Le VIIIe volume des Lettres de Henri IV, publiées dans la collection des documents inédits contient un supplément aux tomes antérieurs. Les lettres supplémentaires écrites de la Rochelle surtout dans la partie afférente au premier volume sont beaucoup plus nombreuses que celles insérées dans la publication principale. En les parcourant je ne pouvais m'empécher de penser à l'avidité avec laquelle les aurait lues un érudit que nous regretterons longtemps, M. Jourdan pour son livre souvent projeté de Henri IV à la Rochelle. Je ne crois pas que sa curiosité eût été satisfaite j'y ai trouvé, pour moi, des détails très propres à éclairer cette figure d'Henri avant son arrivée au trône de France très peu de choses sur la vie rochelaise.
Cependant cela m'a donné envie de recueillir ce qui nous reste à cet égard épars dans les écrits publiés de M. Jourdan ou dans ses notes, ou partout où je pourrais puiser.
Ne pouvant pas faire un tout de ces recherches, sans sortir à tout moment de la Rochelle ne voulant m'imposer aucun plan, aucune proportion aucune règle autre que le respect absolu de la vérité voulant à ma fantaisie tantôt passer vite sur des faits importants, tantôt m'appesantir sur des vétilles je n'adopterai d'autre ordre que l'ordre chronologique, et je donne à cette compilation la forme d'un journal.
1
ANNÉE 1558.
Henri de Navarre n'avait pas cinq ans lorsqu'il vint pour la première fois à la Rochelle. Il y accompagnait son père qui visitait cette ville, comprise dans son gouvernement de Guienne, en se rendant à Amiens pour y rejoindre la cour de France. Ce n'est pas là une conjecture très vraisemblable, comme l'a cru M. Jourdan c'est un fait établi par l'affirmation précise de Favyn. (1)
Favyn Barbot, Baudoin, tous nos chroniqueurs placent ce voyage en février -1557 mais ils adoptent tous la langue du temps dont ils parlent, pour lequel l'année commence soit au 25 mars, soit à Pâques, selon les pays. Barbot ne précise pas moins cette date en faisant observer que le roi et la reine de Navarre étaient appelés à la cour de France par un événement qui devait créer pour eux bien des dangers, le mariage du dauphin François avec la fille de Marie de Lorraine, la belle Marie Stuart.
Or ce mariage eut lieu en avril 1558. Baudoin dit que le roi de Navarre arriva à la Rochelle le 5 février et y resta treize jours.
C'est donc en février 1557, vieux style, ou 1558 nouveau style, qu'eut lieu le passage d'Antoine et par conséquent d'Henri de Navarre à la Rochelle.
M. Jourdan remarque que cette date est contradictoire avec celle du 7 février 1558, que les biographes assignent à la naissance de Catherine de Navarre à Paris. Contradictoire pour ceux qui font danser Jeanne d'Albret à la Rochelle le 7 février 1557 et la font accoucher à Paris le 7 février 1558 non pas mais accusatrice pour ceux qui en leur empruntant isolément cette dernière date ne la corrigent pas pour se conformer au nouveau style. C'est une correction qu'ont faite, je crois, car je n'en ai pas la preuve sous les yeux, les biographes récents de Catherine. Dans tous les cas ce rapprochement suffirait à prouver qu'il faut la faire.
Je ne vois pas du tout pourquoi M. Jourdan, après avoir fait cette observation dans ses Ephémérides (I, 27, note), se croit obligé dans ses Amours de Henri de Navarre (p. 2) de se contredire, de contredire Favyn qui s'exprime si précisément sur l'âge d'Henri, pour donner à cet enfant moins de quatre ans et faire remonter ce voyage en 1557. Il s'appuie sur une anecdote qui en effet n'est pas très claire.
Barbot rapporte que dans un bal donné pendant son séjour à la Rochelle Jeanne tomba en pamoison dont elle se reconnut grosse ; et ce fut, ajout-il, d’une fille nommée Catherine, qui a été défunte Madame, sœur unique du roi Henri IV.
La chose est encore plus difficile douze mois que deux jours avant la naissance. Faut-il absolument pour cela démentir Barbot ou sur la date du voyage ou sur l'anecdote ? Il faut seulement conclure que celle qui lui a conté le fait, sa mère ou sa grand'mère, s'est trompée sur la cause, ou seulement peut-être sur l'enfant qui fut cause de cette pamoison. Cet accident put être le terme de la grossesse dont il était la révélation il fut probablement réparé trois mois après la physiologie n'y voit pas la moindre difficulté et Catherine fut le fruit de cette réparation.
Il reste pourtant encore une contradiction à lever. Baudoin, Mervault, d'autres chroniqueurs, se copiant tous les uns les autres disent que le roi de Navarre arriva à la Rochelle le samedi 5 février, ce qui convient parfaitement à l'année 1558 nouveau style et qu'il y resta treize jours.
Barbot dit qu'il y vint la première semaine de carême, qui ne comprend jamais le 5 février et qui en était éloignée de plus de quinze jours en 1558 et qu'il y demeura l'espace de quinze à vingt jours.
Je ne sais si à cette époque on dansait, on jouait la comédie en carême car il y eut des comédies jouées; mais d'ailleurs la plus grande précision me fait pencher pour les premiers historiens, qui transcrivent, je crois, la note officielle prise par le corps de ville. Barbot, lui, rédige des causeries de famille on lui a dit vers le temps du carême il met la première semaine de carême, dont, en vrai huguenot qu'il est, il oublie la sainte gravité il est plus riche en anecdotes, moins précis sur les dates.
Je me suis arrêté à discuter cette date parce que, si elle n'a aucune importance pour la vie du jeune Henri, elle sert à fixer la première prédication publique des idées de la réforme à la Rochelle.
A ce voyage Henri et sa famille logèrent chez Bonaventure Fouchier, sieur des Grolles conseiller au présidial, dont l'hôtel était situé rue des Maîtresses, aujourd'hui rue Dupaty, sur l'emplacement de la maison actuelle de M. Marchegay. (2)
II
ANNÉE 1565.
Henri n'était encore qu'un enfant, n'ayant pas douze ans, lorsqu'il vint une seconde fois à la Rochelle, à la suite de Charles IX, le 13 septembre 1565. Il y resta quatre jours, logé avec la famille royale à l'hôtel d'Huré, rue Bazoges. (3)
III
ANNÉE 1568.
Enfant encore, au-dessous de quinze ans, lors de son troisième voyage le 28 septembre 1568, il entre pourtant déjà dans l'histoire par la gravité des circonstances et par un mot heureux. Il était arrivé de la veille ou de l'avant-veille, avec sa mère, venant à l'appel du prince de Condé, chercher un point d'appui pour la guerre qu'ils préparaient.
Lahaize lui adressa, comme à Condé, un long discours auquel il répondit par quelques paroles qu'on lui avait fait apprendre par cœur.
Puis je laisse parler Lahaize,
« parce que ledit seigneur prince cuidoit n'avoir assez suffisamment répondu a tout ce qui lui avait été proposé il ajouta de gaillardise de cœur et gentillesse d'esprit Je ne me suis tant étudié pour savoir bien parler comme vous, mais je vous asseure que si je n'ai assez bien dit ce que je voulais dire je le ferai mieux car je sçay beaucoup mieux faire que dire. Qui est un bel apophtegme, et lequel ainsi prononcé sans affectation et pourpensement resjouit et contenta merveilleusement toute l'assemblée, et confirma l'excellente attente que l'on a conceu de ce jeune prince, qui ne promet que choses hautes et grandes et dignes de sa nourriture et origine. (4)
Peu s'en fallut que ces grandes et justes espérances fussent anéanties. Peu de jours après, le jeune prince tomba à l'eau entre deux vaisseaux un capitaine de marine, Jacques Lardeau, eut le bonheur de le sauver.
Il n'y a aucune raison de révoquer en doute cette anecdote. Il est juste cependant de dire que ni Barbot ni aucun contemporain n'en parle. Elle nous a été conservée dans les mémoires assez romanesques de Nicolas Gargot, petit-fils de Lardeau, qui ne lui assigne pas de date, et je crois que c'est Arcère qui lui donne celle-ci. (5)
Je ne saurais assigner la durée précise de ce séjour d'Henri. Vers la mi-octobre, les princes se mirent en campagne Jeanne d'Albret ne quitta la Rochelle que le 21 janvier 1569 mais son fils avait été rejoindre l'armée au moins devant Angoulême, plus d'un mois auparavant. (6)
IV
ANNÉE 1569.
La reine de Navarre et les princes étant absents de la Rochelle il ne leur en importait que plus que le maire de cette ville leur fût dévoué il fallait, contre les règles de la commune, obtenir que Salbert fût réélu.
Henri écrivit ou signa étant à Pont-l'Abbé, deux lettres à cet effet, l'une aux Rochelais, l'autre à Salbert, en date du 25 mars 1569.
Pour appuyer cette lettre Jeanne revint à la Rochelle le 5 avril mais rien ne montre que son fils ait quitté l'armée pour l'y accompagner. Il y vint au contraire avec elle après la défaite de Moncontour, et y passa les deux semaines du 6 au 18 octobre mais sans qu'on relève rien qui lui soit personnel. (7)
V
ANNÉE 1570.
Il y revint sur la fin de décembre. Sa correspondance contient trois lettres écrites de la Rochelle le 5 et le 6 janvier suivant l'une aux syndics et au conseil de Genève, où comme chef du parti protestant il autorise auprès d'eux et auprès de Théod. de Bèze, le porteur de la lettre deux autres à la Reine-mère et au duc d'Anjou.
Après une entrevue avec Cossé il leur envoie et autorise auprès d'eux le sieur de Quinsey. Il quitta la Rochelle vers le milieu de ce mois, mais le 13 septembre 1570 il annonçait à son oncle, le cardinal de Bourbon, le dessein de partir le lendemain pour la Rochelle et il y revenait pour y faire cette fois un séjour prolongé, et qui paraît avoir été continu jusqu'au 22 août 1571. (8)
VI
ANNÉE 1570-1571.
Henri avait alors près de dix-sept ans il avait fait la guerre tout prince souverain qu'il était, il revenait à la Rochelle comme sujet du roi Charles IX tenant de lui le gouvernement de Guyenne et les fonctions d'amiral de France, dont il répondait seul.
D'un autre côté, sa mère, le prince de Condé, Coligny, les principaux chefs protestants l'avaient accompagné à la Rochelle, une de leurs places de sûreté, et l'on peut douter qu'un pareil conseil laissât à un si jeune homme toute liberté d'action; en sorte qu'on ne saurait dire quelle est au juste sa part dans les lettres signées de son nom. Quoi qu'il en soit, ces lettres, au nombre de trente-six, dont vingtquatre dans le supplément, annoncent une administration vigilante intelligente et ferme, au milieu des difficultés qui lui viennent de toutes parts. La preuve en sortira d'un sommaire de ces lettres, (9)
6 novembre 1570. Au Roi. Il a obéi immédiatement au Roi en remettant la place de Blaye aux mains de Lansac le jeune, et le prie d'exiger la même obéissance et la même promptitude pour l'exécution des conditions du traité favorables aux réformés. (T. VIII, p. 32.)
21 novembre. – Au Roi. Il s'excuse d'avoir perçu une contribution volontairement levée par les villages du gouvernement de la Rochelle, pour payer et renvoyer les lansquenets qui vivaient à discrétion écartés çà et là, dans le pays, chargeant et foulant grandement le pauvre paysan. (VIII, 32.)
On trouve vivement exprimé dès cette lettre ce sentiment de pitié pour le pauvre peuple qui a peut-être suffi pour faire d'un des particuliers les plus vicieux un des rois les plus grands qu'on ait vus.
27 décembre. Au Roi. Il rend compte au Roi de ce qu'il a fait pour remédier aux violences du comte de Bossu amiral de Flandre, dont la flotte a attaqué et pillé jusque dans la rade deux navires marchands de la Rochelle et qui n'a pas tenu sa parole de réparer le dommage.
L'amiral a emmené deux marchands de la Rochelle sur son navire; on a enlevé un de ses officiers, qu'on a remis à la mère de ces marchands pour servir d'otage. Il a enlevé des marchandises, on lui a enlevé des marchandises pour garantir l'indemnité qu'il doit. (VIII, 34.)
Cette lettre très intéressante démontre une protection vigoureuse des intérêts privés par la force publique.
6 janvier 1571. Au Roi. Sur l'exécution de l'édit de pacification. Après une entrevue avec Cossé, dont les pouvoirs sont insuffisants, il envoie et recommande au Roi le sieur de Quinsey. (VIIIn, 39.)
8 janvier. Au Sieur de Quinsey. Il a oublié de lui signaler comme une contravention importante à l'édit l'obstination de Dulude à ne pas remettre Soubise au sieur de Belsunce auquel il l'avait enlevé. (VIII, 40.)
12 janvier. Au Roi. Il lui recommande un de ses valets de chambre retiré vers Soissons qu'on poursuit d'accusations controuvées uniquement parce qu'il est huguenot, (VIII, 41.)
13 janvier. Au Roi. A la Reine-mère il s’excuse de ne pas se rendre à leur invitation qui l'appelle à Paris. Un ton de déférence très respectueuse ne cache pas une très grande méfiance. (VIII, 42, 44.)
24 janvier. Au marquis de Villars, lieutenant général, en son absence, pour le roi en Guyenne et en Poitou. Il lui recommande Hélie Granger, prisonnier à la conciergerie de Bordeaux, poursuivi pour deux faits couverts par l'édit de pacification, mais sur lesquels il craint la partialité des juges. (I, 14.)
6 février. Il lui recommande Lacroix auquel on ne veut pas rendre son état de valet d'écurie du roi, bien qu'il ne lui ait été ôté que pour cause de religion. (I, 15.)
21 février. Au Roi. II le remercie d'avoir obtenu la main-levée de ses terres des Pays-Bas, et le prie de s'opposer au dessein du marquis Villars de s'emparer à Millau de pièces d'artillerie qui lui appartiennent et de détenir des places du Rouergue qui sont à sa mère. Protestations de fidélité et de dévouement. (VIII, 45.)
23 février. Envoi de Téligny pour faire valoir quelques réclamations sur l'exécution de l'édit. Plaintes du peu de déférence et des empiètements de Dulude, gouverneur du Poitou, son subordonné. (VIII, 46.)
26 février. Au Roi. Demande la punition des catholiques d'Orange, qui ont massacré les protestants. (VIII, 48.)
5 mars. Au Roi. Il se plaint que Dulude son subordonné reçoive du Roi des ordres dont il n'est même pas informé. (VIII, 49.)
9 mars. Au Roi. Il dément tout préparatif d'armement maritime contre les Espagnols à la Rochelle, et annonce qu'il a donné de nouveaux ordres pour les prévenir. (I, 16.)
On a supposé que c'était là un désaveu officiel concerté avec Catherine de Médicis et destiné à être mis sous les yeux de l'ambassadeur d'Espagne.
31 mars. Au Roi. II s'est soumis à recevoir Lesborge comme lieutenant de sa compagnie mais il prie qu'on lui laisse comme aux autres capitaines la disposition des grades. (VIII, 50.)
13 avril. A M. de Lavardin. Instruction pour faire contribuer, le plus doucement possible, au paiement des soldats étrangers appelés par le parti de la Réforme tous ceux qui jouissent des édits, tout en ménageant fa susceptibilité des nobles. (I, 18.)
Cette lettre importante fait bien sentir tout ce qu'avait de difficultés la position des chefs du parti elle explique comment les nobles, prodigues de leur sang pour la cause étaient avares de leur or. C'était une question de vanité autant que d'intérêt.
22 avril. A M. de Savoie (le duc son oncle). Lettre de compliment, (I, 20 )
1er mai de la Jarne. Au Roi. Au duc d’Anjou. Il appuie le fils sieur de Clermont dans sa demande de révision d'un jugement prononcé contre son père. (VIII, 51, 53.)
Cette lettre est datée de la Jarne. Les éditeurs y substituent la Jarrie, sans nécessité. Jeanne et Henri paraissent avoir habité plusieurs fois pendant cette année la Jarne et la Jarrie.
Salbert était sieur de la Jarne, et le château de la Jarrie appartenait alors à la famille de Vergier. (Jourdan, Ephémérides, I, 449, n, 329.) M. Decombredet, malheureusement mort à Paris dans la guerre contre la Prusse, avait écrit une notice sur les seigneurs de la Jarne, mentionnée à Saintes dans un concours, restée, je crois, inédite.
17 mai. A la .Reine mère. II lui recommande le sieur de la Roque, chargé d'une affaire pour sa mère. Protestations de dévouement. (VIII, 54.)
22 mai. Au Roi. Il réclame contre la distribution, qu'on lui indique par un état, des garnisons envoyées en Aunis et en Saintonge qui n'est propre qu'à entretenir la méfiance. (VIII, 54.)
22 mai. Au Roi. Demande de révision d'un jugement rendu contre M. de Saint-Vallier en contravention avec les édits de pacification, (VIII, 56.)
31 mai. A la Reine mère. Demande de faciliter, selon sa promesse le paiement des Allemands auxiliaires des protestants. (VIII, 57.)
30 juin. –M duc de Breunswik –Sur la translation par mer du corps du duc Wolfgand duc des Deux-Ponts, de la Rochelle, où il avait été déposé, en Allemagne. (I, 21)
2 juillet et 25 juillet. A M. de la Force. A propos des pertes qu'il a souffertes, dans son château Jollet lorsque la Pynaudière s'y est posté pour prévenir les ennemis, dans les guerres civiles. (I, 22.)
Il insiste sur la nécessité d'avoir recours à des arbitres et non à des juges pour ces difficultés entre protestants.
10 juillet. A M. Castellas. Sur les moyens de faire parvenir en Allemagne l'argent dû aux auxiliaires allemands. (VIII, 58.)
16 juillet (de Ronflac commune de la Jarne). A MM. Des Eglises de Lyon- les gourmande sur les difficultés que trouve chez eux la levée de contributions pour le paiement des auxiliaires allemands, (VIII, 59.)
16 juillet (de Ronflac). A M. Castellas. II l'invite à la rigueur envers les débiteurs lyonnais. Si elle ne suffisait pas le Roi y enverrait des fonctionnaires papistes, bien autrement rigoureux. (VIII, 62.)
30 juillet (de la Jarrie). Au Roi. Il accrédite de Piles qui va expliquer au Roi pourquoi certains prisonniers faits à Saint-Junien sont encore retenus. (VIII, 63.)
1er août (de la Jarrie). Au Roi. Il licenciera les garnisons des protestants, quoique aux termes des édits il pût les garder dans les places de sûreté aussitôt que les garnisons voisines qui les inquiètent auront été réellement licenciées. (VIII, 64.)
Cette lettre pleine de plaintes malgré un ton très marqué de soumission, laisse voir une grande méfiance.
2 août (de la Jarrie). Au Roi. Il a réprimé et dû réprimer une attaque contre le château d'Aubeterre. Le vice-sénéchal d'Angoumois est suspect dans cette affaire. (VIII, 67.)
6 août (de la Jarrie). Au marquis de Villars. Il prie son lieutenant de ne pas exciter le parlement de Bordeaux à instruire contre des soldats qui venaient par ses ordres le trouver à la Rochelle. Il a prié le Roi de juger directement cette affaire. (I, 25.)
4 août (de la Jarrie). A M. de Cestellas. Il le prie de faire le plus tôt et le mieux possible dans le Lyonnais les levées de contributions pour le paiement des auxiliaires allemands. (VIII, 68).
Il n'y a guère besoin d'insister sur la gravité de la position qu'indiquent ces lettres importantes. Agent d'un roi qu'il venait de combattre et qui le regardait encore comme un chef de rebelles surveillé et contrarié plus que servi par les subordonnés que lui avait choisis ce roi forcé de traiter en son nom avec des étrangers avec lesquels il avait personnellement de tout autres rapports que ceux que lui donnaient ses fonctions obligé de contraindre à des paiements onéreux pour les frais d'une guerre achevée les hommes de son parti qu'il avait à ménager pour les guerres prévues tenu d'adoucir tous les chocs entre gens de ce même parti sans s'aliéner personne Henri de Navarre avait besoin d'une prudence consommée, et ces lettres en portent les traces. Sans doute cela même est une preuve qu'il ne les a pas écrites qu'elles ont été dictées par les conseillers éminents qui l'entouraient et le dominaient, et qui eux-mêmes étaient obligés de compter avec les magistrats de la ville où ils résidaient, que cette cour éblouissait peut t être mais gênait et inquiétait. Du reste, ces lettres elles-mêmes le déclarent en quelque sorte car plusieurs d'entre elles portent cette double signature, Henry, Henry de Bourbon (les princes de Navarre et de Condé). Il n'en est pas moins certain que c'était là pour ce jeune homme de dix-huit ans une forte école, un fécond noviciat.
Il prit moins de part probablement ou plutôt il ne figura qu'à cause de son rang dans le synode tenu par les églises protestantes, à la Rochelle au mois d'avril -1571, sous la présidence de Théodore de Bèze, et qui amena le formulaire célèbre sous le nom de Profession de foi de la Rochelle. Sa signature y figure la seconde, après celle de la reine sa mère, avant celles de Condé, de Louis de Nassau, de Coligny.
Ce fut aussi uniquement comme solidaire avec sa mère, qu'il signa l'acte par lequel celle-ci, conjointement avec Condé et Coligny, fondait deux chaires l'une de grec l'autre d'hébreu au collège de la Rochelle, dont ils voulaient faire un séminaire de piété.
Ce fut lui seul pourtant qui plus tard donna quelque efficacité aux promesses faites. (10)
Henri se rendait abordable aux familles rochelaises; il signe comme parrain un acte de baptême du 17 décembre 1570. (11)
C'est à cette année aussi que M. Jourdan place ce qu'il lui plaît d'appeler les premiers amours d'Henri IV, c'est-à-dire ses relations adultères avec la femme du professeur Martinès. C'est là un terrain qu'ont mauvaise grâce à fouler les sabots de l'érudition. Il faut pourtant bien que je dise que je ne comprends pas un mot de ce chapitre de M. Jourdan. Trouvant lourde toute discussion à cet égard, et ne voulant renoncer à aucun des documents qu'il possédait, il n'a pas apporté dans leur emploi l'exactitude et la critique qui lui étaient habituelles.
D'Aubigné dans la Confession de Sancy, chap. v fait entrer dans la longue kyrielle de celles qui ont servi aux plaisirs de Henri, Martine, femme d'un docteur de la princesse de Condé et Leduchat ajoute en note qu'il y a apparence que c'est la même dont M. Dufay, chancelier de Navarre, était amoureux en 1589, dix-huit ans plus tard.
Il résulte même du texte de d'Aubigné qu'Henri n'eut cette femme que lorsque lui-même était marié. M. Jourdan (Amours, p. 6) déclare que c'est une erreur, et qu'il s'agit ici de la femme du professeur de grec. Arcère (II, 62) avait dit en effet que celle-ci, étant veuve, fut une des maîtresses de Henri, mais sans citer d'autorité. M. Jourdan allègue celles de Colomiez et de Bassompierre sur cette indication un peu vague, je ne puis retrouver les endroits cités.
Je lis seulement dans Colomiez qu'un vénérable vieillard lui avait souvent répété que la femme de Martinès était d'une beauté remarquable et plaisait beaucoup à Henri IV.
Uxorem duxerat forme venustat conspiscuam, ideo que Henrico magno, ut ex venerando sene saepius audivi, pergratam.. Il renvoie, il est vrai, a un livre intitulé Cupidon sur le trône, ou l'histoire des amours de nos rois depuis Dagobert, livre que je n'ai pu retrouver. (Gallia orientalis p. 67.)
Voici les lignes de Bassompierre que cite M. Jourdan :
« Étant en sa première jeunesse à la Rochelle Henri IV desbaucha une bourgeoise nommée dame Martine de laquelle il eut un fils qui mourut. Les ministres et le consistoire lui en firent de publiques remontrances au presche. Il (le mari) ne se plaignait même pas des attentions du prince croyant que Mmes Martinès et Henri s'en tenaient aux termes d'une simple galanterie et ne poussaient les choses plus loin que jeu. On ne sait où chercher ce passage dans les mémoires de Bassompierre, qui vont de 1595 à 1640, et je les ai vainement parcourus pour l'y retrouver. Peut-être M. Jourdan a-t-il oublié qu'il l'avait pris (si tant est qu'il soit textuel, ce dont quelques mots me feraient douter) dans les notes écrites par Bassompierre à la Bastille, plus de vingt ans après la mort d'Henri IV, sur la vie de ce prince et celle de Louis XIII dans tous les cas il ne faisait que répéter de vieux on dit; car Henri avait plus de vingt-cinq ans lorsque naquit Bassompierre et ces on dit n'ont ni vérité, ni vraisemblance. Le professeur Martinès s'il s'agit ici de lui, ne vint à la Rochelle qu'en 1572; Colomiès le dit (lieu cité); sa leçon d'inauguration porte cette date enfin M. Jourdan (Amours, 5) établit qu'il n'y fut appelé qu'après le mois d'août 1571.
Or Henri quitta la Rochelle le 22 août 1571 les enfants de Martinès dont M. Jourdan trouve les actes de naissance, sont de 1577, 1578, 1580 et 1583, ce qui porterait à croire qu'il n'était même pas marié en 1572 il y a donc certainement erreur ou sur la personne ou sur le temps, ou sur le lieu. Tout cela importerait peu sans l'assertion adoptée par M. Jourdan, que ce fait fut l'objet d'un blâme public prononcé en chaire. Rien de plus invraisemblable. Dans l'intrigue d'une femme mariée avec un jeune homme de dix-huit ans, ce n'est guère celui-ci, fût-ce un prince, qui est le corrupteur. La dénonciation publique d'une intrigue de ce genre, gardée secrète serait un scandale pire que la faute qu'elle châtierait; enfin il est bien probable que Bassompierre dans ses vagues souvenirs a rapproché cette histoire vraie ou fausse, de M Martine de la pénitence solennelle de Coutras. Mais il gâte singulièrement celle-ci.
Cet aveu d'une grande faute, en face d'une armée au moment d'une bataille, a quelque chose de grandiose capable d'émouvoir les auditeurs et l'auteur même quelque gascon qu'il soit mais à condition d'être unique renouvelé il deviendrait grotesque. Une maîtresse de plus ou de moins, sur plus d'un demi cent, ce n'est rien pour la réputation d'Henri IV mais par respect pour la vérité je crois qu'il faut rayer celle-ci du catalogue.
Puisqu'il s'agit ici de galanterie, disons qu'on trouve dès lors mention d'achats de bijoux faits pour le compte d'Henri, chez Jacques Cochet, orfèvre à la Rochelle. (12)
Henri laissa la Rochelle le 22 août 1571. L'itinéraire joint à sa correspondance dans les documents inédits sur l'histoire de France (II, 542), le ramène dans cette ville le 13 décembre 1571, quoiqu'il soit à Nérac le 11 et le 18 du même mois; ce voyage précipité, peu vraisemblable, est affirmé sur la foi d'une lettre datée de la Rochelle et de ce jour mais cette lettre ne se retrouvant ni dans l'ouvrage ni dans le supplément, il est bien probable que cette indication est une erreur.
Henri ne revint qu'en 1573 non point à la Rochelle, mais dans le camp de ceux qui l'assiégeaient.
VII
ANNÉE 1573.
On sait dans quelles circonstances il y venait converti à la religion catholique le lendemain de la Saint-Barthélemy, les pieds dans le sang des siens et le poignard sur la gorge protégé seulement par son rang et par sa femme qui, quelques torts qu'elle ait pu avoir comme épouse (mais quelle sainte eût été la femme fidèle de cet impudent et cynique libertin?), montra en sa faveur à cette époque beaucoup de fermeté il était traîné à la suite du duc d'Anjou plutôt comme prisonnier que comme compagnon d'armes.
Déjà le 10 septembre précédent, quinze jours après le massacre, il avait écrit aux Rochelais pour les engager à montrer leur confiance en Charles IX, en recevant Biron pour gouverneur.
Les Rochelais avaient répondu à cette lettre comme à toutes celles émanant de la cour, en protestant de leur fidélité comme sujets et en redoublant leurs préparatifs de défense.
Assiégés, ils voyaient Henri dans le camp de leurs ennemis avec plus de pitié que de haine. On n'en trouve pas trace chez eux. En rapportant une conversation entre deux soldats gascons qui servaient l'un parmi les assiégeants, l'autre parmi les assiégés, Cauriana fait dire à celui-ci qu'ils trouvent Henri de Navarre un bon et gentil garçon, elegans est et egrgius adolescens : un gros garçon étourdi, dit Mérimée Brantôme fait parler son soldat plus plaisamment « II n'y a rien que nous avions le roi de » Navarre; ares il est pour vous autres nous avons eu le prince de Condé, ares il est pour vous autres: et, qui plus est, nous avons eu la carraque ares elle est pour vous autres. » (13)
Arrivé devant la Rochelle avec le duc d'Anjou le 12 février, Henri de Navarre suivit ce prince jusque dans son quartier de Nieul qu'il ne quitta pas de tout le siège. On a de lui six lettres (dont trois dans le supplément) datées du camp de Nieul.
II y parle comme gouverneur de la Guienne ou comme souverain du Béarn et s'efforce, en bon catholique, d'étouffer toute résistance de la part de ses sujets reformés. Dieu sait ce qu'il en pensait peut-être, après tout, était-il assez roi pour trouver mauvais qu'on agit, même en pareil cas, contre ses ordres? Cela, en tout cas, n'intéressait guère les Rochelais.
Le 14 juin 1573, Henri accompagnait le duc d'Anjou dans cette tournée où celui-ci n'échappa a une balle rochelaise que par le dévouement de son écuyer Devins.
Le 26, il informait de la paix Sérinhac, qui commandait les calvinistes de Toulouse en l'engageant à cesser de son côté les hostilités. Cette lettre est datée comme les autres du camp devant la Rochelle. (Lett. I., 53) II semble bien pourtant que c'est elle qui a trompé M. Jourdan et qui lui a fait croire que Henri entra il la Rochelle le 26 et y demeura dix-huit jours.
Je ne vois pas du moins d'autre mention de ce séjour, qui eût probablement rencontré une double opposition de la part du duc d'Anjou et de la part des Rochelais. Il semble même qu'on pût conclure que Henri de Navarre s'éloigna de la Rochelle dès le 27 juin de cette phrase de la Relation du siège publiée par les catholiques et donnée par Goulart « Le vingt-septième du présent mois, Monsieur partit de Nieul pour aller à l'ile d'Oléron, attendant la réponse du Roi cependant le roi de Navarre et le » prince de Condé partirent du camp pour se rendre » à la cour. »
Mais on a dans la correspondance (VIII, 89) une lettre datée de Nieul, ce premier juillet 1573, à M. de Balanzac lettre singulière il est vrai, où Henri, au moment de partir de la Rochelle pour Paris demande de bons chiens parce que le temps approche de chasser aux perdreaux.
La lettre du reste prouverait aussi que Henri n'était pas dans la Rochelle. (14)
VIII
ANNÉE 1576.
Il faut franchir trois années pour retrouver Henri en relation avec les Rochelais. Il avait repris l'exercice public du culte réformé il savait ce que lui avait été il prévoyait ce que lui serait la Rochelle; il voulait la revoir en passant; il le fit savoir aux magistrats de la ville. Ils se souciaient peu de le recevoir, non pas, je m'imagine qu'ils se méfiassent de son retour à leur église personne n'ignorait à quelle violence il avait cédé en l'abandonnant et d'ailleurs chaque parti, chaque secte se persuade aisément qu'on ne la quitte que par force ou par intérêt, qu'on lui revient par remords et par conviction.
Chaque parti, chaque secte n'est-elle pas la vérité, et la seule vérité ? Ils ne craignaient pas, je crois, en lui le catholique, mais le prince. C'était leur gouverneur, au nom du Roi il venait, tout récemment, comme tel, de réclamer et de recevoir le dixième des prises faites par leurs corsaires. Or, c'était comme tel qu'ils ne voulaient pas le laisser entrer. Ils lui envoyèrent une députation, qui prit pour prétexte 'de son refus la pauvreté de la ville, privée depuis plusieurs années de son commerce et incapable par là de le recevoir comme elle le devrait et le voudrait.
Henri comprit; dans une lettre écrite de Niort, le 16 juin il insista sur sa demande, en appuyant sur sa connaissance de leurs anciens privilèges franchises et libertés en déclarant qu'il est résolu de les respecter et assez fort pour les faire respecter aux autres; qu'il ne demande que ce qui est du à sa légitime autorité, telle que l'a eue son père.
Les Rochelais cèdent ils le recevront à bras ouverts; mais lors qu'il aura accepté et signé les articles qu'ils lui soumettent. Nos pères savaient ce que vaut une parole de gentilhomme. Cet acte de méfiance respectueuse vaut qu'on l'écoute dans ses propres termes
« Articles et remonstrances requises par les maire, eschevins et pers de la Rochelle estre signés par la Majesté du roi de Navarre pour faire son entrée en ladite ville, sur la remonstrance et requeste des bourgeoys, manans et habitans d'icelle a eulx faicte, après avoyr oy la lecture de la lettre de sadicte majesté, adressée auxdits maire, eschevins pers bourgeoys manans et habitans.
» Les bourgeoys, manans et habitans de la Rochelle désireroyent supplyer humblement la majesté du Roi de Navarre de différer et remettre son entrée en ladicte ville pour autre foys, veu la pauvreté du pays, mesmement des pauvres habitans desquels le traffic a cessé desja sept ou huit ans et n'ont aucun moyen de lui faire réception digne de sa majesté, aussi que le commancement du petit trafficq pourra cesser ou estre interrompu par le moyen de ladicte entrée de façon qu'ils se trouveront encore tous desnués de moyens lorsqu'il leur conviendra payer leur part des taxes qui se préparent pour satisfaire à l'ecdict de pacification; toutes fois sy ladicte majesté a résolu d'y venir maintenant la supplyent humblement leur accorder de signer les conditions qui s'en suyvent :
Premièrement que sa majesté promettra et signera de n'entrer en ceste ville de la Rochelle en quallité de gouverneur lieutenant de Roy en ladicte ville et gouvernement et de même y establyr aucun ; ains qu'il nous maintiendra en ce que le Roy nous a accordé par les articles secrets portans exemption de gouverneur et de garnison fors du sénéchal à la justice.
Secondement qu'il aura pour agréable et ne trouvera rnauvays que les clefs de ladicte ville ne luy soyent présentées encores que par cy devant on les ayt présentées tant à luy que à ses prédécesseurs, veu que nos previllèges anciens esquels nous avons été remys portent notamment que nous ne baillerons lesdictes clefs sinon au Roy ou à son hoyr masle et que ledict previllège comme tous autres nous ont estés confirmés par l'ecdict de la paix signé et juré de sadicte majesté, joint que ladicte confirmation de nos dicts previllèges a esté par tous nos seigneurs les princes et autres seigneurs et députés des Eglises unanimement poursuyvie et obtenue par l'une des asseurances de ladicte paix et sans avoyr prins ne requis autres seureté pour tous ses pays de deça
Tiercement que sadicte majesté n'entrera en ladicte ville sinon avecques sa maison, laquelle ils la supplyent restreindre au plus petit nombre que faire ce pourra, renvoyant hors ce gouvernement le surplus de ces gardes et compaignies, sauf qu'il luy plaise amener quelques gentilshommes de la religion et non suspects avec sa garde de Suysses; et ce pour plusieurs avertissements d'entreprinses sur ladicte ville qu'aucuns prétendent exécuter soubs couverture de ladicte entrée, offrans faire faire telle garde pour la personne de sa majesté qu'elle avisera.
» Sera supplyée sa majesté que son entrée faicte en ladicte ville ne trouve mauvays de congédier tous ceulx qui de quelque estat et condition qu'ils soyent voudront entrer en ladicte ville veu le peu de séjour que sadicte majesté entend faire en icelle. »
Henri écrivit de nouveau de Surgères le 26 juin une lettre où en déclarant qu'il ne vient que les visiter comme ses bons amis, il demande qu'on ne lui fasse pas d'entrée et accepte explicitement ces conditions il envoyait la liste des personnes qui l'accompagneraient. (15)
On a prétendu qu'il avait lui-même demandé l'exclusion de quelques-unes d'entre elles dont il désirait se débarrasser la chose est possible, il semble cependant qu'il put s'en fier aux précautions des Rochelais.
Son séjour fut très court; entré le 28 juin la Rochelle, il en partit le 4 juillet. Il est pourtant marqué par deux lettres, l'une à M. de Bayaumont, par laquelle il le prie de faire restituer aux Bordelais des canons qui pendant la guerre avaient été conduits à Agen l'autre à. Manaud de Batz, pour lui dire qu'il compte qu'il sera pour lui ce qu'il a été pour sa mère.
IX
ANNÉE 1582.
Henri resta près de six ans sans revenir à la Rochelle mais dans ce laps de temps il eut avec elle quelques relations épistolaires.
Le 28 juin 1577 pendant qu'il traitait à l'assemblée de Bergerac, il adressa d'Agen au corps de ville, une lettre où .il lui montrait moins d'espoir de la paix que de résolution de ne rien épargner pour l'avoir bonne.
Cela n'empêcha pas les ministres d'écrire à Lanoue pour lui recommander de veiller à ce que Henri ne fit pas trop bon marché des intérêts de la religion.
C'était en effet une des difficultés de ces négociations que les ministres du culte, qui ne contribuaient pas à la guerre de leur sang et qui y contribuaient de leur argent le moins possible eussent toujours une voix importante lorsqu'il s'agissait de la paix.
Néanmoins le 18 août Henri écrivait aux ministres et aux anciens des églises réformées assemblés à la Rochelle que d'impérieuses nécessités l'avaient contraint d'abandonner beaucoup de la libérté obtenue par le précédent édit de pacification. Il y a ici, dans le texte de sa correspondance des documents inédits, un mot qui pourrait faire croire qu'il s'agit en particulier de la Rochelle, la liberté qui vous était acquise ; mais ce n'est qu'une faute d'impression le texte déjà imprimé qui a servi d'original porte nous. (16)
Un motif tout à fait semblable dicte à Henri une lettre datée de Cadillac, le 10 février 1581 qui n'a pas d'adresse mais que les éditeurs des documents inédits croient adressée aux maire et échevins de la Rochelle. Il leur fait sentir la nécessité de se soumettre aux conditions arrêtées dans les conférences de Fleix et les engage à décider par leur franche adhésion l'acceptation des autres provinces. (I, p. 357.)
Une autre lettre de la même année soulève deux questions, l'une sur sa valeur morale, l'autre sur son authenticité. Par cette lettre datée de Nérac, le 3 juin 1581, Henri presse le corps de ville de la Rochelle de faire punition exemplaire de Popellynière et de son imprimeur, qui ont l'un composé, l'autre publié un livre contre la religion réformée et contre ceux de la maison de Bourbon.
Ce livre, l'histoire de France fut en effet examiné et censuré le mois suivant par le Synode mais aucune des corrections qui lui furent imposées ne paraît se rapporter à la maison de Bourbon.
La demande de Henri ne témoigne pas sans doute d'un grand respect pour la liberté de la presse; il faut considérer toutefois qu'il parle ici comme plaignant non comme roi, comme partie non comme juge, et qu'il semble agir d'après des plaintes qu'on lui a faites non d'après la lecture du livre, qui ne parait en effet guère motiver ses plaintes. M. Fillon qui a publié cette lettre dans ses Études numismatiques (p. 110), l'emprunte à la collection Dupuy. D'où vient alors qu'elle n'a pas trouvé place dans le supplément aux lettres d'Henri IV, bien que l'éditeur cite expressément le fonds Dupuy, comme un de ceux qu'il a cousultés. Est-ce oubli? est-ce rejet volontaire? Je ne sais et ne puis que signaler le fait.
Il ne résulta de la aucune froideur entre Henri et ses amis de la Rochelle. Il vint les visiter en 1582, prenant ses précautions pour ne leur inspirer aucune crainte et par suite recevant d'eux de grandes démonstrations de respect et de dévouement.
« Le vendredi 13 avril, dit Mervaut, le Roi de Navarre accompagne de M. le prince de Condé, de M. de Rohan et de quelque soixante chevaux, ayant laissé ses gardes et ses troupes hors du gouvernement vint en cette ville.
Le Maire avec les principaux de la ville et trois cents arquebusiers ayant été au-devant de lui jusques au pont des Salines, où il lui fit sa révérence et l'accompagna jusques à son logis qui était celui du sieur Blandin assesseur de cette ville, et en passant devant la place du Château il fut salué de six pièces de canon et de l'arquebuserie des compagnies de la ville, qui étaient la assemblées pour lui faire honneur.
On était à la veille de Pâques. Le roi, le prince et le duc participèrent à la cène avec les habitants.
Henri partit de la Rochelle, le 22. Deux jours auparavant il avait fait payer une annuité de 700 fr. de la rente fondée par sa mère et par lui en faveur des chaires de grec et d'hébreu du collège de la ville et ordonné qu'elle fût exactement payée à l'avenir. M. Jourdan a retrouvé aux archives de Pau cette ordonnance et la quittance de la partie prenante. L'incessante activité de Henri est aussi signalée par quatre lettres écrites pendant ce court séjour. (17)
Il retournait en Béarn le soin de sa santé l'appelait aux Eaux chaudes. Pour respecter partout les liens du mariage, notons que parmi plusieurs voyages payés pendant ce court espace sur la cassette de Henri, on en trouve un d'un gentilhomme gascon envoyé de la Rochelle à Nérac près de Marguerite, reine de Navarre. Je ne trouve pendant quatre ans aucune trace de relations avec les Rochelais.
Seulement le 31 décembre 1568 Henri écrit au roi de France pour le prier de faire cesser les poursuites intentées contre un capitaine Deslax, habitant de la Rochelle et qui vient d'y être arrêté par suite de faits de guerre commis pendant le siège de 1573 et couverts par les édits de pacification. Ce n'est qu'un indice mais qui montre bien que les liens n'étaient ni rompus ni même relâchés par l'absence.
En 1584 un de ses valets de chambre, Bertrand Dupuy était venu par ses ordres de Pau à la Rochelle. (18)
Année 1586.
Le dimanche 1er juin 1586, Henri entrait de nouveau à la Rochelle mais cette fois avec le dessein d'y faire son principal séjour le roi de Navarre faisait place au chef du parti réforme et celui-ci prenait la Rochelle, faut-il dire, pour capitale ou pour quartier général ?
Il y entrait sans son armée laissant en Saintonge ses troupes de pied et de cheval, ne venant qu'accompagné du comte de Larochefoucault et d'une cinquantaine de seigneurs il y était reçu en roi.
Le Maire avec trente des principaux du corps de ville montés sur des haquenées harnachées de housses jusques à terre et trois cents arquebusiers et cinquante piquiers, tous enfants de ville, sous l'enseigne coronelle portée par le sieur Saint-Jean Dujau, alla jusques au pont des Salines pour le recevoir, et le voyant venir avec sa troupe et une cornette toute blanche et frangée de fil d'argent il mit aussitôt pied à terre et lui alla embrasser la cuisse et faire offre de son service et de celui de la ville, qu'il accepta avec remerciements puis étant remontés à cheval ils vinrent tous ensemble à la porte de Cougnes, ou le roi de Navarre fut salué du canon qui était à la porte de Saint-Nicolas au gabut et aux tours de Saint-Nicolas, de la Chaîne et d'Aix comme de celui de l'éperon, de ladite porte de Cougnes et des arquebusiers qui y étaient, et ensuite par celui de la place du Château et de l'arquebuserie des compagnies de la ville qui y étaient assemblées ainsi qu'il passait pour aller au logis qu'on lui avait préparé, qui était celui de l'assesseur Montjon (19), mais il redevient vite soldat, et c'est en soldat qu'il pas à .la Rochelle, du 1er juin 1586 au 6 avril 1589, d'abord dix-sept, puis treize mois, couchant aussi souvent sous la tente que dans son hôtel l'hôtel ; d'Huré rue Bazoges qu'il avait loué de la famille Bertinault (Jourdan Amours p. 15), développant une merveilleuse activité; et pour employer une expression vulgaire mais énergique, ne faisant pas de son métier de roi un métier de paresseux.
Tallemant des Réaux dans son historiette familière et excellente sur Henri IV rapporte de ce prince un mot, dont il ne donne pas la date mais qui ne peut se placer qu'a cette époque, et qui peint mieux encore celui qui le dit que celui auquel il l'applique.
Je copie Tallemant: « A la Rochelle, le bruit était parmi la populace qu'un certain chandelier avait une main de gorre, c'est-à-dire une mandragore or communément on dit cela de ceux qui font bien leurs affaires.
Le roi, qui n'était alors que roi de Navarre, envoya quelqu'un à minuit chez cet homme demander à acheter une chandelle. Le chandelier se lève et la donne. Voilà, dit le lendemain le roi, la main de gorre cet homme ne perd point l'occasion de » gagner, et c'est le moyen de s'enrichir. » (20)
Lui aussi voulait gagner, et n'en perdait pas l'occasion.
Arrivé à la Rochelle le ler juin il en part le lendemain pour aller à l'île d'Oléron et visiter l'armée navale qui devait attaquer Brouage.
Le bruit courut que cette flotte devait conduire Henri en Angleterre, d'où il serait passé en Allemagne, pour se mettre à la tête de 30,000 rêtres, qu'il amènerait en France.
Il y passe trois ou quatre jours il visite Pons, Royan, Saint-Jean d'Angély, Taillebourg, dégageant le pays des troupes ennemies qui se retirent sur Limoges.
De retour à la Rochelle, il en écrit le 11, à ses conseillers d'Etat une lettre où il rend compte de ses premiers succès s'entend avec eux et ajoute de sa main une ligne amicale et familière.
Le 14, il sollicite d'un marchand d'Orthez un emprunt, non pas de quelques milliards, ce n'était pas encore la mode mais de deux cents écus au soleil encore comme cette lettre ne porte pas l'acquit de réception qui devait la suivre, est-on porté à croire qu'il ne put obtenir cette misérable somme, quoi qu'il promit de n'oublier jamais un si grand service. Le même jour il remercie M. de Houdetot d'avoir apaisé un différend entre deux gentilshommes, sur lesquels il sent pourtant qu'il ne peut guère compter. Mais, et sa vie confirme ces paroles ce n'est faute, dit-il d'user de confiance avec les gens d'honneur, quand bien ils seraient égarés. J'ay plus de place en mon cœur pour la miséricorde que pour la haine.
Le soir il était à Marans ; il en repartait le 16 et le lendemain il écrivait à la comtesse de Gramont la lettre si souvent et si justement citée dans laquelle il décrit avec une grâce toute poétique le site de cette ville.
Comme il l'assure de sa fidélité blanche et hors de tache, il faut croire que dans cette quinzaine il n'avait pas trouvé place pour de nouvelles amours elle avait été assez occupée pour cela. (21)
Le 19 juin Henri part pour guerroyer en Saintonge et ne revient à la Rochelle que le 4 juillet.
Le 5, il était à Marans, ou il conduisait une garnison de 800 hommes le 6 il était de retour a la Rochelle où il faisait la cêne dans la salle de Gargouillaud, avec cinquante seigneurs et gentils-hommes de sa suite.
Le 8, Biron marchait sur Marans et Henri de son côté écrivait à ses amis qu'il allait avoir besoin de tous ceux qui savaient manoeuvrer des arquebusiers. Deux choses l'occupèrent pendant les mois de juillet et d'août la défense de Marans sur laquelle il veillait, de la Rochelle ou il était, et qu'il visitait de jour à autre, et des négociations mêlées aux attaques.
Le 19 juillet, il allait visiter l'ile de Ré le 25 il recevait à la Rochelle Montsoreau qui lui était envoyé par Biron le 31 l'abbé Gadagne venait l'y trouver de la part du roi. Ces négociations n'empêchaient pas les cavaliers de Biron aussi voisins de la Rochelle que de Marans, de venir enlever des bestiaux et des prisonniers à portée du canon de la première ; ce à quoi les Rochelais répondaient en tirant dessus et en leur courant sus, et en faisant eux-mêmes des prisonniers. Les sieurs de Lavienne et de Preuilly furent dans le mois d'août, reconnus de bonne prise, et leurs rançons taxées à huit cent-cinquante, écus dont un tiers appartenait à la cause. (22)
Le 6 août cependant intervint une trêve par laquelle Biron faisait porter son canon à Niort et abandonnait Marans.
Le 15, Henri couchait dans cette ville, son étape vers Luçon il revenait le 19 à la Rochelle ; en repartait le 4 septembre pour Surgères et Saint Jean-d'Angély, y revenait le 8, en repartait le il pour aller passer deux jours à Luçon auprès de Mme de Soissons, sa tante ; y revenait le pour avoir le surlendemain une conférence avec Chémerault, que le roi de France lui envoyait pour traiter de la paix.
On y paraissait alors assez disposé pour que le 22 on vit sans trop d'inquiétude en rade de Chef de Baie des navires de guerre du Roi.
Ils restèrent dans ces parages et auprès de Brouage pendant plus d'un mois sans faire aucun acte d'hostilité cependant on finit par se lasser du voisinage on escarmouchait et les navires du Roi durent remonter vers le Havre.
Henri ne voyait pas là la guerre car il courait toujours, partant de la Rochelle le 20, pour y revenir le 23, en repartir le 30 y revenir le 15 octobre, envoyer le 28 les navires Rochelais surveiller la flotte royale partir le lendemain pour Saint-Jean d'Angely doit- il ne revint que le 11 novembre.
Etait-on en paix? Etait-on en guerre?
Le 20 novembre le régiment de Neuvy, qui tenait pour le roi de Navarre, fut battu à Maillezais; son chef fut pris avec cinq drapeaux ; mais la reine-mère désavouant cet exploit des siens, renvoya les captifs sans rançon ; elle envoya Rambouillet assurer Henri de ses intentions pacifiques.
Une trêve en effet fut publiée à la Rochelle le 24 novembre puis de nouveau le 3 décembre les conférences assignées d'abord à Saint-Maixent, ayant été transportées à Saint-Bris, près Cognac.
Henri qui n'avait pas quitté la Rochelle depuis le 11 novembre en partit le 5 décembre pour se rendre à Saint-Bris. Ce que j'ai dit n'avait pas épuisé son activité pendant ce période.
Sa correspondance en fournit de nouvelles preuves. Il nous reste de cette époque 24 lettres, dont trois seulement au supplément. Elles entrent dans les plus petits détails surtout pour les affaires d'argent. C'est par là surtout qu'Henri éprouvait des embarras. J'en ai donné une preuve dans l'emprunt demandé à Orthez on en trouve une plus poignante peut être, dans une lettre où il se plaint que ceux de Bayonne aient saisi les deniers que sa sœur Catherine de Navarre, envoyait pour le paiement de ses dettes. Peu de particuliers souffriraient aussi patiemment un affront de ce genre. (23)
Ces lettres sont, au moins pour la plupart, l'œuvre de la chancellerie de Henri, et non pas la sienne; on en trouve une preuve directe dans deux lettres au roi de Danemark et au duc de Brunswick, écrites en latin, mais il les a sans doute inspirées et revues ; elles témoignent d'un grand soin des détails. Toutefois, celles de cette série ont peu cette vive allure à la quelle on le reconnaît.
Une lettre de la fin d'août à la comtesse de Gramont, tendre au fond, a pourtant elle-même quelque chose d'inquiet et de haletant. (24)
Le 5 décembre 1586 Henri partit pour les inutiles conférences de Saint-Bris.
Les historiens écrivent tous Saint-Bris les géographes actuels Saint-Brice ce qui ne laisse pas d'embarrasser d'autant plus que Brie et Saint-Bris des Bois ne sont pas loin de là.
Pendant qu'il était à Saint-Bris Henri n'était pas à la Rochelle M. de la Palisse en conviendrait mais il en parlait beaucoup et en termes qui appartiennent à l'histoire. D'accord sur la pensée, les historiens diffèrent sur les mots; j'adopte naturellement la forme la plus saillante.
Le duc de Nevers lui représentait qu'il ferait bien mieux de faire sa cour au Roi de France qu'au maire de la Rochelle, sans lequel il ne pourrait lever un denier dans la ville.
A la Rochelle, répondit Henri, je fais tout ce que je veux, parce que je ne veux que ce que je dois. Grande parole à coup sûr, magnifique éloge de celui qui l'a dite et de ceux qui l'ont fait dire Il y a donc eu en France un hectare et une année ou un roi était contenu par la résistance respectueuse, soutenu par le dévouement d'un peuple.
Certes, je ne veux pas bannir de notre musée les tableaux qui rappellent la clémence politique de François 1er et l'obstination désespérée de Guiton mais si j'avais à décorer notre Hôtel de ville, j'y ferais peindre la conférence de Saint-Bris, pour inscrire au bas en grands caractères ;
A la Rochelle je fais tout ce que je veux, parce que je ne veux que ce que je dois.(25)
Le 21 décembre 1586 Henri revenait à la Rochelle accompagné de vingt-cinq chevaux et comme son train n'était pas arrivé, il s'en allait loger tout simplement à l'auberge, aux Trois Marchands.
La conférence n'assurait pas la paix il s'en fallait mais la trêve était prolongée jusqu'au 6 janvier et le fut bientôt après, à trois reprises, jusqu'au 8 mars. (26)
Pendant ce temps et sept semaines encore après, jusqu'au 26 avril 1587, Henri parait avoir habité constamment la Rochelle. Il y reçoit Biron le 3 janvier, et conclut avec lui une trêve.
Son itinéraire ne signale que des promenades il va diner à Vérines le 20 janvier, le 21 à la Grimaudière; la correspondance donne de lui une lettre du 23 février, écrite de la Rochelle elle en annonce une du 25 comme écrite de Saint-Jean d'Angély qu'elle ne donne pas toutefois, et qu'elle a peut-être rejetée comme fausse il semble, en effet, d'après Baudoin que dans ces derniers jours de février, Henri recevait à la Rochelle La Roche maître d'hôtel de la Reine-mère pour traiter de la prolongation de la trêve.
Il part de cette ville le dimanche ler mars et va à Marans dont il ne revient que le 4 du même mois.
Je ne vois pas qu'il s'en absente pendant le reste de ce mois.
Le 4 avril, le mardi après la Quasimodo, il choisit parmi les trois élus à la mairie Jean Guiton, frère du maire de l'année précédente, déjà père d'un fils nommé Jean comme lui, et qui devait donner à son nom une grande et sombre illustration. (27)
C'était comme lieutenant-général du Roi en Guienne, comme représentant du roi de France, qu'Henri faisait ce choix; il n'eût eu ce droit ni comme roi de Navarre, ni comme chef avoué du parti protestant.
Bien qu'on fût en trêve c'est-à-dire en guerre avec la cour, les Rochelais n'avaient rien perdu de leur respect pour elle, et, au mois de décembre précédent, après le retour d'Henri, ils avaient envoyé Baudoin Chateignier et Guiton celui même qu'ils venaient de faire maire à Cognac porter à la reine-mère l'assurance de leur fidélité et de leur obéissance.
Seulement ils l'entendaient comme un peu plus tard Henri IV à Rouen, la main sur la garde de leur épée. (28)
Ce qui fut plus personnel à Henri, c'est la part qu'il voulut prendre au grand repas qui célébrait l'installation du maire le jeudi après la Quasimodo. Il s'y invita, ce qui ne put que grossir de beaucoup la liste des invités, et la salle ordinaire ne se trouvant plus assez vaste, on établit un parquet de la maison de ville au canton de la Caille, on y dressa des tables on la couvrit, on la tapissa. Les jeunes gens de la ville servirent le roi qui les pria fort net de ne pas faire l'essai, et n'en mangea pas moins de tout en soldat qui ne faisait pas tous les jours un bon diner. On sait que plus tard il disait qu'il n'avait jamais eu tant d'appétit que lorsqu'il n'avait guère de quoi manger.
Les chroniqueurs insistent tous sur la confiance qu'il montra en ne laissant pas faire l'essai, précaution cependant impuissante quand elle n'était pas superflue, mais dont l'omission a toujours été droit au cœur de ceux qu'on en dispensait. On sait l'anecdote rapportée par Tallemant des Réaux.
Le même Henri, devenu Henri IV, étant en visite chez sa tante, la duchesse de Montpensier lui demanda des confitures. Elle fit apporter un pot d'abricots et, en prenant, elle voulait faire l'essai. Il l'arrêta, et lui dit :
- Ma tante, vous n'y pensez pas.
- Comment, reprit-elle n'en ai-je pas assez fait pour vous être suspecte?
-Vous ne me l'êtes point ma tante.
- Ah répliqua-t-elle, il faut être votre servante, et elle le servit depuis avec beaucoup d'affection. (29)
Nul doute qu'à la Rochelle aussi ces allures familières, bourgeoises, ne servissent à sa popularité. Tout le monde les approuvait-il? Quand Mme de Simier, dit encore Tallemant, qui était accoutumée à voir Henri fil, vit Henri IV : J'ai vu le roi, dit-elle, mais je n'ai pas vu sa majesté. Et de fait je m'imagine que si quelque courtisan de Louis XIV eût osé conter au grand roi que leurs grands-pères avaient diné côte à côte, dans une rue de la Rochelle il eut couru grand risque de tomber dans la disgrâce de celui qui faisait le roi mieux que Baron. Un roi me prête ses paroles pour le dire, comme s'exprime Bossuet.
Mais laissons ces majestés pour revenir à nos bourgeois. Le 26 avril Henri se mêlait encore à la vie commune, en allant tout simplement au Temple signer l'acte de baptême de Suzanne Eschalent, qu'il venait de tenir sur les fonts avec Louise Gellier, dame de Montauzier. (30)
Tout cela n'offre guère de traces de l'activité de Henri ; il est probable pourtant qu'elle ne s'endormait pas : car il n'avait pas perdu un jour de vue la guerre imminente. On le voit par ses comptes. Pendant qu'il achète des canons de la poudre des chevaux, pour la lutte des champs de bataille, il dirige la lutte des pamphlets, qui alimente l'autre. Ses comptes de cette année portent: 1e Paiement de cinquante écus à Pierre Haultin, imprimeur, à la Rochelle, pour l'impression de la Loi salique, par du Belley c'est-à-dire de l'Examen dit discours publié contre la maison royale de France, et particulièrement contre la branche de Bourbon, seul reste d’icelle, sur la loi salique et succession du royaume, par un catholique, apostolique, romain, mais bon français et très fidèle subjet de la couronne de France. 376 pages in-8".
Ce livre ne porte ni le nom du lieu d'impression, ni celui de l'imprimeur et les fleurons ne sont pas ceux dont se servait habituellement Haultin. Comme il est donné comme l'œuvre d'un catholique peut-être a-t-on voulu en déguiser la provenance. 2° Six écus à Jean Portau, imprimeur de la Rochelle pour 200 exemplaires de la Déclaration du roi de Navarre.
Cette désignation peut également convenir à trois brochures de ce temps : Déclaration et protestation du Roi de Navarre, du prince de Condé et du duc de Montmorency sur la paix faite avec ceux de la maison de Lorraine, etc., par un gentilhomme, 1585.- Advertissement fait aus Roi de la part du Roi de Navarre et de M. le prince de Condé, touchant la dernière déclaration de guerre, 1587, Rochelle, J. Portau.- Déclaratio causarum quibus serenissimus Rex Navarrae, primus regii Francorum sanguinis princeps, ejusdemque regni haeres, etc., externum militem conscriber coactus est. Rupellis, P. Haultinus, 1587, in—4°. Il est ptobable que c’est à la seconde qu’elle s’applique. (31)
Les comptes ne parlent pas d'un autre livre du même temps attribué aussi a de Belley : Mémoire et recueil famille de Bourbon, branche de la maison de France, Rochelle, P. Haultin, 1587, 398 pages in,-8.
Ces indices sont plus que confirmés par la correspondance. Elle contient pour ce laps de temps trente-trois lettres, dont huit dans le supplément. Il y veille aux affaires, petites et grandes, de son gouvernement, au règlement de ses finances, la constante difficulté de son temps et peut être de tous les temps, sans négliger l'administration de ses domaines; ainsi il se plaint que ses terres, celles du Cambrésis, en particulier, ne lui rapportent presque aucun revenu mais surtout il avait soin de raviver sans cesse le dévouement et l'ardeur guerrière de ses partisans, ou plutôt de ses compagnons d'armes. le disais des lettres précédentes que j'y reconnaissais peu sa main il en est ici tout autrement. Il y a la un certain nombre de petites lettres vives hâtives jetées en courant, vrais sons de trompettes qui ne permettent pas de supposer un secrétaire et, nouveau trait de familiarité, sur quelques-unes, des assistants des camarades, ont ajouté leurs lignes vives aussi, mais d'un esprit moins délicat, moins séduisant, royauté même mise à part.
Une de ces lettres (12 mars) est adressée à la comtesse de Gramont. Il se plaint de son oubli. Nous verrons bientôt comment il s'en consolait, (32)
Du 1er mai au 19 juin 1587, Henri occupé sans cesse à guerroyer dans la Saintonge ou dans le bas-Poitou, ne couche pas dans sa coquille de la Rochelle, comme l'appelait Joyeuse, et n'en reçoit guère d'autres secours que des pièces d'artillerie et de la poudre.
Il rentre dans cette ville le 20 juin il était à Marans le 25 encore entre ces deux jours faut-il placer cette furieuse cavalcade où l'accompagna Sully.
Ils partirent de la Rochelle pour Saint-Maixent et y revinrent sans repaistre ni reposer qu'une seule heure, et Henri était tellement fatigué que ne pouvant plus se tenir à cheval, il fut contraint de se mettre dans une charrette à bœufs qu'il rencontra la nuit allant à la Rochelle.
Il est de nouveau à la Rochelle le 26; le 29 et le 30 à Surgères le 1er juillet à Fontenay, le 2 à Saint-Maixent il tient la campagne toute la première moitié du mois ; il est à la Rochelle le 13, à Fontenay le 14 ; il paraît habiter la Rochelle du 20 juillet au 3 août ; il la quitte alors du 10 au 23 ; il s'en éloigne encore pour batailler en Poitou pendant sept semaines, et n'y rentre que le 10 octobre.
Il y venait presser le départ de deux canons de batterie qu'il avait achetés et que après délibération le conseil lui avait vendus sur cette considération qu'ils serviraient à la cause générale. Il y apportait cinq cornettes prises sur les armées des ligueurs.
Cette vue aidait les Rochelais à accepter une levée de 15,000 écus sur les habitants et un impôt sur les marchandises à leur sortie de la ville, d'un sou par livre pour les étrangers et de six deniers pour les bourgeois.
Une députation prise dans la noblesse, les ministres et le tiers-état, l'accompagna, le 14, à son départ pour son armée, qu'il avait dû disséminer de Saint-Jean d'Angély à Saintes pour la faire vivre. C'était le chemin de Coutras. (33)
Du 24 juin au 10 octobre, six lettres seulement sont écrites de la Rochelle. Elles rendent compte des faits, demandent de l'appui, surtout de l'argent. (34)
La bataille de Coutras appartient a l'histoire générale, ainsi que la grande scène religieuse qui la précède. Mais celle-ci se rattache très-directement à l'histoire des séjours de Henri à la Rochelle.
On sait qu'au moment de livrer bataille Henri qui combattait pour une cause religieuse, qui comptait dans son armée beaucoup de gens d'une piété sévère, inquiets de sa politique personnelle, scandalisés de sa vie privée, fit devant tous ses gentilshommes l'aveu de ses fautes et en demanda hautement pardon, déclarant noblement qu'on ne peut trop s'humilier devant Dieu ni trop braver les hommes. Celle de ces fautes qui avait produit le plus de scandale, c'était celle qui avait amené l'accouchement tout récent d'Esther fille de Jacques Imbert de Boislambert, avocat au présidial de la Rochelle bailli du grand fief d'Aunis.
Si cette confession publique avait mis un terme, au moins pour quelque temps, aux relations adultères d'Henri de Navarre, je serais fort porté à l'admirer mais comme il n'en eut pas moins dès le lendemain très-publiquement une femme légitime, Marguerite de Valois une maîtresse à laquelle il promettait de l'épouser Corisande d'Andouins, et une autre maîtresse à laquelle il montait une maison Esther de Boislambert, sans compter celles dont l'alcôve ne portait pas une enseigne officielle, je ne puis voir dans tout cela qu'une scène de haute comédie, bien qu'il soit possible que l'acteur ait partagé un moment l'émotion qu'il donnait aux autres. (35)
Il n'en faut pas moins revenir sur ces amours et sur la dissertation de M. Jourdan. On sait que l'enfant né de ces relations le 7 août 1587 reconnu par son père sous le nom de Gédéon Monsieur, ne vécut que quinze mois et demi. M. Jourdan l'a montré par des conjectures fort ingénieuses mais superflues car on a à ce sujet cette déclaration précise de Mervaut « Le vendredi sur les quatre heures après minuit et septième jour d'aoust 1587, la fille du sieur de Boislambert, avocat en cette ville, ayant été engrossée par le roi de Navarre, depuis roi de France, accoucha d'un fils qui ne vécut que quinze mois et demi, étant mort en l'île de Ré.
A quoi il ajoute cette circonstance bizarre difficile à comprendre mais que je transcris fidèlement:
Le corps duquel petit prince, qui était à la garde du sieur Desloges, gentilhomme d'Aunis fut réduit en cendres par le feu qui brûla en cette ville le logis nommé la ville d'Anvers en l'an 1639.
Et quant a ladite Boislambert, sa mère elle mourut en l'an 1592, comme elle allait en Bourgogne trouver ledit roi de Navarre. (Le 14 juillet à Saint-Denis, selon Bergier.) Il faut absolument conclure de là que dans sa première affliction Henri avait ordonné de conserver le cadavre de son fils, probablement pour lui donner une sépulture dans quelque lieu consacré à sa famille qu'il l'oublia depuis et que ce corps fut ainsi conservé la Rochelle jusqu'en 1639. (36)
Ce passage établit incontestablement, ce que M. Jourdan avait fort bien vu et fait voir sans se le rappeler, que cet enfant mourut dans la seconde quinzaine de novembre 1588 et que c'est de lui qu'Henri dit à Corisande le 30 de ce mois « Je suis fort affligé de la perte de mon petit, qui mourut hier. A votre avis, ce que ce serait d'un légitime? De ces derniers mots, il ressort évidemment qu'Henri promettait à Mme de Gramont de l'épouser quand il aurait divorcé.
On sait en effet qu'Henri, roi de Navarre ou de France, fut avant le seigneur Don Juan l'épouseur du genre humain bien assuré qu'il était, il est vrai, que Marguerite de Valois lui rendrait le service de ne pas consentir au divorce, et, de fait, elle n'y consentit que pour faciliter un mariage politique et royal. (37)
Je n'oserais dire que la scène de Coutras fut préparée lors du départ d'Henri de la Rochelle. Voici cependant qui donnerait une forte tentation de le croire. Henri, selon Péréfixe, promit de réparer le mal qu'il avait fait à la famille Boislambert. Je ne sais à vrai dire comment se réparent ces brèches-là surtout de la part d'un homme marié mais Henri pouvait l'entendre d'une réparation pécuniaire, d'une pension assurée à la mère et à l'enfant. Or l'acte qui assure cette pension extrait par M. Jourdan, des archives de Pau, est signé le 14 octobre à la Rochelle. Elle remontait aux premiers temps de la conception, puisqu'une quittance 'd'Esther fixe la fin de la première demi-année au dernier jour de juin 1587. On en a encore pour trois autres demi-années peut-être est-ce par suite de l'oubli qui aurait commencé au mois d'avril 1589, époque à laquelle Henri laissa définitivement la Rochelle, qu'Esther courut après dirai-je son amant ou son débiteur. Pour relever de la seule manière possible ici l'honneur de notre compatriote, remarquons que, seule peut-être de toutes les femmes avec lesquelles Henri eut légitimement ou non des relations de ce genre et il y en a beaucoup elle ne parait pas avoir été à d'autre que lui. (38)
J'en voudrais finir avec ce chapitre. C'est certainement une charmante anecdote que celle que M. Jourdan a extraite des Recherches curieuses de Jaillot :
« On prétend que le roi de Navarre visitait souvent à la Rochelle une belle demoiselle, fille d'un échevin, et qu'il en était favorablement écouté. Le père de la demoiselle qui s'aperçut des assiduités du prince, s'en alarma mais il ne savait quel ordre y mettre un jour pourtant entrant brusquement dans la chambre de sa fille où la trouvant qui causait près du roi dans une position un peu trop familière, il s'approcha d'elle et lui donna un soufflet. Le roi, dont la vivacité souffrait en ce moment, lui demanda pourquoi il la frappait. Sire, je le fais, répondit le bonhomme parce qu'elle manque de respect à Votre Majesté. L'auteur ajoute que cette correction indirecte fut efficace et qu'Henri multiplia moins ses visites. Tant mieux l'esprit du père le méritait en vérité. (39)
Les Recherches curieuses ne sont qu'une compilation ; Jaillot ne dit pas où il a puisé ce récit ; M. Jourdan ne l'a pas su et je l'ignore comme lui. Jaillot avait donc des sources de renseignements qui nous sont inconnues. Il a mis lui-même au devant de sa copie du manuscrit de Colin une note où il prévient qu'il en a retranché des passages qu'il avait insérés ailleurs. Peut-être celui-ci en est-il un. Dans tous les cas il n'est pas assez précis pour être contrôlé et Jaillot ne l'a certainement pas inventé, il mérite d'être vrai et doit être tenu pour tel.
A propos de ces amours M. Jourdan prononce d'autres noms. Martine j'ai montré combien l'assertion qu'il accepte est invraisemblable. Mme Sponde sur la seule autorité de la confession de Sancy. Or Sponde s'était fait catholique et Dieu sait ce qu'un pareil motif peut inspirer a d'Aubigné.
D'ailleurs M. Jourdan a lui-même établi que Sponde ne s'était marié qu'en 1588 ; et d'Aubigné place les débordements de sa femme à Brouage, où Henri n'alla pas, je crois, après 1576. Enfin une jeune fille à la prière de laquelle Henri intervint entre d'Aubigné et un soldat, qu'il avait condamné pour indiscipline ; mais en vérité, eût-on tous les défauts d'Henri IV sans avoir rien de sa bonté, on peut être sensible aux prières d'une jolie fille sans entrer pour cela dans son lit. (40)
XI
Revenons à des historiettes moins scabreuses.
La bataille de Coutras éloigna Henri de la Rochelle pour plusieurs mois il n'y revint pas avant le 18 mars 1588. Des relations qu'il eut dans l'intervalle avec cette ville deux seulement ont laissé des traces. Le 25 octobre sa victoire de Coutras y fut célébrée par de grands feux de joie, tels que nous les avons vus il n'y a pas encore bien longtemps avec un mât de navire fort haut élevé garni de barils de gouldron et de fagots. (41)
Le 14 décembre 1585 et le 15 janvier 1588, Henri écrivit en Angleterre pour faciliter les achats qu'y faisaient les Rochelais de vivres et de munitions de guerre. (42)
Au mois de mars 1588, Henri était rappelé en Saintonge par la mort subite du prince de Condé. Notre pauvre siècle est si souvent accusé qu'il faut bien qu'on me permette ici une réflexion. L'incrédulité est, comme on sait, la cause de tous nos maux et, comme on sait encore, le XVIe siècle fut une époque de foi ardente.
Henri de Condé s'était marié deux fois, à deux jeunes filles protestantes. Un historien bienveillant n'est pas bien persuadé que la première lui ait été fidèle pendant le court espace de leur union et l'est du moins que cette union ne fut pas heureuse la seconde fut condamnée à mort pour avoir fait empoisonner son mari par son amant.
Son cousin, Henri de Navarre, épousa successivement, lui, deux jeunes filles catholiques. Pour la première, on assure qu'elle eut autant d'amants que son mari de maitresses, la seconde fut véhémentement soupçonnée de n'être pas étrangère au crime de Ravaillac. En vérité, de notre temps les princes ont la main plus heureuse ou la médisance est moins âpre aux princesses. (43)
Henri de Navarre qui avait d'abord imputé ce crime aux perfidies de la messe en vint promptement à y voir un crime domestique. Mais sa douleur et son indignation n'ôtèrent rien à son activité.
Arrivé à la Rochelle le 18 mars, il marchait le lendemain au secours de Marans il reprenait un fort le 20 le 21, il rendait compte de ses soupçons, de ses craintes, de ses fatigues par une lettre à une de ses maîtresses, Mme de Gramont; le 22, selon toute vraisemblance, en un prêche fait par M. de la Touche excellent ministre du saint Evangile il renouvelait la confession qu'il avait faite avant Coutras, pour expier le scandale qu'avait causé à la Rochelle l'accouchement d'une autre de ses maîtresses le 26, il repartait pour Saint Jean-d'Angély pour y faire poursuivre par la justice l'adultère et l'empoisonnement.
Faut-il donc l'accuser d'hypocrisie ? Rien n'y autorise. Ses lettres du 20 et du 22 de ce mois le montrent plein de respect et de confiance en Dieu et ce sentiment se retrouve même dans ses lettres à sa maîtresse, où il n'est pas de commande.
Il était probablement sincère dans sa pénitence envers Dieu et dans ses protestations de fidélité à ses maîtresses. L'homme est dans ses écarts un étrange problème. Par une autre bizarrerie, la lettre du 22, une lettre officielle, en latin, au duc de Saxe, est datée d'un dimanche. (44)
Henri paraît être resté à Saint-Jean jusqu'au 11 avril.
Le 12 il écrit de la Rochelle. Il est vrai qu'on a une lettre du 14 datée de Bergerac, ce qui est à peine croyable. Je le retrouve à la Rochelle le 28, assistant, non plus dans la rue cette fois, mais dans la salle Saint-Michel, au diner d'installation du nouveau maire, Louis Gargoulleau élu, dit-on, par son influence. Cette élection avait amené un scandale qui rendit à Henri le spectacle qu'il avait donné. L'un des pairs avait jeté dans le scrutin un bulletin un brevet comme on disait alors désignant par une mention satirique un ministre qui n'était même pas éligible, Monsieur notre ministre, maitre Odet de Nort, pape de la Rochelle et ruineur d’icelle par son ombition.
Des recherches ayant eu lieu Salbert se reconnut pour le coupable et le pasteur Esnard l'avertit en plein prêche qu'il ne pourrait être admis à la cène qu'après avoir renouvelé cet aveu devant les fidèles. Salbert le fit. Henri, dont les chroniqueurs signalent la présence garda, j'en suis sûr tout son sérieux mais intérieurement, je le crois, sourit un peu. En mettant cette scène imposante d'une confession publique au service de ses rancunes le consistoire en diminuait singulièrement l'effet. C'était dommage car c'était là une grande puissance morale.
Il est difficile de se rendre compte de l'emploi du temps d'Henri pendant deux ou trois semaines de ce mois d'avril.
Peut être eut-il alors des loisirs on pourrait le conclure de ses comptes manuscrits qui portent parmi ses dépenses de cette année à la Rochelle des achats de livres chez le libraire Timothée Jouan, des achats de singes et de perroquets à un capitaine de navire et des frais faits aux jeux de paume, de billard et de tarots. (45)
Il écrit de la Rochelle, le 5 mai, à son intendant, à Montauban, pour le presser de lui fournir de l'argent, mais il doit quitter cette ville le même jour, car il est le 7 à Saint-Jean-d'Angély et ne reparaît plus à la Rochelle que le 30.
Elle redevint pour trois mois son séjour constant, sinon continu. Il reprend en effet ses courses militaires. Huit lettres écrites dans la première quinzaine de juin le montrent singulièrement occupé à lever des contributions et à ranimer le zèle de ses partisans.
Une d'entre elles, adressée à Madame de Fontevrault, est remarquable, par la manière dont il repousse ses instances pour sa conversion au catholicisme. Il ne s'en indigne pas le moins du monde il pense que ce n'est pas le temps de pareilles méditations, que les ligueurs en veulent moins à la religion qu'à la couronne et qu'alors il s'agit surtout de défendre le roi contre eux. (46)
Le 19 juin Henri tenait, avec la dame de Nérac Louise du Fou, sur les fonds baptismaux, le fils d'un bourgeois de la Rochelle, René Blandin, sieur de Lozières, un brave homme qui lui avait prêté de l'argent et auquel il le rendit l'année suivante. Car Henri empruntait de petites sommes et les rendait ce n'était encore qu'un roitelet. (47)
Le 20 il courait à Surgères, puis à St-Jean-d'Angély, revenait le 22, puis repartait le 23, pour attaquer Marans.
C'était là une grande affaire, pour les Rochelais surtout. La prise de Marans les avait inquiétés à ce point qu'ils avaient désarmé les papistes de la ville et mis chez eux des soldats qui les surveillaient et vivaient à leurs dépens. Leur inquiétude n'avait pas cessé. Aussi fut-ce une grande joie quand Henri, après avoir enlevé en cinq jours Charon, le Braud et Marans même, revint à la Rochelle ramenant Ducluseau prisonnier et faisant porter devant lui huit drapeaux et une cornette dont il fit don au corps de ville.
Il est vrai que la ville avait fourni pour cette conquête des navires et des soldats, et que les particuliers l'avaient rendue possible par des avances d'argent, qu'on connaît, répétons-le, par les quittances du remboursement. A Jean Pierre, sieur de la Jarne, 1200 écus à François Maingault, marchand 3,333 écus à Deschamps, 200 écus. Il n'y a pas jusqu'aux dépenses faites par ses gentilshommes ou ses auxiliaires dans les auberges de la ville, aux Trois-Marchands, au Chapeau-Rouge, que ne fasse payer le roi de Navarre, au demeurant le meilleur fils du monde.
Aussi ne faut-il pas s'étonner si seize lettres, du 18 juin au 7 septembre, sont surtout consacrées à presser les rentrées des impôts qui lui sont dûs et à demander au loin des secours et surtout des secours d'argent. Et pourtant il ne le veut pas à tout prix; il sait encore prescrire des remises aux marchands, pour encourager et faciliter leur commerce, comme il sait prendre une part d'un temps si occupé pour veiller aux affaires de sa sœur, ou de ses cousines les petites princesses de Condé.
Je suis je l'avoue, émerveillé de la prestesse et de la souplesse de cette intelligence. (48)
Henri resta à la Rochelle du 30 juin au 13 juillet; fit du 13 au 17 une excursion vers Saujon et Royan, dont il revint par mer.
Il passa trois semaines à la Rochelle, dont il partit le 9 août pour aller guerroyer contre Mercœur en bas-Poitou.
Il y revint le 22 août et y resta jusqu'au 7 septembre.
C'est le 2 de ce mois qu'il fit célébrer par des feux de joie et par des prières la ruine de la flotte invincible armée par Philippe d'Espagne. Et il faut avouer qu'en effet c'était là un coup de partie pour la cause protestante.
Avant de partir ou pendant son séjour, Henri avait fait à la Rochelle quelques dépenses de luxe, qui devaient servir à sa popularité si l'économie ménage l'argent, la dépense le fait circuler, et les deux sont nécessaires dans une habile proportion.
Ces emplettes prouvent en faveur de l'industrie des ouvriers rochelais ou de l'assortiment de ses marchands. A Pierre Haultin, à Jean Porteau, impression de livres (œuvres politiques) ; à Timothée Jouan achat de livres ; à Deharambure achat de chevaux; à Jean Flanc achat d'une montre (80 écus) ; à Jean Desbordes; orfèvre, un bouton de chapeau garni d'améthystes et de perles à Guibert, un cofl'ret (27 livres), etc. Seulement M. Jourdan a trop complaisamment répété que ce coffret acheté en septembre 1588 était destiné à Gabrielle d'Estrées, qu'Henri ne connut qu'en 1590.
Il l'était sans doute à Esther qu'il quittait, ou à Corisande qu'il allait trouver, ou à quelque autre car il se dirigeait vers le nord. (49)
Henri resta absent de la Rochelle, presque toujours dans le bas-Poitou, la Vendée actuelle, du 7 septembre au 12 novembre 1588.
On trouve, il est vrai, dans sa correspondance deux lettres datées de la Rochelle l'une du 1er l'autre du 25 octobre. La première peut s'expliquer. C'est une lettre officielle, adressée aux consuls de Nérac, rédigée sans doute par sa chancellerie, portée à sa signature et indiquant le lieu où elle a été écrite et non celui où elle a été signée. Rien de semblable n'est possible pour l'autre. C'est une lettre intime, personnelle. Elle est datée de la Rochelle, six semaines après qu'il en était parti trois semaines avant qu'il en revînt ou la date ou la lettre est fausse; celle-ci, je crois. M. Berger de Xivrey, qui oublie cette grande difficulté de la date qu'il avait pourtant lui-même signalée, y voit quelques symptômes de supposition dans la désignation Mornay, au lieu de M. Duplessis dans l'indication de lieu, la Rochelle, sans préposition ; dans la formule de salutation il me semble qu'il y en a d'autres dans les parties les plus saillantes de la lettre :
« Mons. de Launey d'Antraigues, Dieu aydant, j'espère que vous estes, à l'heure qu'il est, restably de la bleseure que vous receustes à Coutras, combattant si vaillamment à mon costé. Quoi donc, depuis plus d'un an que la bataille de Coutras s'est donnée, Henri ne s'est-il jamais informé de cette blessure aux longues suites ou tient-il par hasard à ne pas laisser ignorer à la postérité où elle a été reçue ? Et à la fin : Ne faites faulte de m'en apporter tout ce que vous pourrés car de ma vie je ne fus en pareille disconvenue, et je ne sais quand, ni d'où, si jamais, je pourray vous les rendre; mais je vous promets force honneur et gloire et argent n'est pas pasture pour des gentilshommes comme vous et moy.
Certes Henri va bien souvent ailleurs de pair et compagnon avec ses gentilshommes mais d'une allure plus familière ; je ne sais si jamais il les met sur le même rang que lui d'un ton si solennel. Quoi qu'il en soit, la fausse indication du lieu tranche la question Henri y perd il est vrai, une des plus belles gasconnades qui se lisent dans ses lettres mais je crois bien que cette fois c'est l'esprit seul de l'imitateur qui en a l'honneur. (50)
XII
Henri revint à la Rochelle le 11 novembre 1588, et il allait y avoir besoin de tout son empire sur lui-même, de toute la finesse et de toute la ténacité de sa politique.
Les états de Blois, si manifestement dirigés contre les protestants, les avaient contraints de lui opposer une assemblée des leurs. Elle s'ouvrit le 14 novembre dans la grande salle de l'échevinage de la Rochelle. La ville y était représentée par le maire, Louis Gargoulleau, un échevin, Mathurin Regnaut, et un pair, Jean de Bourdigalle. Henri, assisté du plus autorisé de ses conseillers Duplessis-Mornay et de huit autres de ses délégués y dirigeait les débats de trente-sept députés de la noblesse et des villes. J'allais presque dire qu'il luttait contre eux. Ils étaient en effet mécontents de son penchant pour les plaisirs et de son ambition personnelle, inquiets de ses tendances politiques, plus disposés à restreindre qu'a fortifier son pouvoir.
Si les Rochelais exigeaient qu'on n'altérât rien de leurs privilèges et de l'état de leur ville, qu'on ne diminuât rien des deniers qui leur étaient octroyés, les autres députés, avec des demandes moins précises, voulaient s'enquérir de tout, toucher à tout, réserver tout faire enfin du roi sous le nom de protecteur un instrument de leurs intérêts et de leurs passions. Henri contesta peu protesta fort de son dévouement aux églises insista sur la nécessité de l'unité dans le commandement militaire et dans l'action politique et à force de patience et d'habileté, tout en acceptant un véritable conseil de surveillance, dont un membre devait être pris à la Rochelle, fit réellement confirmer son pouvoir.
Peut-être seulement cette assemblée protestante lui fit-elle penser qu'il serait bien désirable que la religion catholique fut la vraie et l'aida-t-elle à croire ce que lui dit quelque temps après Henri III, qu'un roi de France devait être catholique. Cela, on ne le peut guère savoir mais ce qu'il sentit à cette assemblée lui-même l'a dit « : Vous me pensiez soulagé écrit-il à la comtesse de Gramont, pour être retiré en nos garnisons. Vraiment s'il se refaisait encore une assemblée, je deviendrais fou. »
Il ne s'en mit pas moins vigoureusement à exécuter les décisions prises dans ces réunions.
L'assemblée s'était dissoute le 18 décembre il écrivait les lignes ci-dessus le 22, et le 23 il quittait la Rochelle et reprenait les armes.
Les dix-huit lettres de cette période qu'on lit dans la correspondance (dont une seule au supplément) font voir qu'il n'avait jamais perdu de vue ce moment. (51)
On sait que c'est pendant ce temps, le 29 novembre, qu'U avait perdu le fils qu'il avait eu d'Esther de Boislambert ; je n'ai pas à revenir là-dessus.
Parti le 23 Henri de Navarre dès le 25 faisait annoncer successivement à la Rochelle l'assassinat du duc de Guise et la prise de Niort.
Mais le 9 janvier suivant, on apprenait qu'il venait d'être atteint, à Champ-Saint-Père, d'une pleurésie qui mettait sa vie dans le plus grand danger. L'émotion fut vive. Immédiatement des prières publiques furent faites dans toutes les salles et elles se continuèrent pendant toute sa maladie. La ville envoya des députés visiter le prince. (52). Henri se montra sensible à cet empressement dès qu'il le put connaître. Il revint convalescent dans la Rochelle le 28 janvier 1589. Il y reprit vite le soin de ses affaires. On a des lettres de lui du février puis quatre autres du 15 et du 16, dont une est digne d'être remarquée. Tout empressé qu'il est de se procurer de l'argent, Henri songe à faire diminuer les droits de navigation sur les rivières, en considération du soulagement du peuple et de la liberté du commerce et trafic ; il s'élève contre ces subsides imposés pour les besoins de guerre et qui demeurent à l’avenir en temps de paix au grand préjudice du pauvre pleuple. La poule au pot n'était pas seulement un mot heureux c'était une pensée habituelle d'Henri IV.
On a une lettre de lui datée de Saint-Maixent, le 23 février. Il avait donc probablement quitté la Rochelle la veille. Il venait d'adjoindre à son armée 2,500 écossais levés en partie avec les 15,000 écus que la ville lui avait votés l'année précédente.
D'une note des Extraits des Extraits des comptes de Henri faits par M. Jourdan sur les archives Pau, il résulterait qu'une pareille introduction d'Ecossais par la Rochelle aurait eu lieu dès 1587. (53)
Il ne devait plus la revoir qu'en passant. Il y arriva de nouveau le 31 mars, venant de Bressuire ; mais il en partit le 4 avril, selon un de nos chroniqueurs ; probablement le 6, puis qu'on a des lettres du 5 et du 6 datées de la Rochelle. (54)
Depuis le 1er juin 1586, c'est-à-dire pendant près de trois ans, elle avait été vraiment sa capitale, la seule ville où il eut réellement habité. Si on compte les jours qu'il y a passés depuis le premier jour ou il y vint, le 5 février 1558, ils formeront à peu près deux ans et huit mois et si l'on tient compte de ses moindres absences, ce temps se répartira en trente séjours fort inégaux. Ce séjour peut-il être compté pour quelque chose dans la formation du caractère d'Henri IV ?
Il semble que le mot prononcé aux conférences de Saint-Bris suffise pour répondre. Je ne voudrais pas assurer à la vérité que si, au lieu de parler à des adversaires Henri eût parlé à sa maîtresse avec autant de franchise qu'il s'exprimait sur l'assemblée de 1588, il n'eût pas laissé percer plus d'humeur dans ses paroles; mais un breuvage peut être amer et salutaire. Il est clair que la vie d'Henri à la Rochelle a été très simple qu'il y a vu de très près de simples gentilshommes des bourgeois de toute sorte des marchands, des artisans.
Quand il y venait pour peu de jours, il demeurait chez des membres du corps de ville, les plus riches, je le crois, anoblis pour la plupart, mais n'ayant ni les mœurs ni les idées de la noblesse. Quand il y demeurait longtemps, il n'y avait même pas de palais. Il y louait une maison et nous avons le prix de cette location 110 écus, c'est-à-dire 330 livres par an. Qu'on apprécie aussi haut qu'on voudra la différence de valeur de l'argent, et l'on trouvera encore Henri bien modestement logé pour un roi. Il avait des relations quotidiennes avec ces bourgeois dont il était le locataire. Il leur empruntait de grandes sommes, affaire de politique ou de bien petites, 26 écus par exemple, ce qui n'a guère pu être qu'un besoin personnel. Il les leur empruntait et les leur rendait.
Ce n'est donc pas seulement par les conditions que la ville lui imposait comme à tous les rois de France mais de plus près et plus en détail, c'est aussi par des relations fréquentes avec les particuliers que Henri se trouvait tous les jours mêlé avec des gens qui, anoblis ou non étaient et restaient des gens de travail, des bourgeois. Si une vie si différente de celle qu'ont habituellement les rois n'a pas contribué en quelque chose au développement des qualités naturelles d'Henri, il ne faut plus croire à aucune influence de l'éducation.
Il n'est pas de mon sujet d'exposer quelles furent les relations des Rochelais avec Henri devenu roi de France. Il reconnut et paya en partie la dette contractée par sa mère envers leur collège il reconnut et maintint leurs privilèges communaux et à cela il n'eut pas un petit mérite puisqu'il fallut combattre le mauvais vouloir du parlement et de la plupart de ses conseils. Envers les Rochelais considérés comme protestants il développa avec un mélange de douceur et de fermeté cette politique qu'on peut, au point de vue de l'idéal trouver plus ou moins imparfaite, mais qu'on sera forcé d'admirer si on en rapproche les effets de ce qui s'était passé auparavant, de ce qui s'est passé depuis plus encore si on en juge les difficultés a la lumière de ce qui se passe de nos jours.
Pour mesurer la gloire d'Henri IV, il faut comparer à la France telle qu'il l'a prise la France telle qu'il l'a laissée. On comprendra alors la douleur qu'a causée sa mort, la popularité qu'a gardée son nom.
Ces deux sentiments furent vifs à la Rochelle mais ils furent vifs par toute la France.
Je le répète, cela est hors de mon sujet. Aussi ne m'arrêterai-je plus que pour relever une erreur peu importante ; mais une erreur est toujours bonne à redresser.
Arcère a dit (II, 78) en citant Létoile (journal de Henry IV, II, 129, que les Rochelais offrirent 60,000 écus pour former la maison, d'un de ses bâtards César, depuis duc de Vendôme, et que le roi répondit que c'était trop pour faire de la bouillie à un enfant. Il trouve la somme invraisemblable. Dupont (p. 291) et moi (I, 330) avons répété l'anecdote en insistant tous deux sur les invraisemblances de toute sorte qu'elle présente. Nous avons été trompés tous trois par une altération du texte de Létoile je le présume du moins, n'ayant pas sous les yeux l'édition dont s'est servi Arcère.
Voici le texte de Létoile dans la collection Michaud et Poujoulat, p. 249 : Ce jour (jeudi 27 octobre 1594) les députés de la Rochelle firent requête au roi de 60,000 écus pour dresser la maison du petit prince (et en note : Henri de Bourbon, second du nom prince de Condé) auxquels Sa Majesté ne fit autre réponse sinon que c'était trop pour avoir de la bouillie à un enfant. La personne, on le voit, est changée et les rôles sont intervertis. Le roi refuse de donner, non de recevoir 60,000 écus. La chose est bien plus vraisemblable et plus royale.
L. DELAYANT.
==> La Porte de Cougnes – Entrée Solennelle des Souverains à la Rochelle
==> Guerre de Religions dans le Poitou, PRISE ET SIÈGE DE MONTAIGU (Septembre 1580)
==> 1586 Les Conférences de Saint-Brice (Charente) entre Henri IV et Catherine de Médicis
==> HENRI IV. 1589. Fin de la Ligue en Poitou
==> Colonne de Henri IV à Clisson par le baron François-Frédéric LEMOT
(1) Favyn, Hist. de Navarre, liv, XIV? P.891- Amos Bardot, II, 52.- Baudouin, ann.1557
(2) Jourdan, Amours…. p. 3, note.
(3) Barbet, II, p..148. Jourdan, Ephémérides, I, p.334, Amours…., p15
(4) Baudoin, p. 981.–Lahaize, Deuxième Discours, K, ij.
(5) Mémoires de la vie de Nicolas Cargot (1667), p. 145.
(6) Baudoin, p. 981.982- Lettres de Henri IV, II, p. 536
(7) Bardot, II, p.268.- Revue de l’Aunis, I, p.3- Lettr.de Henri IV, II, p.537.
(8) Lettre. De Henri IV, I, p.7 ; VIII, p, 22,23 ; I ; p.11.
(9) Lettr. De Henri IV, I, p.11 à 25 ; VIII, p.32 à 68.
(10) Jourdan. Ephémérides, II. 339, Revue de l’Aunis, septembre 1808 ; LD Histoire des Rochelais, I. 238.
(11) De Richemond, Origine de la Réforme, 2' édit., p. 116.
(12) Jourdan, Doc. tirés des archives de Pau.
(13) Cauriana p. 44. Mérimée, chron., ch. VIII. Brantôme, Encore M. de Montluc.
(14) Cauriana, p. 141. Jourdan Eph., t., 228 ; Amous, p. 9 Goulart, Etat de la France, II, p. 209.
(15) Ms. Baudoin, p. 1,052 Let. De Henri IV, I, t, p. 93, 94.
(16) Let. de H., I, 141, VIII, 115.Dumoustier Histoire de Loudun, p.52
(17) Mervaut, Recueil, p. 120. Jourdau, Revue de l’Aunis, septembre 1868. Lett. t. 448, 449- VIII 226, 227.
(18) Lett.Ii, 613. –Jourdan. Doc. tirés des arch de Pau..
(19) Mervaut. p. 121.
(20) La diligence est la mandragore que le sot vulgaire estime être entre les mains de ceux qui font bien leurs affaires. Oliv. de Serr. 1600. p. 32.
(21) (Baudoin, p. 1149. Lett.de Cauriana, nég. Dip. Avec la Toscane, IV, p.647. Lett. II, 221,222,223,224.
(22) Lett, VIII, ^.309- Baudouin, ann, 1586- Jouran, Ephem, II, 319
(23) Lett. De Henri IV, II, p.230 à 240, T, VIII, p. 309 à 311.
(24) Lett II, 240, 237.
(25)Péréfixe, Hist. De Henri IV, p.57- Mathieu, Hist des Troubles, 1600, p.33- d’Aubigné, Hist. Unin, III, liv, I, ch, p.23- Nevers, Mémoires I, 768.
(26)Ms. Baudoin, 1151. Mervaut, 122.
(27)Lett. II, 271, 598- Ms. Baudouin, 1152.
(28) Ms. Baudouin, p.1151.
(29) Ms. Baudoin, p. 1157. Recherches curieuses, p. 127.
(30) Jourdan, Eph., II, 171.
(31) Jourdan Doc. Tirés des arch. De Pau. Bit. hist., n- 18,500 18.564 –18,572.
(32) Lettres de Henri IV, II, 251 à 279 ; VIII, 312 à 317.
(33) Ms Baudoin p. 1157.- Sully, ch XXI. – Lettre. II, 599.- Mervault, 123.
(34) Lett. De Henry IV, II, 203 à 305.- VIII, 318, 319.
(35) Vie de Duplessis, p.108. Péréfixe, p, 65.
(36) Mervaut, p. 133. Colin, 14 Bergier, Diaire, 14 juillet 1502.
(37) Jourdan, Amours, p. 11-17, II, 434.
(38) Tallemant, Historielle d’Henri IV. Gayle, dict, p. 1442
(39) Rech, cur, p 127
(40) Jourdan Amours, p. 10, 20 ; notes généalogiques.- D’Aubigné, Mém. Ed. Lalanne, p.78. Confession de Sancy, ch V.
(41) Mervaut, 123. Baudoin, p. 1162. 1169.
(42) Lettres, II, 320, 333.
(43) D’Aumal, Hist. Des princes de Condé.
(44) Lettres, II, 343,345,349,351,353.- Vie de Duplessis , p.109.
(45) Lettres, II, 366, VIII, 331. Baudouin, p. 1167. Jourdan, Doc, tirés des arc. De Pau
(46) Lettres, II, p.372 à 381 ; VIII, p. 338, 334
(47) Jourdan, Ephém. I, 206 ; Doc. Tirés des arch. De Pau
(48) Jourdan, Doc. Tirés des arch. De Pau. Lettres, II, 381 à 391 ; VIII, 334 à 338.
(49) Jourdan, Doc. Tirés des arch. De Pau ; Amours, p,6. Monde illustré, 2 mai 1863.
(50) Lettres, II, p. 394-398. Bullet. Du comité de l’histoire de France, 1856, p.420. Lettres , II, p.610.
(51) Lettres II, p, 411
(52) Paterne, p, 89.
(53) Mervault.Paterne, p.89.
(54) Ms.Colin,p.15. Lettres, II, p.470, ; VIII, p, 346.