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PHystorique- Les Portes du Temps
26 janvier 2022

Janvier 1910 La Réception de Pierre LOTI par la ville de ROCHEFORT

Janvier 1910 La Réception de Pierre LOTI par la ville de ROCHEFORT

Le mercredi 23 janvier, par une solennité qui avait dû être remise par suite d'une indisposition assez grave de l'auteur de tant de chefs d'oeuvre, et dont la date avait d'abord été fixée au 14 janvier, notre vieil Hôtel-de-Ville avait revêtu sa parure de tapis, de guirlandes, de plantes vertes et de festons de lumière, pour recevoir dignement un des plus justement célèbres enfants de notre ville.

Sur l'invitation de la municipalité, toutes les personnalités du monde civil et militaire de Rochefort avaient tenu à apporter au héros de cette fête leur tribut de reconnaissance et d'affectueuse et respectueuse sympathie.

Dans la foule des assistants, nous avons remarqué : MM. le vice-amiral de Percin, préfet maritime ; le contre-amiral Mallet, major général; le général Beaujeux, commandant la 3e brigade coloniale; Roquère, sous-préfet de Rochefort; tous les chefs de service de la marine et de la guerre ; les deux colonels des régiments coloniaux, MM. Messager et Montignault ; le médecin général Burot, directeur du service de santé Morin, commissaire général de la marine; Toussaint de Quiévrecourt, contrôleur général ; Tréboul, directeur des constructions navales ; Combarnous, directeur des travaux hydrauliques ; Génuit, président du Tribunal civil Laure, procureur de la République Limouzin, président de la Chambre de commerce Giraud, président du Tribunal de commerce ; les principaux fonctionnaires civils ; les conseillers généraux et d'arrondissement les membres du Conseil municipal; la presse locale et régionale; les professeurs et l'administration du Lycée; M. Perdrigeat, président de l'Association amicale des anciens élèves du Collège et du Lycée de Rochefort; M. Oré, bâtonnier de l'ordre des avocats M. Codorniu, bibliothécaire de la ville ; quelques amis ou camarades de collège de P. Loti au Collège de Rochefort.

.M. Loti est arrivé exactement à huit heures trois quarts, en son uniforme constellé de toutes les décorations de tous les ordres du monde. Signe particulier il n'est pas officier d'Académie.

Une délégation composée de MM. David et Giraud, amis personnels de l'illustre écrivain, était allée le chercher à son domicile, rue Chanzy, et l'avait accompagné jusqu'au seuil de l'Hôtel-de-Ville, dans la voiture que tous les Rochefortais connaissent si bien.

M. Jaumier, au son de la Marseillaise, est allé recevoir l'hôte de la ville sur le premier palier de l'escalier et l'a introduit dans la salle des délibérations du Conseil, ou une table en fer à cheval, occupant toute la longueur de la pièce, avait été dressée la cheminée était ornée de drapeaux et des armes de Rochefort et formait un fond de décor parfait à la cérémonie tout intime qui allait se dérouler devant elle.

Les portraits des anciens maires souriaient dans leurs cadres, et vraiment c'était très bien. Par les fenêtres on voyait dans les arbres du jardin et autour du bassin aux poissons rouges, luire discrètement quelques lanternes vénitiennes et des verres de couleur.

Quand tous les invités ont eu pris place, M. Jaumier, premier adjoint, remplaçant M. Braud, empêché, a commencé par lire une lettre d'excuses du député-maire. Retenu à son grand regret à Paris par les exigences des travaux parlementaires et l'obligation d'assister aux travaux et aux discussions de la Commission de la marine, il s'excusait de ne pouvoir être ce soir avec ses concitoyens unis dans un même sentiment il envoyait le témoignage de son admiration reconnaissante au célèbre écrivain, à l'enfant de Rochefort il le remerciait au nom de la ville des efforts qu'il avait fait pour la sauver alors qu'elle était menacée, et priait M. Jaumier d'offrir à l'illustre Rochefortais, au nom de la ville, une modeste plaquette d'argent, souvenir de cette soirée où tous les cœurs étaient unis pour célébrer la gloire de M. Viaud.

Puis, au nom du Conseil municipal et de la ville, M. Jaumier a lu le compliment d'usage au récipiendaire (1).

« Monsieur,

« Ce n'est pas seulement l'enfant glorieux qui a couronné les armes de la cité du laurier d'or des poètes que j'ai l'honneur, au nom de Rochefort, de saluer et d'accueillir aujourd'hui: c'est l'enfant reconnaissant qui, voyant sa ville menacée, a fait ses efforts et mis ses amitiés dans le plateau de la balance pour la sauver.

« Et je veux vous louer d'abord, me souvenant des heures tristes, de n'avoir pas désespéré de n'avoir pas voulu rester confiné dans votre tour d'Ivoire, mais d'avoir, vous, l'auteur exquis de ces merveilles qui sont Pêcheur d’Islande, Mon frère Yves ou le Roman d’un Spahi, Ramuntcho, collaboré à ces articles de science et de technique qui, contre l'école nouvelle des Darrieus et des Abeille, établissaient l'importance, la nécessité de notre port militaire.

 Cela, Rochefort ne l'oubliera jamais, et lorsque, tant de ses hôtes, qu'elle avait plus fêtés que vous, lui étaient ou indifférents ou ennemis, de vous être souvenu et de l'avoir défendue, elle vous remercie.

« Mais, si notre ville est fière de vous avoir trouvé à côté de ceux qui, en ces temps-là, combattaient le bon combat, n'imaginez pas qu'elle n'a pas aussi l'orgueil, le très légitime orgueil, de votre gloire et d'abord de ce qui en rejaillit sur sa tranquille renommée.

Plus qu'à La Rochelle les vieux arbres, le parc nouveau de Dominique et l'atelier de Fromentin, à Saint-Maurice, la chère maison de la rue Chanzy, que vous avez transformée en un miraculeux palais de féerie, est depuis longtemps pour Rochefort un précieux joyau, et vous savez qu'on y vient déjà comme en pèlerinage.

Et lorsque, par un de ces caprices exquis dont vous êtes coutumier, vous en ouvrez, vous en entrouvrez les portes pour une de ces somptueuses fêtes où vous vous complaisez, vous savez avec quel empressement on sollicite la douceur de collaborer à vos rêves.

« C'est qu'ils sont d'une qualité si rare, si substils et si exquis! De Rarahu à Aziyade, ces soeurs tristes de Phèdre ou d'Ariane, et de l'aimable Madame Chrysanthème unie à la plaintive Djemone, de quelles douloureuses histoires d'amour nous avez-vous bercés et quel commentaire troublant, sincère et poignant vous avez écrit en marge de cette terrible phrase du missionnaire d'Atala : « La plus grande misère de l'homme c'est de ne pas pouvoir être longtemps malheureux. » Cette phrase, votre ami Plunkett ne vous l'a pas dite, jadis, aux causeries qui furent un de vos premiers livres; mais votre cœur l'avait devinée et quel charme plus pressant, plus mélancolique, plus humain de toute notre misère, de toute notre faiblesse, de toute notre précarité que celui qui monte comme un sanglot et comme une plainte de vos lèvres, piquants reflets, en effet, et fantômes douloureux qui passent sur la sombre route, si votre œuvre tout entière est pleine de cette pensée que les jours s'écoulent et que la vie passe et que d'autres viendront qui sentiront les mêmes sentiments que nous, qui verront les mêmes choses que nos yeux ont vues et qu'ils ne se souviendront pas.

« Eh bien non! ils se souviendront de vous! ou plutôt ils les verront comme vous aurez voulu qu'ils les voient, ces pays splendides où vous avez promené vos nostalgies le Japon, Pékin, le Maroc, le désert, la Galilée, Jérusalem, l'Inde, l'Egypte et ce merveilleux fantôme d'Orient, et cette baie divine de la Bidassoa, qui, l'un après l'autre, ont pris tout votre cœur! Ils chercheront la tombe d'Aziyadé vers Eyoub, la maison claire de Ramuntcho vers Hasperen, et ils se réjouiront de l'avoir reconnue

Et quand le soleil, dans un de ces soirs éblouissants que vous adorez, se couchera sur la Corne-d'Or et sur la gloire de Sainte-Sophie ou sur les bancs de sable de la baie d'Hendaye, donnant aux trois couronnes aux tours de Fontarabie et de Charles-Quint, la pourpre saignante où vous les avez vues, ils se rediront ces pages déjà classiques où vous avez mis toute la douceur de vos tendresses.

« Et de cela aussi nous sommes fiers car vous nous avez dit que ces rêves sont mis dans un coin de cette petite cour que vous avez enclose et préservée au milieu des merveilles que vous ayez créées.

 Il y a, je crois, dans cette cour, une glycine que votre père avait plantée. C'est une chose de France, de Rochefort, et vous l'aimez pour son passé. C'est elle qui rattache à notre sol toute cette merveilleuse floraison que vous êtes allé cueillir sur les autres rivages elle y mêle son fragile éclat et chaque année, pendant une quinzaine, des grappes pales, demi-décolorées, y chantent nos printemps précoces et calmes.

Voici que maintenant vous pourrez lui rester plus fidèle et que les ordres de départ ne vous enlèveront plus à nous prenez garde, nos horizons familiers ont conjure de vous reprendre, de vous retenir et de vous séduire pour vous garder, et la fête de ce soir n'est que le premier, et le plus innocent, de leurs sortilèges, où tout Rochefort vous accueille et vous dit sa reconnaissance. »

M. Jaumier, qui est fort applaudi, remet ensuite à M. Loti l'élégante plaquette dont nous avons parié une Gauloise au fin profil ciselé sur du vieil or peint, avec cette inscription

LA VILLE DE ROCHEFORT

À JULIEN VIAUD (PIERRE LOTI)

M. Pierre Loti, très visiblement ému, a répondu en un chef-d'œuvre d'esprit et de bonne grâce, fréquemment applaudi :

«  Monsieur le maire,

« Messieurs,

« Vous m'avez conduit à faire, ce soir, une chose qui ne me ressemble pas, que je n'avais jamais faite et ne referai probablement jamais. S'il m'est permis d'employer un terme de théâtre, je dirai que c'est une véritable première que je vous donne en ce moment. Jusqu'ici, en effet, chaque fois qu'on a bien voulu organiser pour moi une manifestation de sympathie, et cela m'est arrivé souvent, ailleurs qu'en notre ville, j'ai toujours été l'homme insaisissable qui se dérobe et disparait. C'est à tel point que j'ai refusé même, le mois dernier, à bord du Suffren, un simple toast d'adieu que voulaient m'offrir mes camarades de l'escadre.

Voyez donc combien il faut que j'aie été touché par une bonne et charmante pensée venue de mes concitoyens, voyez quel prix il faut que j'y attache pour me départir ainsi tout à coup de mon horreur de paraître et de mon amour du silence.

« Je veux vous remercier du fond du cœur mais vous me pardonnerez de le faire bien simplement, et surtout en très peu de mots, car, vous le savez sans doute, et c'est, je crois, Alfred de Musset qui l'a dit dans les termes les plus dénués de respect, il n'y a rien de vide et d'ennuyeux comme le discours d'un académicien.

« Vous m'êtes reconnaissants, dites-vous, de mes démarches pour sauver notre arsenal. Oh je ne m'exagère pas, veuillez le croire, la valeur effective du concours que je vous ai apporté. Mais il est certain que, suivant l'expression consacrée, j'ai fait ma force, à l'instant surtout où l'on se préparait, dans un précédent ministère, à nous étouffer sournoisement et sans l'aveu du pays.

Comme je vis dans une ignorance voulue de la politique intérieure et des considérations électorales, j'ai frappé sans distinction à toutes les portes. Ainsi; pour vous donner un exemple amusant de mon éclectisme, un peu plus tard, quand il a été question de soumettre notre existence à un vote de la Chambre, je me rappelle m'être adressé, dans la même demi-heure, à un très noble duc et au député le plus avancé de la banlieue parisienne, qui ne sont certes pas dans les mêmes eaux. Chez tous deux, du reste, et chez tant d'autres parlementaires que j'ai interviewés au cours de la même semaine, j'ai rencontré une pareille bonne grâce et un pareil désir de s'éclairer, sans parti pris, pour le plus grand bien de la défense nationale.

 « Nous ne sommes pas encore sauvés, hélas et ce n'est qu'une trêve. Bien que le simple bon sens, ce qu'on appelle le sens commun, suffise, à défaut de tout sens marin, pour comprendre l'importance capitale de nos rades et de notre port, nos ennemis, les uns par conviction aveugle, les autres par intérêt occulte, se refusent à désarmer. Il faudra continuer la bataille qui n'est que commencée, et, tant que je vivrai, vous me trouverez prêt à mettre le peu d'influence dont je pourrai disposer au service de notre si juste cause. Mais, pour cela vous ne me deviez point le beau remerciement de ce soir, car je n'ai agi, en somme, et n'agirai que par un élan du cœur, presque d'instinct, comme un enfant de Rochefort et voilà tout. Quelqu'un qui mérite bien plus votre reconnaissance, parce qu'il n'est pas de chez nous, lui, c'est notre préfet maritime, qui, cependant, nous a défendus avec tant d'autorité, tant de certitude clairvoyante permettez-moi donc de le remercier encore ici, au nom de tous.

 « Une chose par exemple que je m'accorde, et que personne ne peut me refuser, c'est cet attachement profond que mon père m'avait inculqué dès mon enfance pour notre ville, pour ses entours, même pour nos vieux Remparts, hélas menacés, et pour tout notre coin de province. Ainsi voyez, maintenant que la marine ne m'enchaîne plus, il avait semblé à tous que j'irais me fixer à Paris, où beaucoup d'intérêts m'appellent, ou peut-être dans cet Orient qui est un peu ma seconde patrie. Eh bien je n'y ai même pas songé.

Certes, je me permettrai encore des courses par le monde mais je resterai un habitant de la rue Chanzy, que aimerais mieux appeler comme autrefois la rue Saint-Pierre; et c'est là, dans ma vieille maison familiale, que je vais faire poser, à une place d'honneur, la plaquette si précieuse et si touchante que vous avez bien voulu m'offrir.

J'ajouterai même, pour aborder une note gaie, que je viens de faire l'acquisition, là-bas, au bout du faubourg, d'un petit jardin de quatre mètres carrés, ou j'ai le projet, un peu plus tard, de m'installer définitivement auprès de vous c'est vous dire qu'on ne peut pas être un Rochefortais plus obstiné!

« Avant de finir, j'ai à m'excuser de vous avoir contraints à changer le jour que vous aviez d'abord fixé pour me faire le grand honneur de cette réception mais vous savez sans doute déjà qu'il n'y a pas de ma faute.

Vous aviez choisi le 14 janvier, une date pour moi très douloureuse, d'abord parce qu'elle m'a obligé de dire adieu à cette marine que j'aimais tant; ensuite parce que mon âge, que j'aurais eu la faiblesse de vouloir cacher, a franchi cette fois- là un cap redoutable.

Ma plus grande ambition dans la vie, je vous le dis entre nous, tout à fait confidentiellement, n'est-ce pas ? ma plus grande ambition aurait été de ne pas vieillir. Là, je suis forcé de reconnaître que je n'ai pas réussi j'ai été vaincu surtout par un petit livre absurde, avec lequel les terriens n'ont jamais maille à partir et qui s'appelle l'Annuaire.

 Or, ce fatal 14 janvier 1910, ce jour de deuil, par une pensée infiniment délicate vous aviez voulu le transformer à mes yeux en un jour de fête. Pour cela encore, merci, et merci de tout cœur »

Comme on l'a vu au cours de sa réponse, Loti avait cru devoir transmettre à l'amiral de Percin une large part des remerciements qu'on lui adressait. Au milieu des applaudissements, l'amiral a ajouté un mot gracieux pour dire que Loti appartient sans doute bien à Rochefort, mais qu'il appartenait aussi à la marine. Il a rappelé le télégramme flatteur de l'amiral Boué de Lapeyrère à son capitaine de vaisseau atteint par la limite d'âge, et exprimé le gros regret qu'il avait lui, personnellement, de « n'avoir plus » d'ordres à donner à un Académicien.

Pierre Loti s'est mêlé ensuite aux groupes et a causé très aimablement avec chacun la réception s'est achevée par un toast à sa gloire, et à neuf heures et demie il s'est retiré, salué par la musique municipale placée sous le porche de l'Hôtel-de-Ville, ayant séduit tous les invités de la municipalité par sa cordialité et le charme qu'il sait donner aux moindres paroles qu'il veut bien dire.

Et un de ses amis qui l'a accompagné dans son cher et merveilleux logis de la rue Saint-Pierre a raconté que, rentré chez lui, le célèbre académicien ne cachait ni sa joie, ni son émotion. Sa ville ne l'avait certes pas fêté comme Marseille son Jean Aicard, avec des cortèges et des arcs-de-triomphe, ces Charentais ne sont pas exubérants, mais la discrétion émue où tous avaient su lui manifester une sympathie profonde et une affection sincère, l'avait peut-être touché davantage que les pompes et les éclats qu'il déteste et qui lui sont si peu familiers.

 Ch. G.

 

 (Jardin de la Marine)

 

 

JEANNE AMÉLIE BLANCHE FRANC DE FERRIÈRE

(Madame Julien Viaud)

Quand, le 20 octobre 1886, Jeanne Amélie Blanche Franc de Ferrière épouse Julien Viaud elle est âgée de 27 ans étant née le 21 août 1859 à Pomport, canton de Sigoulès, en Dordogne. Elle était issue d’une vieille famille d’origine périgourdine venue se fixer dans la région bordelaise. Sa nature vive, noyée dans l’austérité de la société bordelaise à laquelle elle appartenait, s’était enflammée pour les romans de Loti et leur auteur. Jolie, fort jolie même, certains chroniqueurs mondains de l’époque de son mariage l’affirment, elle était d’un aspect plutôt frêle et délicat.

D’une humeur douce et souriante en harmonie avec celle des autres membres de la famille, d’une intelligence cultivée bien propre à comprendre le génie de son mari, elle vécut, jusqu’à la mort de la mère de Loti, un peu comme une étrangère dans la maison de Rochefort où tout était sacré : la famille, les objets du passé, les pièces nouvelles remplies de choses précieuses. Isolée par sa surdité chez des gens qui ne parlaient qu’à voix basse, troublée par sa vue défectueuse dans une maison pleine de recoins et de secrets où le jour n’entrait que parcimonieusement, elle s’accommoda volontiers de cette solitude.

Elle avait ce regard un peu voilé, mais lointain, qu’ont certains myopes et charmait avant même d’avoir parlé tant était douce l’expression de son visage. Presqu’aussitôt mariée elle a l’espérance de donner à Loti une descendance.

Malheureusement cet espoir fut déçu. Au mois de mai 1887 naît prématurément un fils qui ne vivra que quelques instants. L’on craindra fort pour la vie de la mère. Elle s’en remet, et donnera, le 17 mars 1889, le fils, tant désiré, pour lequel elle fut une admirable mère. Autour d’elle s’est fait un silence qui pourrait laisser entendre, bien à tort, qu’entre elle et son illustre mari, il y eut désunion. Rien n’est moins exact. Loti lui témoignait les plus grands égards. Il était d’ailleurs plein d’attentions pour elle.

Après la mort de sa propre mère (12 novembre 1896), il lui donna la même place qu’occupait celle-ci dans son foyer. Peu après, la maison de Rochefort, agrandie par l’acquisition de la maison contiguë, transformée, qui n’accueillait que la famille, quelques intimes, sinon quelques admirateurs du maître, s’ouvrit sur un monde nouveau.

Madame Pierre Loti, qui fit toujours aux amis que lui présentait son mari un accueil plein de grâce, se plut à les grouper de temps en temps autour de lui en d’agréables réunions. Elle se tenait alors dans ce clair salon Louis XVI, qui fut le sien, charmante en ses robes harmonieuses, sa douce dignité, accueillante, intelligente, généreuse. Sa surdité rendant toute conversation difficile avec elle, elle s’en excusait en priant que l’on ne s’en inquiétât point.

 

Elle ne put suivre toujours son mari dans ses errances, mais le rejoignait quand celui-ci pouvait avoir une vie à terre. Elle est au golfe Juan en novembre 1891, alors que son mari est affecté au Courbet. Elle est près de lui à Hendaye quand, à deux reprises, Loti commande le Javelot. Elle est en juin-juillet 1906 à Constantinople, à l’époque où Loti commande le Vautour, etc... Elle survivra dix-sept ans à son mari avant de s’éteindre, le 25 mars 1940, à Lamonzie-Saint-Martin (Dordogne).

D’après : Les journaux d’octobre 1886. Jacques Chardonne — Chronique privée de l’an 1940 — Paris — s.d. [1940] — Editions Stock-Delamain et Boutelleau, pp. 42-43. Réimprimé in : Femmes — Contes choisis et quelques images — Albin Michel — Paris s.d. [1961], p. 182. Baron Frédéric A. Chassériau — Souvenirs sur Loti et Jammes — Les deux dames Loti — Revue hebdomadaire du 2 janvier 1937, pp. 87-88. Reproduit in : Les Annales du 25 novembre 1937. Réimprimé in : Mes souvenirs sur Pierre Loti et Francis Jammes — Paris — Plon s.d. [1937], pp. 76-77. Yvette Guilbert — La chanson de ma vie — Paris — Bernard Grasset — 1927, p. 235.

 

 

 

 

Revue Pierre Loti

Bulletin de la Société de géographie de Rochefort

 

 

 

Sur la Terre de nos ancêtres du Poitou - Aquitania (LES GRANDES DATES DE L'HISTOIRE DU POITOU ) <==.... ....==> 1914 Éphémérides de la Mobilisation à Rochefort - Hôpital de la Marine de Rochefort - Pierre Loti

 

 


 

(1) N'ayant pu nous procurer le texte de ce compliment, nous sommes obligé de chercher à le reconstituer de mémoire et d'après les notes parues alors dans les journaux.  

N. D. L. R.

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