1892 ARCHÉOLOGIE SUBSTRUCTIONS GALLO-ROMAINES AU CHATEAU D'OLERON

En décembre 1892, Emmanuel Pineau fut prié par M. Bourgoin de le renseigner sur l'origine de fondations de murs que commençaient à rencontrer les ouvriers qu'il employait au défoncement d'un champ situé, en son point le plus rapproché, à 20 mètres nord du puits Jouan, 500 mètres ouest du Château d'Oléron.

Ce puits, complètement isolé dans la campagne et auquel on n'accède que par des sentiers, remonte à une haute antiquité, et est intarissable il suffit presque seul, dans les années de sécheresse, à alimenter la population civile et militaire du Château. La margelle est monolithe, étroite, presqu'au ras du sol, la maçonnerie en pierres sèches, l'eau peu profonde, pourtant excellente. Le champ fait partie d'un léger coteau en pente au S.-O. et qui, si l'on en juge par les débris répandus çà et là, devait être bâti sur un certain nombre d'hectares. Le colon qui le cultivait avait avisé le propriétaire que la carrière commençait dès le creux du sillon. La prétendue carrière, c'étaient les murs rasés et les aires bétonnées.

Il n'a pas été possible, malgré l'extrême obligeance du propriétaire, de suivre les murs jusqu'à leur base car le défoncement ne devait pas dépasser cinquante centimètres et à 1 m. 60 on ne rencontrait généralement pas encore les dernières assises. II est probable que les fondations reposaient à même sur la hanche purbeckienne, qui se trouve là, à mètres environ de la surface du sol.

Partout, du reste, j'ai constaté des ameublissements profonds, des trous irréguliers incomplètement comblés de déblais et de terre végétale, surtout dans la partie est, sous le vent, comme si, sous certaines de ces habitations, il y eut eu des fosses, des caves dans lesquelles se seraient écroulées les habitations. En effet, une grande partie des matériaux qui les constituèrent devait être demeurée sur place; si l'on remarque que ces quelques murs, dérasés de 0 m. 50 à 0 m. 60 seulement, donnèrent, pour une surface bâtie d'environ 12 ares, plus de 100 me. très cubes de moellons.

Une des constatations les plus nettes que j'aie pu faire, c'est qu'à la base des fondations il n'y a que pierres et mortier, mais qu'au voisinage de la surface du sol, un grand nombre de débris de tuiles à rebord ont été incorporés dans la bâtisse.

 II y a donc ou des reconstructions sur des murs existants déjà, c'est-à-dire soit une réoccupation, soit une occupation prolongée.

La fouille ayant attaqué sur un point fortuit l'emplacement habité, et des champs et des vignes nous bornant de toutes parts, sous lesquels se prolongent les murs mis au jour, il est impossible de faire un plan normal des habitations qui y existaient.

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 Pourtant voici ce qu'on peut remarquer.

Trois longs murs, épais, celui de l'ouest de 0 m. 60, celui du milieu de 0 m. 40, celui de l'est de 0 m. 50, les deux premiers distants de 3 m. 50 dans le bas, se rapprochant en haut à 2 mètres et limitant G petits appartements de 4 à 5 mètres carrés et une piscine de 6 mètres carrés, située à la suite et en contre-bas de 0 m. 40 par rapport au sol de ces petites chambres.

Des murs transversaux de 0 m. 40 d'épaisseur séparent ces pièces, que pave un mince béton, dans lequel sont noyés des moellons espacés et posés debout. Les 2 pièces précédant la piscine sont pavées d'un béton de 5 centimètres d'épaisseur appliqué sur la partie convexe de tuiles à rebord de 0 m. 37 sur 0 m. 48, posées sur un lit de sable et de chaux blanche.

La piscine, ou l'on descendait par une marche, mesure 2 mètres sur 3 et était enduite, outre les murs, d'un béton de 0 m. 20 reposant sur un double dallage de pierres jointes par un mortier rougeâtre à gros grains quartzeux. Le béton, qui, du fond, remontait sur les 4 murs, s'y terminait par un rebord saillant. Nulle trace de conduites d'eau par en dessous. Si c'était là vraiment une piscine, comme le donnent à penser la contiguïté avec les chambres les plus soignées, la disposition au-dessous du sol et la continuité du revêtement en béton du fond sur les parois, l'eau n'y pouvait donc être amenée qu'à la surface du sol.

Au nord, la piscine s'arrête à un mur épais de 0 m. 60, qui traverse tout le champ et au-delà duquel on ne trouve plus que la continuation du mur central et quelques autres fragments de murs, mais qui ne limitent rien de bien net.

II en est de même à l'est, où, après une venelle de 0 m. 40, un troisième mur, parallèle aux deux premiers, a dû servir à appuyer les 3 ou 4 murs transversaux qui formaient avec lui une série de pièces vastes et irrégulières. Si l'on note l'inutilisable largeur (0 m. 40) entre les deux premiers murs longitudinaux et ce troisième, et la présence de 2 énormes pierres frustes posées debout comme un bornage, puis la dissemblance des constructions, ici la méthode, l'ordre, là l'irrégularité, on sera porté à conclure qu'il devait y avoir en ce point juxtaposition d'habitations appartenant à des propriétaires différents.

Enfin, dans la partie inférieure du champ, et eh bordure de l'héritage voisin, à 24 mètres du sentier, située en dehors des murs décrits et complètement isolée, était une construction que je crois avoir été un cellier. C'est une fosse rectangulaire de 0 m. 70 de profondeur, sur une longueur de 2 m. 35 X 1 m. 65; 4 murs de 0 m. 40 la limitent, que tapisse un revêtement très régulier de moellons d'une dimension moyenne de 0 m. 25 XO m.35, les angles dressés avec soin, la surface libre bien unie, et épais seulement de 0 m. 04. Le fond, composé d'un revêtement de ces mêmes pierres, logeait, en son centre, un bassin de pierre, en forme de calotte, qui mesurait 0 m. 58 de diamètre sur 0 m. 18 de profondeur. Le tout reposait sur un puissant béton de 0 m. 25 établi sur une double assise de pierres.

Ai-je dit que tous ces bétons sont uniformément constitués par des fragments de tuiles rouges, gros comme de fortes noisettes, noyés dans de la chaux blanche. N'était-ce pas ce qui convenait pour le pressurage des raisins et la conservation des amphores?

Des éboulis, de la terre, des os de boucherie en grand nombre remplissaient cette fosse rectangulaire, ainsi que deux débris d'amphores, un fragment de mortier en grès vert, usé des deux côtés, un autre de lave, une molette en porphyre, de la grosseur du poing, enfin un amas d'une matière hétérogène, formée mi-partie de grains blancs, mi-partie d'autres grains d'un gris bleuâtre, de la même nuance que la poterie commune dont on trouve, là et aux environs, de nombreux fragments.

 Dans cette matière je crois voir des grains d'un feldspath et d'une pouzzolane, déjà partiellement broyés et attendant leur mise en œuvre définitive pour la confection, dans le voisinage, de la vaisselle domestique. Un amas de terre revêtu d'une enveloppe vitrifiée vient encore donner plus de vraisemblance à cette supposition.

A côté de cette poterie grossière, dont quelques fragments portent pourtant parfois de très jolies moulures et des décors en creux assez finement exécutés, tels A. B, se rencontrent divers débris de formes différentes, qui ont dû appartenir à des vases remarquables.

L'un est un petit pot piriforme, gris cendré, sans décoration, mais précieux par le ton et la finesse de la pâte le second, C, est un fragment de coupe en terre rouge, fine, mince, revêtue d'un vernis mordoré relevé d'un feston interverti appliqué en relief et rehaussé d'un filet de vermillon l'autre, D, un débris de terre rouge et poli comme de la laque, orné de baguettes en relief, rappelant des thyrses et présentant au centre un médaillon où l'on voit la lutte d'une chimère et d'un dauphin. M. le docteur Labouesse a bien voulu les dessiner.

Trois ou quatre fragments de tablettes de marbre de 0.08 de largeur, des enduits de murailles recouverts d'une peinture de couleur verdâtre, du verre vert, et une pièce d'argent d'Antonin le Pieux, viennent nous apprendre que les propriétaires de ces habitations appartenaient à une classe sociale élevée. J'ai omis de noter, dans un des bétons, l'encastrement, au ras du sol, d'une sorte de cuvette en ciment de 0.40 de diamètre.

Comme résidus alimentaires je ferai remarquer qu'aucun os d'animal de boucherie, j'en ai envoyé un certain nombre par M. Beltrémieux, au musée Fleuriau, à La Rochelle, n'était scié; les animaux étaient débités par membres, comme on le pratique encore de nos jours en vénerie.

Les coquilles d'huîtres, de moules, de patelles (vulgo jambes) étaient abondantes, aussi les os d'oiseaux, surtout d'échassiers de rivage.

Un seul objet en fer, méconnaissable par l'oxydation.

En résumé, ces 7 murs longitudinaux et ces 14 murs transversaux doivent avoir fait partie de 3 habitations voisines, et j'espère que la replantation des vignes, très active en ce moment à Oléron, en étendant les défoncements aux champs voisins, permettra de donner de l'extension à ces premières fouilles, dans un avenir prochain, et de multiplier en ce point des découvertes d'où ne pourront manquer de sortir des conclusions intéressantes pour l'archéologie et l'histoire.

Dr EMM. PINEAU. 1893

 

 

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