Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
PHystorique- Les Portes du Temps
26 décembre 2020

Louis XIII enlève le commandement de Saumur à Duplessis-Mornay

Louis XIII enlève le commandement de Saumur à Duplessis-Mornay

En 1617, le roi Louis XIII évince sa mère Marie de Médicis et exerce personnellement le pouvoir royal. L'une de ses premières décisions est de rendre le libre exercice du culte catholique à tout le Béarn passé à la Réforme protestante sous Jeanne d'Albret.

C'est dans ces circonstances que se réunit à La Rochelle (25 décembre 1620), sans l'autorisation du roi, une nouvelle assemblée politique.

Cependant les protestants n'étaient pas unanimes sur la conduite à tenir en cette circonstance.

Dans une réunion à Niort, le 2 mars 1621, La Trimouille, le duc de Rohan et Soubise se rencontrèrent avec d'autres seigneurs huguenots et avec les représentants de la ville et de l'assemblée de La Rochelle.

 Quant à Duplessis-Mornay, il avait remis à La Trimouille, qui était venu le voir à Saumur, un mémoire qui traçait la marche à suivre dans la conférence et un modèle de l'avis à donner par les grands de la religion à l'assemblée de La Rochelle.

En vain, Rohan, Soubise, La Trimouille voulurent-ils user de leur influence et de celle de Duplessis-Mornay pour décider l'assemblée à se soumettre au roi, ils trouvèrent les délégués de l'assemblée inflexibles.

Entraînés par l'exemple, Soubise, puis La Trimouille, puis Rohan, promirent de prendre part à la lutte (1).

L'assemblée de La Rochelle tâcha d'organiser le parti pour la lutte :

Le royaume fut divisé en huit cercles dont chacun devait obéir à un général et fournir un contingent, d'hommes pour la défense commune.

Le second cercle, comprenant la Bretagne, le Poitou et la ville de l’Ile-Bouchard, était confié à Soubise, frère du duc de Rohan, qui devait commander lui-même dans le Haut-Languedoc et la Haute-. Guyenne.

La Trimouille avait l'Angoumois, la Saintonge et les Iles.

La Rochelle, qui avait rang de province, formait aussi un cercle à part (2).            

 

La guerre ne fut pas heureuse pour les Réformés : le roi accourut de Paris vers le Poitou :

 

Le 11 mai 1621, le jeune Louis XIII (19 ans) venu de Tours par bateau, entre dans Saumur avec ses troupes.

 

13 mai 1621.

Lettre du Roi, mandant au seigneur de La Trimouille, duc de Thouars, de venir le trouver à Saumur ;

A mon cousin le seigneur de La Trimouille, duc de Thouars, pair de France.

Mon cousin, les dezobeissances qui se commectent journellement en ma ville de La Rochelle et en plusieurs autres endroictz, tant par ceulz de l'Assemblée qui y est que par autres de mes subjeetz de la Religion Prétendue Refformée, m'obligent de m'en approcher pour y maintenir et affermir mon auctorité et chastier ceulz qui demeureront en leur rébellion.

 Et sachant la bonne intention que vous avez toujours tesmoignée en mon endroit sur ces occurrences, j'auray à plaisir que vous me veniez trouver en ce lieu, où je vous feray paroistre le bon gré que je vous en sçay et la différence que je faiz de ceulz qui se contiennent en leur devoir aux autres.

 Venez donc au plus tost, et vous asseurez que je vous verray bien volontiers.

Sur ce je prie Dieu, mon cousin, qu'il vous ayt en sa saincte garde.

Escrit à Saumur, le XIII  jour de may 1621.

LOUIS.

Phelypeaux.

 

 

Au passage, il enleva à Duplessis-Mornay le commandement de Saumur, sans doute pour le récompenser de son opiniâtre fidélité à sa personne (3).

Louis XIII proposa à Mornay de remettre son gouvernement pour cent mille écus et le bâton de maréchal. Mais il répondit fièrement qu’il n’avait tenu qu’à lui d’avoir des millions ; qu’il s’était toujours montré jaloux de mériter les charges, que de les obtenir, comme tant d’autres, par des importunités et des bassesses, et qu’il ne pouvait se résoudre à vendre la liberté et la sureté de ses concitoyens.

Le roi lui ordonna cependant de céder pour trois mois le commandement de la place. Il obéit, mais, on oublia de le rappeler. Il se retira alors dans sa baronnie de la Forêt sur Sèvre, près de Bressuire en Poitou, où il mourut le 11 novembre 1623.

Mornay jouit pendant toute sa vie d’une grande réputation en France, chez les étrangers, et surtout parmi les protestants, dont il fut pour ainsi dire le chef. Diplomate intègre, bon capitaine, il était aussi écrivain distingué, et a laissé un assez grand nombre d’ouvrages fort estimés.

 

L'ancien manoir de La Forêt fut bâti originairement dans une île de la Sèvre Nantaise.

Placé au milieu d'un jardin paysager, et quoique un peu gâté aujourd'hui par une restauration à la moderne faite en 1820, il se présente encore de la façon la plus pittoresque aux regards du voyageur qui suit la route de Saumur à La Rochelle et arrive par Bressuire ou par La Châtaigneraie.

Après être resté longtemps dans la maison des Jaucourt, descendants de Du Plessis-Mornay, il a passé au marquis de La Rochejaquelein, puis, en 1830, au comte-Gérard de Rohan-Chabot.

« Le tombeau de Du Plessis-Mornay, de sa femme et de son fils était placé tout près du château de La Forêt, et on le voyait là encore il y a un peu plus d'un demi-siècle.

Mais (le croirait-on?) quelques années avant la révolution de 1789, le propriétaire, poussé par un sordide intérêt, après avoir fait ouvrir les tombeaux et enlever les corps du cercueil, fit fondre ces mêmes cercueils, afin d'en employer le plomb aux couvertures du château!..»

Ces déplorables détails sont extraits textuellement d'une brochure rarissime, publiée en 1842 par M. de La Fontenelle de Vaudoré et que nous avons eu beaucoup de peine à nous procurer (4).

On sait en quelles circonstances douloureuses Du Plessis-Mornay avait quitté son gouvernement de Saumur, en 1721, lorsque le roi Louis XIII voulut se servir de cette place de sûreté avant d'aller exterminer les huguenots rebelles à Montauban.

 On sait comment le mensonge et la ruse triomphèrent de la bonne foi de Mornay.

On sait aussi qu'il en mourut de chagrin. Voici la lettre magnifique que le vieux serviteur de la royauté écrivait, l'âme brisée, le 14 février 1622, de ce château de La Forêt-sur-Sèvre.

On va voir si à plus d'un titre, elle est bien ici en son lieu et place.

« De La Forêt-sur-Sèvre, le 14 février 1622.

« Sire,

 « Puisqu'il est résolu, pour le bien prétendu du service de Votre Majesté, que mon obéissance et fidélité me tournent à crime et à supplice, et le loyer et la louange que j'en eusse dû attendre, à ignominie ; je supplie très-humblement Votre Majesté de me vouloir au moins octroyer qu'avec sa bonne grâce et son sauf-conduit je me puisse retirer hors de ce royaume avec ma famille; de l'accorder pareille aussi à M. de Villarnould, mon gendre, enveloppé en même cause.

Pareillement, de pouvoir transporter hors de Saumur les os des miens, pour n'être exposé à la rage d'un si ingrat peuple.

Là, Sire, soustrait aux objets qui trop justement affligent mon âme, je prierai Dieu qu'il lui plaise faire prospérer de plus en plus la personne et couronne de Votre Majesté, pardonner aux auteurs de ces conseils plus nuisibles à ses affaires qu'à moi-même, et pour adoucir mes amertumes, me faire oublier que je suis né Français.

« Et peut-être, Sire, se trouvera-t-il quelqu'un qui grave sur ma tombe ce misérable épitaphe: Cy-gist, âgé de soixante et treize ans, après en avoir employé sans reproche, les quarante et six au service de deux grands rois, fut contraint pour avoir fuit son devoir, de chercher son sépulchre hors de sa patrie. Juge, lecteur, et déplore, soit son malheur, soit la malice du siècle.

« Signé : PHILIPPE DE MORNAY. »

Le 3 novembre 1623, il dictait à ses secrétaires un deuxième codicille du testament qu'il avait fait dès longtemps, en 1606, en commun avec son admirable femme, Charlotte-Arbaleste.

Nous en extrayons, les lignes que voici :

« .Pour nos corps, nous en avions ordonné par notre commun testament. Mais d'autant que l'estat de la ville de Saumur est grandement altéré, et que le peuple de contraire religion au dit lieu s'est montré extrêmement animé contre nous sans nul sujet; outre que nous avons depuis acquis la baronnie de La Forest en Poictou; j'ordonne que les corps de ma femme, de mon fils, et autres qui y sont déposés, si ceux à qui ils appartiennent le désirent, soient transportés en ce lieu de La Forest, auquel à cette fin, dans mon château, en lieu par moi choisi, j'ai ordonné être dressée une sépulture. Je scay bien que leur vœu étoit de ne pas séparer ce que Dieu avoit si étroitement conjoinct. Et pour ce qu'il aura plu à Dieu m'appeler, désire y être mis avec eux, et ceux de ma famille qui le voudront ainsi, le tout avec le moins d'apparat que faire se pourra, pour y attendre la bienheureuse résurrection. Ainsi soit-il. »

On lit dans les mémoires de l'Athénée de Niort, séance du 9 floréal an X, que « la tombe de Du Plessis-Mornay, respectée pendant les fureurs de la guerre civile, et (quoique le vieux manoir eût été incendié) s'élevait encore alors sur les bords de la Sèvre.

Mais rien au château de La Forêt-sur-Sèvre, n'indique plus aujourd'hui où reposa le plus illustre de ses possesseurs, dit M. de La Fontenelle de Vaudoré, et comme si l'industrialisme s'était placé là pour faire perdre de vue les chroniques des temps passés, une- minoterie, à construction assez élégante d'ailleurs, a été élevée par les soins du marquis de La Rochejacquelein, et précède l'arrivée à l'ancien manoir.

 

Un éloge de Du Plessis-Mornay et un projet de monument à sa gloire, mis au Concours par l'Athénée de Niort, en 1806 : note lue à l'assemblée générale de la Société de l'histoire du protestantisme français, le 10 mai 1870 signé Charles Réad

 

 

 

Histoire des protestants et des Églises réformées du Poitou (Nouvelle édition, entièrement refondue)  Pierre Dez,...

Bulletin de l'Athénée du Beauvaisis

 

 

Philippe DUPLESSIS-MORNAY (1549-1623), Gouverneur de la place de Saumur  <==

Bataille du Pont de Cé -Château de Brissac, Louis XIII, Marie de Médicis et Richelieu <==....

==> 1621 Lettres de Jean de Fabas envoyé à la Rochelle

....==>Le régiment Royal-Niort créé par Louis XIII par lettres patentes prises au Siège de Saint-Jean-d'Angély le 26 juin 1621.

 

 ==> 5 juillet 1931 Inauguration du médaillon de Duplessis- Mornay au Château de Saumur en présence du député Georges de Grandmaison.

 


 

(1). Briquet : Histoire de Niort, I, p. 364, et surtout Bull. 1875, p. 531 (lettre de Jacques des Nouhes à Duplessis-Mornay).

(2). Histoire de l'Edit de Nantes, II, p. 355.

Les actes de l'assemblée de La Rochelle ont été publiés dans le t. V des Arch. Hist.- Poitou. Voir aussi à ce sujet dans la même collection le t. VIII, p. 165 et suiv. Les députés du Poitou furent : Jonas de Bessay (président mensuel du 25 décembre 1620 et du 25 mai 1621), Jacques Clemenceau, pasteur de Poitiers (président adjoint mensuel du 25 décembre 1620 et du 25 juin 1621, du 22 mars et du 25 octobre 1622), Etienne Chesnevert de la Miltière, André Malleray, Olivier de Saint-Georges, H. Bastard de la Cressonnière (gouverneur de Maillezais).

(3). M. Boissonnade (Histoire du Poitou, p. 223) dit que Duplessis-Mornay livra Saumur au roi.

En réalité, Duplessis-Mornay a accueilli Louis XIII à Saumur et le roi l'a relevé de ses fonctions comme s'il avait commis une faute grave. Il se retira alors dans son château de la Forêt-sur-Sèvre.

(4) Du Plessis-Mornay à La Forét-sur-Sèvre. Brochure in-8° de 38 pages, dédiée par l'auteur « A sa savante cousine, la comtesse Alexandrine Du Montet, née Prévot de la Boutetière-Saint-Mars, arrière-petite-nièce de Du Plessis-Mornay.»

 

Publicité
Commentaires
PHystorique- Les Portes du Temps
Publicité
Publicité