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PHystorique- Les Portes du Temps
29 septembre 2020

Le port de la Meilleraie à Varades, l'Insurrection du 12 mars 1793 à Saint- Florent-le-Vieil

Le port de la Meilleraie à Varades, l'Insurrection du 12 mars 1793 à Saint- Florent-le-Vieil

Depuis 1790, le département de Maine-et-Loire était composé de huit districts : Angers, Baugé, Châteauneuf, Cholet, Saint Florent-le-Vieil, Saumur, Segré et Vihiers.

Le district de Saint-Florent-le-Vieil comprenait les six cantons de Beaupréau, Champtoceaux, Montrevault, La Pommeraye, Sainte Christine et Saint Florent-le-Vieil.

Un décret rendu par la Convention le jour même de sa réunion (22 septembre 1792) avait ordonné le renouvellement de tous les corps administratifs, municipaux et judiciaires. Pour se conformer à ce décret les électeurs du district de Saint-Florent-le Vieil s'étaient réunis au mois de novembre 1792 pour nommer les nouvelles autorités.

Furent élus membres du Conseil général du district : Jacques Hiron, né à Montjean, âgé de 33 ans, René Esprit Richard, âgé de 40 ans, Jean-François Bodin, architecte, Claude-Martin-Toussaint Letort, Jacques René Cadieu. né à Saint-Jean de-la-Motte (Sarthe), âgé de 35 ans, Jacques-François Martin, Symphorien Lebreton, né à Montjean le 4 juin 1761, curé constitutionnel de la Pommeraye, Pierre-Simon Martin, Arçandeau, Fleuriot, Raynau et Du val. — Le procureur-syndic se nommait Joseph Étienne Renou, né à la Pommeraye, le 31 janvier 1740.

Hiron devint président, et les quatre administrateurs du directoire du district furent : Richard, Bodin, Letort et Cadieu.

Ajoutons, pour être complet, que le secrétaire était Gazeau, le trésorier Delaunay, et l'archiviste Crispiel.

On sait que le mardi 12 mars 1793, la ville de Saint-Florent -le-Vieil fut prise par les jeunes gens venus pour le tirage au sort.

Le président Hiron, les quatre administrateurs du directoire du district (Richard, Bodin, Letort et Cadieu), le procureur syndic Renou, un membre du Conseil général du district Duval, ainsi que l'archiviste Crispiel, sautèrent par les fenêtres et cherchèrent un refuge à travers les jardins, et peu après on les trouve tous réfugiés à Angers.

 Un commis du district, Lemotheux, fut tué dans cette journée du 12 mars. Quant au secrétaire du district, Louis Gazeau, il prit parti pour les insurgés.

Trois membres de la municipalité de Saint-Florent-le-Vieil, Michelin, Chicotteau et Potterie, firent de même; deux membres furent tués, Jacob et François Martin; les autres durent se cacher, Oger, Michel-François Le Febvre, François Gaultier, procureur de la commune, Souvestre, greffier de la municipalité.

Nous avons dit que le président du district, les quatre administrateurs du directoire, un membre du Conseil général, le procureur syndic et l'archiviste se réfugièrent à Angers.

A la date du 24 avril 1793, ils rédigèrent en cette ville un procès-verbal concernant l'insurrection du 12 mars à Saint-Florent-le-Vieil. Nous le reproduisons in extenso (2) :

 

Nous, administrateurs du directoire et membres du conseil du district de Montglonne, soussignés, certifions que, le 11 mars dernier, jour où nous commençâmes à faire exécuter le recrutement relatif au contingent, que nous devions fournir sur la levée des 300.000 hommes, décrétée par la loi du 24 février, le citoyen Hiron, domicilié de Mont jean et président du conseil de notre district, nommé par nous commissaire à l'effet de procéder à cette levée dans le canton de Sainte-Christine (3), vint le matin nous annoncer qu'il avait la veille proclamé la loi relative à cet objet dans les communes de Sainte-Christine et de Neuvy, où le peuple rassemblé avait, à la proclamation de cette loi, manifesté un mécontentement général; que lui, commissaire, avait bien dit à ce peuple tout ce qu'il croyait le plus propre à le calmer et à lui faire sentir les dangers de se refuser à l'exécution de la loi, mais que néanmoins il craignait de rencontrer de grands obstacles dans l'objet, de sa mission.

Après nous avoir fait cette déclaration, il repartit pour se rendre dans les communes du Pin et de Saint-Quentin à l'effet d'y continuer la même opération.

Les inquiétudes que nous donna cet avis, de concert avec le citoyen Tessier, administrateur du département et commissaire envoyé vers nous à l'effet de procéder au recrutement, ainsi que la municipalité et le conseil général de la commune du Montglonne (4) qui s'était réuni à nous, nous déterminèrent à en instruire sur-le-champ le département, vers lequel nous députâmes le citoyen Vallée, curé constitutionnel de Montglonne, pour demander des forces capables d'assurer l'ordre et l'exécution de la loi ; nous dépêchâmes aussi sans différer des courriers à Montrevault, Beaupréau, Mont jean, Chalonnes, Varades et Ancenis, à l'effet d'en obtenir promptement des secours en hommes d'armes.

Tous ces endroits, excepté le département, qui n'avait pu dans le jour nous faire parvenir sa réponse, nous annoncèrent que craignant pour eux-mêmes ils ne pouvaient nous offrir aucun secours.

Sur les 2 à 3 heures du soir, environ 1500 insurgés fondirent sur Varades et menaçaient de tout ravager; les patriotes de ce bourg accoururent promptement nous demander des secours.

A l'instant nous requîmes la force armée du Montglonne ; la générale fut de suite battue, et, en très peu de temps, toute la garde nationale réunie nous forma une petite armée d'environ 150 hommes, dont 60 armés de fusils et le surplus de piques.

Nous fîmes promptement passer la rivière à un détachement de 50 hommes, commandés par le citoyen Letourneau.

 

Ce détachement se rendit jusqu'au cours d'eau qui sépare la Meilleraie du bourg de Varades, où il se trouva arrêté parce que la barque qui sert à ce passage avait été coulée à fond par les insurgés.

Là, après une fusillade d'environ une demi-heure entre ce détachement et les insurgés, ces derniers disparurent, et le détachement rentra au Montglonne.

Nos inquiétudes croissant en raison des événements, nous requîmes que la garde nationale se tint sous les armes jusqu'au lendemain, que deux petites pièces de canon que nous avions fussent placées de manière à assurer la défense de l'administration, ce qui fut exécuté.

Des émissaires que nous avions répandus dans les environs, vinrent dans la soirée nous instruire qu'il se faisait des rassemblements à la Meilleraie., au Mesnil, à Saint-Laurent, la Boutouchère, Botz et la Chapelle. Nous en conçûmes les plus grandes craintes, malgré que les perfides endormeurs Michelin, Chicoteau et Potterie, alors officiers municipaux et aujourd'hui chefs des révoltés, s'efforçassent de nous tranquilliser, en nous disant que ces rassemblements n'avaient pour objet que le mode à adopter dans le recrutement qui devait s'effectuer le lendemain au Montglonne ; que d'ailleurs, ils connaissaient parfaitement ce peuple naturellement criard, mais timide et incapable de se porter à aucun excès.

Survint encore, à la brune, le citoyen Duval, l'un des membres de notre conseil, arrivant de Bouzillé, où il avait aussi été préposé par nous au recrutement : il nous annonça qu'il avait couru les plus grands risques et que le peuple l'avait prévenu que, le lendemain au matin, il viendrait en nombre nous signifier qu'il n'entendait pas se soumettre à la loi du recrutement.

Éclairés de plus en plus sur notre position par ce qui précède, nous expédiâmes promptement de nouveaux courriers à Angers, Chalonnes et Montjean, où nous en avions envoyé le matin, avec des lettres qui réitéraient nos demandes et peignaient notre détresse toujours croissante.

Nous délibérâmes de suite, de concert avec le citoyen Delaunay, receveur de notre district, qui ne nous avait pas quittés de la journée, le commissaire du département et le conseil de la commune, sur le parti que nous devions prendre pour la sûreté de la caisse du district, des papiers et autres objets de notre administration. Les enlever du lieu où ils étaient pour les cacher dans la ville, les charger sur des voitures ou dans un bateau pour les conduire it Angers, nous parurent des mesures excellemment dangereuses : nous savions avoir grand nombre d'ennemis dans la ville, nous craignions justement même d'en voir assister à notre délibération et tout prêts à nous trahir.

Entourés de rassemblements dans les campagnes et menacés sur l'eau par la Meilleraie, nous crûmes devoir pour leur sûreté laisser ces objets renfermés dans la maison du district, où nous avions réuni tous nos moyens de défense. Nous craignions aussi que ces déplacements, en décourageant notre petite armée, ne donnassent au peuple la mesure de notre faiblesse et des idées de se porter à des excès auxquels il pouvait ne pas songer.

Ces diverses réflexions jointes à l'espoir des secours que nous donnait le commissaire du département, et le peu de temps qui nous restait, nous déterminèrent à laisser chaque chose en son lieu avec la ferme résolution de défendre notre poste.

— Nous restâmes ainsi à délibérer et à agir toute la nuit en permanence dans la salle de nos séances. La garde nationale, toujours au nombre d'environ 130 hommes, se tint sous les armes; des cartouches furent distribuées, l'ordre du combat arrêté à tout événement ; des patrouilles fréquentes furent faites pendant la nuit dans la ville et les environs ; le pont du Marillais fut coupé pour intercepter ce passage.

A neuf heures du matin, notre ville se trouva investie de toutes parts par des rassemblements, dont le nombre nous parut être d'environ 5 à 6.000 hommes, sans que nous eussions reçu aucun renfort, mais seulement une lettre du citoyen Vallée, qui nous annonçait que le département était lui-même dans le plus grand embarras, mais que malgré cela il allait s'empresser de nous faire passer des forces de Cholet où il en avait envoyé.

Réduits à nos seuls moyens, notre armée trop peu nombreuse pour garder la ville entière fut rangée en bataille devant le district ; le meilleur esprit, le courage semblaient animer tout le monde, lorsque les insurges se présentèrent en foule à toutes les avenues de la ville.

 Plusieurs d'entre nous s'avancèrent pour leur parler : ils nous dirent qu'ils n'entendaient pas se soumettre à la loi du recrutement et qu'ils voulaient nous désarmer. Sur les observations que nous voulûmes leur faire, l'un de nous, le citoyen Jacob, officier municipal, fut par eux massacré, un autre manqué d'un coup de fusil ; tous nous n'eûmes que le temps de rejoindre les nôtres, et le combat s'engagea.

Après avoir vu tomber morts les citoyens Audiganne et Lemotheux, commis du district, Massé, filassier, et Dalaine, ferblantier, l'ennemi, auquel nous avions également tué 4 hommes et blessé une quarantaine, dont la plupart sont morts par suite de ces blessures, s'empara de nos deux petites pièces de canon ; notre armée se débanda entièrement en abandonnant presque tous les fusils et les piques : les uns se sauvèrent par la rivière, les autres qui ne purent en faire autant se trouvant désarmés, en très petit nombre et en proie à la rage d'environ 5 à 6.000 insurgés, n'eurent, pour se soustraire à une mort certaine et qui fût devenue inutile à la chose publique, que la ressource de se cacher.

Les révoltés, alors entièrement maîtres de la ville, se livrèrent à toute leur fureur. Les uns parcoururent les rues en demandant, à grands cris et du ton de la rage la plus effrénée, la tête des patriotes; les autres, en très grand nombre, se portèrent dans la maison qui renfermait les administrations du district et de la municipalité, la caisse du district, et où logeaient le citoyen Delaunay, receveur du district, les gendarmes, le citoyen Lemotheux, tué dans le combat, et quelques autres particuliers attachés au service public. A l'instant, les portes, les contrevents, les vitres et les meubles, tout fut brisé, les papiers et les lois, renfermés dans les administrations du district et de la municipalité, consumés par le feu, la caisse du receveur du district Vallée et les papiers de sa comptabilité brûlés, sans qu'il ait resté aucun vestige, si ce n’est quelques registres de naissances, mariages et décès et 2 registres de la comptabilité du receveur, à moitié déchirés.

Tous les effets mobiliers, appartenant aux divers particuliers logés dans cette maison, ont été également dévastés et pillés. Nous ajouterons encore que dans la ville, le reste de la journée et le lendemain, les maisons des citoyens Renou, procureur syndic, Letourneau, commandant de la garde nationale, et Guillotoau, aubergiste, furent aussi entièrement dévastées ; il n'y resta pas portes, contrevents, vitres ni meubles qui ne fussent brisés, et tous leurs effets pillés de manière qu'ils n'ont pu sauver que quelques lambeaux.

Tous dispersés par l'événement funeste rapporté ci-dessus, nous ne pûmes sur-le-champ rédiger le présent; lors de la rentrée des patriotes, qui eut lieu au Montglonne le 12 avril dernier, nous ne nous réunîmes qu'en très petit nombre (5) ; et pendant le temps que l'armée de la république y resta, nous fûmes jour et nuit occupés à faire des billets de logement pour la troupe, à lui procurer des lits, du bois, des subsistances de toute espèce et à recevoir des insurgés qui venaient déposer les armes, des déclarations relatives aux chefs de la révolte, de manière qu'il nous fut impossible pendant ce temps de constater par écrit le détail de tous nos malheurs, opération que nous avons été obligés de remettre jusqu'à ce jour, où réfugiés dans cette ville nous pouvons nous en occuper.

 

 

Fait et arrêté à Angers, le 24 avril 1793, l'an 2 de la république, par nous procureur syndic et administrateurs du directoire du district de Montglonne, nous réservant de faire signer le présent par nos confrères, les officiers municipaux, les officiers de la garde nationale et tous les patriotes du Montglonne, témoins de notre désastre, à mesure qu'ils se réuniraient à nous.

 

 L'Anjou Historique

 

 

 

  Ces révolutions qui font l’Histoire <==.... .....==> A saint Florent le VIEIL le 12 mars 1793 commença l'épopée vendéenne, la guerre de géants

 


 

(1) Elles sont « peu connues et mènent la plupart une vie très retirée », répondait l'agent national de la commune en envoyant la liste, incomplète, du reste (10 avril 1794).

(2) Archives de Maine-et-Loire, district de Saint-Florent-le-Vieil.

Il faut ajouter l'intrus de la Pommeraye, Lebreton, membre du conseil général du district, lui aussi réfugie à Angers.

(3) Le canton de Sainte-Christine comprenait six communes : la Jumellière, Neuvy, le Pin-en-Mauges, la Poitevinière, Sainte Christine, Saint-Quentin-en-Mauges.

(4) On avait changé le nom de Saint-Florent le- Vieil en celui de Montglonne.

(5) Le 12 avril 1793, Letort et Cadieu, membres du directoire du district, Renou, procureur syndic, Le Febvre, officier municipal, et Gaultier, procureur de la commune, « seuls membres des corps administratifs dispersés par l'invasion des brigands, qui ayons pu rentrer dans cette ville depuis que l'armée patriote y a replanté l'étendard de la patrie, étant assemblés dans la maison d'un de nous ; considérant la nécessité où nous nous trouvons de réorganiser sur-le-champ dans cette ville une autorité civile, qui puisse seconder les opérations de la force armée dont le déploiement est si indispensable dans cet instant ; considérant en même temps l'impossibilité où nous nous trouvons de rétablir les différentes autorités civiles de cette ville de la même manière qu'elles l'étaient avant l'arrivée des brigands, et de suivre la hiérarchie établie par les décrets ; avons arrêté, sons le bon plaisir du département, que nous nous formerions provisoirement et pour tout le temps où nous serions sur le pied de guerre, en Comité général de salut public, nous réservant d'y appeler tous les bons citoyens de cette ville, qui par leurs lumières et leur activité pourront coopérer avec nous à faire subsister l'armée des défenseurs de la patrie, maintenir l'ordre, rassembler les débris épars des différentes administrations, faire parvenir et exécuter les arrêtés du département, prendre tous les renseignements possibles sur les causes de la révolte et employer tous les moyens qui seront en notre pouvoir pour ramener le plus tôt possible la paix dans notre pays ; avons arrêté, en outre, que copie de la présente délibération sera envoyée sur-le-champ au département avec invitation de nous faire passer quelques fonds, indispensable3 à notre administration provisoire. »

 

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