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27 septembre 2021

SITUATION DE L'AQUITAINE EN 1066 par Edmond-René LABANDE

SITUATION DE L'AQUITAINE EN 1066

Entre le 5 avril et le 1er juin 1066, la comète dite de Halley apparut dans le ciel d'Occident et troubla maint cerveau. « Les gens s'émerveillent de l'étoile », lit-on sur la « tapisserie » de Bayeux, et un messager court aussitôt annoncer à Harold ce qui ne saurait être qu'un présage.

Le moine Amat du Mont-Cassin s'exprimera de manière explicite, qualifiant la comète de « merveillouz signe pour ceste forte aventure et bataille qui estoit a venir » (1), et Orderic Vital usera d'un langage analogue (2).

Dans quelques mois va être célébré le neuvième centenaire de ces mémorables événements : un duché français parvenu à un tel degré de perfection que son titulaire, par un coup d'audace unique aux annales de l'Occident médiéval, s'empare en quelques jours d'un royaume insulaire et fonde une réalité politique nouvelle : l'Etat anglo-normand.

A cette occasion, nous pouvons nous poser la question suivante : parmi les principautés territoriales qui fleurissaient sur le sol de France en 1066, n'en était-il pas qui avec la Normandie de Guillaume le Bâtard pouvaient soutenir la comparaison ?

Trois surtout se présentent à l'esprit : Flandre, Bourgogne et Aquitaine.

 Lors de la bataille de Hastings, le duc d'Aquitaine est en pèlerinage à Rome, fidèle en apparence à la tradition paternelle, et Alexandre II l'y reçoit.

 

Qui était ce prince, quel était l'Etat qu'il gouvernait ?

 Depuis la fin du Xe siècle, comté de Poitou et duché d'Aquitaine sont fortement réunis; les prétentions des comtes d'Auvergne, de ceux de Toulouse ou même d'autres à ce titre ducal sont, sinon abolies tout à fait, du moins fort assoupies, et le cointe qui s'intitule parfois pompeusement « duc de toute la monarchie des Aquitains » (3) réside à Poitiers.

Si le noyau du duché est poitevin, les confins de l'Aquitaine sont, par contre, en plus d'un point, indéterminés, contestés et contestables.

 Principauté aux contours flous, voilà un trait par lequel l'Aquitaine, à vrai dire beaucoup plus vaste que la Normandie, se distingue d'abord de celle-ci.

Celui que nous appelons Guillaume VIII (VIIIe en tant que duc, VIe comme comte), conserva habituellement les noms de Guy et Geoffroy sous lesquels il était connu auparavant.

 Il était âgé d'environ quarante ans à l'époque de Hastings; il était devenu duc huit années plus tôt, par la mort de son frère aîné, Guillaume VII Aigret, donc par accident.

Il n'était que le quatrième fils de Guillaume le Grand, dont les trois aînés avaient successivement gouverné le duché et disparu sans enfants. Le dernier mâle se trouvait à point nommé pour relever le lignage, et la dynastie ne put manquer, comme le feront si souvent les Capétiens, de puiser dans cette promesse de continuité quelque motif de fierté. Tout dépendait assurément de ce que serait ce baron.

Entre son père Guillaume V et Guillaume IX le Troubadour, son fils, l'un et l'autre relativement connus et, quoique pour des motifs divergents, hommes d'un rayonnement considérable, Guillaume VIII demeure encore mystérieux, faute de moyens d'approche pour interpréter sa personnalité.

Malgré l'indigence des sources, les historiens modernes ne furent pourtant pas avares d'éloges à son endroit. Achille Luchaire, d'habitude plus circonspect, tranche en le déclarant « politique avisé et fin, soldat de premier ordre et conquérant toujours (sic) heureux (4) ». « De réelles qualités de conquérant et d'organisateur », renchérit Augustin Fliche (5); « son oeuvre ressemble, à bien des égards », poursuit-il, « à celle de Guillaume le Conquérant ». « Un vrai prince, de génie supérieur », écrivait pour sa part le doyen Boissonnade (6) ; il est vrai que, quelques pages plus loin, cet auteur, parlant des ducs d'Aquitaine, les définit tous (sans faire exception pour le nôtre), « piètres administrateurs, peu aptes aux besognes patientes et durables », n'ayant « pas même l'idée d'une organisation centralisatrice » ; l'Aquitaine devient ici « le plus disparate, le plus fragile des Etats féodaux français ».

En présence de ce rudimentaire palmarès, nous suggérerons que Guillaume VIII et son fief ne méritent sans doute « ni cet excès d'honneur ni cette indignité ».

 Il est en tout cas plus sûr d'essayer de nous en tenir aux jugements des contemporains, de retenir par exemple que ses ennemis angevins ont surtout vu en ce duc un « chevalier très mordant, jeune, rusé et travailleur (7) ».

Et de toute manière, c'est seulement en le regardant agir que l'on peut essayer de se faire une opinion.

Si l'on ne sait à peu près rien des hommes de l'entourage de Guillaume qui, en l'éduquant, en le conseillant, purent agir sur lui, au moins sait-on que sa mère Agnès, issue des comtes de Bourgogne, fut une femme d'envergure.

 Habile politique, ambitieuse, la veuve de Guillaume le Grand s'était remariée, non toujours pour son bonheur, avec Geoffroy Martel, qui devint comte d'Anjou; elle n'avait pas dédaigné de soigner sa propre réputation en associant son nom à de hautes œuvres de mécénat, telle la reconstruction de la basilique Saint-Hilaire de Poitiers, consacrée en 1049; sa fille Ala avait épousé l'empereur Henri III.

 Après une carrière agitée, le comte d'Anjou étant mort en 1060 (8), elle quitta la cour de son fils pour se retirer à la fameuse abbaye aux Dames de Saintes (9), où elle s'éteignit sept ans plus tard.

Par elle, Guillaume VIII, oncle de l'empereur Henri IV, se trouve placé de plain-pied avec les premiers princes d'Europe (10); elle l'aura certainement habitué à voir grand, à viser haut.

La puissance du duc d'Aquitaine en 1066, quelle était-elle ?

Un texte (11), malheureusement fort tardif, mais du plus haut intérêt — il fut rédigé à Limoges au début du XIIIe siècle, alors que le duché d'Aquitaine depuis quelques années n'existait plus, — donne les détails d'une cérémonie au cours de laquelle le duc est bénit après son avènement.

Reçu à la porte de la cathédrale Saint-Etienne de Limoges par l'évêque, il se voit revêtir d'un sericum pallium (apparemment une chasuble, pour affirmer le caractère quasi sacerdotal de la « monarchie » aquitanique), puis le prélat le coiffe d'un cercle d'or, lui passe au doigt l'anneau dit de sainte Valérie, la protomartyre d'Aquitaine (12), et lui met en mains le vexillum, un gonfanon au haut d'une lance. Le duc est alors conduit par l'évêque jusqu'au chœur, où l'épée, préalablement déposée sur l'autel, lui est ceinte, cependant que le doyen du chapitre lui lace les éperons. En cet appareil il assiste à la messe au cours de laquelle toutefois, en dépit d'affirmations hâtives de Boissonnade (13), il ne reçoit point d'onction.

Doit-on se représenter ce cérémonial comme ponctuellement suivi cent cinquante ans déjà avant le texte qui le décrit ? Pour tout dire, le rapprochement que l'on peut faire entre cet ordo ad benedicendum et des textes antérieurs (14), avec ceux qui surtout concernent d'autres fiefs, rend vraisemblable l'antiquité de la coutume. Il serait intéressant en particulier de pousser plus loin qu'on ne l'a fait jusqu'à présent (15), la comparaison entre rituels de Normandie et d'Aquitaine.

Beaucoup plus prestigieux pour Guillaume que le diadème ducal était le fait de détenir l'abbatiat de la collégiale Saint-Hilaire de Poitiers, rivale insigne — y songeons-nous assez ? — de la collégiale royale Saint-Martin de Tours. « Qui t'a fait roi ? » aurait répondu un jour à Hugues Capet un insolent comte de Périgord, si l'on en croit Adémar de Chabannes (16).

Mais le comte de Poitou eût pu dire, évoquant les deux saints titulaires de ces grandes basiliques de pèlerinage : « Qui fit jadis Martin, sinon Hilaire ? »

Dans les chartes du chapitre de Saint-Hilaire, le nom du comte apparait en qualité d'abbé; rien ne laisse soupçonner au premier abord qu'il s'agisse d'un abbé laïque (17). Sidney Painter n'a point manqué de faire état (18) de ce facteur de la puissance ducale, et le place à côté des atouts que constituait pour ce prince la possession de très vastes territoires, allodiaux ou bénéficiaux.

Puissance qui n'apparaît guère comme limitée au sommet.

Peu de temps après l'avènement de Guillaume VIII, le roi Henri Ier fit sacrer à Reims, à la Pentecôte 1059, son fils Philippe, âgé de sept ans, et il se trouve que pour la première fois un tel événement donna lieu à une relation circonstanciée (19).

 Nous y lisons que, parmi les grands laïques qui, de par leur fief, étaient tenus de participer à la cérémonie, la plupart n'y assistèrent que par procureur, ainsi Guillaume le Bâtard (la Normandie n'avait guère eu jusqu'alors à se louer de l'attitude d'Henri Ier), ou son beau-père le comte Baudouin de Flandre, ou Geoffroy, le comte d'Anjou.

 

Le duc d'Aquitaine, au contraire, cousin issu de germain du roi, non seulement parut au sacre, mais il le fit entouré de plusieurs de ses vassaux (obtimates) — le comte de la Marche Audebert, Foulque comte d'Angoulême, le vicomte de Limoges, — et de prélats de son ressort : Itier Chabot, évêque de Limoges, les évêques Guillaume d'Angoulême et Arnoul de Saintes (20), l'abbé Hugues II de Charroux.

 Aussitôt après le légat pontifical et les archevêques, c'était Guy-Geoffroy qui marchait premier des laïcs en cette circonstance.

 Il ne dut pas être mécontent de faire éprouver au tout jeune Philippe qu'ultérieurement celui-ci aurait à compter avec le puissant « duc de toute la monarchie d'Aquitaine ». S'il est vrai que, à la mort du roi Henri, Guillaume se montra loyal sans réticence à l'égard de Philippe Ier (21), si cette fidélité se poursuivit lorsque, le comte de Flandre étant mort (22), le roi majeur se mit vraiment à gouverner, cependant d'hommage proprement dit l'on ne saurait trouver nulle trace.

 La médiocre allusion faite par un chroniqueur à un contingent poitevin dans les rangs royaux à la bataille de Cassel en 1071 (23) ne suffit pas pour que l'on puisse parler d'un auxilium féodal normalement fourni.

L'hommage du duc, Philippe 1er ne pouvait l'exiger : avec quelle armée, avec les troupes de quel autre vassal eût-il opéré, en cas de félonie, la commise sur des fiefs aussi vastes, aussi lointains ? Ainsi le pouvoir ducal n'était-il pas, en 1066, limité par en haut. Etait-il entravé à la base ? c'est ce dont nous essaierons plus loin de juger.

Quoi qu'il en soit, ce que l'on peut sans peine constater, c'est l'audience européenne de Guillaume VIII; la renommée, sinon de l'homme, certainement de ses Etats, est grande. Deux épisodes des relations internationales, postérieurs de peu à 1066, en fournissent la preuve, tout en soulignant l'équilibre qui existait alors entre l'Aquitaine et une Normandie pourtant gouvernée par un roi.

En 1069, Alphonse VI, roi de Leôn depuis quatre ans, demanda la main d'Agnès, fille de Guy-Geoffroy (24), après qu'une fille de Guillaume le Conquérant, d'abord pressenti, fût décédée avant d'avoir rejoint son fiancé.

 Plus tard, l'empereur Henri IV, pressé par d'énormes difficultés intérieures (25) au cours de sa lutte contre Grégoire VII, chercha en 1074 de l'aide hors d'Allemagne.

Il était jeune encore, plein d'illusions en s'imaginant, à vingt-quatre ans, que les rois de France ou d'Angleterre se dérangeraient pour le soutenir contre des rebelles saxons. Il se serait, après leur double refus, tourné vers son oncle : Il implora Guillaume, duc des Poitevins, frère de sa mère, suppliant, celui-ci d'avoir pitié du fils de sa sœur, et de lui apporter du secours afin qu'il pût récupérer le royaume paternel dont il était injustement privé.

Mais le duc répondit en alléguant qu'entre eux deux s'interposaient tant de puissances qu'il lui serait impossible de faire parvenir une armée jusqu'à lui à travers tant d'obstacles.

Ici, notre source d'information est germanique (26), non suspecte d'orgueil de clocher comme le récit du moine Martin de Montierneuf (27), et ses allégations sont d'autant plus probantes.

La principauté de la France du Sud-Ouest est évidemment illustre en Europe, et son détenteur rivalise avec son suzerain, comme avec son trop brillant émule et cousin le duc de Normandie.

Cependant, — un examen, même superficiel suffirait à le révéler, — quelque chose manquait ici, que le duc Guillaume le Bâtard sut de toute évidence réaliser : la structure d'un Etat.

Les institutions de l'Aquitaine — ou tout simplement du Poitou — étaient encore, tout comme celles, par exemple, du duché de Bourgogne, embryonnaires (28), et il allait falloir attendre les Plantagenet pour que l'on pût en observer de plus sérieuses.

C'est tout Juste si nous avons loisir de constater qu'il existe, au moins par moments, un chancelier comtal à Poitiers, ainsi en 1067 Thibaut, écolâtre de Saint-Hilaire (29).

Quant au sénéchal, bien que ce soit précisément en cette seconde moitié du XIe siècle qu'il est apparu, on ignore à peu près tout du contenu de sa fonction à cette époque.

En aucune manière le duché d'Aquitaine n'a constitué alors un Etat; simplement, et tout au plus, une prétention, soutenable de temps à autre, lors des phases de prospérité, ou de grande vigueur militaire, mais une prétention très fragile. Dans une solide esquisse qui, à défaut — jusqu'à présent — d'étude de fond relative à ces problèmes locaux, demeure un des meilleurs travaux écrits sur la question, Yves Renouard notait naguère (30) :

« Le titre de duc d'Aquitaine demeure honorifique et prestigieux, mais nu : il n'apporte aucun élément concret de puissance, aucun domaine particulier au comte de Poitou. Le titre ducal couronne magnifiquement la multiplicité des titres comportant puissance réelle accumulés. Il exalte la grandeur [des comtes], en exprimant sur un plan supérieur l'unité de leur personnage : le pape l'emploie pour les désigner depuis 1033 au moins (31); mais il est symptomatique qu'eux-mêmes, jusqu'à l'aurore du XIIe siècle, ne l'aient jamais porté seul. »

Cherchons maintenant à rassembler ce que l'on peut connaître de la politique de Guillaume VIII.

Ses soucis dynastiques ont été grands : comme tout potentat féodal de plus ou moins haute volée, il fut longtemps tourmenté par le désir d'avoir un fils. Allait-il être plus heureux que ses frères prédécédés ?

 Vers la fin de 1058, au moment où il devenait comte de Poitou, « il quitta », écrit sans émotion le chroniqueur de Saint-Maixent, « la fille du comte Audebert [de Périgord], sa femme, pour cause de parenté, et prit une autre épouse appelée Matéode ». Parenté ? En tout cas, stérilité : ceci est motif, cela prétexte. On n'ignore pas comment, chez les nobles français du XIe siècle, le recours aux arguments généalogiques était courant pour justifier l'instabilité conjugale.

Dix ans après ce changement, la nouvelle épouse n'avait donné qu'une fille au duc d'Aquitaine, et le refrain monotone reprend : « Ayant délaissé la susdite Matéode, le comte Guy épousa Audéarde, fille du duc Robert de Bourgogne et nièce du roi Henri de France (32). »

A ce moment, c'est-à-dire peu de temps après la conquête de l'Angleterre, le duc avait près de quarante-cinq ans, l'élue bourguignonne une vingtaine d'années.

 Qu'avait-on fait de Matéode ? Quel prétexte avait-on saisi pour éloigner cette comtesse de Poitou dont nous ignorons jusqu'à l'ascendance ? Qu'est-elle devenue ensuite ? Les textes font silence.

Si la parenté fut invoquée pour dissoudre la deuxième union de Guy-Geoffroy, comment les évêques ont-ils laissé s'accomplir la troisième, alors que notoirement Robert le Vieux de Bourgogne était son cousin issu de germain ? Autant de paradoxes, fréquents dans la vie féodale.

Il ne faudrait pas oublier qu'Audéarde était la nièce du saint abbé Hugues de Cluny (33), grand promoteur de la réforme de l'Eglise à laquelle Grégoire VII allait attacher son nom : il n'est pas dit que, moyennant quelque secrète promesse du duc d'aider a cette réforme, Hugues ne se soit entremis pour faire jeter un voile sur ce que ce mariage avait de contraire aux canons.

D'Audéarde allait naître, le 22 octobre 1071, le fameux Guillaume le Troubadour.

Il est temps de nous demander maintenant quels étaient les problèmes que posaient au comte-duc, et ses propres vassaux, et ses voisins ou grands rivaux.

L'Aquitaine de 1066, à qui l'on se souciait tant d'assurer un héritier mâle, s'étendait fort loin au Sud-Ouest (34).

La Gascogne était entrée en 1032, à la mort de son duc Sanche-Guillaume, dans cet ensemble féodal, basculant, par suite d'une alliance matrimoniale, de la mouvance du roi de Navarre à celle du duc d'Aquitaine.

La mère de Guy-Geoffroy, Agnès, avait intrigué sans désemparer pour assurer à celui-ci un magnifique héritage, en dépit des efforts d'autres prétendants; avant 1052 le comte d'Armagnac, Bernard Tumapaler, s'était finalement désisté, non sans une énorme compensation de 15.000 sous (35).

 

Ainsi, à son avènement, Guillaume VIII était-il maître théorique de territoires se développant jusqu'au pied des Pyrénées. Possession qui devait se heurter plus d'une fois à de nouvelles contestations de la part de vassaux barbares, et fort agités.

Une charte de Saint-Seurin de Bordeaux, en 1060, désigne Guillaume VIII comme « triomphant des rebelles » (36) et laisse donc entendre que Bernard s'était insurgé.

 Une autre révolte survint en tout cas peu après, mais le comte d'Armagnac se fit battre dans la vallée de l'Adour (mai 1063), à la Castelle, non loin de l'illustre monastère de Saint-Sever, où venait d'être enluminée une extraordinaire Apocalypse (37).

Tumapaler vaincu, et veuf, se retira au prieuré clunisien de Saint-Mont dont une charte, de peu postérieure, salue Guy-Geoffroy dans les termes suivants : « Le très noble comte des Poitevins qui gouverne l'Aquitaine et la Gascogne tout entière (38). »

Cet accroissement territorial avait amené les comtes de Poitou à s'intéresser davantage à Bordeaux.

Mais Poitiers ne fut pas pour autant délaissée comme résidence habituelle. Il était seulement important d'exercer une attentive surveillance sur le siège métropolitain de la IIe Aquitania.

Et nous constatons, non sans intérêt, que ce sont des prélats poitevins qui devinrent, en ce milieu du XIe siècle, archevêques de Bordeaux : Archambaud, abbé de Saint-Maixent, élu en 1045 grâce à l'adresse d'Agnès de Bourgogne, et son successeur Josselin de Parthenay, que fit désigner Guillaume VIII en 1059 (39).

Bordeaux, dont l'atelier monétaire vit sortir sous ce règne les premières monnaies ducales portant effectivement la légende AQUITANIE, faisait équilibre à Poitiers, capitale effective, mais vulnérable.

Des vassaux beaucoup plus proches que ceux de l'excentrique Gascogne causaient au comte de Poitou de perpétuels soucis. Il faut, selon nous, s'élever avec quelque vigueur contre certaines vues historiques à travers lesquelles nous nous représenterions, si nous n'y prenions garde, le Poitou de 1066 sous des teintes presque idylliques. Voici, par exemple, ce qu'écrivait il y a peu l'érudit suisse Reto Bezzola :

 

Entre tous [les] Guillaumes, nous ne saurions en trouver un seul qui eût cette rudesse masculine, cette nature sombre et violente, la cruauté froide, les colères ou le fanatisme que manifestent par exemple leurs voisins du Nord, les comtes d'Anjou.

 A l'inverse de tant de barons querelleurs, avides d'augmenter leurs possessions et leur pouvoir, les princes de la maison d'Aquitaine ne cherchaient qu'à maintenir en paix leurs domaines par une politique d'équilibre entre les forces opposées de leurs voisins. Ils surent toujours se servir des démêlés de leurs vassaux pour conserver sur eux leur suprématie.

 Et tandis que, chez les Angevins, les rivalités de famille ne cessent que lorsque le père a maté le fils et le frère le frère, la maison de Poitiers jouit d'une tranquillité intérieure qui n'a jamais été sérieusement troublée, depuis l'origine jusqu'à la fin de la dynastie, c'est-à-dire durant près de deux siècles (40).

 

Un tel tableau appelle de singulières retouches. Ne considérons que deux des baronnies les plus proches, Thouars et Lusignan.

Nous constaterons que d'abord Aimery IV, vicomte de Thouars, fief situé aux limites du comté d'Anjou, pouvait se trouver tenté de jouer sur deux tableaux; il ne fut pas toujours rassurant pour le comte de Poitou, loin de là.

Après l'aventure de sa participation à l'expédition d'Angleterre que nous évoquerons plus bas, il fomenta par exemple, ou laissa provoquer par son frère Savary, une révolte de la place de Luçon contre le duc-comte.

Il en résulta, en 1069, que celui-ci « emporta le château de Luçon, et il incendia le monastère dédié à la bienheureuse Vierge Marie, situé dans son enceinte, ce qui fit périr hommes et femmes en grand nombre » : ainsi s'exprime notre informateur habituel (41). Voilà qui peut constituer à nos yeux un assez sérieux « trouble » de la « tranquillité intérieure ». Ce ne fut pas le seul.

Hugues le Pieux, sire de Lusignan, avait été quelques années plus tôt (1060) en révolte contre Guy-Geoffroy : au cours d'une sortie de son château assiégé par les troupes ducales, il avait été tué le 8 octobre 1060.

Son successeur Hugues VI, gendre au reste d'Aimery de Thouars, continua la lutte (42).

 

Au-delà des limites du Poitou, le ciel n'était pas plus serein.

Si nous jetons un regard vers les vicomtés limousines, vassales du duc, nous y observons sans peine combien les barons du lieu étaient rudes, instables, combien il était nécessaire que le suzerain leur fît éprouver le poids de son prestige.

En 1067, le vicomte Aymar II de Limoges, qui pour son château dépend de l'abbé de Saint-Martial, attaque férocement la cité voisine, relevant de l'évêque, et ses gens s'y livrent à un massacre. A la suite de quoi le duc imposera au vicomte de faire abandon au chapitre cathédral, à titre de réparation, d'une abbaye qu'il détenait.

Mais que vaut, dans la société du XIe siècle, une injonction de cette nature ? Le vassal ne s'exécuta point, et il fallut une nouvelle pression — armée probablement — de Guillaume VIII pour que, en 1074, suivi de ses fils, le vicomte Aymar, pieds nus et en habit de pénitent, fît amende honorable au chapitre de Saint-Etienne. Pour accueillir cette solennelle réparation, l'évêque Itier n'était plus là; au cours de ces années de troubles, il était mort (43).

Ces exemples peuvent suffire à ébranler l'illusion d'une Aquitaine patriarcale et pacifique. Ils nous permettent d'éprouver à quel point le duc, en ce troisième quart du XIe siècle, fut constamment obligé de veiller au grain, non moins que les princes qui avaient à gouverner la Normandie ou la Flandre. Et s'il y eut paix relative sous ce Guillaume, une telle paix fut parfois achetée bien cher. D'autant que contraindre à l'obéissance de fantasques vassaux n'est pas le seul thème des luttes menées par le duc.

Il y avait aussi des voisins incommodes. Le plus notoire fut le comte d'Anjou. Depuis que Guillaume le Grand avait accepté, pour mettre fin à une meurtrière rivalité, que son trop puissant voisin tînt de lui en fief la région de Loudun, on devine que le comte d'Anjou mettait à profit une aussi favorable conjoncture.

Tenir du duc l'admirable donjon carré de Loudun et, plus loin encore, au cœur du Poitou, à six lieues seulement de sa capitale, la place de Mirebeau, c'était disposer contre son seigneur du plus vigoureux moyen de pression, c'était régler soi-même le débit d'innombrables conflits. Sur ce terrain encore, Guy-Geoffroy dut réagir.

 Le problème des relations avec l'Anjou était compliqué pour lui par la question de Saintonge.

Lorsque la duchesse Agnès avait épousé Geoffroy Martel, son douaire, qui se trouvait être la Saintonge, avait été saisi par le comte d'Anjou et il en était résulté des heurts très rudes entre Poitevins et Angevins.

Ensuite Geoffroy avait répudié Agnès parce qu'elle était stérile (elle était d'ailleurs passablement plus âgée que lui) ; elle revint en Poitou, mais il garda la Saintonge; quelque temps avant de mourir, il constituait héritiers ses deux neveux, dont l'un, Foulque le Réchin, reçut de lui, à la Pentecôte 1060, avec les éperons de chevalier, l'investiture du pays de Saintes (44).

Puis Geoffroy mourut à Saint-Nicolas d'Angers sous l'habit monastique.

Le Réchin et Geoffroy le Barbu, ses successeurs, n'étaient que de très jeunes gens sans expérience; pour la première fois depuis bien longtemps, l'Anjou se trouvait débilité.

Le duc d'Aquitaine tenta d'en profiter.

Dès mars 1061, il voulut arracher la Saintonge au jeune Foulque; mais il se fit battre à Chef-Boutonne (45). Ah ! s'écrie doctement l'auteur des Gesta consulum Andegavorum, comme Sénèque a eu raison de dire : « Les hommes mèneraient une vie bien tranquille si ces deux mots : tien et mien étaient abolis ! » Mais un an plus tard, la discorde s'étant introduite entre les deux Angevins, ce qui les affaiblissait, Guy-Geoffroy réussit à emporter Saintes, et la même chronique est bien obligée de le reconnaître (46). Cependant que le moine de Saint-Maixent claironne : « [Le duc] vint planter ses tentes tout autour de la ville de Saintes et en fit le siège; par la faim et par le fer il opéra des ravages, jusqu'à ce que les Angevins et ceux qui étaient dans la place eussent capitulé entre ses mains avec tout ce qui leur appartenait (47). »

Devenu plus tard comte unique, — par éviction définitive et incarcération perpétuelle de son frère, — Foulque le Réchin, lorsqu'il confirmait les privilèges du monastère poitevin de Saint-Jouin-de-Marnes (48), ne pouvait évoquer sans quelque nostalgie l'époque glorieuse où son oncle le Martel avait, à la bataille du Mont-Couër, à deux lieues de ce célèbre sanctuaire, vaincu et capturé le duc d'Aquitaine Guillaume VI !

L'on devine que la récupération de la Saintonge par les Poitevins ne mit pas fin à un conflit acharné, mais contribua au contraire à le faire rebondir.

Si Foulque tenait désormais les quatre cités qu'il intitule fièrement « capitales de l'honneur des comtes d'Anjou (49) », savoir Angers, Tours, Loches et — hélas ! pour le Poitou - Loudun, ville où son frère avait fait une donation en 1062 pour l'érection du monastère Sainte-Croix (50), en revanche il se voyait farouchement attaqué dans Saumur par son rival poitevin, et l'historiographe maixentais, si empressé à retenir les hauts faits de la dynastie ducale, donnera à ce propos les détails que voici : Conformément au jugement de Dieu, qui juge toutes choses selon la justice, le château de Saumur fut consumé au cours d'un horrible incendie, allumé par le comte Guy de Poitou.

ainsi que les sanctuaires de Saint-Florent, de Saint-Jean-Baptiste et de Saint-Pierre apôtre, et il ne demeura absolument rien du suburbium entier de ce château pas un seul édifice dans cette enceinte ni hors de celle-ci ne fut épargné par le feu (51).

Agent, conscient ou non, de la justice divine ? Guy-Geoffroy n'était sans doute pas dupe de la phraséologie de ses thuriféraires monastiques; plus guerrier au total qu'administrateur, il avait surtout voulu tirer profit de la querelle entre les frères angevins; mais les souffrances infligées à Saumur n'avaient pas eu pour contrepoids d'apporter à Geoffroy le Barbu l'aide militaire que celui-ci espérait. Les Poitevins accouraient trop tard pour le sauver.

Tout au plus avaient-ils, par ce coup de main, infligé une sévère leçon au comte d'Anjou, qui ne bougea plus dans les années suivantes : années de rudes épreuves pour lui, puisque le roi Philippe lui arrachait aussi le Gâtinais (52).

 Beaucoup moins bien connue est l'histoire des relations entre le duc d'Aquitaine et un autre de ses voisins, le comte de Toulouse Guillaume IV. Mais en ce domaine non plus le premier ne peut être représenté comme un prince pacifique.

A la suite d'une échauffourée assez énigmatique qui se serait produite au début de son règne, à Bordeaux, entre ses chevaliers et des hommes du comte de Toulouse, — une centaine des siens auraient péri, — il voulut venger une aussi rude injure, marcha sur Toulouse, suivi d'un grand nombre de vassaux, ravagea les abords de cette cité et s'en empara; elle fut en partie incendiée (53). C'est là du moins ce que relate la chronique officielle déjà alléguée : il ne dut guère s'agir que d'un épisode sans suite, qui n'entraîna autre chose qu'une humiliation; avertissement, mais non ruine pour cette brillante cité, où commençait à s'édifier le gigantesque édifice roman de Saint-Sernin (54).

Pour en venir — enfin — aux relations entre Aquitaine et Normandie en ce temps, nous poserons en prémisses que le cas de cette dernière est bien différent de Toulouse ou de l'Anjou qui étaient, elles, principautés limitrophes.

Entre le Poitou et le grand duché neustrien s'interposaient précisément le comté d'Anjou, avec son annexe de Touraine, et le Maine.

Sur la carte du royaume capétien, Guillaume le Bâtard avait vite tenu une place excessive, et le roi de France, le jugeant encombrant, s'était employé à diverses reprises à le contenir, sans grand succès.

Dans ces luttes, comme dans celles que Geoffroy Martel avait menées contre des forteresses telles qu'Ambrières, des contingents poitevins étaient allés combattre (1054-1058), avec le futur duc et Aimery de Thouars (55).

Lorsque plus tard le Bâtard, profitant de la mort du comte Herbert II, mit la main sur le Maine (56), Guy-Geoffroy, à vrai dire occupé ailleurs, se garda bien d'intervenir, voire de montrer les dents. L'expansion normande ne s'opérait-elle pas au détriment de son pire ennemi, le comte d'Anjou ? L'Aquitain a pu secrètement s'en réjouir.

Lors des événements dramatiques de 1066, qui aboutirent à la conquête de l'Angleterre, le duc d'Aquitaine n'a pas non plus bougé ni, que l'on sache, réagi en aucune manière. Mais un de ses vassaux, parmi les plus illustres et turbulents, déjà nommé à plusieurs reprises, le vicomte de Thouars, joua dans l'entreprise un rôle considérable.

Certains ont supposé que, si Aimery IV se jeta dans cette aventure, ce fut pour reconstituer son trésor, obéré par le paiement récent d'une grosse rançon. Il est évidemment impossible de savoir s'il partit avec l'autorisation ou contre le gré de son seigneur; en un cas comme dans l'autre, Guillaume VIII ne put se désoler de voir s'éloigner ce baron; une expédition hasardeuse allait occuper Aimery et, si elle s'avérait fatale pour lui, elle pourrait permettre au comte de Poitou d'intervenir dans les affaires de la vicomté.

Qu'il y ait eu des Poitevins au sein de l'armée de Guillaume le Bâtard, la chose est attestée, entre autres sources, par Orderic Vital (57).

Mais quel pouvait en être le nombre ? Celui de 4.000, que l'on a proposé (58), sur quoi repose-t-il ? Je sais bien que Guillaume de Poitiers, l'historiographe éminent du règne du Bâtard, parle généreusement d'un effectif de cinquante mille chevaliers (59), mais la critique moderne a prudemment ramené ce nombre à moins de dix mille (60).

Dans ces conditions, les combattants de Poitou qui avec Aimery, son frère le sire de Fontenay et le vidame Simon de Parthenay, se trouvèrent attendre à Saint-Pierre-sur-Dives, en septembre, les vents favorables à la traversée, n'étaient sans doute que quelques centaines, La bataille de Hastings, où Harold trouva la mort, et Guillaume la couronne d'Angleterre, fut livrée le 14 octobre.

 Nous ne nous attarderons pas à reprendre après tant d'autres le récit d'un engagement aussi illustre, mais il nous faut retenir la place avantageuse que tient, dans les relations les plus autorisées, le vicomte de Thouars : Guillaume de Poitiers tout comme Orderic Vital mettent ce guerrier en vedette (61), et le premier surtout donne les détails les plus curieux sur le rôle d'Aimery dans les jours qui suivirent.

Après la prise de Canterbury, lorsque la question fut posée de savoir si le Bâtard tenterait de se faire au plus tôt couronner, les avis dans l'état-major de l'expédition furent partagés. Et l'archidiacre de Lisieux poursuit (62) : Assistait à ce conseil Aimery l'Aquitain, gouverneur de Thouars, dont l'éloquence égalait la bravoure.

Tout en admirant, en louant courtoisement la modestie d'un seigneur qui sondait ainsi les dispositions des chevaliers pour savoir s'ils voulaient qu'il devînt roi, il dit : « A pareil débat jamais n'ont été admis (ou bien rarement) des chevaliers. Mais nous n'avons pas à délibérer longuement sur un vœu dont nous souhaitons qu'au plus vite il soit réalisé. »

Le Normand Wace, dans son roman de Rou, se fit l'écho d'une tradition analogue, puisque selon lui, à la veille de Hastings, le vicomte de Thouars, décidément représenté comme une sorte d'ange tutélaire des armes normandes, se serait écrié, parlant au duc de Normandie :

Soz ciel tel chevalier n'en a; Beau quens est, e beau rei sera.

Cumbate sei, e si veincra.

Tot seit honi ki li faldra (63) !

Il est probable que le vicomte Aimery ne revint pas les mains vides de son expédition : une tradition, que rien ne permet de contrôler (64), veut qu'il ait, entre autres présents, apporté à sa femme Arengarde des broderies à l'aiguille qui enchantèrent celle-ci, et elle s'ingénia dès lors à en imiter la technique.

Invinciblement, ceci reporte notre pensée vers la fameuse broderie de l'évêque Odon de Bayeux, dont il faut bien se dire qu'elle répondait à une mode, et qu'elle ne dut pas, loin de là, être unique de son espèce en ces années-là (65).

L'Aquitaine des environs de 1066 a joué enfin un rôle non négligeable dans divers événements qui concernaient la vie religieuse; et tout d'abord dans les essais de reconquête chrétienne en pays musulman qui préludèrent aux croisades (66).

Au début de 1063, le duc Guillaume VIII ne savait, si l'on en croit Bezzola (67), « à quoi employer ses troupes ». C'est bien là manière de parler puisque, en mai 1063, se produit l'engagement de la Castelle par lequel il met à raison le comte d'Armagnac (68).

Non. il ne faut pas laisser entendre que, si les Poitevins sont descendus en Espagne cet été-là, ce fut pour échapper au désœuvrement.

 L'expédition de 1063 fut impromptue, provoquée par des causes imprévisibles : l'assassinat par un musulman du roi Ramire Ier d'Aragon souleva une intense émotion en Occident, spécialement dans les milieux clunisiens dont ce monarque avait été un grand soutien.

Ce furent pour une bonne part les moines de Cluny qui appelèrent toute la Chrétienté à secourir l'Aragon, et les barons répondirent en foule (69). L'appel de l'aventure y était pour beaucoup. Guillaume d'Aquitaine et ses vassaux participèrent à une expédition dont bien des chansons de geste du début du XII" siècle nous restituent l'atmosphère.

Le corps expéditionnaire se dirigea sur Barbastro, place d'une importance stratégique considérable, située dans la haute vallée d'un affluent de l'Ebre, au N.-E. de Saragosse, marché agricole et aussi bien centre d'études coraniques.

Des contingents hétéroclites, venus de Normandie, de Bourgogne, de Catalogne et d'ailleurs, chevauchaient aux côtés des gens d'Aquitaine; Guy-Geoffroy comptait, parmi ses vassaux présents, cet Aimery de Thouars qui devait trois ans plus tard s'illustrer sous d'autres cieux.

Barbastro fut assiégée pendant quarante jours, puis enlevée en 1064, par un coup de chance, les habitants s'étant vus privés d'eau, mais non du fait de leurs ennemis. Selon les auteurs musulmans, les conquérants auraient d'abord promis la vie sauve aux vaincus, puis se parjurèrent en les massacrant; c'est cette tuerie, tout au moins, que confirme, à travers son habituel laconisme singulièrement dense, le chroniqueur de Saint-Maixent : le duc, écrit-il, « acquit la ville de Barbastro au nom chrétien, après avoir fait périr tous ceux qui l'habitaient (70) ».

Un si rapide et radical épilogue ne fut pas suivi d'effet. Guy-Geoffroy n'était pas dépourvu de « cruauté froide », ni de « fanatisme »; il n'était pas davantage le « conquérant toujours heureux » que l'on a prétendu nous présenter (71). Brutal, débauché, changeant, il le fut comme la plupart de ses congénères, et l'expédition d'Aragon se conclut pour ses armes sans gloire, sinon sans butin.

 D'après Ibn Hayyan, chroniqueur cordouan de ce temps (72), la prise de Barbastro et les ravages concomittants amenèrent la mort ou la capture de 50.000 personnes (73), et les chrétiens en entrant dans la cité se livrèrent à de vastes orgies; puis ils s'installèrent, au lieu de continuer à combattre. Les Sarrasins, eux, sans plier devant l'adversité, organisèrent une dévastation systématique du territoire avoisinant en vue d'affamer l'adversaire. En sorte que bientôt celui-ci se replia vers les Pyrénées. « Sous la pression de la faim cette grande armée s'en retourna inefficace », écrit un chroniqueur de Saint-Martin de Tours (74), qui n'est peut-être pas si mécontent, au total, de voir l'abbé de Saint-Hilaire revenir bredouille.

Cependant, les barons poitevins rapportaient des proies abondantes et diverses; parmi lesquelles des esclaves (75). Ibn Hayyan dit que « le roi des roumis se choisit, parmi les jeunes filles musulmanes, les femmes que distinguait leur beauté ainsi que les jeunes garçons les plus gracieux, plusieurs milliers de personnes, qu'il emmena afin d'en faire présent à son souverain ».

 

Qui peut bien être ce « roi » des chrétiens, sinon le plus élevé en dignité des combattants, savoir notre duc (76) ? Il aurait donc ramené des esclaves, mais on peut douter que c'ait été avec l'intention de les offrir au roi Philippe. En tout cas, il se garda bien de passer à nouveau en Espagne, et la petite garnison laissée à Barbastro, vite amollie par les licences d'une vie à l'orientale, fut taillée en pièces en avril 1065.

Le retentissement de cette singulière expédition allait être cependant durable. Le poème intitulé Le siège de Barbastre (77) n'est guère antérieur à l'extrême fin du siècle suivant; il est vrai que, à côté du principal personnage, Bovon de Commarchis, nul héros n'y incarne les barons poitevins de 1064.

Pour en revenir au temps de Guillaume VIII, ce n'est pas sans stupéfaction que l'on constate comment la prise de cette place aragonaise a constitué, fût-ce épisodiquement, un élément du langage de chancellerie, voire de comput !

Dans un acte passé en 1067, en présence de la duchesse Agnès, et par lequel l'archidiacre de Saintes fait des largesses à l'abbaye Notre-Dame de cette ville (78), le scribe a cru ne pouvoir mieux faire pour désigner Agnès qu'en la disant mère de Geoffroy, « lequel incendia Toulouse et enleva Barbastro aux Sarrasins ». Et ce n'est pas là un texte unique : une autre charte du même cartulaire — d'ailleurs de 1065 — et une notice de Saint-Cyprien de Poitiers (79) sont datées « l'an que le duc Guillaume prit Barbastro ».

Les captifs musulmans de Guillaume VIII ou ceux de ses vassaux, ramenés en Poitou, y ont-ils laissé quelque trace de leur activité ?

Lorsque l'on constate qu'un portail d'une église de Thouars et quelques autres possèdent un décor à voussures festonnées évoquant certaines portes ou arcades musulmanes (80), on peut se demander si Aimery IV n'aurait pas eu dans son lot quelque esclave sculpteur qui aurait proposé certaines formules aux artistes régionaux.

Et quand on constate que le fils du conquérant de Barbastro, né sept ans après cette aventure, fut l'initiateur d'un lyrisme occitan dont tels érudits s'obstinent à rechercher la source dans la poésie arabe (81), on peut aussi s'interroger : Guillaume IX enfant n'a-t-il pas été bercé par des femmes musulmanes esclaves de son père ? Ce sont là hypothèses séductrices, et il n'est pas interdit à l'historien de les garder en mémoire, mais c'est ici tout ce qu'il peut faire.

Dans les épisodes de la reconquista que l'on vient d'évoquer, le duc d'Aquitaine apparut comme un champion du pape Alexandre, lequel, s'il n'avait pas orchestré cette expédition, l'avait en tout cas bénie et encouragée.

Et ceci pose le problème des relations de Guy-Geoffroy avec le Saint-Siège. Le prince n'était pas un inconnu pour le pontife : sa sœur, en effet, la veuve de l'empereur Henri III, et sa belle-sœur Hermessende, veuve de Guillaume Aigret, s'étaient retirées à Rome; elles y vivaient dans l'orbite de Pierre Damien, homme d'une haute spiritualité, animateur du mouvement prégrégorien; elles faisaient partie de ces pénitentes à qui Pierre adressait de remarquables lettres de pitié et de direction (82).

Elles étaient bien vues d'une Curie en pleine rénovation depuis le décret de 1059 sur les élections pontificales. Un peu de cette attitude bienveillante rejaillit sur le duc d'Aquitaine, bien que celui-ci ne pût se vanter d'être entièrement exempt de simonie dans la concession des crosses épiscopales sur son territoire. Mais le pape lui sut gré de n'avoir à aucun moment trempé dans le schisme de Cadalus provoqué par son impérial neveu, crise d'où le pontife légitime ne sortit définitivement qu'au synode de Mantoue en juin 1064.

Guy-Geoffroy donnait ainsi des preuves de loyalisme autant au pape qu'à son roi. Il fit pèlerinage à Rome en 1066, puis il assista au synode de Saintes, et là, en approuvant ostensiblement la déposition de l'évêque du lieu et son remplacement par l'abbé de Maillezais (83), il donna, non sans habileté, un gage au mouvement de réforme désormais lancé; ceci à la veille même de répudier son épouse Matéode (84).

Cette politique prudente ne pouvait que faire contraste, aux yeux du pape, avec la conduite outrageante de l'empereur ou celle, assez sordide, du roi de France.

Comment ne pas évoquer enfin — Barbastro nous y conviait déjà — la poussée clunisienne qui s'opère alors en Aquitaine ?

L'abbé saint Hugues effectuait ses premières tournées en ces régions aussitôt après le concile réformateur de 1059.

Par la désignation de clunisiens comme abbés dans les années qui suivirent : Godéran à Maillezais, Eudes à Saint-Jean-d'Angély (1060), Adémar à Saint-Martial de Limoges, Benoît à Saint-Maixent (1064), le duché joue un rôle important en cette phase d'expansion de la congrégation de Cluny, que confirme en 1068 la rédaction de ses consuetudines (85).

Le duc y aidait de tout son pouvoir, multipliant les égards vis-à-vis de l'abbaye Saint-Cyprien de Poitiers, favorisant les fondations nouvelles, faisant des donations à l'abbaye-mère. Toutefois l'atmosphère était loin d'être partout favorable à l'affiliation clunisienne : l'installation des réformateurs à Saint-Martial, par exemple, malgré l'appui du vicomte de Limoges et du duc, entraîna protestations et rébellions de la part des moines, détenteurs d'insignes reliques, et qui tenaient fort à leur autonomie (86).

Déjà, derrière la grande façade bénédictine et clunisienne de l'Aquitaine, une vie religieuse nouvelle se préparait, à peine perceptible encore.

C'était l'heure où disparaissaient des hommes comme Robert, fondateur de la Chaise-Dieu (1067), dont tant de prieurés peuplèrent l'Aquitaine, ou des animateurs de la vie canoniale comme l'abbé Gautier de Lesterps (87), comme saint Thibaut de la Marche, chanoine du Dorat, dont le tombeau fut vite étonnamment vénéré, tous représentants d'une vie religieuse traditionnelle.

Mais, dans le même temps, Robert d'Arbrissel commençait, au fond de sa Bretagne, à méditer sur son destin spirituel : prélude à une « conversion » qui, par la fondation de Fontevrault, bouleversa une partie de l'Aquitaine; cependant qu'Etienne de Muret s'ingéniera à adapter en son Limousin natal le cénobitisme érémitique (88), peu après l'époque dont nous parlons.

 

Nous n'avons pas ici la prétention de donner un tableau de l'Aquitaine de 1066 sous tous ses aspects; à quelques-uns seulement notre propos s'est volontairement limité : parmi tous ceux qui demeurent dans l'ombre, combien d'ailleurs ne peuvent encore être abordés !

Nous manquons d'études exigeantes, par exemple, sur la vie quotidienne en Poitou au XIe siècle, d'un dépouillement exhaustif, à ces fins, des cartulaires, des sources hagiographiques, des chroniques. Les conditions matérielles nous échappent dans l'ensemble. Tout au plus la densité des constructions entreprises au temps de Guillaume VIII, la multiplication des chantiers nous suggèrent-elles que le pays est riche, et qu'il est peuplé.

Pour ne parler que du Poitou dans les années les plus proches de Hastings, l'église Saint-Romain de Châtellerault monte vers 1060 (89); le premier sanctuaire roman d'Airvault se trouve constitué en 1068 (90); vers le même temps, à La Chaize-le-Vicomte, le vicomte de Thouars entreprend de faire construire la nécropole de son lignage; un monastère est fondé en 1069 à Nieul-sur-l'Autize, dont le chantier ne tardera pas non plus à démarrer; la même année, il est question de deux églises que l'évêque Isembert II fait bâtir à Argenton-Château, et vers 1070 l'abbé de Bourgueil, en accord avec l'archevêque Josselin de Bordeaux, fonde le bourg de Secondigny (91).

  Si l'on veut bien noter que nous nous bornons à mentionner des entreprises à peu près datées, si l'on songe à la masse de toutes celles, parmi les plus vastes, pour lesquelles aucune datation n'est possible, on ne peut qu'être impressionné par la vitalité de cette Aquitaine.

Certes, le grand réveil de l'économie, ici comme ailleurs, ne deviendra sensible qu'à l'extrême fin du siècle. Rien d'étonnant donc si les activités exportatrices du port de Bordeaux par exemple, ou bien l'industrie métallurgique de Châtellerault ne sont pas encore discernables dans les textes; pourtant, d'ici peu, les chansons de geste parleront couramment de l'épée poitevine, « le brant d'achier poitevinois », ou du heaume, ou du haubert d'origine poitevine (92).

Si l'existence d'un pont sur la Vienne en ce même Châtellerault, attestée en 1060 (93), ne suffit pas à elle seule à étayer l'hypothèse d'un courant commercial passant par cette cité, en revanche, certains indices ténus autorisent à déceler quelque vie artisanale en Poitou : dès les environs de 1025, Guillaume V, lors d'un de ses voyages au-delà des Alpes, ne se faisait-il pas fort de procurer à l'évêque de Verceil des étoffes fabriquées sur commande en son propre pays — apud nostrates, aurait-il dit (94) ?

Le bilan des activités de l'esprit dans l'Aquitaine d'alors pourrait être plus aisément dressé si l'on s'en voulait donner le mal; il se révélerait comme considérable.

Ainsi à Saint-Martial de Limoges, l'abbatial d'Adémar, imposé aux moines en 1064 dans les conditions que l'on a dites (95), fut-il une longue période de fécondité pour le scriptorium de ce monastère : un précieux manuscrit des Moralia in Job de saint Grégoire y fut alors copié, entre beaucoup d'autres (96).

Le plus ancien exemplaire conservé du fameux jeu du Sponsus est du début du XIIe siècle, mais dès le temps de Guillaume VIII rayonnait déjà largement l'école musicale de Saint-Martial (97).

A l'abbaye de Maillezais en Bas-Poitou, de somptueux livres liturgiques étaient élaborés (98) et, dans la liste impressionnante des manuscrits de ce monastère que l'on a pu reconstituer, beaucoup sont antérieurs à 1100.

D'un intérêt considérable à son tour se révèle avoir été la bibliothèque du chapitre de Saint-Hilaire à Poitiers, communauté dont nous avons dit (99) les puissantes assises ducales : elle présente cette particularité que, en un siècle connu pour ses violences féodales et — entre les temps carolingiens et la « renaissance » du XIIe — peu soucieux, dit-on, de culture classique, elle contenait un certain nombre de textes grecs (100).

La tradition ne voulait-elle pas, en 1450, qu'un « livre en grec » eiit été apporté à cette église par son saint titulaire lui-même ? Quoi qu'il en soit, la bibliothèque et le scriptorium hilariens furent de très bonne heure le noyau d'une école qu'on a récemment définie « le plus important foyer culturel au sud de la Loire (101) » : formule qui demanderait à être quelque peu atténuée si l'on veut ménager le légitime orgueil des Limousins. La tradition de ce studium remontait à Guillaume V et à son ami Fulbert, évêque de Chartres et trésorier de Saint-Hilaire. En cette seconde moitié du XIe siècle s'affirmait encore l'école épiscopale de Poitiers (102), rivale de la collégiale.

La ville possédait, grâce à ces divers établissements, un prestige dont porte témoignage le seul nom de l'auteur des Gesta de Guillaume le Conquérant, puisque ce clerc, normand par ses origines et sa carrière, se fit appeler « Guillelmus Pictavinus », et ce parce que, écrit Orderic Vital, « c'est à Poitiers qu'il s'abreuva largement aux sources de la philosophie (103) ».

En cette Aquitaine qui avait connu, depuis la fin du xe siècle, les plus généreux efforts pour réaliser la paix de Dieu, le duc Guy-Geoffroy sut, disent les flatteurs, faire régner la paix.

Le moine de Montierneuf écrit en effet : « Le royaume d'Aquitaine jouissait alors d'une si grande paix que l'on n'a jamais entendu dire qu'un voyageur ou un paysan se déplaçant à travers ce pays y ait subi quelque dommage (104). »

Le duc sut-il vraiment maintenir la « tranquillité intérieure » ? Nous avons vu, pour être francs, que ce ne fut pas sans telles terribles parenthèses, comme l'incendie de Saumur ou celui de Luçon, ni sans que l'amour de l'aventure entraînât les barons du pays aux plus douteuses expéditions, dont ils ne retiraient même pas toujours la gloire militaire.

 Il reste que, en dépit de tout cela, à l'heure où, entre les sanctuaires de Westminster et de Jumièges, se bâtissait l'Etat anglo-normand, la capitale du duché d'Aquitaine constituait déjà ce roc d'où allait jaillir le feu d'artifice de Guillaume IX le Troubadour, mais aussi le sol fécond où germerait la vigoureuse réflexion philosophique d'un Gilbert de la Porrée.

Société des antiquaires de l'Ouest

 

 

 

 

==>14 octobre 1066 - Les Chevaliers du Poitou à la conquête de l’Angleterre avec Guillaume le Conquérant.

==> Histoire de la Tapisserie de Bayeux, la conquête de l’Angleterre, faite en 1066 par Guillaume le Conquérant

==> Barfleur, La voie des Rois d’Angleterre

 

 

 


 

 

(1) AMAT DU MONT-CASSIN, Croniques et ystore de li Normant [traduction tardive d'un texte perdu], éd. V. de Bartholomaeis, Rome, 1935 (« Fonti per la storia d'Italia », 76), p. 12.

(2) « Ut perspicaces astrologi, qui secreta physicae subtiliter rimati sunt, asseverant, mutatio regni designatur » : ORDERIC VITAL, Historia ecclesiastica, éd. Le Prévost/L. Delisle, Paris, t. II, 1840 (« Société de l'histoire de France »), p. 116. Cf. encore Chroniques de Saint-Martial de Limoges, éd. H. Duplès Agier, Paris, 1874 (« Soc. hist. de Fr. »), p. 48; Michel DE BOÜARD, Guillaume le Conquérant, Paris, 1958 (« Que sais-je ? », 799), p. 85.

(3) Cette expression d'un diplôme (cf. Léonce AUZIAS, L'Aquitaine carolingienne, Toulouse, 1937 [« Bibliothèque méridionale », 2e s., 28], p. 517), peut être rapprochée des quelques mots par lesquels le chroniqueur de Saint-Maixent rapporte l'avènement de Guillaume VIII : « Huic in regno successit Goffredus » (Chronicon Sancti Maxentii, dans Chroniques des églises d'Anjou, éd. P. Marchegay /E. Mabille, Paris, 1869 [« Soc. hist. de Fr. »], p. 400). [Une nouvelle édition de ce texte par Jean VERDON est en préparation. Certains amendements au texte dans les citations qui suivent sont dus à sa diligence.]

(4) Achille LUCHAIRE, Les premiers Capétiens (987-1137), Paris, 1901 (« Histoire de France », LAVISSE, 11/2), p. 72.

(5) Augustin FLICHE, Le règne de Philippe Ier, roi de France (1060-1108), Paris, 1912, p. 235.

(6) Prosper BOISSONNADE, Histoire de Poitou, 3e éd., Paris, 1941 (« Les vieilles provinces de France »), p. 52. Cf. ibid., pp. 58-59.

(7) « Miles acerrimus, juvenis, astutus et laboriosus », disent les Gesta consulum Andegavorum, dans Chroniques des comtes d'Anjou et des seigneurs d'Amboise, éd. L. Halphen/ R. Poupardin, Paris, 1913 (« Collection de textes pour servir à l'étude et à l'enseignement de l'histoire », 48), p. 64.

(8) Cf. infra, p. 351.

(9) Chartes et documents pour servir à l'histoire de l'abbaye de Saint-Maixent, éd. Alfred Richard, Poitiers, t. I, 1886 (« Archives historiques du Poitou », 16), p. 149. — Cette très illustre abbaye recevait la même année (29 avril 1061) des privilèges notables de Nicolas II : Cartulaire de l'abbaye royale de Notre-Dame de Saintes, éd. abbé Th. Grazilier, Niort, 1871 (« Cartulaires inédits de la Saintonge », 2), n° 4, p. 8. Cf. A. RICHARD, Histoire des comtes de Poitou, Paris, 1903, t. I, pp. 281, 295.

(10) Le mystérieux moine MARTIN, auteur d'un bref récit des premiers temps de l'abbaye Montierneuf à Poitiers, qui devait tant au duc, s'exprime dans les termes dithyrambiques que voici : « Guillelmus, qui et Gaufridus….., nobilissimorum Guillelini et Agnetis, Aquitaniae ducum, heres fuit, regum propinquus, imperatorum cognatus et avunculus, itemque regum socer exstitit.

Gloriosus siquidem Francorum Henricus, et Philippus vêtus, et Guillelmus Anglorum reges et consanguinci proximi fuere; Henricus vero ille, maximus imperator, ejusdem probitatis et honestatis, — adhuc multi supersunt qui recolunt — hujus uterinam sororem, Agnetem nomine, in conjugem sumpsit, de qua genuit Henricum nomine qui, etsi a parentum probitate degeneravit, augustalia tamen sceptra gestavit. Hispaniarum autem reges, Ildefonsus et Petrus, ejus filias in matrimonium se suscepisse gavisi sunt » : Fragmentum historiae monasterii novi Pictavensis, dans Historiens de France, XI, 118-119.

(11) Ordo ad benedicendum ducem Aquitaniae, ibid., XII, 451-453.

(12) M.-Madeleine GAUTHIEH, La légende de sainte Valérie et les émaux champlevés de Limoges, dans « Bulletin de la Société archéologique et historique du Limousin », t. LXXXVI, 1955, pp. 35-80, notamment 74-77.

(13) P. BOISSONNADE, op. cit., p. 56.

(14) Exemple : le prieur GEOFFROY DU VIGEOIS en sa chronique, parlant de l'avènement de Richard Cœur de Lion en Aquitaine (1170), s'exprime comme suit : « Apud Sanctum Hilarium Pictavis, dominica post Pentecosten, juxta consuetudinem in abbatis sedem elevatur, sed a Bertranno Burdegalensi et Joanne praesulibus lancea ei cum vexillo praebetur…. Procedenti tempore Richardus Lemovicas veniens in urbe cum processione suscipitur, annulo sanctae Valeriae decoratur novusque dux ab omnibus proclamatur » (dans Histor. de Fr., XII, 442-443).

(15) La meilleure mise au point nous semble être, à l'heure actuelle, celle de Hartmut HOFFMANN, Franzôsische Fürstenweihe des Hochmittelalters, dans « Deutsches Archiv für Erforschung des Mittelalters », t. XVIII, 1962. pp. 92-119.

(16) « Rex Francorum ausus est eum provocare ad certamen, sed hoc ei mandavit : Quis te comitem mandavit ? Et Adelbertus remandavit ei : Quis te regem constituit ? » (ADÉMAR DE CHABANNES, Chronicon, éd. J. Chavanon, Paris, 1897 [« Coll. textes p. serv. à l'ét. et à l'enseign. de l'hist. », 20], p. 156; cf. Edmond POGNON, L'an mille, Paris, 1947 [« Mémoires du passé Pour servir au temps présent »], p. 175).

(17) « Signum Widonis, quem Gausfridum cognominabamus, abbatis nostri. Signum Agnetis genitricis ejus » (novembre 1058). — « Dominus meus abbas Gosfridus et ego [Goscelinus, beati Hylarii tessaurarius], et omnes canonici beati Hylarii eam [cartam] nostris manibus firmavimus » (1067) : Documents pour l'histoire de l'église de Saint-Hilaire de Poitiers, éd. L. Redet, Poitiers, 1847 (« Mémoires de la Société des Antiquaires de l'Ouest », 1" s., 14), n° 81, p. 89: 83, p. 90.

(18) Sidney PAINTER, Feudalism and Liberty, Baltimore, 1961, pp. 19-20.

(19) Dans Histor. de Fr., XI, 32-33; cf. A. FLICHE, Le règne de Philippe Ier, roi de France., pp. 2-6; A. RICHARD, Histoire des comtes de Poitou, t. I, p. 277.

(20) Ce prélat simoniaque devait être déposé en 1067 avec l'approbation du duc, cf. infra, p. 359.

(21) « Balduinus, comes Flandriae, quasi interrex in regno judicat, salva fidelitate Philippi pueri régis; huic vero magnum decus intervenit gloriae, nam comes Tietbaldus, Andegavensis comes, et omnes Galliae optimates, salva fide Philippi régis, juraverunt fidelitatem et honorem regni » : Annales Elnonenses minores, dans Monum. Germ. histor., script., V, 20. Aucun document ne vient contredire cette assertion en ce qui concerne le comte de Poitou, cf. FLICHE, op. cit., p. 10.

(22) Le 1er septembre 1067.

(23) Livrée contre Robert le Frison (Genealogiae comitum Flandriae, dans Monum. Germ. histor., script., IX, 322; cf. FLICHE, p. 256.

(24) Chronicon Sancti Maxentii, éd. Marchegay /Mabille (supra, p. 340, n. 3), pp. 404-405.

(25) Cf. Karl Jordan, dans Bruno GEBHARDT et H. GRUNDMANN, Handbuch der deutschen Geschichte, 8e éd., t. 1, Stuttgart, 1954, p. 252.

(26) « Philippum, latinae Franciae rectorem, multis pollicitationibus sollicitat, ut antiquae memor amicitiae sibi, quandocumque vocatus fuerit, in auxilium veniat; sed ille, similiter a suis accusatus et pene paterno solio depositus, vix suum honorem, cui adhuc haerebat, se dixit retinere, nedum isti suum, a quo penitus ceciderat, temptaret reponere. Willehalmum, gentis anglicae regem, hac conditione suum vocavit in auxilium, ut ei vicem redderet aequaln, si se umquam haberet necessarium; ille vero respondit se terram illam bellorum violentia pervasisse, et ideo, si reliquerit eam, ne posthac recipiatur in ea, formidare. Willehalmum, ducem Pictavorum, matris suae germanum, sororis suae filio rogavit misereri, sibique ferre auxilium, quo posset in regnum patris sui, quo careret injuste, restitui; at ille tanta Francigenarum, Nortmannorum vel Aquitanorum virtutes inter se et illum esse respondit, ut nullo ingenio per tantam fortitudinem cum exercitu transire Potuisset » : BRUNO, De bello saxonico liber, éd. Pertz, Hanovre, 1843 (c Monum. Germ. histor., in usum schol. »), p. 33. Cf. FLICHE, op. cit., p. 330.

(27) Cf. supra, p. 341, n. 10.

(28) Yves RENOUARD, Les institutions du duché d'Aquitaine (des origines a 1453), dans F. LOT/R. FAWTIER, Histoire des institutions françaises au moyen âge, Paris, t. I, 1957, p. 161; Jean RICHARD, Les institutions ducales dans le duché de Bourgogne, ibid., p. 210.

(29) Documents pour l'histoire - de l'église Saint-Hilaire de Poitiers, éd. Redet, n° 84, p. 92; cf. A. RICHARD, Histoire des comtes de Poitou, t. I, p. 378; Robert FAVREAU, Les écoles et la culture à Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers des origines au début du XIIe siècle, dans « Cahiers de civilisation médiévale », t. III, 1960, p. 476.

(30) Y. HENOUARD, op. cit, pp. 162-163.

(31) Patr. lat., CXLI, 1154. Cf. A. RICHARD, op. cit., t. I, pp. 227, 228 et n. 1.

(32) « Relinquens filiam Audeberti comitis, uxorem quam, causa parentelae, aliam, Mateodam vocatam, accepit in conjugio. Duxit uxorem Guido, comes Aldeardim, filiam Rotberti, ducis Burgundiae et neptam Ainrici, regis Francorum, relicta Matode supradicta. » : Chronicon Sancti Maxentii, pp. 400, 404.

(33) Cf. P. BOISSONNADE, Les relations des ducs d'Aquitaine, comtes de Poitiers, avec les Etats chrétiens d'Aragon et de Navarre (1014-1137), dans « Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest », 39 s., t. X, 1934/36, P. 275.

(34) Guillaume « fut un véritable roi de la France centrale. Il étendait sa domination de la Loire et de l'Atlantique aux Cévennes » (?) « et aux Pyrénées. Il renouvelait l'Aquitaine d'Auguste, le royaume wisigoth, le premier duché d'Aquitaine. Il fut, comme Euric, l'un des arbitres de la chrétienté » : Paul COURTEAULT, Histoire de Gascogne et de Béarn, Paris, 1938 (« Vieilles prov. de France »), p. 56.

(35) Charles HIGOUNET, Bordeaux pendant le haut moyen âge, Bordeaux, 1963 (« Histoire de Bordeaux », 1), p. 56; cf. A. LUCHAIRE, Les premiers Capétiens (987-1137), p. 72. — La Gascogne, par incorporation à l'Aquitaine, entrait-elle dans le ressort du roi de France ? Sur la délicate question de la « Gascogne allodiale », utile mise au point d'Y. RENOUARD, op. cit., p. 160, n. 5.

(36) Cartulaire de l'église collégiale de Saint-Seurin de Bordeaux, éd. A. Brutails, Bordeaux, 1897, n" 12, p. 13; cf. HIGOUNET, loc. cit.

(37) Emile A. VAN MOE, L'Apocalypse de Saint-Sever, ms. lat. 8878 de la Bibliothèque Nationale (XIe siècle), Paris, 1943.

(38) « Pictaviensium nobilissimo comite Aquitaniam et totam Vasconiam gubernante » : Cartulaire du prieuré de Saint-Mont, éd. J. de Jaurgain, Paris/Auch, 1904 (c Archives historiques de la Gascogne » ), n° 11, p. 25; cf. HIGOUNET, loc. cit.

(39) HIGOUNET, p. 55. — C'est depuis la désignation de Josselin que les seigneurs de Parthenay prirent de nom de Larchevêque, cf. S. PAINTER, Feudalism and Liberty, p. 34.

(40) Reto R. BEZZOLA, Les origines et la formation de la littérature courtoise en Occident (500-1200), IIe p. : La société féodale et la transformation e la littérature de cour, Paris, 1960 (« Bibliothèque de l'Ecole des Hautes études », 313), pp. 253-254. C'est nous qui soulignons.

(41) « Tunc cepit castrum Lucionense et monasterium Sanctae Mariae virginis, quod est in eodem castro, combussit, multosque homines ac feminas in eo extinxit » : Chronicon Sancti Maxentii, éd. Marchegay/Mabille, p. 404. (f. Léon PALUSTRE, Histoire de Guillaume IX, duc d'Aquitaine, Poitiers, 1880 .; Mémoires Soc. Antiq. Ouest », 2e s., 3), p. 145; LUCHAIRE, op. cit., p. 72; Jean VERDON, Intérêt archéologique du « Chronicon Sancti Maxentii », dans « Cahiers de civil, médiév. », t. III, 1960, p. 358.

(42) RICHARD, Histoire des comtes de Poitou, t. I, p. 278; PAINTER, op. cit., p. 51.

(43) RICHARD, p. 301; Paul DUCOURTIEUX, Histoire de Limoges, Limoges, 1925, p. 43; R. LIMOUZIN-LAMOTHE, Le diocèse de Limoges des origines à la fin du moyen âge, Paris, 1951, p. 73.

(44) « Me nepotem suum ornavit in militem in civitate Andegavis festivitate Pentecostes…., et cominisit mihi Santonicum pagum cum ipsa civitate. … Aetas autem mea decem et septem erat annorum quando me fecit militem » : FOULQUE LE RÉCHIN, Historiae Andegavensis fragmentum, dans Chroniques des comtes d'Anjou, éd. Marchegay/Salmon, Paris, 1856 (« Soc. hist. de Fr. »), P. 379. Cf. Louis HALPHEN, Le comté d'Anjou un XIe siècle, Paris, 1906, p. 134.

(45) Chronicon Sancti Maxentii, p. 402; cf. RICHARD, op. cit., pp. 283-284; HALPHEN, op. cit., p. 136.

(46) Gesta consulum Andegavorum. éd. Halphen/Poupardin (supra, p. 341, n. 7), pp. 59, 64.

(47) « Obsedit Sanctonas civitatem, castris in circuitu positis, et fame et gladio vastavit, usque quo Andegavenses et cives qui in ea erant se cum suis omnibus in manibus tradiderunt » : Chronico S. Maxentii, p. 403.

(48) Le 19 juin 1068 : Chartularium Sancti Jovini, éd. Ch. Grandmaison, Niort, 1854 (« Société de statistique du département des Deux-Sèvres », 17), P. 20; HALPHEN, Le comté d'Anjou, n° 211, p. 304.

(49) « Quae sunt capita honoris Andegavorum consulum » : FOULQUE LE RÉCHIN, op. cit., p. 380.

(50) HALPHEN, op. cit., n° 166, p. 292; René CROZET, L'art roman en Poitou, Paris, 1948, p. 62.

(51) « Judicio Dei, juste omnia judicantis, castrum Salmurum horribili incendio combustum est a Guidone, comite Pictavorum, cum ecclesia Sancti Florentii, Sanctique Johannis Baptistae et Sancti Petri, nihilque penitus remansit de toto suburbio ejusdem castri, cum domibus extra et intra murum degentibus, quod non incenderetur, v. kalendas julii » : Chronicon Sancti Maxentii, p. 404; texte rectifié. Il s'agit, semble-t-il bien, de la destruction de trois sanctuaires, non d'un seul comme le paraît suggérer J. VERDON, Intérêt archéologique du « Chronicon Sancti Maxentii » (supra, p. 11, n. 41), p. 358.

(52) Auguste LONGNON, La formation de l'unité française, Paris, 1911, pp. 71-72.

(53) « Qui Guillelmus apud Burdegalain occidit circa centum milites nobiles per traditionem, qui erant de exercitu Goffridi ducis. Qui traditionem ipsam non potuit diu sustinere, sed cum omnibus obtimatibus suis calumpniatus est eam, veniens ad Tolosam, et vastavit eam in circuitu, et cepit » : Chronicon S. Maxentii, p. 401.

(54) L'histoire de Toulouse avant 1073 est particulièrement pauvre en documents, cf. Philippe WOLFF, Histoire de Toulouse, 2e éd., Toulouse, 1961, Pp. 51-52.

(55) Sur ces faits, consulter RICHAHD, Histoire des comtes de Poitou, t. I, P- 272; HALPHEN, op. cit., p. 78; M. DE BOUARD, Guillaume le Conquérant, PP. 46-50.

(56) Herbert mourut en mars 1062; les Normands envahirent le Maine année d'après.

(57) « Galli namque et Britones, Pictavini et Burgundiones aliique populi cisalpini ad bellum transmarinum convolarunt » : ORDERIC VITAL, Historia ecclesiastica, éd. Le Prévost/Delisle, t. II, p. 125; cf. Gesta Ambaziensium dominorum, dans Chroniques des comtes d'Anjou, éd. Marchegay-/Salmon, p. 174.

(58) BOISSONNADE. Histoire de Poitou, p. 55

(59) « Stipendio ipsius millia militum quinquaginta alebantur » : GUILLAUME DE POITIERS, Gesta Guillelmi ducis Normannorum et regis Anglorum, éd. Raymonde Foreville, Paris, 1952 (« Classiques de l'histoire de France au moyen âge », 23), p. 150.

(60) Moins de 7.000 hommes, y compris les gens de pied, proposait Ferd. LOT, L'art militaire et les armées au moyen âge, en Europe et dans le Proche-Orient, t. I, Paris, 1946 (« Bibliothèque historique Payot »), p. 285.

Estimation un peu moins faible chez DE BOÜARD, op. cit., p. 84. Notons que l'auteur du Chronicon Sancti Maxentii, pour une fois prudent, avait écrit : « Fertur habuisse in exercitu suo xiiij. milia hominum » (p. 403).

(61) « Institerunt eis Cenomannici, Franci, Britanni, Aquitani, et miserabiliter pereuntes cadebant Angli. Interfuerunt huic praelio. Haimericus Toarcensis praeses…. » : ORDERIC VITAL, éd. Le Prévost/Delisle, t. II, pp. 147-148. Cf. GUILLAUME DE POITIERS, op. cit., p. 196.

(62) Ibid., p. 218; cf. H. IMBERT, Notice sur les vicomtes de Thouars de la famille de ce nom, dans « Mémoires de la Soc. des Antiq. de l'Ouest », 1re s., t. XXIX, 1864, p. 347.

(63) WACE, Roman de Rou, éd. Fr. Pluquet, Rouen, 1827, t. II, p. 194 (v. 12695/98).

(64) Transmis par H. IMBERT, op. cit., p. 348.

(65) Dans The Bayeux Tapestry, A Comprehensive Survey, publ. sous la direct, de Sir Fr. Stenton, Londres, 1957, l'article de G.W. DIGBY, Technique and Production (pp. 37, 46) cite quelques exemples de travaux analogues à la fin du XIe siècle, mais rien qui concerne l'Aquitaine.

(66) Qu'Alexandre II ait encouragé l'expédition, c'est certain; mais elle ne fut à aucun titre, en dépit des affirmations tranchantes de Boissonnade, une « croisade », car aucun des caractères juridiques de la condition de croisé n'y apparaît pour les participants. Cf. Michel VILLEY, La croisade; essai sur la formation d'une théorie juridique, Paris, 1942 (« L'Eglise et l'Etat au moyen âge », 6), pp. 64 et suiv.

(67) R.R. BEZZOLA, La société féodale et la transformation de la littérature de cour, p. 261.

(68) Cf. supra, p. 348.

(69) Pr. BOISSONNADE, Du nouveau sur la « Chanson de Roland », Paris, 1923, p. 23; Aug. FLICHE, La réforme grégorienne et la reconquête chrétienne (1057-1123), Paris, 1940 (« Histoire de l'Eglise », Fliche/Martin, 8), p. 51; et surtout Marcelin DEFOURNEAUX, Les Français en Espagne aux XIe et XIIe siècles, Paris, 1949, p. 132.

(70) « Barbastam civitatem nomini christiano, cunctis qui erant in ea prius perditis, adquisivit » : Chronicon Sancti Maxentii, éd. Marchegay/ Mabille, p. 403.

(71) Cf. supra, pp. 349, 340.

(72) Les extraits du texte de Ibn Hayyan concernant ces événements sont contenus dans R. Dozy, Recherches sur la littérature et l'histoire de l'Espagne pendant le moyen âge, 3e éd., Leyde, 1881, t. II, pp. 332-371.

(73) Chiffre, bien entendu, aussi conventionnel que ceux qui ont été discutés supra, p. 354.

(74) « Exercitus multus a Gallis. …ad debellandos Sarracenos proficiscitur, sed, omni regione a Sarracenis vastata, urgente fame inefficax revertitur » : Chronicon Sancti Martini Turonensis, dans Historiens de France, XII, 461-462. Cf. A. FLICHE, Le règne de Philippe Ier, p. 31; M. DEFOURNEAUX, op. cit., p. 134; Ramôn MENÉNDEZ PIDAL, La Espana del Cid, Madrid, 1929, t. I, pp. 165-167.

(75) « …..Multam et variam supellectilem….. multaque mancipia - adducunt » : Fragmentum historiae Francorum, dans Histor. de Fr., XII, 162. Sur l'esclavage des musulmans en Aragon à cette époque, consulter Ch. VERLINDEN, L'esclavage dans l'Europe médiévale, t. 1 : Péninsule ibérique, France, Bruges, 1955 (« Rijksuniversiteit Gent, Werken uitgegeven door de Faculteit van de Letteren en Wijsbegeerte », 119), pp. 130-136.

(76) C'est ce que suggère DEFOURNEAUX, op. cit., p. 134, n. 1.

(77) Le siège de Barbastre, chanson de geste du XIIe siècle, éd. J.-L. Perrier, Paris, 1926 (« Classiques français du moyen âge », 54). Cf. DEFOURNEAUX, pp. 265-266.

(78) Cartulaire de l'abbaye royale de Notre-Dame de Saintes, éd. Grazilier, n° 12, p. 23.

(79) Ibid., n° 229, p. 150 (« Tempore Willelmi comitis, qui Barbastam civitatem Sarracenis abstulit »); Cartulaire de l'abbaye de Saint-Cyprien de Poitiers, éd. Redet, Poitiers, 1874 (« Archives historiques du Poitou », 3), n° 569, p. 333 [« Acta sunt hec tempore quo cornes Pictaviensis cepit Barbastam »]. Ces divers actes furent mentionnés par RICHARD, Histoire des comtes de Poitou, t. I, pp. 292-293.

(80) Il s'agit, par exemple, d'une porte nord à l'église Saint-Médard de Thouars, cf. R. CROZET, L'art roman en Poitou, p. 140 et pl. 17.

(81) Excellent résumé de la question dans H. DAVENSON, Les troubadours, Paris, 1961 (« Le temps qui court »), pp. 115 et suiv.

(82) A ce propos, voir M. L. BULST-THIELE, Kaiserin Agnes, Leipzig, 1933 (« Beitrâge zur Kulturgeschichte des Mittelalters und der Renaissance », 52), notamment p. 110; BEZZOLA, Les origines et la formation de la littérature courtoise en Occident, 1re p. : La tradition impériale, de la fin de l'antiquité au XIIe siècle, Paris, 1944 (« Biblioth. de l'Ec. des Hautes Etudes », 286), p. 293; Owen J. BLUM, Saint Peter Damian : His Teaching on the Spiritual Life, Washington, 1947 (« Catholic University of America, Studies in Mediaeval History », n.s., 10), pp. 39, 164, 193.

(83) RICHARD, Op. cit., p. 303.

(84) Cf. supra, p. 346.

(85) Sur tout ceci, on se référera essentiellement à Guy DE VALOUS, Le monachisme clunisien des origines au XVe siècle; vie intérieure et organisation de l'Ordre, Ligugé/Paris, 1935 (« Archives de la France monastique »), passim.

(86) Chroniques de Saint-Martial de Limoges, éd. Duplès-Agier, p. 48; cf. FLICHE, Le règne de Philippe Ier p. 463; LIMOUZIN-LAMOTHE, Le diocèse de Limoges des origines à la fin du moyen âge, p. 108.

(87) Le 11 mai 1070, « dominus Gauterius, abba et canonicus ecclesiae Sancti Petri Stirpensis, dormivit in pace aeterna » : Chronicon Sancti Maxentii, éd. Marchegay/Mabille, p. 405.

(88) Cf. dom Jean BECQUET, Saint Etienne de Muret et l'archevêque de Bénévent Milon, dans « Bull. de la Soc. archéol. et histor. du Limousin », t. LXXXVI, 1957, pp. 403-409.

(89) R. CROZET, op. cit., p. 65.

(90) Yvonne LABANDE-MAILFERT, Poitou roman, La Pierre-qui-vire, 1967 (« La nuit des temps », 5), p. 32.

(91) CROZET, Op. cit., pp. 13, 65, 67.

(92) Quelques exemples parmi beaucoup d'autres : « acier » (Mort Aimerg de Narbonne, éd. J. Couraye du Parc, Paris, 1884 (« Société des anciens textes français »), vers 2810; — « brant » (Gaufrey, chanson de geste, éd. F. Guessard/P. Chabaille, Paris, 1859 [« Anciens poètes de la France »], v. 3064); — « espié » (Mort Aimery, v. 1342); — « heaume » (A. TOBLER, Aus der Chanson de geste von Auberi., Leipzig, 1870, p. 182). L'enquête peut être poursuivie à l'aide de Ern. LANGLOIS, Table des noms propres de toute nature compris dans les chansons de geste imprimées, Paris, 1904, VO Poitevin, Poitevinois. Mais le grand problème reste de dater ces textes.

(93) Par un acte du Cartulaire du prieuré de Saint-Nicolas de Poitiers, éd. Redet, Poitiers, 1872 (« Arch. histor. du Poitou », 1), n° 26, p. 32. Commentaire dans A. HÉRAULT, Histoire de Châtellerault, t. I, p. 46.

(94) Texte dans Histor. de France, X, 484, cf. 501. Signalé par Mgr E. LESNE, Histoire de la propriété ecclésiastique en France, t. III, Lille, 1936, pp. 249-250.

(95) Cf. supra, p. 360.

(96) E. LESNE, op. cit., t. IV, 1938, pp. 105-106, 365, 504.

(97) Jacques CHAILLEY, L'école musicale de Saint-Martial de Limoges jusqu'à la fin du XIe siècle, Paris, 1960.

(98) Tel le ms. B.N. lat. 9435. Cf. LESNE, op. cit., t. IV, p. 508.

(99) Supra, p. 343.

(100) Notamment le ms. B.N. suppl. gr. 8, contenant des œuvres de saint Jean Damascène et de divers autres Pères; s'il n'est pas assuré qu'il ait été copié à Saint-Hilaire, il appartint à cette communauté.

(101) R. FAVREAU, Les écoles et la culture à Saint-Hilaire-le-Grand de Poitiers (supra, p. 345, n. 29), p. 473. Cf. LESNE, op. cit., t. IV, p. 508.

(102) L. PALUSTRE, Histoire de Guillaume IX, duc d'Aquitaine, p. 158 et n. 1.

(103) « Quia Pictavis fonte philosophico ubertim imbutus est » : ORDERIC VITAL, Historia ecclesiastica, éd. Le Prévost/Delisle, t. II, p. 217. — Guillaume de Poitiers acheva de rédiger les Gesta peu après 1070.

(104) « Tanta pace tune regnum Aquitanie potiebatur, ut numquam auditum sit uspiam viatorem aut ruricolam eo venientem disturbatum fuisse » : MARTIN DE MONTIERNEUF, Fragmentum historiae monasterii novi Pictavensis (supra, p. 341, n. 10), p. 120.

 

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