John_William_Waterhouse_-_Fair_Rosamund

La belle Rosemonde (suivant les Historiens Anglais av. 1140-1176), fille du Mylord Clifford, fut de toutes les Maîtresses de Henri II, Roi d'Angleterre (1), celle qu'il aima le plus, et qui excita le plus la jalousie de son épouse (2).

Aliénor cette fière Princesse, avait, à cette époque, cinquante ans, des grossesses fréquentes, de fréquents voyages, tels surtout qu'on les faisait en ce temps-là, n'aident pas à la conservation de la beauté. Eléonore ne pouvait souffrir que le Roi, beaucoup plus jeune qu'elle, eût des galanteries qui lui dérobaient son cœur: elle croyait que la dot qu'elle lui avait apportée, était d'un assez grand prix pour l'obliger à lui être fidèle.

Rosemonde était une de ces figures qu'on ne peut voir sans en être touché, et elle avait, sur toutes les Beautés de l'Angleterre, l'empire qu'a la Rose, dont elle portait le nom, sur les autres fleurs.

 - Il ne faut donc pas s'étonner si Henri, dont le cœur n'était que trop susceptible, se sentit enflammé pour elle, ni si la jalouse d'Eléonore employa tout pour faire périt une si dangereuse rivale.

« Elle lui inspira la plus fougueuse passion. Pendant des années il l'adora, la comblant de tendresse et de présents.

La liaison débuta probablement vers 1165, durant une de ses campagnes galloises et  devint publiquement reconnue par le roi en 1174, après la révolte de ses fils.

Rosemonde lui donna deux fils Geoffroy Plantagenêt (1151-1212), archevêque d'York, et Guillaume de Longue-Épée (1180-1226), comte de Salisbury  et d'habiles caresses puis, comme il se faisait- vieux et qu'elle était très jeune, jolie et fort courtisée, il en devint jaloux et résolut de la claustrer.

 Le Roi lui fit bâtir un château, qu'il ne crut accessible qu'à lui seul, dont les avenues formaient des labyrinthes aussi ingénieux et aussi entrelacés que celui de Dédale ; d'ailleurs environné d'un charmant paysage, coupé par des canaux multipliés de la façon la plus agréable à l'œil, où rien enfin ne fut épargné, tant pour en faire un asile sûr, qu'une délicieuse solitude où sa chère Rosemonde pût ne pas s'ennuyer.

Mais, qui peut longtemps tromper la vigilance d'une femme jalouse !.

Aussi la Reine ne tarda-t-elle pas à trouver le moyen de pénétrer dans ce château, et de sacrifier à son ressentiment, l'objet de la tendresse de son époux.

La ravissante blonde était encore au lit ; l'épouse outragée l'empoigna violemment par ses cheveux dénoués et transperça de son épée le beau corps impur de la maîtresse de son époux ; puis elle s'en revint par le même chemin

Henri, désespéré de la mort de son amante, ne trouva d'autre objet de consolation, que celui de lui faire ériger un superbe tombeau, et qu'il prit encore soin de dérober à la vue de la vieille Eleonore.

Ce fut dans le Monastère des Religieuses de Godstow entre Oxford et Woodstock, où on la voyait, au milieu du choeur, sous un dais magnifique, environné de cierges de cire Planche, et qui brûlaient jour et nuit.

Les Religieuses seules savaient quel était ce dépôt que le Roi leur avait confié, et le secret en fut gardé tant que Henri vécut.

 

Je dois signaler que cette version dramatique a été contestée par plusieurs historiens, les coups portés par Aliénor n'auraient pas été mortels et Rosemonde aurait encore survécu dix-huit ans et ne serait morte qu'en 1176, alors qu'Henri Il l'avait déjà, depuis longtemps, oubliée et remplacée.

En l'absence de documents certains, il est difficile de prendre parti.

«Henri, » dit M. Henri Martin,  « qui savait la Reine capable de tout, avait construit en forme de labyrinthe le château de Woodstock, pour y cacher sa principale maîtresse, la belle Rosamonde.

Eléonore pénétra, dit-on, dans les détours de Woodstock, et poignarda ou empoisonna Rosamonde de sa propre main. »

 Pour accepter cette assertion, il faut d'abord écarter les témoignages de Girald de Cambrai, de Henri de Knighton et de Jean Bromton, qui s'accordent à dire qu'après l'incarcération de la Reine, Henri II vécut publiquement en adultère avec Rosamonde.

Ils n'en font qu'un à la vérité, car l'un d'eux copie l'autre, et un de peu de valeur. Mais encore est-il un peu plus grave que la ballade qu'on leur préfère.

Pour savoir que Woodstock était bâti avant la naissance de Rosamonde, il ne faut qu'avoir lu le roman de Walter Scott, lecture d'une érudition peu ardue.; mais cette question me semble toute jugée par ce fait, qu'en 1173 il y avait plus de vingt ans que Rosamonde était la maîtresse de Henri qu'étant encore duc de Normandie, c'est-à-dire un peu avant ou un peu après son mariage, il en avait eu deux enfants Guillaume, surnommé depuis Longue-Épée, et Geoffroy, déjà évêque de Lincoln à l'époque dont nous parlons, et que ces fils avaient été élevés à côté des fils d'Eléonore.

Quels témoignages faudrait-il pour faire admettre qu'une tolérance de vingt ans s'est changée tout à coup en une jalousie homicide? Il n'y en a pas un. Le plus sûr est de dire, avec Hume, que tout dans cette histoire de la belle Rosamonde est fabuleux.

Il en faut dire autant, j'espère, des autres sujets qu'on prête à la jalousie d'Aliénor. Henri avait alors sous sa garde, selon l'usage du temps, les deux filles du roi de France, fiancées, au berceau, avec ses fils Henri et Richard.

Selon Larrey, « Henri ayant oublié qu'il devait être le beau-père de la princesse Marguerite était devenu son amant ». Cela s'appuie sur un passage de Jean d'Ipres, écrit au XIVe siècle et à côté d'une erreur manifeste.

Selon Bromton, suivi en cela par le P. d'Orléans, Henri, après la mort de Rosamonde, déflora Alix de France, fiancée en 1169 à son fils Richard, et ce fut la cause que Richard allégua plus tard en refusant de ratifier le mariage projeté.

On ajoute qu'il se proposait de faire prononcer son divorce avec Aliénor, pour épouser cette enfant. Cette hypothèse admise, qui oserait blâmer, non plus la jalousie, mais la trop juste indignation d'Aliénor contre le misérable qu'elle aurait eu pour mari? Mais j'ai déjà montré ce que valent les autorités alléguées Marguerite avait, en 1172, au plus quatorze ans; Alix, au plus douze, et bien que Richard ait, quinze ans plus tard, établi, par plusieurs témoins, que celle-ci avait eu un enfant de son père, ces infamies n'ont, au moins à ce moment, rien de vraisemblable, ce qui n'implique pas que Henri ne se permît pas des infidélités moins criminelles, ni qu'Aliénor les supportât patiemment.

Quoi qu'il en soit, cette sanglante aventure désunit définitivement le ménage royal et c'est ainsi qu'Aliénor incita son fils, Richard Cœur de Lion, à se coaliser avec le roi de France contre le roi d'Angleterre.

En 1191, deux ans après la mort du roi, Hugues, l'évêque de Lincoln, de passage à Godstow, , en fit part à la Reine, qui, sous prétexte du scandale que pouvait causer un Monument de cette espèce, engagea le Prélat à le faire détruire, il se décide de faire déplacer ses restes.

Ainsi tous les soins de Henri ne purent, ni sauver la vie de son amante, ni mettre son tombeau à l'abri de la vengeance de sa femme !

 

 

 

La Place, Pierre-Antoine

Revue d'Aquitaine : scientifique et littéraire / réd. en chef J. Demolliens

 

 

 

 

 <==.... ....==>25 décembre 1169 : Henri II Plantagenêt tient sa cour de Noël à Nantes où il célèbre les fiançailles de son fils Geoffroy II 

 ==> Sur la Terre de nos ancêtres du Poitou - Aquitania (LES GRANDES DATES DE L'HISTOIRE DU POITOU )

 


 

(1) Mort en 1189 à Chinon inhumé sans l’abbaye de Fontevraud

(2) Eléonore de Guyenne, Princesse aussi impérieuse et aussi vindicative que galante, qui, six semaines après son divorce avec Louis VII, Roi de France, épousa. Henri II, Roi d'Angleterre