté en l'air ; après lequel lesdits sergents ayant courus comme ilz sont obligés, l'auroits prins et tué ;

Et ce fait, sommes allés avecq les sudits au quenton des Esparade, où estant, avons fait audiencier par nostre prevos les héritiers de Gabriel Bossion, Jacque Bouyer, Izaac Basset, Jean Caille (9), Estienne Chabiran (10), et autreshabitans dudit quanton des Esparade, de la ruee du moulain Conteaud et de celle du fauxbourg des Aires, pour lesquelz abitans dudit quanton des Esparade et du moullain Quontos, auroit conparu ; lequel tant pour luy que pour lesdits habitans du canton des Esparade et de la ruee du moullen Contos, nous auroit reprézenté un cocq par luy agetté a cet esfait, ayant déclaré avoir eu et receu de chaicuns desdits habitans un denier qu'ilz doivent payer et contribuer pour ledit achat de cocqs à celluy qu'il roprézente, et à cauze de leurs maizons située audit quenton des Esparade et ruee du moullen Conteau; et lequel cocq ayant esté treuvé entier avecq toute ces plumes auroit par nous esté receu du consantemant dudit sieur procureur, et icelluy jetté en l'air ; après lequel lesdits sergents auroits courus comme ilz sont obligés et l'auroits prins et tué ;

Et ce fait, estant en maime lieu, a ausy conparu , tant pour luy que pour les autre habitans de la ruee de Courbon et fauxbourg des Aires, auroit reprézenté un cocq vif qu'il a déclairé avoir agetté et receu par (pour) cella de chaicuns desdits habitans de la ruee Courbon et fauxbourg des Aires, un denier qu'ilz sont obligés de payer et contribuer annuellemant à celluy quy à son ran agette le cocq, et l'a prézenté à cauze de leurs maizons qui conpoze la ditte ruee Courbon et fauxbourg des Aires ; lequel cocq c'estant treuvé entier avecq toutte ces plumes, auroit par nous esté receu du consantemant dudit procureur, et icelluy jetté en l'air; après-lequet lesdits sergents auroits courus comme ilz sont obligés, l'auroits prains et tué ;

Et ce fait, sommes allés avecq les sudits au fauxbourg de Saint Martin et à la place proche les simetière de l'églize de Saint Martin, où estant, aurions fait audiencier le sieur prieur de Saint Martin, pour lequel a conparu ; lequel pour le sieur prieur nous a reprézenté deux cocqs vifs que le sieur prieur de Saint Martin doibt anuellemant à pareil jour à cauze dudit prieuré; et lesquelz cocqs ayant esté treuvé entiers avecq toute leurs plumes, auroit par nous esté receu du consantemant dudit procureur, et icelluy jetté en l'air l'un après l'autre; et après lesquelz les sergent ont courus comme ilz sont obligés, et auroits par eux esté prains et tué ;

Et ce fait, estant audit lieu, avons fait audiencier le prieure et prébandiers de l'Ospital Vieux et fauxbourg de Saint Martin, pour lesquelz a conparu ; lequel tant pour le prieure que prébandiers dudit hospital, nous a reprézenté un cocq qui est deu anuellemant à pareil jour à cauze dudit hospital ; lequel cocq ayent esté treuvé entier avecq toutte ces plumes, auroit par nous esté receu du consentemant dudit prieur, icelluy getté en l'air; après lequel les sergents ayant courus commes ilz sont obligés, et l'ont prain et tuée ;

Et de là sommes retournez avecq tous les sudits au quanton des Esparade, au premier pon dudit fauxbourg des Aires, à l'entrée de la ruee de Courbon, dont l'un desdits sergents est obligé de passer l'eau au travers la rivière, ce quy a esté fait par ledit Bardy.

Et ce fait, sommes retournés avecq touts les sudits, aux fauxbourg de Saint Martin et «à la ditte place proche les simetière de l'églize de Saint Martin, où estant, pour ledit sieur prieur de Saint Martin, nous auroit prézenté deux fagots de brande, l'un de cinq riorte (11), et l'autre de trois entournes d'un demy sen de javelle, que ledit sieur prieur de Saint Martin est obligé de doner anuellemant pour estre brullés et chaufer le sergent quy a passé l'eau ; lesquelz fagots de brande, javelle, ayant esté treuvés de la grandeur et grosseur convenable, ont par nous esté receus du consentemant dudit sieur procurenr, auquelz aurions mis le feu et fait bruller; et voullant entendre la grande maisse dans laditte églize, quy y doibt estre sélébrée à pareil jour par ledit sieur prieur, où il doibt estre prézanté des gateau à l'ofrende, deux par les propriataire des moulen de Lavergne et Conteaux, il nous auroit esté certiffié la ditte messe avoir esté sélébrée par ledit sieur prieur. Donct et du tout nous avons octroyé actes pour valloir et servir ce que de raizon, et ont tous signé:

Mossion — Bardy — Benaste — Boullanger — Chappeau — Grellaud — Tapissier — Heudebourg, greffier.

N'oublions pas de mentionner ici que le précieux document que nous venons de publier est un présent de M. Brillouin aîné, de Saint-Jean-d'Angely, un amateur et un chercheur, comme nous, de tout ce qui intéresse l'histoire de la Province. Il voudra bien nous permettre de lui renouveler nos remercîments.

Baron DE LA MORINERIE. Revue archéologique

 

 

 

 

(1) Voir aussi Massiou, Hist. de Saintonge, et d'après lui H. d'Aussy, Chroniques Saintongeaises.

(2) L'article de Jouyneau ne parut dans le Recueil des mémoires de la société des antiquaires de France qu'après sa mort. Il était décédé le 30 septembre 1816 à 80 ans.

(3) La vérité est que, d'après d'anciens sceaux, les 3 bandes sur la fasce provenaient d'un emprunt fait au XIIe siècle à la maison de Turenne, qui portait coticé d'or et de gueules de 10 pièces, réduites à 6 par Renaud V, sire de Pons, en 1371.

 

(4) La chapelle Saint-Gilles existe encore. Elle est enfouie dans un des fossés du château non loin du donjon : c'est un bijou de l'art roman à la fin du XIe siècle. Sa façade est merveilleusement conservée ; il semble que son archivolte date seulement d'hier; mais que sera-t-elle demain si on n'y prend garde? Saint-Gilles sert aujourd'hui de magasin.

(5) C'était alors Charles de Lorraine, comte de Marsan, prince de Mortagne, etc., chevalier des ordres du roi, etc., époux de Marie d'Albret, dame de Pons, arrière-petite-fille d'Antoinette de Pons, comtesse de Marennes, et de Henri d'Àlbret, baron de Miossens.

(6) L'armoriai général de 1696 va nous permettre de glisser ici quelques notes sur plusieurs de ces personnages. Il est à la fin de chaque registre un supplément dans lequel d'Hozier a inventé, suppléé, comme il le dit, des armoiries à ceux qui n'en avaient pas présenté. L'imagination du juge d'armes s'est exercée principalement sur les noms des solliciteurs en blason et en a tiré des rébus ou armes parlantes du plus joyeux effet ; le tout moyennant la finance obligée de 20 livres.

Dans le supplément de l'armorial de la généralité de la Rochelle, nous trouvons donc :

François Mossion, receveur des consignations de la ville de Pons. — D'azur à 3 gerbes d'or 2 et 1.

Mossion — Mession, avait lu le juge d'armes, — faisait songer à la moisson; les gerbes de blé vinrent tout naturellement éclore sous sa plume.

François Mossion succéda à Pierre Hardy en l'office de juge-sénéchal ; il appartenait aux Mossion de la Gonterie, famille distinguée qui figure parmi celles de la noblesse saintongeaise.

Pierre Boulanger, procureur d'office de la ville de Pons. — De gueules à 3 besans d'or 2 et 1.

Pour lui le rébus fait défaut ; mais il avait été appliqué à un marchand de Pons, du nom de Le Boulanger : — d'or à une paille de four de sable, etc.

Pierre Caille, notaire et procureur à Pons, — d'azur à un chevron chargent accompagné en chef de 2 étoiles de même et en pointe d'une caille d'or soutenue d'un croissant d'argent.

Il eût été plaisant cette fois que d'Hozier eût manqué la caille.

Pierre Caille était aussi juge de Fléac.

Jean Benaste (ou Benasté) , notaire et procureur à Pons. — De sable à 3 croissants d'or 2 et 1.

Le rébus est ici difficile à saisir; il ne nous est point prouvé cependant que l'héraldiste n'ait pas songé à un astre. Le croissant peut bien avoir découlé de là.

Jean Grelaud, notaire à Pons, — De gueules à 3 cors de chasse d'or 2 et 1

L'assonnance appelait les grelots, mais les cors de chasse ne sont pas non plus mal trouvés. Jean Grelaud vivait encore en 1725; il était propriétaire des moulins de Baratte en Saint-Vivien de Pons, et comme tel tenancier de la seigneurie d’Asnières.

Au XVIe siècle, un conseiller au présidial de Saintes, échevin de cette ville, sous-maire en 1570, du nom de Jean Grelaud, cultivait la muse latine; il faisait partie de la petite pléiade santone rangée autour de Bernard Palissy, le célèbre potier, et de Nicolas Alain, l'historien de la province.

Pierre Bardy devint en 1716 juge de la sirerie; sa fille avait épousé Pierre Boulanger, le procureur fiscal.

Daniel Hubideau. En of 789, un Hubideau était aussi sergent royal à Pons.

(7) Le procès-verbal rédigé à l'avance laisse partout en blanc le nom des comparants. Il est probable que c'étaient les titulaires eux-mêmes qui avaient répondu à l'appel.

(8) Blancs qui existent dans l'original.

(9) Jean Caille, sans doute un parent de Pierre, le sergent.

(10) Etienne Chabiran, marchand à Pons. — D'azur à un chat-huant d'or. Chabiran, assonance Chat-huant ! Et dire que d'Hozier a rempli l'armorial  de 1696 d'une innombrable quantité de facéties de ce genre!

(11) Riorte, retorta, lien.

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