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PHystorique- Les Portes du Temps
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10 juillet 2024

Suite de l’interrogatoire de Marie-Antoinette, dite de Lorraine d’Autriche

Le président. Sur la journée du 20 juin, avez-vous quelques détails à donner ?

Le témoin. Ce jour-là je n’ai quitté mon poste que pendant peu de temps ; attendu que le peuple auroit été fâché de ne point y trouver un de ses premiers commis, je me rendis dans le jardin du château : là je parlai avec divers citoyens, et ne fit aucune fonction de municipal.

Le président. Dites ce qui à votre connoissance sur ce qui s’est passé au château la nuit du 9 au 10 aout.

Le témoin. Je n’ai point voulu quitter le poste ou le peuple m’avoit placé : je suis demeuré toute la nuit au parquet de la commune.

Le présidente. Vous étiez très-lié avec Petion, il a dû vous dire ce qui s’y passoit.

Le témoin. J’étois son amis par fonction et par estime, et si je l’avois vu dans le cas de tromper le peuple et d’être initié dans la coalition du château, je l’aurois privé de mon estime. Il m’avoit à la vérité dit que le château desiroit la journée du 10 aout pour le rétablissement de l’autorité royale.

Le président. Avez-vous eu connoissance que les maîtres du château aient donné l’ordre de faire feu sur le peuple ?

Le témoin. J’en ai eu connaissance par le commandant du poste, bon républicain, qui est venu m’en instruire : alors j’ai sur le champ mandé le commandant-général de la force armée, et lui ai, en ma qualité de procureur de la commune, défendu expressément de faire tirer sur le peuple.

Le président. Comment se fait-il que vous, qui venez de dire que dans la nuit du 9 au 10, vous n’avez point quitté le poste ou le peuple vous avoit placé, vous avez depuis abandonné l’honorable fonction de législateur ou sa confiance vous avoit appelé.

Le témoin. Lorsque j’ai vu les orages d’élever dans le sein de la Convention, je me suis retiré ; j’ai cru mieux faire, je me suis livré à la morale de Thomas Payne, maitre en républicanisme : j’ai désiré comme lui de voir établir le règne de la liberté et de l’égalité sur des bases fixes et durables ; j’ai pu varier dans les moyens que j’ai proposés, mais mes intentions ont été pures.

Le président. Comment, vous vous dites bon républicain, vous dites que vous aimez l’égalité,  et vous avez proposé de faire rendre à Petion des honneurs équivalens à l’étiquette de la royauté ?

Le témoin. Ce n’est point à Petion, qui n’étoit président que pour quinze jours, mais c’étoit au président de la Convention nationale à qui je voulois faire rendre des honneurs, et voici comment : je desirois qu’un huissier et un gendarme le précédassent, et que les citoyens des tribunes se levassent à son entrée. Il fut prononcé dans le temps des discours meilleurs que le mien, et je m’y rendus.

Le président. Connoissez-vous les noms de ceux qui ont averti que Petion couroit des risques au château.

Le témoin. Non, je crois seulement que ce sont quelques députés qui en ont averti l’Assemblée législative.

Le président. Pourquoi avez-vous pris sur vous d’entrer seul dans le Temple, et sur-tout dans les appartemens dits-royaux ?

Le témoin. Je ne me suis jamais permis d’entrer seul dans les appartemens des prisonniers ; je me suis au contraire toujours fait accompagner par plusieurs des commissaires qui y étoient de service.

Le président. Pourquoi avez-vous marqué de la sollicitude pour les valets de l’accusée, de préférence aux autres prisonniers ?

Le témoin. Il est vrai qu’à Force, la fille Tourzel croyoit sa mère morte, la mère pensoit autant de sa fille : guidé par un acte d’humanité, les ai réunies.

Le président. N’avez-vous pas entretenu des correspondances avec Elisabeth Capet ?

Le témoin. Non.

Le président à l’accusée. N’avez-vous jamais eu ay Temple d’entretiens particuliers avec le témoin ?

L’accusée. Non.

On entend un autre témoin.

Jean Sylvain Bailly, homme de lettres, dépose n’avoir jamais eu de relation avec la famille ci-devant royale ; il proteste que les faits contenus en l’acte d’accusation, touchant la déclaration de Luis-Charles Capet, sont absolument faux : il observe à ce sujet, que lors des jours qui ont procédé la fuite de Louis, le bruit couroit depuis quelques jours qu’il devoit partir ; qu’il en fit part à la Fayette, en lui recommandant de prendre à cet égard les mesures nécessaires.

Le président au témoin. N’étiez-vous pas en liaison avec Pastorer et Roederer, ex-procureurs-généraux-syndics du département de Paris ?

Le témoin. Je n’ai eu avec eux d’autre liaison que celle d’une relation entre magistrats.

Le président. N’est-ce pas vous qui, de concert avec la Fayette, avez fondé le club connu sous le nom de mil sept quatre-vingt-neuf ?

Le témoin. Je n’en ai pas été le fondateur, et je n’y fus que parce que des Bretons de mes amis en étoient.  Ils m’invitèrent à en être, en me disant qu’il n’en coûtoit que cinq louis ; je les donnai et fus reçu : eh bien ! depuis je n’ai assisté qu’à deux diners.

Le président. N’avez-vous pas assisté aux conciliabules tenus chez le ci-devant la Rochefoucault ?

Le témoin. Je n’ai jamais entendu parler de conciliabules. Il se peut faire qu’il eu existat, mais je n’ai jamais assisté à aucuns.

Le président. Si vous n’aviez pas de conciliabules, pourquoi lors du décret du 19 juin 1790, par lequel l’Assemblée constituante voulant donner aux vainqueurs de la Bastille le témoignage éclatant de la reconnaissance d’une grande nation les récompensoit de leur courage et de leur zèle notamment en les plaçant d’une manière distinguée au milieu de leurs frères dans le champs ce Mars, le jour de la fédération ; pourquoi, dis-je, avez-vous excités des troubles entre eux leurs frères d’armes les ci-devant gardez-françoises puis ensuite été faire de reporter la gratification d’où ils avoient été honorés ?

Le témoin. Je ne me suis rendu auprès d’eux qu’à la demande de leurs chefs, à l’effet d’opérer la réconciliation des deux parties ; c’est d’ailleurs l’un d’eux qui a fait la motion de remettre les décorations dont l’Assemblée constituante les avoit honorées, et non pas moi.

Le président. Ceux qui ont fait cette motion ayant été reconnus pour cous être attachés en qualité d’espions, les braves vainqueurs en ont fait justice en les chassant de leur sein. N’avez-vous pas prêté les mains au voyage de Saint-Cloud, au mois d’avril ; et de concert avec la Fayette, n’avez-vous pas sollicité auprès du département l’ordre de déployer le drapeau rouge ?

Le témoin. Non

Le président. Etiez-vous instruit que le ci devant roi recéloit dans le château un nombre considérable de prêtres réfractaires ?

Le témoin. Oui, je me suis même rendu chez le roi à la tête de la municipalité, pour l’inviter des renvoyer les prêtres insermentés qu’il avoit chez lui.

Le président. Pourriez-vous indiquer les noms de habitués au château, comme sous le nom de chevaliers du poignard ?

Le témoin. Je n’en connois aucuns.

Le président. A l’époque de la révision de la constitution de 1791, ne vous êtes-vous pas réunie avec les Lameth, Barnave, Desmeunier, Le Chapelier et autres fameux réviseurs coalisés, ou pour mieux dire, vendus à la cour pour dépouiller le peuple de ses droits légitimes et ne lui laisser qu’un simulacre de liberté ?

Le témoin. La Fayette s’est réconcilié avec les Lameth : mais moi je n’ai pu me raccommoder, n’ayant pas été lié avec eux……..

 

 

Annales patriotiques et littéraires de la France, et affaires politiques de l'Europe

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