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PHystorique- Les Portes du Temps
15 mai 2022

Charette à Legé. — Le grand combat de Palluau 15 mai 1793 - Le poison de la Révolution

Charette à Legé Le grand combat de Palluau 15 mai 1793

Le 5 mai 1793, la ville de Legé est prise par quatre colonnes républicaines: celle de Beysser partie de Machecoul, celle de Boulard partie de Palluau, celle de Baudry d'Asson partie de Challans et celle de Laborie partie de Saint-Colombin.

Les républicains ne rencontrent presque aucune résistance et se replient ensuite sur leurs cantonnements initiaux, ne laissant à Legé qu'une petite garnison de 320 hommes sous les ordres du chef de brigade Prat.

Mais le 7 mai, la colonne de Laborie, de retour à Saint-Colombin, est écrasée par Charette lors d'une attaque-surprise. Estimant que Legé est désormais insuffisamment défendue, le général Canclaux ordonne son évacuation.

Celle-ci s'effectue le 9 mai en fin de journée : la colonne de Prat se retire sur Machecoul en passant par Palluau, Saint-Christophe-du-Ligneron et Challans.

La garnison est attaquée près du bourg par des insurgés embusqués, mais un détachement envoyé par Boulard les font reculer.

Le soir même, Charette peut faire son retour à Legé, où il établit son quartier-général.

La situation de Boulard devient alors compliquée : des rassemblements d'insurgés sont signalés au Poiré-sur-Vie, aux Clouzeaux et à La Roche-sur-Yon, menaçant les postes de La Mothe-Achard, d'Aizenay et de La Chapelle-Palluau, situés sur ses arrières.

La victoire de Saint-Colombin et la réoccupation de Legé, que le bruit public transformait en attaque de vive force, servirent beaucoup à la réputation de Charette ; aussi la petite armée de Legé s'accrut-elle rapidement.

Parmi les nouveaux venus, on remarqua une bande de trois cents paysans bien armés, marchant avec plus d'ordre et de discipline que la plupart des Bas-Poitevins ou des Paydrets. Ils appartenaient aux paroisses du Loroux-Bottereau (1), de la Chapelle-Basse-Mer, de la Boissière-du-Doré, de la Renaudière, etc.

 En apprenant les succès de Charette, ils avaient quitté l'armée de M. de Lyrot et étaient accourus se ranger sous les ordres du général dont tout le monde parlait.

Charette les appela ses « grenadiers », et la chanson les a popularisés (2).

 On signala, à tort d'ailleurs, un détachement de cavalerie républicaine dans la forêt de Touvois.

Charette ordonna une reconnaissance dont il prit le commandement et à laquelle participa la plus grande partie de ses forces. Le drapeau du 4e de ligne fut laissé en garde à un sous-officier de ce régiment, qui semblait s'être rallié tout à fait à la cause royaliste. Cette conversion n'était qu'apparente, car le sous-officier profita de l'absence de la plupart des Vendéens pour s'évader sous des vêtements de paysan, en cachant soigneusement sur sa poitrine l'étendard aux trois couleurs.

Il gagna Machecoul où la garnison le promena en triomphe (3).

Les officiers républicains avaient raison d'honorer l'obscur sergent qui avait risqué sa vie pour rendre à son régiment le signe vénéré qui s'appelle « le Drapeau » ! Nous regrettons de ne point savoir le nom de ce vrai militaire que les documents officiels ont eu le tort de ne pas signaler.

Charette songeait toujours à attaquer Machecoul. Il en fut encore empêché par une opposition qui se produisit chez les chefs royalistes du voisinage.

A la tête des dissidents étaient les deux frères Savin : l'un, Louis, maître en chirurgie, commandant au Luc; l'autre, Jean-René, capitaine de milice coloniale, commandant à Saint-Etienne-du-Bois, et enfin Joly, toujours violent et mal disposé dans sa solitude du Poiré.

 Ils se désintéressaient de Machecoul et conseillaient l'attaque de Palluau.

Louis Savin écrivait à son frère d'agir auprès de Vrignault pour qu'il ne prît pas part à l'expédition dans le pays de Retz (4).

Charette ne pouvait tenter l'attaque de Machecoul sans l'appui de Vrignault, sur le territoire duquel il prélevait ses réquisitions (5).

Le commandant de Vieillevigne ne répondait point aux sollicitations des Savin et ne créait de ce côté aucune difficulté à son général, mais Joly intervint et envoya un émissaire à Legé pour concerter une attaque de Palluau par trois côtés à la fois.

 En réalité, c'était Joly qui préparait l'opération, bien que, contrairement à ses habitudes d'indépendance, il témoignât maintenant beaucoup de considération pour la personne de Charette (6).

Quand leurs relations devinrent plus fréquentes, elles ne gagnèrent point en cordialité. Le plan ne fut arrêté qu'au dernier moment (7).

M. de Royrand qui, malgré sa réconciliation avec Charette, devait continuer à lui témoigner de la froideur et ne jamais lier ses opérations avec celles du commandant de Legé, ne cachait point sa désapprobation pour l'inaction de son voisin.

Le vieil officier estimait que Charette devait attaquer Palluau, comme le désiraient Savin et Joly, mais il était aussi d'avis qu'il fallait s'emparer de Machecoul, ainsi qu'il l'écrivait dans une lettre curieuse (8) à MM. de Bulkeley et de Cholippes, les commandants royalistes de la Roche-sur-Yon.

 

 

A Palluau, chez les Républicains, l'incertitude n'était pas moindre.

Si Boulard avait suivi ses propres inspirations, il eût donné l'assaut à Legé. Après en avoir chassé Charette et Vrignault, il serait rentré aux Sables-d'Olonne, son véritable centre de commandement, d'où il aurait dirigé des colonnes volantes jusqu'à Saint-Gilles et Saint Jean-de-Monts pour assurer la surveillance de la côte dans toute la Vendée maritime.

Malheureusement pour le commandant de l'armée des Sables, il lui fallait compter avec les représentants et leurs conceptions stratégiques. Sans lui donner d'ordres péremptoires, le conventionnel Gaudin, qui était d'ailleurs d'opinions modérées (9) et respectueux de la discipline militaire, l'engageait à disperser les rassemblements du Poiré et des Clouzeaux (armée de Joly) et de la Roche-sur-Yon (bande de Rulkeley).

De plus, sur sa ligne de retraite, plusieurs points : la Chapelle-Palluau, Aizenay et la Mothe-Achard (10), étaient menacés par des rassemblements qui grossissaient tous les jours.

La retraite allait être ordonnée jusqu'à la Mothe-Achard, dont il importait de dégager les abords, lorsque arriva l'avis que Charette se disposait à attaquer (11).

Le général républicain ne croyait pas avoir à combattre d'autres adversaires que ses voisins de Legé. Le lendemain, il apprit que le tocsin se faisait entendre au Poiré et dans les paroisses environnantes.

 C'était Joly qui rassemblait ses bandes (12). Boulard se préparait à être attaqué sur son front et sur sa droite. Jean-René Savin allait en outre surgir sur la gauche, alors que les reconnaissances le signalaient à tort à SaintEtienne-du-Bois.

Le 15 mai, à onze heures du matin (13), trois colonnes de Vendéens que Boulard estimait à 12,000 hommes d'infanterie, évaluation qu'il convient de réduire au moins d'un tiers, menaçaient Palluau sur trois points différents, distants chacun de deux ou trois kilomètres.

(Ruines du Vieux château de Palluau)

L'effectif réduit des troupes de Boulard ne lui permettait pas d'avoir des avant-postes éloignés, il se contentait de postes placés à l'entrée des quatre principaux chemins qui débouchaient à Palluau.

Une patrouille aperçut celle des colonnes insurgées qui était alors la plus rapprochée du bourg; on courut aux armes.

Cette colonne descendait par la route de Legé (14); elle comprenait les contingents de Charette et de Vrignault, d'un effectif total d'environ 2,000 hommes, avec 80 cavaliers et 2 pièces de canon.

Charette, à la tête de ses cavaliers, exerçait ostensiblement le commandement de toute cette troupe. Les deux autres colonnes n'étaient pas encore en ligne lorsque Charette fit placer ses deux pièces d'artillerie (15).

On entendit sur la droite une fusillade : la colonne de Joly attaquait par le chemin du Poiré-sur-Vie, à l'est de Palluau.

Charette avait déployé ses hommes et ceux de Vrignault, qui s'abritaient de leur mieux derrière les arbres et les haies. Seuls ses cavaliers, l'élite de sa troupe, restaient en groupe derrière lui.

Alors, dans cette guerre sans merci, où de part et d'autre on semblait étranger à tout sentiment de générosité, il y eut un procédé de courtoisie militaire qui rappelait la glorieuse journée de Fontenoy :

« Les troupes républicaines étant sorties pour se mettre en bataille, nous dit un témoin oculaire, M. Lucas Championnière (16), les choses se firent dans les règles : un cavalier de l'armée de Charette s'avança pour saluer l'ennemi et l'engager à tirer le premier; on lui rendit son salut, mais on ne tira point. »

Les vieux grenadiers de Boulard et ses jeunes volontaires avaient, paraît-il, gardé les traditions des gardes-françaises du maréchal de Saxe.

L'artillerie vendéenne réduite à une pièce, l'autre se trouvait probablement hors de service, commença le feu, mais ses pointeurs manquaient d'expérience. « Les premiers coups, mal ajustés, confesse l'officier royaliste (17) auquel nous empruntons ce souvenir, excitèrent parmi les Républicains des éclats de rire que nous entendions fort distinctement. »

Comme elle reprenait ses droits, la gaieté du soldat français, héroïque et caustique, riant franchement de la maladresse de ces artilleurs en sabots (18) qui, lorsqu'ils s'en tenaient à leurs fusils, devenaient les tireurs les plus redoutables !

Après avoir ri, les Républicains canonnent à leur tour leurs adversaires; ceux-ci, effrayés, s'entassent derrière les maisons, sur le bord du grand chemin.

Mais Charette se rue sur eux à coups de plat de sabre (19) en leur criant d'avancer; les paysans, fouaillés par leur général, se groupent autour de lui, lorsqu'un boulet vient frapper à ses pieds et le couvre de terre. Il sort du nuage de mitraille sain et sauf, pendant que ceux qui l'entourent, cédant une nouvelle panique, retournent à leur abri.

Mais les gars du Loroux qui étaient à la queue de la colonne le rejoignent, poussent en avant les fuyards et, mêlés avec eux, ouvrent le feu sur les tirailleurs républicains. La fusillade devient très vive (20).

Du côté du chemin du Poiré, l'attaque continue sans progresser. Joly s'est privé d'une partie de ses forces.

Il a envoyé 900 hommes couper le pont de la Chapelle-Palluau, sur la Vie, afin d'enlever toute retraite à l'ennemi, ce qui était prématuré et maladroit, puisque cela diminuait l'offensive. Aussi, les troupes qui étaient opposées à Joly le débusquèrent-elles facilement de ses positions. Il essaya f vainement de rejoindre Charette, mais le feu d'une batterie républicaine, placée près de la route (21), mit en désordre la troupe qui lui obéissait.

Les paysans de Joly se débandèrent dans la direction du Poiré ; malgré ses menaces et ses coups, il fut entraîné dans leur déroute.

L'ennemi ne le poursuivit pas et concentra ses efforts pour refouler les troupes de Charette, qui menaçaient la gauche des Républicains, afin de se défiler un peu de l'artillerie.

Elles allaient réussir dans ce mouvement tournant et pénétrer dans la partie nord-ouest de Palluau, mal barricadée et surtout mal défendue par les gardes nationaux, lorsque la colonne des frères Savin, qui avait trop longtemps hésité pour choisir son point d'attaque, ne voulant se mettre ni sous les ordres de Charette, ni sous ceux de Joly, leur tira des coups de fusil par mégarde.

Cette colonne s'était arrêtée à la hauteur d'un moulin à vent situé à l'extrémité nord-ouest du bourg; elle ouvrit le feu sur les cavaliers de Charette qui reculèrent sur leur propre infanterie (22).

Profitant du désordre, l'artillerie républicaine tire à mitraille. Les troupes de Legé battent en retraite et bientôt se débandent (23), poursuivies par trois bataillons d'infanterie, sous le commandement de Boulard lui-même. .

La colonne des Savin avait déjà pris la déroute sur le chemin de Saint-Christophe (24).

Charette, avec ses cavaliers, essaya d'arrêter les fantassins républicains au début de la poursuite. Mais bientôt, c'est la petite cavalerie de Boulard, une centaine de gendarmes, qui charge les « Meuniers de Charette » (25).

La lutte n'était pas égale, aussi les dispersa-t-elle rapidement. Quand ils étaient serrés de trop près, les paysans cavaliers sautaient en bas de leurs montures, jetaient leurs sabots et reprenaient toute leur agilité de fantassins.

Charette peut gagner la tête des fuyards avec les cavaliers qui l'ont suivi. Il fait gravir à une pièce de canon un tertre, sur la gauche de la route, à trois quarts de lieues de Legé, devant des moulins appelés « moulins de la Chambadière (26) ».

Les canonniers avaient encore des gargousses et des boulets. Quelques coups furent tirés sur les bataillons républicains dont les habits bleus ou blancs surgissaient au-dessus des blés. Ce tir, hâtif et mal exécuté, comme presque toujours, par les Vendéens, rendit cependant confiance aux paysans qui recommencèrent à riposter et à abattre les tirailleurs les plus rapprochés ; alors le général Boulard fit sonner la retraite, sa victoire était assez complète sans risquer une embuscade autour de Legé.

Il était cinq heures (27) Boulard venait d'apprendre que Joly avait fait détruire le pont de la Chapelle-Palluau.

Pour rétablir ce passage et conserver sa ligne de retraite, il envoie ses gendarmes en reconnaissance jusqu'à Aizenay. Un parti des bandes de Joly y est surpris et dispersé (28). Les gendarmes rétablissent le pont sur la Vie et en gardent les abords.

A Legé, la soirée et la nuit se passèrent sur le qui-vive. Charette battu s'attendait à une reprise de la poursuite et il prenait ses dispositions pour y faire face. Ce n'était plus l'imprévoyant commandant de Machecou], ses défaites elles-mêmes l'avaient mûri.

Après avoir groupé 500 à 600 hommes, emmenant ses deux canons, il avait garni de sentinelles la partie de Legé qui domine la route de Palluau et placé des petits postes à toutes les avenues (29). Beaucoup de fuyards revinrent; ils accusaient de leur échec les deux autres colonnes (30).

Les pertes des Vendéens étaient de 150 hommes tués ou prisonniers (31). Les Républicains n'avouèrent pour leur compte, dans les documents officiels, que 2 tués et 22 blessés, dont 5 grièvement (32).

Au petit jour, Charette envoie ses cavaliers battre l'estrade. Ils rencontrent d'autres Vendéens qui reviennent à Legé, si repentants de leur panique qu'ils demandent à retourner à l'ennemi, ce qui leur est accordé.

Aussitôt formée, la petite colonne se dirige sur Palluau pour inquiéter les Républicains; mais quand la nuit est tombée, Charette la fait rentrer à Legé, craignant quelque nouvelle déroute.

 Il apprend à ce moment que l'ennemi a évacué Palluau et qu'il est en retraite sur Aizenay.

Aussitôt il réunit ses cavaliers, les conduit au galop dans le bourg de Palluau, sabre une trentaine de traînards, dont quelques-uns portaient encore l'uniforme blanc à revers rouges de l'ancien régiment de l'Ile-de-France (33); puis il envoie des exprès à Joly et à Savin.

Ce dernier arrive du Luc avec sa division et remplace les cavaliers de Legé, qui retournent à leur cantonnement chargés de butin (34).

Boulard avait appris l'attaque du poste républicain de la Châtaigneraie par une grande affluence de Vendéens (35), leur succès et leur marche sur Fontenay.

Aussi s'était-il décidé à protéger les Sables-d'Olonne en venant occuper la Mothe-Achard (36).

Le jour même où il quittait Palluau, qu'il avait si bien défendu la veille, la grande armée vendéenne éprouvait un sanglant échec devant Fontenay, qu'elle devait cependant finir par emporter neuf jours après Boulard effectua sa retraite par la grande route des Sables à Nantes (37), faisant une étape de cinq lieues et demie sans être inquiété.

A la Mothe-Achard, son premier soin fut d'entrer en communication avec son lieutenant Esprit Baudry. Cet officier, resté à Challans, s'y trouvait un peu isolé, d'autant plus que Joly, avec 500 hommes, occupait le poste d'Aizenay et que Charette pouvait, d'un moment à l'autre, marcher sur Challans.

(Plan d'eau - monument du Souvenir Vendéen érigé en 2012 à Palluau)

 

Le colonel républicain affirmait cependant, en termes d'une énergie toute soldatesque (38), qu'il ne redoutait point l'ancien lieutenant de vaisseau (39).

Celui-ci s'accordait d'agréables loisirs dans son rustique quartier général de Legé, et cependant il entendait parler avec enthousiasme de la grande armée, formée des contingents de l'Anjou et du Haut-Poitou.

Déjà la renommée avait popularisé jusque dans les hameaux du pays de Retz les noms de ses généraux : Cathelineau, le paysan héroïque à la parole d'apôtre; d'Elbée, l'homme d'expérience, plein de fermeté et de courtoisie; La Rochejaquelein, qui personnifie la jeunesse intrépide et radieuse; Bonchamps, Lescure, anciens officiers, instruits et énergiques ; Marigny, l'officier des canonniers marins, trop violent, trop brutal, mais si brave ! et tant d'autres, grands seigneurs ou petits gentilshommes, connus dans la région et estimés de tous.

M. de Royrand avait rallié la grande armée, on le répétait à Vieillevigne, à Montaigu, à Legé; on s'étonnait que Charette n'en fît point autant.

Dans son désir de reprendre Machecoul, le commandant de Legé comptait sur une diversion de La Cathelinière, alors dans la forêt de Princé et qui devait attaquer Port-Saint-Père.

Cette attaque se produisit sans que Charette en fût prévenu; Beysser la repoussa facilement avec un détachement de la garde nationale nantaise et la cavalerie de Machecoul; il poursuivit la bande de La Cathelinière jusqu'aux approches de « sa » forêt (40).

A Legé, on ne s'occupa guère de l'échec de l'ancien pilotin; les Républicains laissaient en repos Charette et ses compagnons.

 Ce fut dans la vie aventureuse du chef vendéen une halte de repos et de plaisir (41).

A Machecoul, son autorité avait toujours été gênée par la surveillance de Souchu et l'indiscipline des paysans ; dans son nouveau quartier général, on le respectait et on le craignait. Ses cavaliers et les gens du Loroux lui constituaient une troupe d'élite sur laquelle il pouvait compter. Les chefs royalistes du voisinage acceptaient son autorité, les habitants, châtelains ou paysans, sollicitaient sa protection.

Un jour, dans le logis des Le Bouvier qu'habitait le général, il vint une belle jeune femme, coiffée d'un feutre gris à cocarde blanche, vêtue d'un habit d'amazone et portant à la ceinture couteau de chasse et pistolets de guerre. Sa taille élancée, son profil de médaille aux traits réguliers et sévères, ses grands yeux noirs, tour à tour impérieux et caressants, tout en elle révélait un charme étrange et dominateur.

C'était la comtesse de la Rochefoucauld (42), dont le mari, ancien capitaine des vaisseaux du Roi, avait émigré depuis 1791.

Restée seule au château de Puy-Rousseau, tout proche du petit manoir de Fonteclose, elle avait eu de rares et froides relations avec le chevalier Charette, que son modeste état de maison et sa sauvagerie desservaient auprès de ses voisins plus opulents.

Le départ triomphal de Charette, à la tête des bandes de Machecoul, avait intéressé la châtelaine, qui l'avait bientôt oublié pour prendre elle-même, neuf jours après, le 23 mars, la direction du mouvement royaliste dans la petite paroisse de la Garnache.

A la tête de ses serviteurs, de ses métayers et de ses gardes, elle était venue occuper la maison commune et y proclamer S. M. Louis XVII. Les patriotes du bourg avaient été dénoncés et arrêtés. Des scènes de violence et de pillage se produisirent comme toujours (43); pour les enrayer, Mme de la Rochefoucauld avait constitué un comité qu'elle présidait, mais l'approche d'une colonne républicaine avait bientôt dissous le comité et fait fuir la présidente, qui trouva un asile dans l'armée de Joly, aux environs de Challans.

Le vieux chirurgien, improvisé général, n'aimait pas la noblesse, même quand elle était représentée par une jolie femme; la fière comtesse resta d'ailleurs peu de temps au milieu des bandes de la Mothe-Achard et d'Aizenay.

La déroute d'une partie de l'armée de Joly (44), qu'elle suivait pour ne pas errer à l'aventure, la laissa sans autre protection et sans autre escorte que celle d'un jeune fermier, Thoumazeau (45), qui lui était profondément et respectueusement dévoué.

Les deux fugitifs gagnèrent Legé et la châtelaine de Puy-Rousseau vint demander asile au voisin de Fonteclose qu'en des jours heureux elle avait quelque peu dédaigné.

Charette ne lui témoigna pas de rancune ; il accueillit avec sa fougue habituelle la belle visiteuse, qui reconnut bientôt une si cordiale hospitalité par un attachement qu'elle ne prit pas garde de dissimuler.

La présence de Mme de la Rochefoucauld attira Mme de Bulkeley et son mari, ancien officier au régiment de Walsh, commandant du rassemblement de la Roche-sur-Yon et en correspondance amicale avec Charette, sans se résoudre à servir sous ses ordres.

Mme de Bulkeley, plus âgée que Mme de la Rochefoucauld, car elle touchait à la quarantaine, n'en gardait pas moins les traces d'une grande beauté.

 D'origine angevine (46), elle avait les cheveux blonds, les yeux bleus et la fraîche carnation des jeunes femmes de cette région. Elle ne vint à Legé qu'en visiteuse, avec l'époux qu'elle devait bientôt perdre dans cette horrible guerre et qu'elle accompagnait toujours en intrépide amazone. Mlle Charette était revenue auprès de son frère; elle éprouva pour Mme de Bulkeley une sympathie dont nous avons retrouvé la trace dans sa correspondance (47.

D'autres jeunes femmes, quelques jeunes filles vinrent au quartier général, les unes avec leurs maris, leurs pères ou leurs frères, les autres avec des protecteurs de rencontre ou même toutes seules, sous la sauvegarde de l'honneur vendéen. Des réunions joyeuses s'organisaient dans la petite maison de la place de l'église.

 

On chantait à l'accompagnement d'un clavecin qu'avait épargné la guerre civile; on dansait au son de la musette, les ménétriers ne manquaient point et leur musique était douce à tous ceux qui l'entendaient.

« A Legé, nous dit Lucas Championnière (48), le lieutenant de Charette, on ne fut longtemps occupé que de plaisir. Plusieurs demoiselles et dames du pays vinrent habiter le cantonnement, les jeux et les ris les accompagnaient; la plus belle de toutes ces dames était sans contredit Mme de la Rochefoucauld. On a souvent dit qu'elle commandait une partie de l’armée et que son courage la portait toujours au premier rang, rien n'est plus faux; semblable à Vénus plutôt qu'à Minerve, on croyait alors que le dieu Mars de nos armées se délassait près d'elle des travaux pénibles de la guerre. »

A l'exception des trois frères Hervouet de la Robrie, de MM. de la Noë, Du Chaffault, Lucas Championnière, gentilshommes du pays, de Méric et Pinaud, anciens officiers, de Saint-Pal, Le Moelle, David des Norois (49), qui appartenaient à la noblesse ou à la vieille bourgeoisie, les officiers de Charette étaient des fermiers ou de simples cultivateurs; ils en avaient conservé toute la rudesse.

 L'un des plus braves, qui jouissait déjà de l'entière confiance du général et qui commandait la compagnie de la paroisse de Legé, était un jeune tisserand nommé Lecouvreur (50). Il faut citer ensuite Arnaudeau et Lapierre, l'ancien domestique, devenu capitaine de cavalerie, insubordonné et très cupide (51).

Quelques anciens sous-officiers et soldats des régiments de Provence et de La Marck servaient d'instructeurs, mais sans exercer de commandement direct. Les paysans ne les aimaient pas et Charette s'en méfiait.

 Vrignault et ses paroisses occupaient Vieillevigne ;  l'hostilité, ou tout au moins l'antipathie, subsistait entre les deux chefs et leurs soldats.

La nouvelle de la seconde bataille de Fontenay, le 24 mai, et de la victoire complète de la grande armée causa un sentiment général d'envie, le mécontentement des voisins de Charette s'accrut.

A Aizenay, Joly ne le dissimulait pas, sans oser s'insurger contre le général dont il acceptait l'autorité, mais dont il blâmait ouvertement l'inaction (52), se plaignant d'ailleurs aussi que l'armée d'Anjou affectait de ne pas entrer en relations avec la Vendée maritime.

 

A Challans, le colonel Baudry, en apprenant la victoire de Fontenay, craignait que Charette ne l'attaquât avec des forces supérieures.

 L'officier républicain informe Boulard, dès le 29, qu'il se repliera prochainement sur Vairé et sur Olonne, en laissant des postes à Saint-Gilles et à la Chaize (53).

On crut, à l'armée de Joly, qu'il y avait eu un combat à l'avantage des Maraichins et l'on en fit honneur à Charette qui capturait, disait-on, de nombreux fuyards autour de Legé (54). Dans ces bandes indisciplinées, la confiance revenait aussi vite qu'elle disparaissait.

Charette comprit qu'il y avait utilité à s'informer de ce que devenait la grande armée, il envoya des officiers à Fontenay.

Quelle était au juste la mission de ses envoyés ? C'est ce qu'il n'est point aisé de déterminer. Toutefois, le fait de s'être mis en relations avec les vainqueurs du 25 mai est absolument établi par la lettre qui suit, adressée à M. de Bulkeley, dont le nom est mal orthographié, Beaucly.

Nous respectons d'ailleurs l'orthographe de ce document (55) :

A Legé, ce 31 mai 93.

Monsieur,

Depuis le succès des armes de la grande armée à Fontenay je n'en ai pas entendu parler, j'attends quatre officiers de mon armée que j'y ai envoyé il y a trois jours. Aussitôt leurs arrivées je m'empresserai de vous faire part de leur rapport.

Si la grande armée, comme je le crains, se porte sur d'autres endroits, je ferai tout mon possible pour m'unir avec M. Roirand, forcer les brigands dans leurs tavernes et si bien les treter qu'ils n'ayent plus d'envie de mordre à la grappe. Il y a, à ce qu'on en a assuré, un rassemblement de 1,500 hommes sous les ordres de Mr Beaumels dans le Marais.

Il a il y a quelques jours donné une vigoureuse chasse aux bleus et en a tué beaucoup. Nous sommes toujours menassés d'une vigoureuse attaque, mais qui dit bleu dit j... f... et je crois qu'ils ne sont nullement disposés à remplir leurs promesses.

Il y eut hier au soir un combat auprès de Nantes; les patriotes ont été repoussés vigoureusement, j'en ai eu aujourd'hui la certitude sans avoir les détails de combat. Rien de plus pour le moment, j'ai l'honneur d'être, etc.

 Le Chr CHARETTE.

A Monsieur Beaucly, commandant à La Roche-Surion.

La grande armée avait quitté Fontenay, remporté de nouvelles victoires à Cholet, Vihiers, Doué; elle s'acheminait vers Saumur, qu'elle devait emporter d'assaut (56), marchant au chant des cantiques, derrière ses croix de procession et ses bannières de paroisse.

 Quelle différence avec les bandes de Legé et du pays voisin ! On continuait à y danser, à y boire, à y chanter, à y mener enfin la vie de partisan en pays conquis. Toutefois Charette se rendait compte qu'il ne pouvait prolonger son inaction.

Il fait, le 6 juin, une pointe sur Challans que Baudry a évacué (57) la veille et il se replie sur Legé, persistant plus que jamais dans une intention d'attaquer Machecoul, qui ne recevra plus maintenant de secours des postes républicains de la Basse-Vendée.

Aussi presse-t-il les préparatifs de l'attaque, tout en s'efforçant de les tenir secrets. Il envoie des émissaires à Vrignault et à Joly, aux frères Savin, à La Cathelinière et à M. de Couëtus.

Le moment était bien choisi, car Boulard, voyant qu'il lui était impossible avec ses faibles ressources de garder la ligne de Fontenay aux Sables, avait abandonné la Mothe-Achard et s'était lui-même replié sur Olonne, où il établissait son quartier général, se contentant d'occuper avec cette localité le château d'Olonne et Pierre-Levée, pendant que Baudry gardait l'Aiguillon, Vairé, Saint-Gilles et le pont de la Chaize.

 

 

 

Charette et la guerre de Vendée : d'après les archives de l'Etat et de la ville de Nantes, des mémoires inédits de chefs vendéens, etc. / par René Bittard Des Portes,...

 

 

 

 

 La Vendée avant 1793 : légendes et récits <==

 A saint Florent le VIEIL le 12 mars 1793 commença l'épopée vendéenne, la guerre de géants<==

le 14 mars 1793 Manoir dit La Vieille Fonteclose (Maison de Charette) <==

les amazones de François Charette de la Contrie de l'armée catholique et royale (Mme Bulkeley) <==

 

 


 

 Velléités d’une guerre chimique sur les Vendéens :

 Lettre de Savin à Charette. ( Archives du ministère de la guerre.)

« Nous fûmes vraiment étonnés, écrit Savin à Charette, le 25 mai 1793, de la quantité d'arsenic que nous trouvâmes à Palluau, au commencement de la guerre. On nous a même constamment assuré qu'un étranger, qu'ils avaient avec eux et qui fut tué à cette affaire, était chargé d'assurer le projet d'empoisonnement contre nous » ==> Préparatif des colonnes infernales de Turreau

(1) « Des paysans de Loroux, attirés par sa réputation, vinrent lui offrir leurs armes et leurs bras; ces étrangers avaient tous l'air guerrier et leurs fusils de munition attestaient leurs combats et leurs victoires, et M. Charette commença alors à prendre cet air important qu'il a bien perfectionnédepuis. » (Lucas Championnière, Mémoires inédits.)

(2) « Monsieur de Charette a dit à ceux de Loroux (bis),

« Mes bijoux,

« Pour mieux tirer, mettez-vous à genoux. »

(Chanson de Monsieur de Charette, attribuée à Paul Féval.)

(3) « On nous a dit alors que le reste du régiment de Provence devait se réunir à nous si nous avions su garderie drapeau. » (Lucas Championnière, Mémoires inédits.)

(4) Nous avons lu à la Bibliothèque de Nantes, dans la collection DugastMatifeux, des lettres de Louis Savin à René Savin et au comité de Saint Etienne-du-Bois, qui révèlent peu de sympathies pour Charette; l'une, du 18 mai 1793, débute ainsi :

« M. Charette a le talent de vous endormir; il veut aller à Machecoul, qu'il y aille. Faites tous vos efforts pour que M. Vrignault reste à Legé avec toute sa troupe, sans cela il sera impossible de tenir si Palluau fait quelque sortie, car il faut s'y attendre, sitôt que l'ennemi aura appris que l'armée est affaiblie par le départ de M. Charette.»

 Et plus loin : « Il n'y a qu'un seul parti à prendre, sitôt M. Charette parti et avant même son départ : il faut former une ligue entre les commandants Vrignault, Savin et Joly, pour faire face à Palluau et le prendre s'il est possible. » Après avoir insisté sur l'utilité de le prévenir du départ de Charette, il ajoute que celui-ci se trompe quand il croit trouver du blé en quantité à Machecoul et il termine ainsi :

 « M. Charette vous leurre quand il vous dit qu'il viendra en deux jours ; il restera à Machecoul, si toutefois il peut le reprendre, car cela est très douteux. Est-il donc raisonnable de négliger d'attaquer un ennemi en présence pour se porter à quatre ou cinq lieues d'un autre côté. » (V. Collection Dugast-Matifeux, Bibl. de Nantes.)

(5) A la fin de la lettre de Savin, nous lisons : cc M. Charette ne manque pas de vivres, il a reçu hier matin, à Vieillevigne, cent et quelques boisseaux de blé venant de la métairie du Poiré. » Pour engager Charette à l'attaque de Palluau, Joly lui avait laissé faire cette réquisition.

(6) La fin du post-scriptum est également à citer : « Où est donc M. Joly, lui qui ne veut recevoir que les ordres de M. Charette? » (Collection Dugast-Matifeux, 4° vol., pièce 7.)

(7) Le même Savin écrivait à M. de Bulkeley et au comité de la Roche, le 12 mai : « Nous 'ne savons, Messieurs, quel est au juste le plan de M. Charette; ce qu'il y a de certain, c'est qu'il y a à Legé une force très imposante, sans compter ce que l'on attend. » (Collection Dugast-Matifeux, 148 vol., pièce 3.)

(8) « J'ai reçu hier, Monsieur, une lettre qui me mande que M. Charette n'a point attaqué Palluau, ce qui doit beaucoup gêner l'armée de M. Jolv et par conséquent la vôtre.

D'autant que Mareuil, les Moutiers et Bournezeau sont évacués ; je compte, suivant vos désirs, me porter demain avec un détachement pour tâcher de répandre (sic) sur trois endroits si vous pouvez vous porter avec votre détachement sur Bournezeau ; de là ou marchera aux Moutiers et de là sur Mareuil, pour conserver le poste. J'ai écrit à l'armée d'Anjou pour lui demander de se porter sur la Chatoigneraye ; si l'armée se porte de ce côté, je pourrai faire partir un détachement pour aider à prendre Palluau et la Motte, de là se porter aux Sables et à Machecoul.

« Vous saurez que l'armée d'Anjou a pris Argenton, Château et Bressuire sans la moindre résistance.

Si nous avions Machecoul, Port-Saint-Père et les Sables, nous trouverions beaucoup de munitions de guerre et de bouche, et nos ennemis seraient sûrement dans l'impuissance de nous attaquer d'aucuns côtés. Vous voyez combien il est utile que nous prenions et occupions le poste de Mareuil. J'espère que vous voudrez bien y faire attention et envoyer demain un détachement pour agir conjointement avec nous.

« J'ai l'honneur d'être votre très humble et très obéissant serviteur.

« ROYRAND. M

(Pas de date.)

« A Messieurs Bucheley (sic) et de Chouppes, commandants à la Roche-sur-Yon. » ...

(Collection Dugast-Matifeux, 5° volume, pièce 6.)

(9) Gaudin l'aîné avait eu le courage de voter a la C-nvention contre la mort du Roi.

(10) A la Mothe-Achard, un corps de volontaires toulousains, intitulé « les Chasseurs du Midi », était d'une insubordination telle qu'il fallut accorder des congés en masse. Baudry, leur commandant de division, avait perdu toute autorité sur eux.

(11) Boulard mentionnait dans son rapport à Canclaux, en termes pleins d'humour, l'avis qu'il venait de recevoir : « Hier après-midi, j'ai eu une petite alerte qui n'a pas eu de suite, quoique le général Charette m'eût fait dire par un prisonnier qu'il voulait manger la soupe avec moi. Comme je suis honnête et que je voulais le bien recevoir, j'ai fait battre la générale, j'ai envoyé à sa rencontre; mais à mes dispositions il a trouvé qu'elle serait trop chaude et il a remis la partie à une autre fois. » (Boulard à Canclaux, 14 mai. Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle, mai 1793.)

(12) « On menaçait de mettre le feu à celles qui refuseraient de marcher à l'ordre des chefs. 1) ( Guerre des Vendéens et des Chouans, attribuée à Savary. 1824, Baudouin, édit., t. Ier, p. 189.)

(13) Rapport de Boulard à Dayat. Palluau, 16 mai 1793. (Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle, mai 1793.)

(14) Même document. Le Bouvier-Desmortiers (Réfutation, etc., t. 1er, p. 111) la subdivise en deux : celle de droite commandée par Charette, celle de gauche dirigée par Vrignault. Boulard n'en mentionne qu'une sur la route de Legé.

(15) Boulard ne parle que d'un seul canon dans la colonne de Charette. Lucas Championnière affirme qu'il y en avait deux. Peut-être n'y en avait-il qu'un en état de fournir un feu régulier.  

(16) Mémoires inédits.

(17) Lucas Championnière, Mémoires inédits.

(18) Dans son rapport, Boulard constate que les Vendéens, sur la route de Legé, tirèrent une vingtaine de coups, pour la plupart inoffensifs. (Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle. mai 1793.)

(19) Lucas Championnière, Mémoires inédits.

(20) « Cependant les plus braves excitent et poussent les autres. On approche à portée de fusil. Les Républicains s'avancèrent aussi en tirailleurs et il se fit pendant quelque temps un feu assez soutenu. » (Lucas Championnière, Mémoires inédits.)

(21) La batterie républicaine pouvait atteindre l'une et l'autre colonne. (Savary, Guerre des Vendéens et des Chouans, t. 1er, p. 190.)

(22) « De son côté, Savin, qui venait par la traverse, trompé par le mouvement de la mêlée, fit feu sur les Royalistes, croyant tirer sur les Républicains. La cavalerie, qui se trouva la première exposée il cette fusillade, se replia si précipitamment que l'infanterie crut la bataille perdue et prit la fuite. » (Le Bouvier-Desmortiers, Réfutation, etc., p. 112.)

« Le terrain, jusque-là, était bien disputé, lorsque Savin parut sur la gauche (de la position républicaine), au pied d'un moulin. Nos soldats avancés le prirent pour un nouvel ennemi. Savin, de son côté, fit feu sur nous, nous croyant de la troupe de Palluau. » (Lucas Championnière, Mémoires inédits.)

(23) « Il s’ensuivit un désordre affreux; M. Charette, dans ce moment, ayant donné l'ordre de retirer les pièces de canon, il n'en fallut pas davantage. Chacun crut le danger pressant et l'on se sauva à toutes jambes. » (Lucas Championnière, Mémoires inédits. )

(24) La colonne sur la route de Saint-Christophe fut également repoussée. (Même auteur.)

(25) « Alors l'ennemi, qui avait fait beaucoup de progrès, se voyant pris par le flanc, a pris la fuite de toutes parts. » (Rapport de Boulard. Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle, mai 1793.)

(26) « Les troupes de la République, placées sur les différents points d’attaque, les ont chargés vigoureusement et avec tant d'ardeur que j'ai été obligé d'envoyer des ordres pour réunir les uns à Saint-Etienne-du-Bois, les autres sur la route de Legé; la cavalerie et la gendarmerie ont chargé pareillement avec beaucoup de succès jusque près des Moulins de la Chambadière, près de Legé. » (Rapport de Boulard. Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle, mai 1793.)

(27) « Les troupes sont rentrées à cinq heures et demie. » (Rapport de : Boulard. Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle, mai 1793.)

(28) Les gendarmes saisirent les lettres des Savin sur un insurgé tué. (V. même document.)

(29) Le Bouvier-Desmortiers, Réfutation des calomnies, etc., t. Ier, p. 113.

(30) « C'est à l'énorme faute de Joly et à la méprise de Savin qu’on dut le mauvais succès de cette journée. » Le Bouvier-Desmortiers, qui habitait Legé à cette époque, rapporte ici le bruit général.

(31) Rapport de Boulard.

(32) Idem.

(33) Beaucoup de militaires des anciens régiments en avaient conservé l'uniforme. Ce n'est guère qu'à la fin de 1793 que toute l'infanterie eut l'habit bleu.

(34) Le Bouvier-Desmortiers, Réfutation des calomnies, etc., t. 1er, p. us.

(35) La grande armée, commandée par Cathelineau, d Elbée, La Rochejaquelein, Lescure et Bonchamps.

(36) Boulard à Baudry. Palluau, 16 mai 1793. (Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle, mai 1193.)

(37) Il n'y avait alors que deux grandes routes qui aboutissaient à Nantes, celle qui partait des Sables et passait par la Mothe-Achard, Palluau et Legé, et celle qui partait de Fontenay par Chantonnay et Montaigu. (V. la carte de Cassini.)

(38) « Charette me fait menacer d'ici à dimanche, mais je me f... de lui. » (Baudry à Boulard. Challans, 23 mai. Arch. hist. de la Guerre, armée des côtes de la Rochelle, mai 1793.)

(39) Dès le 18 mars, Baudry, furieux de sa marche de retraite, sollicitait du représentant Gaudin la permission de se joindre à Canclaux pour reprendre l'offensive. (Arch. hist. de la Guerre, année de réserve. mai 1793)

(40) « Le représentant Coustard assistait à l'affaire et prit personnellement le commandement de la garde nationale à pied. » (Lucas Championnière, Mémoires inédits.)

L'abbé Deniau (Histoire de la Vendée, t. II, p. 115) a fait participer Charette à cette affaire, mais Lucas Championnière, qui servit tour à tour sous les ordres de Charette et sous ceux de La Cathelinière, affirme que le premier de ces chefs ne prit aucune part au combat de Port-Saint-Père.

(41) « L'abondance régnait tellement dans nos camps qu'après le moment de terreur passé, les paysans revenaient d'eux-mêmes et presque sana contrainte. Les habitants du pays, ayant peu de confiance dans les assignats, avaient gardé depuis deux ans les bœufs qu'ils ont coutume de vendre. Chaque année, ils donnaient assez volontiers, pour des bons payables à la paix, ces bestiaux qui les surchargeaient; la récolte de vin avait été abondante, les patriotes, en s'enfuyant, en avaient laissé leurs celliers remplis. On prit sans ménagement leur grain, leur vin, leurs bœufs, et, excepté le sel qui nous manquait parce que l'ennemi occupait les bords de la mer, on était traité comme aux noces. » (Lucas Championnière, Mémoires inédits.)

(42) Marie-Adélaïde de la Touche-Limousinière avait en réalité trente-trois ans, quoiqu'elle parût plus jeune encore : « Des traits prononcés, mais non sans beauté, ses formes indiquaient une force peu commune, quoiqu'elle fût d'origine créole, étant née à l'île Grenade, l'une des Antilles. Tout, en un mot, dans sa personne annonçait une énergie masculine, une indomptable résolution. » (Benjamin Fillon et Dugast-Matifeux, Trois Héroïnes vendéennes, Echos du Bocage vendéen, année 1884. — V. aussi Une amie de Charette, par Mme R. Montbrun, Revue du Bas-Poitou, 1897.)

(42 Deux chirurgiens de la Garnache, les Barraud père et fils, prirent l'initiative de plusieurs arrestations.

(43) MM. Benjamin Fillon et Dugast-Matifeux, dans leurs intéressantes études : Trois Héroïnes vendéennes, placent le départ de Mme de la Rochefoucauld de l'armée de Joly après le combat du Pas-aux-Petons, c'est-à-dire à la date du 13 juin, la veille de la reprise de Machecoul par Charette. Lucas Championnière, qui était alors à cette armée, déclare que Mme de la Rochefoucauld arrive à Legé après l'attaque de Port-Saint-Père par La Cathelinière, par conséquent, un certain temps avant la reprise de Machecoul; ce serait, à notre avis, vers les derniers jours du mois de mai.

(45) Thoumazeau (Joseph) n'était pas le fermier de Mme de la Rochefoucauld, comme l'ont dit plusieurs historiens, mais celui d'une commanderie de Malte qui possédait la terre de Coudrie.

(46) Mme de Bulkeley (née Céleste de Cartrie) avait épousé en premières noces M. Chappot de la Brossardière, gentilhomme angevin.

(47) Le 19 juin, Mlle Charette, rappelant à Mme de Bulkeley leur séjour à Legé quelques jours auparavant, lui écrivait à son château de la Brossardière :

« C'est avec grand plaisir, Madame, que j'ai reçu de vos nouvelles... Je n'ai point oublié les instants agréables que j'ai passés avec vous. Ces moments se retrouveront toujours à mon cœur, etc. » (Collection Dugast-Matifeux, t. IV, pièce 133.)

(48) Mémoires inédits, communiqués par la famille.

(49) M. David des Norois, étant étudiant en médecine à Paris, avait recueilli dans son domicile Charette, au lendemain de la défense des Tuileries (le 10 août 1792). Rentré dans son pays, à Saint-Etienne-du-Bois, et enrôlé de force dans la garde nationale, il fut fait prisonnier par les Vendéens, près de Palluau, et conduit dans cette ville, le jour même où Charette y pénétrait avec ses cavaliers.

Le général vendéen reconnut son sauveur et lui demanda avec surprise ce qu'il faisait là : « J'attends du plomb, répondit avec philosophie le jeune étudiant. — Tu n'en recevras pas tant que je serai général », reprit Charette, qui le fit élargir. Des Norois prit aussitôt du service dans la petite armée de Legé. Charette le nomma son aide de camp et plus tard l'adjoignit à Hyacinthe de la Robrie, son major général, avec le titre de major en second, c'est-à-dire de sous-chef d'état-major. Ces détails nous ont été personnellement donnés à Nantes, en avril 1900, par M. le chanoine David des Norois, petit-fils du chef vendéen.

(50) On lui a donné parfois la profession de cabaretier: l'état des anciens officiers vendéens, dressé par le prince de la Trémoïlle, en 1814, le qualifie de tisserand. Ses services furent récompensés par la décoration de la Légion d'honneur, en 1815, peu de jours avant sa mort.

La famille de Lecouvreur est honorablement représentée à Legé par ses petits-enfants : Mme Daudin, dépositaire du drapeau de la division de Legé qu'elle a bien voulu nous montrer, et son frère, M. Volard. Il y eut aussi un capitaine de paroisse qui portait le nom de Volard. (V. Pitre-Chevalier, Bocage et Vendée. Didier, édit.. D. 379.)

(51) Lucas Championnière, Mémoires inédits, qui ajoute : « M. Charette n'ayant point trouvé à Machecoul de sujets capables de le seconder, avait nommé son domestique commandant de la cavalerie; les autres officiers étaient à peu près du même genre. »

(52) «  ... La prise de Fontenay (le 25 mai) a procuré des munitions, canons, argent, équipement; à qui ça aura-t-il profité de nos côtés? Les commandants du haut pays ont fait cette pointe tous seuls sans prévenir personne, depuis Chantonnay jusqu'au Marais... Avec de l'entente, on aurait frappé des coups ensemble sur les Sables, Luçon et les villes du bas pays. M. Charette marche dans son commandement aussi secrètement que l'armée des Angevins. On ne sait rien de ce qu'il entreprend. Il ne va jamais au secours de ses voisins, malgré les demandes qu'on lui fait. Les Bleus, s assemblés en nombre, nous traqueront les uns après les autres. Il n'y a que l'entente qui sera le salut.

« JOLY.

« Aizenay, le 28 mai 1793. »

(Lettre adressée probablement à Bulkeley. — Collection Fillon, pièce tirée du greffe du tribunal de la Rochelle.)

(53) Savary, Guerre des Vendéens et des Chouans, t. Ier, p. 174.

(54) «  Monsieur,

« La situation de l'ennemi est actuellement à la Mothe et aux Moulières, à Challans et à la Chaize. On nous rapporte que les Maraichins avaient repoussé les Bleus de Challans, mais nous n'en sommes pas certains. Nous voyons les Bleus tous les jours aux Moulières et il Beaulieu, mais ils m' dépassent jamais ce bourg de Beaulieu. M. Charette est à Legé dont il prend tous les jours des Bleus, deux à trois à la fois à chaque instant. Je ne vous dirai plus rien de la prise de Fontenay, car je pense que vous en avez reçu les résultats; l'avantage est pour nous bien réel. Je suis bien charme qu'ils cassent leurs meubles, mais je serais encore plus content qu'ils se casseraient la tête.

« Tout à vous, votre obéissant et affectionné serviteur,

« JOLY, Commandant à Aizenay. »

« Aizenay, 30 mai 1793.

(Probablement à Bulkeley.)

(Collection Dugast-Matifeux, 4e volume, pièce 174.)

(55) Nous en avons lu l'original à la Bibliothèque de Nantes, dans la collection Dugast-Matifeux. La pièce est reliée dans le 4° volume d'autographes, elle porte au tome VI le n° 192.

(56) Saumur fut emporté le 10 juin.

(57) Bulkeley recevait à la Roche-sur-Yon, et probablement sur l'ordre qu'en avait donné Charette une lettre des membres du comité militaire de Legé, datée de Legé 7 juin, et commençant ainsi :

« Monsieur,

« M. Charette s'est porté, comme on vous l'a dit, sur la ville de Challans; il s'en est rendu maître sans difficulté. L'ennemi l'avait totalement évacuée dès la veille. Il s'est retiré à Saint-Hilaire-de-Riez, disent les uns, à Saint-Gilles, disent les autres. L'incertitude de la retraite, jointe à la difficulté de se maintenir dans un poste dont l'ennemi, en cas de défaite, pouvait nous fermer les issues de toutes parts, a déterminé notre général à retourner, ce qu'il a effectué ce matin. Deux bœufs et quelques tonneaux de grains, voilà ce que nous avons retiré de notre semi-victoire.

« On se propose, sous peu de jours, d'attaquer Machecoul. Cette démarche doit rester ignorée, vous devez le sentir parfaitement. »

Dans la même lettre, il est ensuite question de la « prise de Paris » ! bruit auquel les signataires de la lettre déclarent cependant ne pas croire, à la victoire de La Rochejaquelein et de Stofflet à Vihiers, de la convalescence; de D'Elbée et de Bonchamps, qui se rétablissent de leurs blessures.

Ainsi donc, à Legé, on restait au courant des opérations de la grande armée. (V. cette pièce no 37 dans le 5" vol. Collection Dugast-Malifeux. Elle est signée : « Les membres du Bureau de Correspondance du Comité militaire, THOMAS et GENDRON. »)

 

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