Bombardement de la flotte anglo-batave et attaque de la ville des Sables d'Olonne en 1696
Les nombreuses expéditions maritimes qui signalèrent le siècle du grand roi, ruinèrent presque en entier la population sablaise. La marine olonnaise fut un des principaux éléments avec lesquels Colbert a formé la grande armée navale de Louis XIV.
C'est des Sables que sont sortis les plus intrépides matelots et les plus habiles pilotes, dans des temps où, suivant l'expression de son historiographe M. Chassériau, cette marine était la plus puissante, la plus nombreuse et la plus vaillante de toute l'Europe.
Dans toutes les mémorables guerres navales de de cette époque, — soit à la baie de Bantry, en 1689; soit à Messine, en 1676; soit à La Hogue en 1692 ; — les Sablais ont pris une noble part aux gloires maritimes de la France.
Ils étaient sous les ordres de leurs compatriotes des provinces de l'Ouest, parmi lesquels on doit nommer le marquis de Villette, le chevalier de l'Etenduère le chevalier de Coëtlogon, le marquis de Sainte-Hermine, le marquis de la Bretesche, etc.
Au combat de Velez-Malaga, qui se livra le 24 août 1704, et dans lequel, suivant l'expression de l'amiral hollandais, « les » flottes combinées de l'Angleterre et de la Hollande ne conservèrent pas trois mats l’avant de réserve », se trouvaient cinq ou six cents marins des Sables
Plusieurs d'entre eux exerçaient les périlleuses fonctions de commandants de brûlots.
L'année 1696 enregistra, pour la ville des Sables, un acte de dévouement et de patriotisme qui couvrit de gloire un pauvre pécheur sablais, Daniel Fricaud.
Le 17 juillet, la flotte anglo-batave, commandée par l'amiral hollandais Russel, se présenta devant le port des Sables avec l'intention de le bombarder.
L'amiral ayant pris en mer le pécheur Daniel Fricaud, le contraignit de lui servir de pilote C'est auprès de lui que le chef d'escadre prit des renseignements sur l'étendue de la ville.
Fricaud, prévoyant les sinistres projets de l'ennemi, certifia à l'amiral que la ville, au lieu d'avoir 120 à 150 mètres de largeur sur une longueur de 1,700 mètres, était au, contraire aussi large que longue.
Sur de tels renseignements, on dirigea les projectiles de la manière la plus meurtrière.
Il en advint que deux mille bombes, passant par-dessus les maisons, allèrent à plus de 300 mètres tomber dans le port, où elles n'occasionnèrent aucun mal : néanmoins, dans le quartier de la Chaume, quarante maisons furent détruites.
La sagacité des Sablais, en cette circonstance, alla au-devant de la ruse de Fricaud. Etonnés tout d'abord de la maladresse constante du tir des flottes combinées, ils disposèrent près du port une immense quantité de paille, et ils l'enflammèrent au fur et à mesure que les bombes venaient s'éteindre dans l'eau.
La ville parut complètement incendiée, et la flotte anglo-hollandaise, satisfaite de ses exploits, se retira, laissant la liberté au pécheur Daniel Fricaud.
Sans le patriotisme de Fricaud, la ville eût été promptement réduite en cendres.
Son artillerie se composait alors de quatre vieilles pièces de canon dont il eût été impossible de se servir. La flotte anglo-hollandaise partie, on songea à mettre les Sables en état de résister aux attaques ennemies.
Le maréchal de Joyeuse s'y rendit dans ce but en 1697, et fît construire à la Chaume quelques fortifications, qui existent encore aujourd'hui.
A d'autres époques, on continua ces travaux; en 1746, 1750 et 1779, ils furent augmentés, et l'on établit, près de l'ancien château d'Arundel, une ligne de retranchement capable de contenir un camp de vingt mille hommes.
Dans l'année 1746, où la guerre éclata de nouveau entre la France et l'Angleterre, la ville des Sables fournit trois cents matelots aux flottes de Louis XV; elle avait cependant déjà diminué de plus de moitié depuis le règne de Louis XIII.
La révocation de l'édit de Nantes, cruelle erreur de la vieillesse de Louis XIV, était venue, en même temps que la décadence de notre puissance navale et l'abandon de nos établissements maritimes, porter un coup mortel au commerce et à la navigation du Poitou.
Le quartier de la Chaume surtout qui comptait beaucoup de protestants avait été désolé par les persécutions qui signalèrent les dernières années du grand roi.
Le temple calviniste avait été détruit ; des dragons avaient été placés chez les prétendus réformés, y vivant à discrétion, y commettant les plus odieux excès et enlevant les enfants que l'intendant de la province faisait mettre dans les couvents, aux frais de leurs parents.
L'Océan, qui avait été la cause de la prospérité de la ville des Sables, semblait vouloir lui-même travailler à la destruction de son propre ouvrage.
Vers le milieu du XVIIIe siècle, les Anglais firent, à l'égard des Sablais, un trait de bravade peu en harmonie avec leur grave caractère, et peu digne d'une grande nation.
Une flottille française, composée de cent quarante voiles marchandes environ, se rendait de Bordeaux en Bretagne et en Normandie.
Cette flottille tomba la nuit au milieu d’une escadre anglaise, qui croisait dans les parages de l'Ile-Dieu.
L'amiral Boskouin vint, avec toute son escadre, devant le fort de la Chaume, il mit ses vaisseaux le cap à terre et en cercle, fit entrer dans ce cercle les bâtiments français, et se livra avec tout son équipage à de bruyantes et à de joyeuses orgies, aux yeux des Sablais, dont l'exaspération était d'autant plus grande, que, à défaut de garnison et sans défense, ils ne purent même essayer de châtier une telle insolence
L'histoire rapporte ici un trait de patriotisme dû à un pêcheur sablais dont le nom n'a pas été conservé. Un plus grand nombre des vaisseaux de la flottille française eut été l'objet de l'insolence britannique, sans son dévouement.
Ce pêcheur s'était retiré entre les écueils des Berges-d'Olonne (les Barges), et, connaissant bien le passage situé entre ces rochers et la terre, il l'indiqua aux vaisseaux français, par le moyen de signaux qu'il fit avec une serviette attachée à son aviron.
C'est ainsi que soixante des navires de la flottille vinrent gagner ce passage et mouillèrent sous les forts de Saint-Nicolas de la Chaume, d'où ils entrèrent dans le port avec la marée.
Les dernières années de la vieillesse de Louis XIV furent fatales aux Olonnais. La décadence de notre puissance navale avait entraîné avec soi la ruine, presque complète, de la population maritime sablaise, morte glorieusement au service du pays.
La révocation de l’édit de Nantes fit sentir à la Chaume, où se trouvaient encore grand nombre de Protestants, toutes les horreurs des guerres de religion.
Le temple protestant fut détruit et les dragons furent placés chez les prétendus réformés; ils y vivaient à discrétion, y commettant les plus, odieux excès, et enlevaient les enfants, que l'intendant de la province faisait mettre dans les couvents, aux frais de leurs parents.
A la ruine et à la désolation produites avec tant de persévérance par les événements, vinrent se joindre les sinistres de l'Océan, cause primitive de la prospérité des Sables.
En 1747, 1750 et 1751, la partie de la ville qui s'étendait au midi, fut envahie par la mer, et plusieurs rues, couvertes d'un très-grand nombre d'habitations, furent renversées; elles sont maintenant remplacées par des dunes.
Les sables arrachés de la côte et de la ville furent entraînés dans le chenal et dans le port, qui s'étaient encombrés à ce point, que des barques de 80 à 100 tonneaux n'y pouvaient entrer sans attendre les jours de grandes marées.
Divers travaux furent alors projetés pour conserver le reste de la ville.
De 1761 à 1756, un mur d'enceinte fut élevé au sud, le long de la mer, pour couvrir la ville; mais il ne produisit pas les résultats espérés, et, en 1760, quelques maisons furent encore détruites par l'Océan.
En 1767, après avoir établi quelques ouvrages d'amélioration, l'illustre Lamandé construisit la magnifique jetée qui s'avance grandiose au milieu de la mer.
Cette jetée, en fixant le chenal le long du coteau de la Chaume, opéra, au midi de la ville, des attérissements, qui la mettent à l'abri des vagues, souvent déchaînées.
Le mur d'enceinte établi de 1751 à 1756 sur le bord de la mer, fut terminé, dès 1763, par un pan coupé, derrière lequel on avait placé des remblais et des pavés.
Ce mur est devenu aujourd'hui, sous le nom de Remblai, la plus délicieuse et la plus poétique promenade que l'on puisse rencontrer, en été, sur le bord de la mer.
Le soir, sur le Remblai, après une chaude journée de juillet, je spectateur hume avec délices la fraîcheur de la mer, enivré par les derniers rayons du soleil, dont le mirage sur les dunes enfante de capricieux méandres. Un ciel pur et d'un horizon infini élève l'âme; les phares de la Chaume et de la jetée jettent au loin leurs feux protecteurs, et la vague mugissante vient battre l'estran, qui se développe majestueusement aux pieds du Remblai, sur une étendue de deux kilomètres. L'image du Remblai se réfléchit dans cet Océan, auquel les poètes n'ont pas besoin de donner un lit de sable d'or.
La vue magnifique dont on jouit sur cette promenade rappelle cette pensée de Hugo : « Choisissez donc, du chef-d'oeuvre du jardinage, ou de l'oeuvre de la nature; de ce qui est beau de convention, ou de ce qui est beau sans les règles. »
Vers le milieu du XVIIIe siècle, une mairie et un conseil municipal furent institués pour la ville des Sables.
Le 15 juillet 1747, un octroi y fut établi; et, pour en assurer la perception, on fit construire le mur de clôture, dont la première pierre fut placée le 14 août.
Dans la méme année 1747, on créa aux Sables un bataillon de miliciens gardes-côtes, sorte de garde nationale, recrutée dans les paroisses situées sur le bord de la mer, et chargée de la défense du littoral. Les miliciens gardes-côtes furent réorganisés en 1778, sous le nom de canonniers gardes-côtes.
Peu de temps après, en 1755, la Chaume fut réunie, pour l'administration, à la ville des Sables.
Les deux paroisses réunies ne comptaient alors qu'une population de 5,500 âmes. Un siècle avant, cette population avait atteint le chiffre 15,000.
Aux Sables existait un siège d'amirauté, chargé de rendre la justice sur toutes les causes maritimes du Poitou et sur tout ce qui se passait en mer entre les sujets du roi.
Il y avait aussi un siège d'élection, créé en 1594, et chargé de juger les différents en matière d'impôts; un siège de traites, pour les divers droits de douanes; un subdélégué de l'intendant, une brigade de maréchaussée et un bureau de poste aux lettres. Toutes ces charges, la dernière exceptée, disparurent dans la tourmente révolutionnaire.
Les dix années de paix qui précédèrent la Révolution rendirent quelque prospérité à la ville sous le règne de Louis XVI, la marine d'Olonne avait repris la pêche de la morue, abandonnée depuis longtemps, et envoyait chaque année trente navires sur le banc de Terre-Neuve. Cette recrudescence de prospérité ne devait pas être de longue durée : la Révolution éclata, et réduisit à néant les derniers efforts de notre marine.
La plupart des marins, recrutés alors pour les guerres de la République et de l'Empire, durent aller mourir sur les champs de bataille ou gémir sur les pontons anglais. Les armateurs renoncèrent aux expéditions de Terre-Neuve. C'est ainsi que notre ville abandonna cette pêche, si propice aux développements de l'industrie et à l'éducation vigoureuse du marin.
Guide historique et pittoresque du baigneur aux Sables d'Olonne / par M. J.-J. Meunier
1622 Louis XIII et la défaite de Soubise - Prise du Château de la Chaume - tour d'Arundel (bataille de l'île de Rié) <==.... ....==> 1747 Naufrage du navire marchand à deux ponts « La Placellière »- Les canons du fort Saint Nicolas aux Sables d'Olonne
Sur la Terre de nos ancêtres du Poitou - Aquitania (LES GRANDES DATES DE L'HISTOIRE DU POITOU ) <==