Après la Guerre de Cent-Ans, le Marais Poitevin redevient Sauvage
La guerre de Cent ans amena la ruine dans le marais desséché; les achenaux s'envasèrent, les digues furent rompues, les écluses détruites.
Un demi-siècle après l'expulsion des Anglais, nous retrouvons les marais de la Sèvre et du Lay dans l'état où la guerre de Cent ans les avait laissés. Les marais de Champagné eux-mêmes, qui semblaient avoir un moment retrouvé leur ancienne prospérité, étaient redevenus sauvages.
Quand les hostilités eurent cessé, les rois de France tentèrent de réparer les ouvrages détériorés.
La Sèvre était, depuis quelques années, dans un état complet d'abandon.
La navigation ne pouvait s'exécuter que pendant l'hiver et était totalement interrompue en été, au moment des basses eaux. Les droits d'ayde continuaient cependant à être perçus, mais ils n'étaient plus consacrés au port de Niort et à la Sèvre.
Louis XI venait de succéder à son père Charles VII.
Louis XI fit cesser cet abus et, le 19 avril 1468, il rendit une ordonnance pour que les droits d'ayde fussent perçus par le receveur ordinaire de Poitou ou par son commis.
« Pour les deniers qui en proviendront estre convertiz, et employez en la réparation et entretenement des dites rivières navigables (la Sèvre et la Vendée) et des porz et havres d'icelles. »
« Considérant, dit Louis XI dans cette ordonnance, que nostre pays de Poictou est fertile et fort abondant en bléz, vin et autres fruits, dont la traite n'en povoit et ne peut être bonnement faicte, sinon par navire, veu la grant estendue du pays et la grant quantité et multitude des fruits qui croissent chacun an, et attendu que en mettant la rivière la Sèvre en estat navigable depuis nostre ville de Nyort, qui est la principale en icelle marche jusques à l'Isle de Marans, qui est prouchain et contigue de la mer, la délivrance de blez, vins et autres fruits croissant dans notre pays de Poictou se pourrait aisément faire. »
Louis XI rappelle dans cette même ordonnance que des droits pour l'entretien de la navigation de la Sèvre avaient été établis par le duc de Berry et qu'ils se levaient au gué de Velluyre, au bos de Langlée, au passage de Moreilles, de Champagné et autres ports qui sont sur la rivière la Vendée, au lieu de la Pichonnière et Maillé et autres localités situées dans l'île de Maillezais, excepté sur les hommes de l'évêque et sur ceux qui allaient à son marché de Maillé.
Ces droits se percevaient aussi sur la Sèvre, à Coulon, à Courdault, à Bouillé et dans les autres ports de la châtellenie de Benet, au lieu de la Neyvoyre et dans les autres ports de la châtellenie d'Arçay, et aux ports de Niort, Sevreau, Bessines, Port-Nau, Péglan, la Tiffardière et la Boussille.
Tous les deniers et revenus provenant de ces aydes avaient été consacrés à l'entretien de la Sèvre, jusqu'au moment où le duc d'Alençon, qui avait vu ses terres occupées par les Anglais, reçut de Charles VII, en dédommagement, la seigneurie de Niort
« pour en joir, ensemble des revenus et prouffits, lequel la tint pas longtemps, pendant lequel il s'appropria le revenu du péage qui avoient esté ordonné pour entretenir la dite rivière en estat navigable et par ce moyen fut interrompu et discontinué l'entretien et icelle rivière devint tellement comblée de sablons et empeschée de bois, que les porz et havres sont rompus et y est discontinué ledit fait de marchandise espéciamment en temps d'été. »
Cette ordonnance produisit d'excellents résultats.
Les droits perçus furent employés à creuser le lit de la Sèvre, à le débarrasser des sables, des troncs d'arbres qui entravaient la marche des bateaux et à réparer les ports. La navigation reprit son ancienne activité.
« La commune de Niort, dit M. Gouget (1), après la « longue tyrannie d'Alençon et le coup dont le roi (Charles VII) l'a frappée pour sa révolte en 1440, est rétablie : elle « refait son sceau, recompose le rôle de ses bourgeois, « rebâtit son hôtel de ville, son aumônerie de Beauchamp, abattue par le canon de l'armée royale, sa maladrerie, ruinée par le temps; fixe pour un instant ses « finances, réorganise ses écoles; éprouvée enfin par la peste, paie à ses frais des médecins venus de Poitiers. »
Depuis la mort du duc de Berry, les seigneurs voisins s'étaient affranchis de ses péages, elle les rétablit ; depuis la praguerie, les officiers royaux s'étaient substitués à ceux du comte d'Alençon dans l'exercice des droits de commune, elle provoque un procès qui en interrompra entre leurs mains l'usage puisque la question se traite par le droit civil, et retournant contre eux les mêmes armes elle proclame dans le droit des communes une règle du droit féodal qu'au fief du Roy doit avoir plus de liberté que es autres.
Elle se mêle à tous les intérêts généraux de la province; envoie ses hommes à la députation des trois « Ordres du Poitou, qui va demander au roi l'établissement à Poitiers d'un parlement en même temps que Poitiers demandera que le siège royal ne soit pas maintenu à Niort; se ligue avec Saint-Jean-d'Angély pour protester contre les traites foraines d'Angoumois et de Saintonge ; provoque à Poitiers, Saint-Jean, La Rochelle, un concert de plaintes contre de nouveaux droits imposés sur le commerce; et, ville dont la moitié s'est révoltée pour le Dauphin, dont l'autre est demeurée obstinément fidèle au Prince, s'autorise à la fois du passé et de l'avenir vis-à-vis du dauphin Louis et du roi Louis XI. »
Les auteurs du dessèchement du Marais Poitevin, Rôle des religieux, Rôle des seigneurs, Rôle des paysans.<==.... ....==>Entretien du Marais Poitevin, procès entre l'abbaye de l'Absie et l'évêque de Maillezais devant le Parlement de Poitiers (1435).
(1) Mémoire sur le commerce de Niort, pages 33 et 34.