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9 octobre 2022

COSTUME MILITAIRE OU HARNAIS DE GUERRE DE JEANNE D'ARC

COSTUME MILITAIRE OU HARNAIS DE GUERRE DE JEANNE D'ARC

Les principales pièces de ce costume sont : l'armure, l'épée et la bannière.

1° ARMURES DE JEANNE D'ARC.

La première armure que revêtit Jeanne, se rendant à Orléans, fut fabriquée à Tours (avril 1429) (1) : elle reçut en même temps une lance, une hachette à lame (2), et une épée, plus belle que celle qu'elle avait déjà reçue du sire de Baudricourt : « le tout lui fit grand plaisir, car elle aimait les belles armes » (3).

C'est avec l'armure de Tours que la Pucelle fit lever le siège d'Orléans et entreprit sa glorieuse campagne de la Loire.

Pour le sacre, reçut-elle du roi une autre armure de parade (4), puisque les pairs laïcs revêtirent ce jour-là (18 juillet 1429) des « habits royaux », don de Charles VII? Rien ne le prouve, rien ne le contredit.

 Mais, dans les expéditions militaires qui suivirent, elle reprit son armure de Tours jusqu'au siège infructueux de Paris.

On connaît à peu près le sort de ces armures historiques (5).

 

1° Armure de Tours. — Blessée et repoussée de Paris, Jeanne offrit à saint Denis son « blanc harnais », c'est-à-dire l'armure qu'elle tenait du roi, et l'épée qu'elle avait enlevée à un Anglo-Bourguignon.

Elle fit cette offrande, déclara-t-elle à ses juges, « par dévotion, ainsi qu'il est accoutumé par les gens de guerre, quand ils sont blessés »; ajoutant : « ...Et parce que j'avais été blessée devant Paris, je les offris à saint Denis, pour ce que c'est le cry de France. » (septembre 1429).

Dès que le pusillanime Charles VII eut battu en retraite sur Gien, les Anglais, se jetant sur la ville de Saint-Denis, la pillèrent, et, violant l'abbaye sans crainte de sacrilège, emportèrent, comme trophée, les armes de la Pucelle, et ce par ordre de l'évêque de Therouanne, chancelier pour la France du roi d'Angleterre (6). Nous verrons plus loin qu'il y aurait peut-être lieu d'en excepter l'épée.

Ce trophée a-t-il passé en Angleterre ? Il y a lieu d'en douter.

 

2° Armure de Compiègne. — Le second harnais de guerre, dont il est fait mention, tomba, à Compiègne, avec sa bannière, entre les mains de Jean de Luxembourg.

Ce seigneur a-t-il livré aux Anglais les armes de sa prisonnière ? Réconcilié plus tard avec le roi de France, en a-t-il disposé en faveur de ce prince? Ce sont là autant de questions qu'il est difficile de résoudre.

Ce qui est certain, c'est que plusieurs armures dites de Jeanne d'Arc semblent être restées en France. Le malheur est qu'on n'en puisse établir la provenance.

D'abord, au n° 31 de l'Inventaire des vieilles armes (7), conservées, du temps de Louis XII, dans « l'armeurerie du château royal d'Amboise », nous lisons :

« Harnoys de la Pucelle, garny de garde bras, d'une paire de mytons et d'un abillement de teste, où il y a un gorgeray de maille ; le bort doré, le dedans garny de satin cramoisy, doublé de mesme. »

L'auteur insinue que cette armure de Jeanne d'Arc a dû servir de modèle à l'enlumineur, qui a composé la miniature de la notice consacrée à Jeanne de Vaucouleurs par le dominicain orléanais, Antoine Dufour, confesseur de Louis XII et d'Anne de Bretagne, mort évêque de Marseille. On y voit Jeanne la Pucelle sur un cheval blanc et revêtue d'une armure toute dorée (?).

Une armure dite de Jeanne d'Arc est encore signalée, en 1581, dans la salle d'armes du château d'Anet, résidence du duc Charles de Lorraine (8). On prétend, mais sans le prouver, qu'elle provenait de Jean de Luxembourg, dont Jeanne fut d'abord la prisonnière.

La chronique de Lorraine, à son tour, en l'année 1776, parle d'une armure de Jeanne d'Arc, qui se voyait au château de Chantilly. Serait-ce l'armure d'Anet, ou celle d'Amboise? Vergnaud-Romagnési croit qu'il s'agit de celle d'Anet (9) ; M. P. Lanéry d'Arc opine que l'armure de Chantilly serait celle de l'armeurerie d'Amboise (10).

Quoi qu'il en ait été, J.-B.-L. Carré décrit ainsi l'armure de Chantilly, telle qu'il la vit vers la fin du XVIIIe siècle : « C'est une armure de femme, et la moindre notion de dessin suffit pour le décider ; c'est une armure de pied, puisque les cuissarts sont complets, c'est-à-dire fermés derrière comme devant.

En effet, nous n'avons jamais vu Jeanne combattre autrement qu'à pied, quoiqu'elle soit arrivée à Chinon sur un cheval et qu'elle y ait fait admirer son adresse à le manéger.

« Ce harnais est couvert totalement de croix évidées. Fait exprès et sous les yeux de celle dont la mission parut céleste, ne dut-il pas porter, suivant l'opinion presque généralement reçue, ce signe distinctif de la religion chrétienne et qu'elle affecta sur toutes ses armes?

« On y remarque garde-collet, garde-bras, garde-braye, et de faites qui vont se confondre et s'unir avec les cuissarts, en prenant les reins, où les femmes les serrent ordinairement, ce qui donne un air gêné et mauvaise grâce à la figure (11). »

Ainsi, du XVe au XVIIIe siècle, Amboise, Anet, Chantilly, prétendent avoir possédé une armure de Jeanne d'Arc.

Si celle de Chantilly provient d'Amboise, il n'y aurait eu en France que deux armures, ce qui ne sort pas de la vrai semblance historique. Mais nous devons ajouter que Carré, dans sa Panoplie, en signale deux autres existant en 1795, l'une à Londres (12), l'autre à Sedan (13). L'une d'elles pourrait être celle d'Anet. Resterait à établir la provenance de la troisième armure.

Il semble que ce soit l'armure de Chantilly qui ait passé au Musée d'artillerie (14) ; au catalogue, elle portait le n° 14 (15), Nous la retrouvons maintenant au Musée des Invalides, dans la série G, et sous le n° 119 (16).

Une armure, dite de Jeanne d'Arc, orne, depuis 1825, le musée de Berlin. Serait-ce celle d'Anet, dont on a perdu les traces, ou bien celle de Sedan? Les données nous manquent absolument pour établir celte unique provenance.

Quoi qu'il en soit, ces diverses prétentions, qui ne sont pas sans valeur, démontrent du moins qu'on ne croyait pas, au XVe, au XVIIe, au XVIIIe et au commencement de ce siècle, à la disparition totale des diverses armures que notre Jeanne a revêtues.

2° ÉPÉES DE JEANNE D'ARC

L'épée, il est vrai, fait intégralement partie du harnais de guerre ; mais, comme souvent l'histoire fait une mention spéciale des épées qui ont été aux mains de la Pucelle d'Orléans, nous croyons utile d'en parler à part, pour savoir si quelqu'une n'aurait pas, par hasard, échappé à l'oubli ou à la destruction.

Jeanne reçut sa première épée du sire de Baudricourt (février 1429). Elle en usa si peu que l'épée de Vaucouleurs n'a pas attiré l'attention des contemporains.

Ce fut à Tours que le roi lui donna, avec une armure complète, une autre épée. Mais à l'épée royale, Jeanne préféra celle qu'elle envoya chercher, de Chinon ou de Tours, par un armurier dans la chapelle de Sainte-Catherine-de-Fierbois (avril 1429) (17); c'était une épée marquée de cinq croix, qui, dit-on, aurait appartenu à Charles Martel.

Si cette tradition est vraie, cette épée aurait sauvé deux fois la France, à Poitiers et à Orléans (18).

Nous ne savons ce qu'est devenu ce présent royal ; quant à l'épée de Fierbois, elle la brisa sur le dos d'une ribaude(19), à Château-Thierry, selon les uns, à Gien, selon d'autres, au grand déplaisir de Charles VIl, qui lui dit qu'elle aurait mieux fait de prendre un bon bâton.

Elle la remplaça par une autre épée, prise à l'ennemi devant Paris. C'est cette dernière épée qui fut conservée à l'abbaye de Saint-Denis.

Jacques Doublet, en effet, dans son Histoire de l'Abbaye de Saint-Denis (Paris, 1625) (20), affirme que « l'épée demeura, avec la ceinture de buffle, dont les annelets, garnitures et boucles dépendans estoient d'or, que j'ai veu maintefois ».

Dans la première moitié du XVIIe siècle, Borilly signalait à Peiresc, provençal, ami de l'avocat-général Charles du Lis, petit-neveu de Jeanne d'Arc, « un coutelas ancien » qu'il tenait en présent du marquis de Canillac et qu'on lui assurait « estre de mesme que la garde de l'espée de la Pucelle d'Orléans ». — « La lame avait quatre doigts de grandeur, au bout et fort proche du tranchant, il y avait huit trous pour passer un fer d'aiguillette. » Le donataire lui avait dit « que ceste pièce avoit esté conservée depuis longues années dans sa maison (21) ».

M. Lanéry d'Arc pense que c'est cette épée qui était conservée à Saint-Denis. Nous pensons, au contraire, que l'épée de Saint-Denis était, celle que Jeanne y avait déposée et que les religieux avaient soustraite au pillage des Anglais.

Il ne serait pas surprenant que l'épée que Borilly, en 1632, avait entre les mains, et qui pour nous n'est pas l'épée de Saint-Denis, eût passé à Peiresc, de Peiresc à Charles du Lis, et, par les descendants de ce dernier, à la famille de Maleyssie.

M. le marquis de Maleyssie écrivait, en effet, en 1872, qu'avant 1789, « sa famille possédait l'épée de la Pucelle et que cette relique avait disparu à la Révolution (22) ».

On peut encore conjecturer que l'épée, dont parle M. de Maleyssie, est celle que Jeanne déclarait à ses juges être restée, avec ses autres armes, en possession de ses frères (23).

A Compiègne, Jeanne portait l'épée de Franquet d'Arras, bourguignon, qu'elle avait fait prisonnier à Lagny. Cette épée tomba aux mains de ses ennemis. C'est dire qu'elle disparut.

Encore une fois, force nous est de conclure que, de toutes les épées qui ont été possédées par Jeanne d'Arc, ou qui lui ont été attribuées, à tort ou à raison, pas une ne nous est parvenue.

 

3° CASQUES DE JEANNE D'ARC.

Nous ne parlons que pour mémoire des divers casques, dont la Pucelle a parfois garanti sa tête, car, très souvent, elle restait tête nue (24); ses cheveux étaient taillés en rond (25).

Elle avait sur la tête, à Jargeau, une chapeline (26) ; à Saint-Pierre-le-Moutiers, une salade (27).

Un casque de cette façon accompagnait, selon Carré, l'armure de Chantilly, « La coiffure, dit cet écrivain, est une salade à simple grille ouverte d'une multitude de trous ronds, sans gorgerin ni hausse-cou. »

Si l'armure de Chantilly se trouve intégralement au Musée des Invalides, c'est la salade, dont parlait Carré en 1795, qui doit encore la surmonter.

 

4° HOUSEAUX DE JEANNE D'ARC.

Nous ne nous arrêterions pas aux paires de heuses ou houseaux, qui complétaient le costume d'homme de guerre de la Pucelle, si la prétention de posséder l'un d'eux n'avait été émise et confiée tout récemment, au public par un homme honorable, dont la bonne foi n'est pas en jeu, mais s'appuie sur une illusion facile à démontrer.

En 1888, Mgr Thomas, archevêque de Rouen, annonçait qu'il se proposait « d'élever un monument qui fût, non seulement une suprême expiation, mais aussi un prélude des gloires que l'Eglise décernera un jour à Jeanne d'Arc, en la plaçant sur les autels (28) ».

 Aussitôt M. le marquis de Carbonnel-d'Hierville écrivait au comité rouennais, pour lui mander qu'il tenait à participer « aux frais et honneurs du monument », en qualité de descendant d'une des branches collatérales de la Pucelle ; puis, il ajoutait : « Je possède le houziau droit que porta Jeanne d'Arc dans son long voyage de sept mois entre Vaucouleurs et le roi. S'il vous agrée, quoique j'aie l'intention de l'offrir à Sa Sainteté le Pape, lors de la canonisation de l'une des patronnes des patriotes français, je me ferai un plaisir de vous le prêter. »

La qualité de la personne, qui se dit « l'un des représentants de la Pucelle », son ton affirmatif, ont pu en imposer à la presse quotidienne, qui s'est empressée de propager cette lettre. Mais l'historien a le droit et le devoir d'exiger des preuves; et ces preuves, j'ai le regret de le dire, ne seront jamais données, non pas parce que M. le marquis de Carbonnel est mort, depuis le 19 octobre 1888, mais parce qu'elles n'existent pas.

C'est par une suite tout imaginaire d'associations d'idées que M. de Carbonnel est arrivé à croire qu'il possédait un des houseaux qu'ait portés la Pucelle. Possesseur du château de Bois des Armes, sis sur la commune de Donnery, et proche Châteauneuf-sur-Loire, il acceptait comme prouvé que ce château avait reçu ce nom d'une défaite des Anglais, que Jeanne avait poursuivis jusque-là après la prise de Jargeau (29) ; qu'elle y avait couché et qu'elle y avait oublié sa paire de houseaux. Voilà pourquoi, au nom primitif de Bois des Armes, il substitua celui de Bas les Armes.

En 1840, il découvre, dans une vieille poutre, un houseau ; il l'attribue, sans hésiter, à l'héroïne et l'expose sous une vitrine. Mais il n'a jamais réussi à faire partager sa crédulité à son entourage le plus intime, et moins encore aux connaisseurs, qui ne donnent pas à l'objet plus de cent ans d'antiquité.

Donc le houseau de Jeanne à Bas les Armes est apocryphe ; et nous ne nous serions pas donné la peine d'en discuter l'authenticité, si cette fausse attribution, acceptée sans contrôle par la presse, n'était de nature à induire en erreur les moins crédules.

 

 

5° BANNIÈRE DE JEANNE D'ARC.

La bannière, qui était le signe du chevalier banneret, a joué, dans la mission de la Pucelle d'Orléans, un rôle si important que savoir ce qu'elle est devenue présente un réel intérêt.

 Et d'abord de quelle bannière s'agit-il ici? On distingue trois bannières dites de Jeanne d'Arc : 1° la bannière des prêtres, avec l'image de Jésus crucifié ; 2° le panonceau, où était figurée l'Annonciation ; 3° la bannière de la Pucelle, que celle-ci portait de préférence à l'épée, pour éviter de verser le sang.

C'est de cette dernière, la plus en vue, et, des trois, la plus glorieuse, que nous nous occupons.

Faite d'après ses instructions, elle était de laine, brodée de soie, au champ d'argent semé de lis. On y voyait sur la face, avec l'inscription Jhesus, Maria, l'image de Dieu, assis sur les nuées du ciel, portant le monde dans sa main, et, de chaque côté, un ange lui présentant une fleur de lis qu'il bénissait ; et, sur le revers, l'écu de France, tenu par deux anges.

Jeanne aimait son épée ; mais, comme elle dit dans son procès, elle aimait quarante fois plus son étendard. — C'est avec lui qu'à Orléans elle s'emparait des Tourelles, le 7 mai 1429 ; c'est avec lui qu'elle triomphait à Patay ; c'est le tenant en mains qu'elle assistait au sacre (17 juillet), disant « qu'ayant été à la peine, il était juste qu'il fût à l'honneur » ; c'est avec lui qu'elle tentait vainement de s'emparer de Paris (7 septembre). C'est enfin avec lui que, le 23 mai 1430, elle fut prise à Compiègne : ayant été à la peine, puis à l'honneur, il devait l'accompagner jusqu'au chemin du martyre.

Qu'est devenue cette bannière ? Et d'abord, elle n'est pas tombée entre les mains des Anglais, qui, dans le procès, n'eussent pas manqué de la produire comme pièce à conviction. — Jean de Luxembourg la laissa-t-il à son homme d'armes qui prit la Pucelle? ou, l'ayant gardée, en fit-il présent à quelque grand seigneur français ?

C'est cette dernière hypothèse qu'adopte, dans sa Panoplie, J. Carré, qui affirme que la bannière de la Pucelle se trouvait, avec l'armure, dans l'arsenal de Chantilly, et qui en donne même la description suivante (30):

« Cette célèbre bannière, l'effroi de l'Anglais, la confiance du Français, on peut assurer, avec plus de certitude que n'en présentent ordinairement les monuments, qu'elle est conservée à Chantilly.

 Sa poignée, plus près du bas de la trabe qu'aux autres, prouve qu'on la porta à pied comme Jeanne fit toujours, en l'appuyant à la ceinture. Mais ce qui la caractérise mieux encore est le reste d'une croix, avec ses caractères, que la vétusté n'a pas encore fait tomber en lambeaux comme le reste de l'étoffe : in, au-dessus d'une des branches transversales de la croix, et signo au dessous ; il est visible qu'on avait cantonné cette croix de ces quatre mots : in hoc signo vinces.

Tous les écrivains et les pièces de son procès font preuve qu'elle portait effectivement, dans sa bannière, une croix avec les noms de Jhesus et Maria. Ces monogrammes se trouvent encore gravés à jour dans le fer de la trabe et achèvent de dissiper tout doute. »

Ce sont justement ces monogrammes, qui, loin d'achever de dissiper nos doutes sur l'authenticité de cette bannière, les réveillent. — L'inscription : in hoc signo vinces n'a jamais existé (31) ; ses juges l'auraient relevée à crime contre leur accusée. Aussi, pour nous, la bannière qui se voyait à Chantilly est apocryphe.

Est-il vrai, du moins, que la bannière de ville (32), donnée à Orléans par Louis XII ou par François Ier, pour être portée dans la procession solennelle du 8 mai, contient « quatre fragments du véritable étendard de la Pucelle» (33)?

Aucun de nos vieux chroniqueurs n'a relevé celle singularité, qui n'est que légendaire.

 

§ II. - COSTUME DE VILLE DE JEANNE D'ARC

En dehors des expéditions militaires, Jeanne revêtait, le costume de ville des chevaliers: un petit chapeau de feutré sur la tête, un pourpoint et des chausses ajustés, dès souliers lacés en dehors du pied, et des habits de drap d'or et de soie, bien fourrés (34), et de diverses couleurs. Elle portait aussi au doigt un anneau.

Si les armures, si les épées de Jeanne d'Arc, que leur matière devait, ce semble, préserver de l'action du temps, sont, à peine retrouvables, peut-on espérer que certaines parties de ses vêtements civils, moins protégés contre l'usure, aient obtenu un meilleur sort? C'est ce que nous allons rechercher.

 

1° LE CHAPEAU DE LA PUCELLE D'ORLÉANS.

 Au moyen âge, quand on voulait, témoigner à quelqu'un son affection ou sa reconnaissance pour services rendus, on lui offrait, soit en don manuel, soit par legs testamentaire (36), un objet usuel, qui vous avait appartenu.

 Jeanne d'Arc ne devait pas agir autrement. En effet, Jeanne d'Arc envoya en cadeau à la veuve du grand Duguesclin, aïeule de Guy et d'André de Laval, un petit anneau d'or, qu'elle avait porté; et, à Châlons (juillet 1429), elle remit à Jean Morel, de Domremy, un « habit rouge », probablement celui qu'elle tenait du duc d'Orléans.

Une tradition qui, à première vue, semble avoir toutes les garanties de la véracité historique, prétend encore que Jeanne d'Arc a donné son chapeau à l'un des membres de la famille orléanaise qui eut l'honneur de la recevoir « en son hostel ».

Ce membre fut-il Jacques Bouclier lui-même, trésorier du duché d'Orléans, ou sa fille Charlotte? Vergnaud-Romagnési tranche l'hypothèse en faveur de celle-ci ; mais alors, quand la fille du trésorier épousa Guillaume Hanet, elle n'aurait pas oublié de mettre dans sa corbeille de noces le précieux souvenir, que sa célèbre compagne lui avait destiné, et de le transmettre à ses enfants.

Or, au XVIIe siècle, date où pour la première fois il est question du chapeau de la Pucelle, ce n'est pas dans la descendance de Charlotte, mais bien dans celle de son frère Antoine que nous le retrouvons.

D'où nous pouvons conclure que Jeanne d'Arc, s'éloignant d'Orléans, après la levée du siège, donna son chapeau au trésorier ducal, lui-même, Jacques Boucher, pour le remercier de l'hospitalité qu'elle en avait reçue, au nom du duc et de la ville d'Orléans.

Mais à quel moment Jeanne le laissa-t-elle chez ses bons amis du grand hostel de la porte Renart, « comme elle aimait les appeler dans son affectueux langage (37) ? » Nous pensons que ce fut après avoir séjourné dix jours au grand hostel de la Porte-Renard, au moment où elle entreprenait la campagne de la Loire, c'est-à-dire le 10 mai.

En effet, il n'est rien moins avéré que la Pucelle, dans les courts séjours qu'elle devait faire à Orléans, du 6 juin 1429 au 19 janvier 1430, ait reçu l'hospitalité du trésorier du duc. Elle prit gîte, croyons-nous, dans la maison, que la ville avait, pour elle, prise à bail du chapitre de Sainte-Croix, et qui était située rue des Petits-Souliers (38). C'est là du moins, ce me semble, qu'elle offrit elle-même l'hospitalité à ses frères, à maître Jehan de Velly, à maître Jehan Rabateau, son hôte de Poitiers, et à Mgr de Mortemart (39).

Pendant un certain laps de temps, les descendants du trésorier se transmirent par héritage le chapeau de la Pucelle, jusqu'au jour où l'un deux, Jean Boucher, le légua de préférence à sa fille Michelle. Comme celle-ci avait

épousé Claude Bongars (40), lieutenant-général au bailliage d'Orléans, le chapeau passa successivement à Jacques Bongars, son fils, conseiller au Parlement de Bretagne, et, à sa mort, entre les mains de sa fille unique, Elizabeth, qui l'apporta, dans sa corbeille, lorsqu'elle épousa, en 1598, Alexandre Lamy, seigneur de Thérouanne, conseiller au Parlement de Paris.

Le précieux dépôt avait quitté Orléans, voici comment il y revint.

M. de Thérouanne maria sa fille unique, Marguerite, à Jean de Metezeau, secrétaire du roi. Celle-ci, se rappelant que par les Boucher et par les Bongars elle était d'origine orléanaise, voulut mettre fin aux migrations successives du Chapeau de la Pucelle, et elle résolut de le confier à une communauté religieuse de notre ville. Son alliance avec une famille, dont l'un des membres avait coopéré à l'institution de l'Oratoire de Jésus par le P. de Bérulle, lui dicta son choix: aussi, en 1631, elle remettait le chapeau au P. Ch. Metezeau, afin qu'il l'offrit à la maison de l'Oratoire d'Orléans.

Ce religieux fit sans doute un voyage à Orléans, pour déposer à l'Oratoire le précieux cadeau de sa belle-soeur (41).

II en dressa lui-même, le 22 avril, l'authentique, dont la teneur suit (42) :

« Jésus, Maria,

« Régnant le très-chrétien roy Louys, treizième du nom, j'ay, Paul Metezeau, prestre de la Congrégation de l'Oratoire de Jésus, donné à notre maison d'Orléans ce chapeau que je certifie estre le véritable de l'héroïque et fameuse fille Jeanne d'Arc, communément appelée la Pucelle d'Orléans, en l'ordre et succession qu'il m'est ainsi échu de damoiselle Marguerite de Thérouanne, femme de Jean de Metezeau, mon frère, secrétaire du roy, et fille unique de M. de Thérouanne, conseiller en la cour de Parlement de Paris, et de damoiselle de Bongars, native d'Orléans, à laquelle damoiselle de Bongars ce chapeau était demeuré par ancienne succession héréditaire et toujours descendante jusqu'à elle, par alliance de la famille et maison en laquelle fut reçue et logée ladicte Pucelle, lorsqu'elle arriva à Orléans, et ainsi soigneusement gardé l'espace de deux cents ans, et laissé par hérédité de parens sous ce nom, pour titre mémorable de l'antiquité de leur maison, jusqu'à ce qu'enfin il m'a été donné et mis entre les mains par celle qui, dans ce rang de succession, l'a possédé, pour être, par providence divine, rapporté en la dicte ville et donné par moi à notre maison de l'Oratoire, avec cet étuy, pour y être dignement conservé à l'avenir, le sauver des cendres et le recommander à la postérité, suivant la piété, valeur, mérite et saincteté de cette fille et vierge,... etc.

« En foy et en témoignage de quoy, et du don que je fais, je signe cet écrit fait de ma main, le vingt-deuxième jour d'avril mil six cent trente et un.

« Paul METEZEAU,

« Prestre de l'Oratoire de Jésus. »

 

Nos Oratoriens conservèrent dignement le précieux dépôt, car ils le considéraient à l'égal d'une relique. Ne pouvant, le placer dans leur sanctuaire et ne trouvant pas leur bibliothèque assez digne, ils le déposèrent le plus près possible de leur chapelle, dans la sacristie (43).

 Bien plus, vénérant en Jeanne d'Arc une sainte, ils furent les premiers dans le discours sur la Pucelle en la fête du 8 mai 1672, et par l'organe du P. Senault (44), à le proclamer, et à réclamer pour elle les honneurs des autels (45).

Les Oratoriens furent les gardiens fidèles et respectueux du chapeau de la Pucelle jusqu'à la Révolution.

Dès qu'ils virent les religieux expulsés d'Orléans en vertu de la loi du 13 février 1790, ils comprirent que leur tour de l'être ne tarderait pas. Ne voulant pas déposséder la cité de Jeanne d'Arc de leur précieux dépôt, ils le confièrent, en 1791, à l'une des plus honorables familles orléanaises en la personne de Mme de Saint-Hilaire, née Jogues de Guédreville.

 Ils espéraient par là le préserver de toute profanation et de « l'oeuvre des cendres (46) » ; mais ils n'avaient pas encore quitté Orléans (47) que nos Jacobins reprenaient l'oeuvre des Anglais.

Vers la fin d'août 1792, ces misérables osaient d'abord demander au Conseil de la commune le bronze du monument de la Pucelle, « qui insultait à la liberté du peuple français », pour en couler des canons.

Le Conseil se contenta pour le moment de voter la suppression du monument. Mais pendant qu'on en démontait les pièces, une bande de forcenés, vauriens orléanais et marseillais, excités, dit-on, par celui qu'on devait surnommer Léopard Bourdon (48), se rua sur le monument et le brisa à coups de hache et de marteaux (49).

Dans le même temps, sinon le même jour, ces vandales se rendaient ensuite à l'hôtel de Mme de Saint-Hilaire, sis vis-à-vis Notre-Dame-de-Recouvrance (50), et sommèrent la vénérable femme de leur livrer, pour être brûlé, le chapeau de la Pucelle.

Celle-ci tenta de leur démontrer l'abomination de leur dessein ; ils ne répondirent à ces raisons patriotiques que par des cris de mort. Force lui fut donc, pour sauver sa vie et celle de ses enfants (51), de le livrer à ces fous furieux, ivres de vin et de sang.

 Et ces sauvages, séance tenante, allumèrent, au milieu de la cour de l'hôtel, un feu (52), dans lequel ils jetèrent le chapeau de la Pucelle, dansant sans doute autour du bûcher, et chantant le Ça ira, pendant que la seule relique de Jeanne d'Arc, qu'eût possédée Orléans, était réduite en cendres (du 1er au 3 septembre 1792).

Les Anglais et les huguenots étaient dépassés. Que la honte de cet autodafé retombe sur l'infâme et sanguinaire Léonard Bourdon !

Il nous reste, pour être complètement exact, à donner la description du chapeau de la Pucelle. Ce n'est pas chose facile, comme on en jugera. Ne se figurant pas alors qu'un tel objet pût disparaître, le P. Métezeau ne s'est point soucié de nous la donner. Dans son procès-verbal, il ne s'occupe que d'un point très important, c'est d'établir l'authenticité du dépôt qu'il confie aux Oratoriens d'Orléans (1631).

Le premier écrivain, qui ait tenté de décrire le chapeau, est l'abbé Lenglet-Dufresnoy, et cela en 1754. « Ce chapeau de la Pucelle, dit-il, conservé à l'Oratoire d'Orléans, est d'un satin bleu, avec quatre rebras brodés d'or, et enfermé dans un étui de maroquin rouge, avec des fleurs de lis d'or (53). »

Beauvais de Préau, dans ses Essais historiques sur Orléans, de 1778, se contente d'écrire : « Les Pères de l'Oratoire conservent, dans leur sacristie, le chapeau de la Pucelle d'Orléans, de velours bleu brodé en or (54). »

Lottin, qui écrit après la destruction du chapeau, copie Lenglet-Dufresnoy, tout en le modifiant:

« Il était d'un satin bleu, avec quatre rubans, brodé d'or et enfermé dans un étui de maroquin rouge, portant des fleurs de lys d'or et contenant l'écrit, c'est-à-dire l'authentique du P. Métezeau (55). »

Enfin, un troisième Orléanais, qui l'avait vu chez les Oratoriens et chez Mme de Saint-Hilaire, M. de Loynes, a rédigé, après 1830, celte note, que Vergnaud-Romagnési a publiée en 1862 : « Il était conservé dans une boîte de sapin, en feutre gris, à grands rebords, mais retroussé par devant, et le bord attaché par une fleur de lis en cuivre doré, fort allongée ; le feutre était fort endommagé par les insectes. Au sommet était une fleur de lis en cuivre doré, de laquelle descendaient des spirales, en cuivre doré, assez nombreuses, et terminées par des fleurs de lis pendant sur les bords du chapeau ; la coiffe était en toile bleue (56). »

Voilà tout ce que nous savons de la provenance et de la façon du chapeau de la Pucelle. Mais le chapeau, détruit sous ce titre en 1792, est-il bien authentique? Délicate question, dont la solution ne peut avoir qu'un intérêt purement rétrospectif, puisqu'il n'existe plus.

Il est avéré, d'abord, que Jeanne a porté un « chapeau de feutre ».

C'est un écrivain contemporain qui l'affirme, Martin Le Franc, prévôt de la cathédrale de Lausanne (57).

 De plus, le chapeau devait être de couleur bleue à l'origine; c'est ce que confirme une des verrières de l'église de Saint-Paul à Paris, faite vers 1436, et où Jeanne d'Arc figurait.

Ce vitrail comportait quatre panneaux ; dans le premier était représenté Moïse ; dans le second David, avec cette inscription : Nous avons défendu la loi; au troisième, apparaissait un croisé ; et au quatrième, se voyait « une femme, dont la coëffure était en bleu et les babils en vert; au-dessus de sa tête était écrit: Et moi, le Roy (58) ».

Sans doute, dans la description faite du chapeau, au XVIIIe siècle, il y a divergence sur l'étoffe ; les uns la qualifient de satin, les autres de velours ; mais le doute, qui pourrait surgir de ce détail, ne saurait prévaloir, à notre avis du moins, contre une tradition familiale, dont un homme grave, un prêtre, le R. P. Métezeau, s'est porté garant.

Pour nous donc, le chapeau, conservé jusqu'en 1791 chez les Oratoriens d'Orléans, avait appartenu à la Pucelle d'Orléans; et il y a lieu d'en regretter la destruction aussi sacrilège qu'anti-patriotique.

 

2° ANNEAUX DE JEANNE D'ARC.

Comme les jeunes filles de son temps et de sa condition, Jeanne portait un anneau, moins par mondanité que par piété. L'histoire nous apprend qu'elle en posséda trois.

Elle tenait l'un de ses parents et l'autre de son frère. Sur le premier, de laiton (59), sans pierre, ni chaton, étaient gravés trois croix et les noms : Jhesus, Maria.

Elle avait tonché de cet anneau sainte Catherine. Le deuxième était en or; il lui avait été donné par un de ses frères, probablement après l'anoblissement de sa famille. On les lui enleva au moment de sa captivité.

 Les Bourguignons prirent celui de laiton, et l'évêque Cauchon celui d'or. Jeanne chargea son juge de le remettre à l'Eglise.

Le troisième était ce « petit anneau d'or » qu'elle envoya à l'aïeule de Guy et d'André de Laval, la veuve du connétable Du Guesclin (60).

Elle eut encore « un petit seel » ou cachet d'or, à ses armes, qui se trouvait, au XVIIIe siècle, entre les mains de Pierre d'Arc, son frère puîné. Si ce signet n'a été gravé que vers 1430, comme le pense Vallet de Viriville (61), il aurait servi plutôt, soit à Jean du Lis, écuyer, prévôt de Vaucouleurs, soit à Pierre du Lis, écuyer, frères de la Pucelle.

Quoi qu'il en ait été, nul de ces trois anneaux, reconnus authentiques, de la Pucelle, n'est parvenu jusqu'à nous ; leur matière les préservait sans doute de destruction, mais l'oubli s'est fait sur eux, et c'est cet oubli qui a causé leur perle.

 

 

OBJETS DIVERS AYANT ÉTÉ EN CONTACT AVEC JEANNE D'ARC

Il est des objets qui n'ont eu avec la Pucelle d'Orléans qu'un contact accidentel et temporaire, suffisant néanmoins pour en faire des reliques, dans le sens le plus large de ce mot, si nous avions l'heur de les posséder.

Tels seraient les meubles, les ustensiles de sa prison, les instruments de son long supplice ; quelques pièces usuelles, auxquelles son souvenir et son nom sont restés attachés, etc., enfin les rares lettres, qui nous restent d'elle, surtout celles où elle a tracé elle-même sa précieuse signature.

§ I. - INSTRUMENTS DE SUPPLICE DE JEANNE D'ARC

On sait que Jeanne fut incarcérée dans le château de Rouen (62).

 On l'enferma d'abord dans une cage de fer ; un peu plus tard, on se contenta de la tenir à la chaîne.

Cette cage de fer avait été construite, exprès pour elle, par un serrurier nommé Castille ; elle fut pesée chez P. Cusquel, bourgeois de Rouen.

Jeanne était « ferrée par les jambes de deux paires de fers à chaîne et attachée très étroitement d'une chaîne traversante par le pied de son lit, tenante à une grosse pièce de bois, de longueur de cinq à six pieds et fermant à clé, ce qui l'empêchait de se mouvoir de place. »

Le silence que font les chroniqueurs rouennais sur les instruments, sanctifiés par la victime des Anglais, nous autorise à croire que ceux-ci les détruisirent de manière à ce qu'aucune parcelle ne fût recueillie par le peuple de Rouen, qui avait pleuré, en la voyant mourir.

Mais cette croix processionnelle, que, sur son bûcher, elle pria F. Isambard de la Pierre d'aller lui chercher à l'église voisine de Saint-Sauveur (63), qu'elle couvrit de ses baisers et de ses larmes, comment se peut-il qu'après le second procès de Rouen, le procès de réhabilitation (14501456), elle ne soit pas sortie de la pénombre qu'imposait la terreur de la domination britanique? Une destruction imposée, ou inspirée par la crainte, aurait-elle encore servi la haine fanatique de l'Anglais (64)?

 

 

- § II. — LES MONTOIRS DE LA PUCELLE

1° LE MONTOIR DE JEANNE D'ARC, A POITIERS.

A Poitiers, Jeanne avait été logée à l'Hôtel de la Rose, habité par Me Jehan Rabateau, avocat-général au Parlement, et par son épouse, « une bonne femme », au témoignage de la Chronique de la Pucelle. C'est là qu'elle résida et qu'elle subit victorieusement l'interrogatoire d'une commission royale. Charles VII, en effet, lui confiait la mission de délivrer Orléans.

On était alors vers le milieu du mois d'avril. Tout étant prêt, Jeanne sortit de l'Hôtel de la Rose pour se mettre en roule. Son cheval l'attendait non loin de la porte, au coin de la rue Saint-Etienne, aujourd'hui rue Sainte-Marthe. Elle monta sur une borne et sauta lestement en selle (65); « puis elle partit, dit la Chronique; et en chevauchant, elle portait aussi gentilment son harnais (armure) que si elle n'eût fait autre chose tout le temps de sa vie. »

Une grande foule assistait à ce départ solennel. Un des témoins de cette scène, Christophe du Peirat, habitant du quartier, dans la mémoire duquel elle était restée profondément gravée, et qui vécut près de cent ans, le raconta en 1495 à Jean Bouchet (66), l'auteur des Annales d'Aquitaine, qui habitait l'Hôtel de la Rose (67), où avait logé l'héroïne.

Du Peirat lui montra la borne, « où elle prit avantage, tout armée à blanc, pour sauter à cheval » (68).

Cette borne était en place en 1823; elle fut alors brisée par des ouvriers paveurs. MM. de la Fontenelle et Gibaut, deux antiquaires distingués, en recueillirent pieusement les débris, qui furent déposés au musée lapidaire de Poitiers et qui sont dénommés sous la rubrique de montoir de la Pucelle (69).

Ce montoir consiste en un bloc de granit de cinquante centimètres de haut sur 1 mètre à peu près ou 1m 25 de circonférence (70). M. Wallon, dans l'édition illustrée de sa Jeanne d'Arc, en donne le dessin (71).

Un autre montoir vient d'être signalé à l'attention publique.

 

2° LE MONTOIR DE JEANNE D'ARC, A CHINON.

M. G. d'Espinay garde religieusement, dans une de ses propriétés, une margelle de puits, qui, d'après la tradition, aurait également servi d'office de montoir à la Pucelle d'Orléans. « La maison de la Bouvillerie, au village du Petit-Poissay, écrit-il, n'a rien de remarquable; mais on y voit une relique précieuse : c'est une large margelle de puits, monolithe, de forme octogonale, et fort usée par le frottement des cordes.

 Elle provient du puits du Carroy, à Chinon, et a été vendue par l'administration de cette ville, lors de l'établissement d'une pompe au Carroy. Suivant la tradition, Jeanne d'Arc aurait posé le pied sur cette margelle en descendant de cheval, à son arrivée à Chinon (72).

De ces deux montoirs, le premier seul, à notre avis, offre toutes les garanties requises d'authenticité (73) ; le second n'a pour lui qu'une tradition, fort respectable il est vrai, mais insuffisante, pour le qualifier de relique.

Ayant épuisé la courte série d'objets se rapportant indirectement au souvenir personnel de Jeanne d'Arc, nous arrivons aux signatures qu'elle apposa à plusieurs lettres.

 

§ III. — SIGNATURES DE JEANNE D'ARC

Jeanne, ne sachant écrire, dictait ses lettres ; mais, vers la fin de sa courte carrière, elle s'était habituée à les revêtir de sa signature, pour leur imprimer un caractère complet d'authenticité.

 Des douze ou treize lettres missives, qui sont signalées et dont nous possédons, sinon l'original, du moins la copie, deux seulement sont signées : Jehanne.

La première en date est adressée de Moulins, le 7 novembre 1429, aux habitants de Riom. Elle fut découverte, en 1844, parmi les papiers de l'hôtel de ville de Riom, par M. Tailhand, président à la Cour royale de cette ville, et elle est restée à la bibliothèque municipale, dont elle est un des monuments les plus précieux. C'est dans la cire du sceau que se voyait le cheveu noir qu'on attribue sans trop d'invraisemblance à la Pucelle d'Orléans. M. Wallon, dans l'édition illustrée de sa Jeanne d'Arc (p. 1945), donne le fac-simile de cette lettre, avec la signature.

La seconde est adressée de Sully aux habitants de Reims (16 mars 1430). Elle resta en dépôt aux archives communales de cette ville jusqu'au commencement du XVIIe siècle, époque où Jean Rogier, prévôt de l'échevinage, la copia avec deux autres, venant également de la Pucelle, mais sans signature. Puis, on ne sait comment ni quand, elle passa à la famille de Quatrehomme du Lys. Par elle, elle arriva enfin à la famille de Maleyssie (74).

Elle traversa la révolution en Poitou, au château du général marquis de Maleyssie, lequel, écrit son petit-fils, « fut naturellement guillotiné »; c'est là qu'elle fut retrouvée par celui-ci ; il l'emporta « avec tous les papiers et souvenirs de famille relatifs à Jeanne d'Arc » dans son château d'Houville, près de Chartres, où elle se trouve encore (75).

Ces deux lettres signées sont sur papier épais, et encore munies du sceau de la Pucelle, en cire rouge (76). Leur signature trahit une main inexpérimentée, hésitante, qui semble avoir été guidée ; car chaque lettre du mot Jehanne est sans liaison, inégale; et, dans l'une comme dans l'autre, les deux n n ont été reprises; leur surcharge leur donne une forme incertaine et écrasée (77).

L'histoire nous signale, il est vrai, une troisième lettre que Jeanne a signée de son nom Jehanne la Pucelle. Mais elle a été détruite par les Anglais, à qui elle était adressée.

 Écrite le 22 mai 1429, elle ne leur fut remise que le 28 mai, le jour de l'Ascension, pendant le siège d'Orléans.

Dans ses autres lettres, Jeanne s'est contentée de tracer une croix devant le Jhesus, Maria, qui les termine ordinairement. Telles sont notamment les lettres de Jeanne aux habitants de Tournay (25 juin 1429), et, au duc de Bourgogne, datées de Reims le 17 juillet 1429, jour du sacre, et qui se trouvent encore, à Lille, aux archives départementales (78).

Ainsi, plusieurs lettres libellées sous ses yeux, dont quatre seulement, sont revêtues, soit de sa signature, soit d'une croix, voilà ce qui de la Pucelle nous reste de plus authentique.

Si seulement les édifices civils, où Jeanne a logé, et les églises ou chapelles, où elle a pénétré pour prier, nous étaient restés intacts, ils pourraient être, à un moment donné, un lieu vénéré de pèlerinage.

Mais, sauf peut-être à Domremy et à Reims, on ne rencontre, dans toutes les villes, où la Pucelle a séjourné, que les emplacements des églises ou chapelles, où elle a prié, ou des hôtels ou châteaux, où elle a pris logis, et sur lesquels, depuis quelque temps, on multiplie des plaques commémoratives. Il n'y a donc pas lieu de s'étendre sur le souvenir direct, que ces monuments, refaits ou dénaturés, ne rappellent qu'imparfaitement, et rien que pour mémoire.

 

CONCLUSION

L'enquête historique, à laquelle nous nous sommes livré, est achevée. Certes, ces résultats sont médiocres ; ils sont loin de satisfaire notre piété de catholique et notre patriotisme de Français.

Des cendres de Jeanne d'Arc, des objets qui ont été en contact avec elle, il ne reste plus rien.

Plusieurs lettres, dont l'une signée d'une croix tracée par elle, et dont deux portent encore sa signature, voilà les seuls monuments scripturaires, qui, au jour où Rome se prononcera sur la sainteté de notre héroïne, pourront nous tenir lieu de reliques.

C'est vraiment peu. N'en soyons pas surpris plus que de raison. Tout a conspiré pour nous priver de ces souvenirs vénérés : le temps et la haine, l'indifférence et l'impiété.

Les premiers détenteurs des objets, qui avaient appartenu à Jeanne d'Arc, furent ses ennemis et ses compatriotes.

La haine des Anglais, haine intelligente, détruisit jusqu'au dernier ceux de ces objets qui tombèrent entre leurs mains.

L'indifférence des Français, ses contemporains, des grands surtout, ces politiques de cour, qui, après avoir entravé sa mission, se réjouirent de sa chute, s'ils ne la préparèrent pas (79), fit dédaigner tout ce qui pouvait rappeler la libératrice d'Orléans.

Ce dédain engendra l'oubli ; l'oubli fait, la tradition rompue, les divers objets, qui, à l'origine, avaient été recueillis et conservés, n'attirant plus l'attention, ne lardèrent pas à disparaître à tout jamais.

Le peuple, qui, le premier, avait cru à la mission providentielle de la Pucelle d'Orléans, et continua à vénérer sa mémoire, quand, au-dessus de lui, on semblait n'en avoir nul souci, aurait été plus soigneux à conserver tout ce qui lui rappelait sa libératrice, si ces reliques étaient tombées entre ses mains ; il les aurait religieusement déposées dans quelque monastère, car il n'avait pas de chez lui ; et c'est là qu'on aurait pu les retrouver pour les associer au triomphe religieux de la sainte.

Toutefois ne soyons pas trop sévères à l'égard de nos pères; eussent-ils recueilli tous les objets qui ont appartenu à Jeanne d'Arc, en posséderions-nous davantage?

Le patriotisme a des éclipses et, des oublis, et les hommes ont, en religion comme en politique, la passion du fanatisme, qui les pousse à détruire ce que leurs adversaires vénèrent le plus.

L'histoire est là pour nous le rappeler.

 

N'y a-t-il pas, tout près d'Orléans, le corps du du Guesclin de Charles VII, de celui qui fut l'exécuteur armé de la mission libératrice de la Pucelle, son vaillant et loyal  compagnon d'armes, le témoin principal de sa réhabilitation ?

L'ancienne collégiale de Notre-Dame de Cléry possède, en effet, le tombeau et les cendres du bâtard d'Orléans.

Qui le sait en France, sauf quelques Orléanais? Qui se préoccupe de restaurer la chapelle funéraire, délabrée, sous les dalles de laquelle gisent sans honneurs les restes de Dunois, et d'ériger, soit à Orléans, soit à Châteaudun, soit à Cléry, une statue au Bâtard d'Orléans.

Pris en flagrant délit d'indifférence, soyons donc indulgents pour ceux qui ont laissé s'égarer tout ce qui nous rappelait la Pucelle d'Orléans.

Les passions politiques et religieuses ont été plus loin; sans sortir de notre Orléanais, est-ce que les huguenots, en 1562, n'ont pas, à Montargis, dispersé les cendres de ce Jean de Luxembourg, roi de Bohême, mort pour la France à Crécy ?

Est-ce que les terroristes n'ont pas jeté au feu le seul objet, qui à Orléans restât de la Pucelle, son chapeau?

L'obscurité poudreuse des archives a sauvé les lettres de Jeanne d'Arc ; n'est-il pas à craindre que la publicité de leurs inventaires ne les expose an rapt de quelque Libri, témoin la disparition du cheveu dans le sceau de cire de la lettre de Riom?

Mais ce que la France ne peut plus nous donner, l'Angleterre le pourrait-elle? Peut-être : après le procès de Rouen, ses juges ont dû y faire passer plusieurs pièces à conviction, ayant appartenu à leur victime: sa bannière, l'une de ses épées, un de ses anneaux, plusieurs lettres signées de son nom.

Il nous répugne d'admettre qu'après avoir assouvi dans le sang de la Pucelle sa rage de fauve, le léopard anglais ait mis en pièces tous ces objets inanimés, dont il n'avait plus rien à craindre que le cuisant souvenir des blessures qu'il en avait reçues.

Aussi pouvons-nous espérer que, de ce côté, à un moment donné, la Providence nous réserve de consolantes surprises.

L'Angleterre est entrée dans ce mouvement historique, dont Jeanne d'Arc en France est l'inspiratrice; faisant taire son amour-propre national, elle étudie, à son tour, au foyer de lumières créé par les érudits français, celle que, dans un moment de délire et de dépit, elle a condamnée.

Ce sont, de la part des descendants de ses premiers juges, les préliminaires de la révision d'un procès inique, à laquelle ils n'avaient pas encore adhéré.

A la tête de ce mouvement de réhabilitation, le dirigeant et l'éclairant, il nous plaît de voir le clergé anglais catholique (80).

Or, après avoir tiré de l'érudition française tout ce qu'elle a mis en lumière sur sa vie, la mission, le jugement et le supplice de Jeanne d'Arc, les Anglais scruteront leurs archives nationales et privées, pour éclairer d'un nouveau jour la belle figure de leur pure et héroïque victime : ils ne s'arrêteront pas là, — et c'est l'un de nos voeux, — ils examineront si, dans leurs riches collections d'art et de souvenirs historiques, il ne s'y trouve pas quelque objet ayant appartenu à la Pucelle d'Orléans.

Alors, quand Rome aura parlé, comme nous, ils tomberont à genoux devant ces reliques, pour vénérer, en elles, comme sainte, celle qu'ils ont brûlée comme sorcière.

Si pénible que soit à notre patriotisme et à notre piété l'absence de reliques, il faut nous résigner; les faits sont là ; le feu a réduit en cendres le corps de Jeanne ; l'eau, en engloutissant son coeur, plus fort que le feu et que la haine, a dispersé ses cendres.

Nous pouvons leur appliquer cette strophe modifiée de l'hymne à saint Aignan, le premier Libérateur d'Orléans :

Non lui restant amoris,

O Johanna, pignora :

Ausus haec delere flammis

Impius prorsus furor !

sans avoir la consolation de pouvoir redire les deux derniers vers :

Pauca, quae servantur, ossa

Omnium vim continent !

« Il fallait, en effet, a-t-on écrit, que tout fût merveilleux en elle, et qu'elle ne survécût pas matériellement dans la mémoire des hommes. » Son tombeau avec ses cendres, à Rouen, en eût fait la martyre d'une ville, tandis qu'elle est. la martyre de l'unité nationale, de la Patrie.

Destinée, après saint Michel, l'un de ses inspirateurs, à être l'Ange de la France, il suffit au culte de vénération, que nous lui avons voué, que « sur notre sol... il reste d'elle comme une présence invisible (81)».

SOLA SUPERSTAT MEMORIA !

 

 

 

Mémoires de la Société archéologique de l'Orléanais

 

 

==> Domrémy, le village natal de Jeanne d’Arc

==> Armoiries, étendards, bannières de Jeanne d'Arc

==>Jean Rabateau de Fontenay le Comte, président au Parlement de Poitiers et Paris (Les juges de Jeanne d’Arc à Poitiers)

==> Les Prisons de Jeanne d’Arc - Le Geôlier de Jeanne d’Arc

==> L’anneau attribué à Jeanne d’Arc racheté par l’association du Puy du Fou sera exposé dans l’église Jeanne d’Arc à Rouen

==> Dunois

 

 


 

(1) « In villa Turonensi fecerunt eidem... datae armaturae. » Déposition de Louis de Coutes. (QUICHERAT, III, p. 67.)

« Au maistre armeurier pour ung harnois complet pour ladite Pucelle, 100 livres (= 564 francs). » Compte de Me Henian Raguier, trésorier des guerres. (QUICHERAT, V, p. 158.)

(2) QUICHERAT, IV, p. 469.

(3) « In armorum pulchritudine complacere. » Perceval de Boulainvilliers. (QUICHERAT, V, p. 120.)

(4) « Messeigneurs y ont esté coutumés en habits royaux. »

(Lettre de trois gentilshommes angevins. Reims, 17 juillet 1429.) — MONSTRELET.

(5) CARRÉ, dans sa Panoplie, prétend qu'elle reçut à Vaucouleurs une armure d'homme. Cet auteur se trompe : à Vaucouleurs, Jeanne revêtit le costume d'un sergent d'armes, lequel ne comportait pas une armure, réservée aux chevaliers.

(6) Jehan Chartier. (QUICHERAT, IV, p. 89.)

(7) Inventaire des vieilles armes du château d'Amboise, du mois de septembre 1449, (Bibliothèque de l'École des Chartes (1847-1848), p. 418.)

(8) Cette armure se voit dans le portrait de Jeanne d'Arc, par André THEVET (1584). — M. P. Lanéry d'Arc a mis, en tête de sa brochure, la gravure sur bois de ce portrait, qui a été fait sur le premier portrait que possède Orléans de sa Libératrice.  

(9) et documents curieux inédits sur les monuments élevés à la mémoire de Jeanne d'Arc, p. 47. Epinal, 1861.

(10) Jeanne d'Arc, par André THEVET. Introduction, p. 12.

(11) CARRÉ, p. 439 et suiv.

(12) Panoplie, p. 439.

(13) Panoplie, p. 443. — L'armure de Sedan comporterait une cuirasse d'homme.

(14) C'est du moins l'opinion de M. Lanéry d'Arc.

(15) Catalogue du Musée d'artillerie, par DEZEST, et Histoire de France, par Henri MARTIN, t. VI, p. 216.

(16) Catalogue du Musée des Invalides.

(17) QUICHERAT, I, p. 76. — « Scripsit viris ecclesiasticis... quatenùs placeret eis, ut ipsa haberet illum ensem, et ipsi miserunt eum. »

(18) Sainte-Catherine de Fierbois. Ses monuments et ses souvenirs de Jeanne d'Arc, par l'abbé FOURAULT, 1880.

(19) Cf. WALLON, Ier vol., p. 242.

(20) Dans un voyage fait en 1613, un prince de Weiniar dit avoir vu cette épée dans l'abbaye de Saint-Denis. — Néanmoins, aux yeux de Quicherat et de Vallon, l'authenticité de cette épée est plus que douteuse.

(21) Lettre de Borilly à Peiresc, en date du 16 janvier 1632, communiquée par M. Tamizey de la Roque à M. P. Lanéry d'Arc, qui la cite dans sa Note sur les armes de la Pucelle, p. 17.

(22) Lettre de M. de Maleyssie. (Bulletin de la Société archéologique de l'Orléanais, t. V, p. 291.)

(23) Jeanne déclara à ses juges que le tout valait plus de 1,200 écus. (QUICHERAT.)

(24) « Et la veis monter à cheval, armée tout en blanc, sauf la tête. ». (Lettre de Guy et André de Laval, 8 juin 1429.)

(25) La Chronique rochelaise dit que les cheveux de Jeanne étaient noirs et ronds. (Relation inédite sur Jeanne d'Arc, extraite du Livre noir de l'hôtel de ville de La Rochelle, par QUICHERAT. Orléans, Herluison, 1879.)

(26) Casque léger en forme de calotte, sans masque ni visière. (QUICHERAT, III, p. 97.)

(27) Casque conique, muni par derrière d'un large rebord et par devant d'une visière mobile. (QUICHERAT, III, p. 218 )

(28) Lettre pastorale.

(29) Ce fait est légendaire.

(30) P. 360.

(31) WALLON, édition illustrée de Jeanne d'Arc, p. 62.

(32) MANTELLIER, Histoire du siège d'Orléans, p. 192. 1867.

 

 

(33) bannière est au Musée de Jeanne d'Arc, à Orléans.

(34) Chronique anonyme. (Revue historique, t. XIX, p, 60.) « Et quant elle estoit désarmée, si avoit elle estat et habits de chevalier : soliers lachiés dehors pieds; pourpoinct et cauches justes, et ung chapelet sur le fieste ; et portoit très nobles habis de draps d'or et de soie, bien fourés. »

(35) Cf. les divers testaments insérés dans les Mémoires de la Société archéologique de l'Orléanais (passim); par exemple le testament de l'évêque d'Orléans, Raoul de Grosparmi (XIIIe siècle) : celui de Blanche, duchesse d'Orléans (XlVe siècle); celui de Jehanne Luillier, veuve de Jacques Boucher (XVe siècle), etc.

(36) Cf. les divers testaments insérés dans les Mémoires de la Société archéologique de l'Orléanais (passim); par exemple le testament de l'évêque d'Orléans, Raoul de Grosparmi (XIIIe siècle) : celui de Blanche, duchesse d'Orléans (XlVe siècle); celui de Jehanne Luillier, veuve de Jacques Boucher (XVe siècle), etc.

(37) Ce n'est pas sans hésiter que nous attribuons à Jeanne d'Arc, après M. de Molandon (Jacques Boucher, p. 393), cette phrase si honorable pour la famille Boucher ; nous ne l'avons rencontrée nulle part, et celui qui avait tout intérêt à nous renseigner sur le document, où il a dû l'emprunter, se tait absolument.

(38) DOINEL, Note sur une maison de Jeanne d'Arc à Orléans. (Mémoires de la Société archéologique, t. XV, p. 494-497.) — » Ung hostel... que tenoit par avant la Pucelle. » (Acte du 27 février 1432.)

(39) Pour les dépenses du premier séjour de Jeanne, les Comptes de forteresse constatent que Jacques Boucher reçut une certaine somme. — « A Jacques Bouchier, trésorier,... pour aucune dépense faicte par Jehanne la Pucelle en son hostel. »

Pour son dernier séjour, 19 janvier 1430, les cédules des comptes sont au nom de Jehan Morchoasne, procureur de la ville.

(40) Il ne s'agit pas ici de la branche protestante des Bongars, d'où est sorti le célèbre historien de ce nom.

(41) Le P. Paul Métezeau était un orateur distingué et un écrivain mystique. Il mourut à Calais le 17 mars 1682, dans le cours d'un carême qu'il prêchait, à cinquante ans, après avoir opéré d'éclatantes conversions. (V. Feller.) Il avait pour frère Clément de Métezeau, qui s'est immortalisé en construisant la fameuse digue de La Rochelle (1627-1628).

(42) V. LENGLET DUFRESNOY, Histoire de Jeanne d'Arc, III, p. 278, et LOTTIN, Recherches historiques, IIe vol.

(43) BEAUVAIS DE PRÉAU, Essais historiques sur Orléans, 1778, p. 135.

(44) Le P. Senault avait été supérieur de l'Oratoire d'Orléans vers 1642, « Par ses éclairs de doctrine et feux de dévotion, il enflammait si amoureusement les coeurs des Orléanois, qu'il les avait rendus tous extatiques et ravis. (LE MAIRE, Antiquités de l'Eglise d'Orléans.)

(45) Voir péroraison du Panégyrique de Jeanne d'Arc du 8 mai 1672, attribué au P. Senault, et publié seulement en 1887. Le R. P. Senault était alors Supérieur général de l'Oratoire.

(46) Procès-verbal du P. Métezeau.

(47) Les Oratoriens semblent n'avoir été supprimés que vers la fin de septembre 1792, époque où l'inventaire de leurs biens fut fait par MM. Porcher, Desbois, Boucher de Mézières, officiers municipaux ; Chartrain, Marcueys et Defay, notables. (LOTTIN, à la date du 27 septembre 1792.)

(48) VERGNAUD, Notes curieuses, p. 12. Cet auteur le désigne sous le titre de représentant du peuple.

(49) Le serrurier Dufresné, chargé de cette besogne, tenta de sauver le buste de Jeanne d'Arc, puis la tête; mais, dénoncé par un de ses ouvriers, il fut obligé de tout briser.

(50) C'est maintenant la maison n° 11 de la rue de Recouvrance, occupée par l'un des petits-fils de Mme de Saint-Hilaire, M. Arthur de Dreuzy.

(51) L'aîné devint l'illustre botaniste, M. Auguste de Saint-Hilaire, mort à Orléans en 1853.

(52) VERGNAUD-ROMAGNÉSI, Notes curieuses sur le chapeau de Jeanne d'Arc, p. 15.

(53) Histoire de Jeanne d'Arc, t. III, p. 279. Orléans, 1754.

(54) P. 135.

(55) Ier vol., p. 179.

(56) V. Notes curieuses sur les fêtes de Jeanne d'Arc et sur son chapeau. Orléans, Herluison, 1862.

(57) Le champion des Dames, de 1440 : Jeanne y est représentée avec un costume militaire et son chapeau de feutre. (WALLON, p. 147.) C'est ce type qu'on devrait reproduire, en le rapprochant du chapeau de Charles VII, d'après un portrait du temps. (LE MÊME, p. 364-651.) — Donner au chapeau de Jeanne d'Arc la forme Henry IV, c'est commettre un anachronisme.

(58) LEVIEIL, L'art de la peinture sur verre, Paris, 1774. Ire partie, p. 32. Cité dans l'Almanach patriotique de Jeanne d'Arc, 1889.

(59) Alliage de cuivre et d'étain, qui était l'or des pauvres.

(60) QUICHERAT, V, p. 109.

(61) Les anneaux de Jeanne d'Arc. (Mémoires de la Société des Antiquaires de France, t. XX.)

(62) Ce château, la tour même où elle fut enfermée, tout a disparu.

(63) FALLUE, Histoire de l'église métropolitaine de Rouen, t. II, p. 419. — « Cette église n'existe plus; elle fut démolie à l'époque de la révolution, bien qu'elle fût remarquable par son architecture et qu'elle rappelât le souvenir de Jeanne d'Arc et de Pierre Corneille. » (Note de M. Ch. DE BEAUREPAIRE.)

(64) Il existe encore, dit-on, dans une chambre de la ferme de Sept-Fonds, située à environ trois kilomètres nord-ouest de Vaucouleurs, un christ en bois de chêne, grossièrement sculpté, qui a environ 90 centimètres de hauteur. Sur la croix, il y a une inscription ainsi conçue :

JEANNE D'ARC ADORA CE CHRIST EN 1428

A LA CHAPELLE SAINT NICOLAS

VAL DE LA FERME DE SEPT FONDS.

Plusieurs curieux viennent de fort loin voir ce christ, qui est encore actuellement dans l'état où Jeanne d'Arc elle-même l'a vu, car il est parfaitement conservé. Quant à la chapelle, elle n'existe plus depuis longtemps.

Si ce crucifix est bien celui devant lequel Jeanne pria, on peut le considérer comme un précieux souvenir, mais non comme une relique.

Parmi les objets auxquels se rattache le souvenir de Jeanne d'Arc, il faut encore considérer comme perdus et anéantis : le tableau qui se trouvait dans la chambre que Jeanne avait occupée dans l'hôtel de la Porte-Renard, à Orléans : il représentait trois femmes, avec cette inscription : Justice, Paix, Union ; les fonts baptismaux, de Troyes, de Saint-Denis, où elle fut marraine. (WALLON, IIe vol., p. 97.)

(65) C'est à tort que M. Dupuis, dans sa brochure des OEuvres littéraires et artistiques inspirées par Jeanne d'Arc, place cette scène à Selles en Berry, en présence de Guy de Laval.

(66) Il était né en 1476.

(67) Il se trompe en faisant de l'Hôtel de la Rose une hôtellerie. C'était la demeure même de Jean Rabateau, où se fit l'interrogatoire.

(68) Voici le texte de Jehan Bouchet :

« J'ai ouï dire, en ma jeunesse et dès l'an 1495, à feu Christophe du Peirat, lors demourant à Poictiers & près ma maison, et qui étoit âgé de près de cent ans, qu'en ma dicte maison y avoit une hostellerie, où pendoit l'enseigne de la Rose, où ladicte Jehanne étoit logée, et qu'il la veit monter à cheval toute armée à blanc, pour aller au lieu d'Orléans ; et me montra une petite pierre, qui est au coin de la rue Saint-Etienne, où elle print avantage pour monter sur son cheval. »

(69) Catalogue du musée des Antiquaires de l'Ouest (1854). S.-A., II, p. 38.

(70) Nous devons ce renseignement à l'historiographe du diocèse de Poitiers, M. le chanoine Auber. — Cf. Jeanne d'Arc à Poitiers, par Bélisaire LEDAIN. Saint-Maixent, 1891.

(71) P. 92.

(72) D'ÉPINAY, Notice sur Marçay. Tours, 1882.

(73) « Rien de plus authentique, chez nous, que le montoir de la Pucelle. » (Lettre à l'auteur de M. le chanoine Auber, historiographe du diocèse de Poitiers, 5 août 1889.)

(74) JADART, Jeanne d'Arc à Reims. Reims, 1887.

(75) ITEM. V. Lettre de M. le colonel comte de Maleyssie, du 1er novembre 1886 (p. 125).

(76) V. Lettre de M. le comte de Maleyssie.

(77) Voir pour Riom, WALLON, op. cit., p. 58 ; et pour Reims. p. 200-201, et JADART, op. cit., p. 58 : «... Je peux vous dire que ces lettres sont sur papier épais ; la forme à celle d'une feuille de papier à lettre renversée et pliée, de sorte que la lettre est très étroite. Le cachet est en cire rouge. » (Lettre de M. le comte de Maleyssie à M. Jadart, de Reims, en date du 1er novembre 1886.)

(78) M. Wallon en donne le fac-simile.

(79) Selon H. Martin, « Jeanne fut trahie en haut, pleurée en bas, plus que comprise ». Ce jugement, dans tous ses termes, est trop absolu. Jeanne fut livrée plutôt que trahie. « Non prodita, sed tradita, condamnée plutôt que jugée. Nullius patrocinio defensa, hoste judice damnata. » (Les Faits de Jeanne d'Arc, p. 106.)

(80) L'Académie de la Religion catholique de Londres offrait, le 18 novembre 1890, une séance à son Ém. le cardinal Manning. Le R. P. Francis Wyndham, des Oblats de Saint-Charles, fit alors une lecture sur la mission de Jeanne d'Arc, son but et son étendue : The mission of Jeanne d'Arc, its objects and extent. — Quelque temps après, le même religieux publiait dans The Dublin review, January 1891, une dissertation sur la Pucelle d'Orléans, vue à la lumière des documents originaux : The maid of Orleans, by the light of original documents.

Nous nous sommes empressé de signaler ces travaux d'Outre-Manche dans les Annales religieuses d'Orléans (t. XXXI, p. 290). Ils sont de bon augure pour la cause qu'Orléans et Saint-Dié poursuivent en cour de Rome.

(81) Mgr THOMAS, archevêque de Rouen, Exorde du panégyrique de Jeanne d'Arc, prononcé à Rouen, le 16 mai 1882.

 

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