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PHystorique- Les Portes du Temps
15 avril 2020

Histoire du Poitou, jugement de Louis d'Amboise, chevalier seigneur de Thouars

Histoire du Poitou, jugement de Louis d'Amboise, chevalier seigneur de Thouars

 Le parlement, qui siégeait à Poitiers, rendit son arrêt le 8 mai 1431, qui condamnait à mort le sire d'Amboise. Tel est le dispositif du jugement.

Louis d'Amboise, chevalier, seigneur de Thouars, est « convaincu du crime de lèse-majesté, pour avoir entrepris et de se saisir de la personne du roi Charles VII, en arrêtant le seigneur « de la Trémouille, gouvernant le royaume, et par ce moyen à gouverner l'état et mettre gens à sa dévotion; et pour ce « est dit qu'il a forfait de corps et de biens : mais pour certaines causes, le roi le relève de la peine de mort. »

Louis d'Amboise fut heureux de ne pas perdre la vie ; mais on n'en voulait qu'à ses biens, qui furent tous confisqués et unis à la couronne.

Sa fortune était son crime. On le laissa gémir, après son arrêt, plus de trois ans dans sa prison. Enfin, à la sollicitation de la reine Marie d'Anjou et de Charles d'Anjou, comte du Maine, il fut mis en liberté.

Charles VII, par des lettres données à Tours, au mois de septembre 1434, lui rendit la vicomté de Thouars et ses autres terres, à l'exception de la principauté de Talmond, des seigneuries d'Amboise, Château-Gaultier, Olonne, Brain et Brandois.

Septembre 1434 Lettres portant restitution au vicomte de Thouars de ses terres et bien confisqués l’an 1431, sauf les terres et châtellenies de Talmont-sur-Jard, Amboise et Civray ; avec une quittance dudit vicomte au profit du sr de Montgauguier.

  • B X1a 8604, fol. 121
  • a P. Guérin, Archives historiques du Poitou, 29, p. 60-69

D'après a.

Charles, par la grace de Dieu roy de France. Savoir faisons à tous, presens et avenir, que, comme jà pieça, en l’an mil cccc. trente et ung, nous eussions fait arrester en nostre chastel de Poictiers Loys d’Amboyse (1), chevalier, pour certains cas et deliz que on lui imposoit, sur lesquelz par nostre ordonnance il fut interrogué et examiné et sur sa confession prins droit, veue laquelle par nous en nostre grand conseil, appellez à ce les presidens et conseillers laiz de nostre court de Parlement, se ensuit certain arrest pronuncé en nostre presence, en nostre Palais à Poictiers, par lequel ledit Loys d’Amboyse fut par nous relevé de la peine de mort, et fut dit et declairé tous ses biens meubles et immeubles estre à nous confisquez et acquis.

 Et avecques ce, par le dit arrest fut dit et ordonné que icelluy Loys d’Amboise tendroit prison fermée jusques à nostre bon plaisir et voulenté.

 Par vertu du quel arrest et en executant icelluy ; tous ses biens immeublez furent mis en nostre main et aussi fut icelluy Loys d’Amboise mis prisonnier ou chastel d’Amboyse, auquel il fut detenu par aucun temps, et depuis fut transporté ou chastel de Chasteillon sur Yndre.

Auquel lieu il a esté detenu prisonnier et très durement traictié par l’espace de neuf moys ou environ, en tele maniere qu’il en a esté fort debilité de sa personne.

Esquelles prisons d’Amboise et de Chasteillon il a esté detenu par l’espace de troys ans ou environ.

Et depuis nostre très chiere et très amée mere la royne de Scicile et nostre très chier et très amé frere Charles d’Anjou et autres, tant de nostre sang et lignage comme autres de noz conseillers, officiers et serviteurs, nous ayent humblement supplié et requis que audit Loys d’Amboyse voulsissons extendre et impartir nostre grace, tant au regart de la delivrance de sa personne, comme aussi de la restitucion de ses biens et heritages, à nous acquis et confisquez, comme dit est.

Pour ce est il que, eue consideracion à ce que dit est et aussi aux bons et agreables services que feu Pierre d’Amboise, oncle dudit Loys d’Amboise, en son vivant viconte de Thouars (2), nous a fait en nous recevant en grant obeissance en ses terres et païs, après nostre partement de Paris, et nous faisant aussi tout ayde et confort de son povoir, et autrement en maintes manieres ; considerans aussi la griefve et longue prison que le dit Loys d’Amboise a soufferte et porté paciemment, et esperans que doresenavant il se porte envers nous comme il doit faire, et se employe en noz guerres et autrement en nostre service, comme bon et loyal subgiet doit faire, et aussi pour contemplacion de nosdiz mere et frere, et pour certeines autres causes à ce nous mouvans ; nous, de nostre certaine science, plaine puissance, autorité royal et grace especial, parces presentes avons le dit Loys d’Amboise restitué et restituons entierement et à plain à ses bonne fame et renommée, et lui avons avecques ce remis et quicté la dicte prison, et ycellui avons mis et mettons à sa franchise et pleine delivrance de sa personne, et sommes contens de la dicte prison qu’il a tenue, sans ce que, à l’occasion dudit arrest, il soit, puisse ou doye estre empesché doresenavant en aucune maniere en sa personne.

Et de nostre plus ample grace à ycelluy Loys d’Amboise avons restitué et restituons, et, se mestier est, lui avons donné, cedé, transporté et delaissé, donnons, cedons, transportons et delaissons pour lui et les siens et ayans cause, à tousjours, toutes ses terres et seigneuries que il avoit, tenoit et possidoit au temps du dit arrest, pour en joyr et user et en faire perpetuelment, tant de la proprieté que des foiz, homagez, hommes, subgiez, droiz, noblesses et prerogatives, fruiz, prouffiz, revenues et emolumens qui y appartiennent, comme il faisoit ou eust peu faire par avant le dit arrest.

Et en oultre, en tant que mestier [est] ou seroit, avons mis et mettons au neant la dicte forfaiture e confiscacion, tant au regart d’icelles terres et seigneuries par nous delaissées au dit Loys d’Amboyse, comme aussi de toutes autres qui cy en après lui pourront par succession ou autrement competter et appartenir, sauf et reservé toutesvoyes à nous le chastel, terre et chastellenie de Thalemond sur Jard, avecques leurs appartenances et appendences, tant en cens, rentes, foys, hommagez, fiefz arriere fiefz, comme en nauffraiges, espaves et autres choses quelxconques, avecques le chastel et forteresse de Chasteau Gautier ; sauf aussi et reservez à nous le chastel, terre, chastellenie et seigneurie d’Amboyse avecques la terre de Sivray, ensemble les foys, homages, fiefz, arrierefiefz, droiz, noblesses, prerogatives, prouffiz, revenues et emolumens quelxconques qui y appartiennent.

Et combien que eussions retenu les terre et chastellenie de Bleré et appartenances avec les dis chastel et chastellenie d’Amboyse, neantmoins, à la supplicacion et requeste des dessus diz, nous avons delaissé et delaissons par ces presentes les dictes terre, chastellenie, droiz et appartenances quelzconques de Bleré au dit Loys d’Amboise, sauf que nous avons retenu et retenons doresenavant mettre capitaine, en nostre nom et de par nous, en la forteresse et pont du dit lieu de Bleré ; et parmy ce aussi que ledit Loys d’Amboise demourra chargié et nous guarentira de ce que le seigneur de Moncauguier (3) et ses coheritiers pourroyent demander par le moyen de certain arrest par eulx obtenu en la court de Parlement contre le dit Loys d’Amboise sur les diz chastel, terre et chastellenie d’Amboyse et autrement, et nous en acquittera et deschargera du tout ; et les diz chastel, terre et chastellenie d’Amboyse, tant de principal que des arrerages, et nous en baillera le dit Loys d’Amboise ses lettres convenables sur ce.

Lesquelz chasteaulx, terres et chastellenies de Thalemond et d’Amboyse, avecques leurs dictes appartenances et appandences quelxconques, et la place de Chasteau Gautier, avons reservées et retenues à nous, reservons et retenons à nous et aux nostres, en la maniere que dit est.

Si donnons en mandement, par ces mesmes presentes, à noz amez et feaulx conseillers les gens tenans et qui tendront nostre dit Parlement, aux gens de noz comptes aux seneschaulx et bailli de Poictou, de Touraine et de Xantonge, au gouverneur de la Rochelle et à tous noz autres justiciers et officiers, ou à leurs lieuxtenans et à chascun d’eulx, si comme à lui appartendra, que de nostre presente grace, concession et octroy fassent, souffrent et laissent ledit Loys d’Amboyse, les siens et ayans cause, joïr et user à plain, sans leur faire ou mettre, ou souffrir estre fait ou mis, aucun destorbier ou empeschement au contraire, mais se fait estoit, le facent cesser et oster. Car ainsi nous plaist il estre fait ; et sur [ce] imposons scilence perpetuel à nostre procureur.

Et affin que ce soit chose ferme et estable à tousjours, nous avons fait mettre à ces dictes presentes nostre seel ordonné en l’absence du grant. Sauf en autres choses nostre droit et l’autruy en toutes.

Donné à Tours, ou moys de septembre l’an de grace mil cccc. xxxiiii, et de nostre regne le douziesme.

Ainsi signé : Par le roy en son conseil, ouquel monseigneur Charles d’Anjou, le comte de Vendosme, l’arcevesque de Vienne (4), l’evesque de Magalonne (5), Christofle de Harecourt (6), le sire de Treves (7), le maistre des arbalestriers (8), les sires de Bueil (9) et de Maillé (10) et plusieurs autres estoyent. J. Le Picart.

Et au dos :

Registrata et lecta et publicata Pictavis in Parlamento, decima septima februarii m° cccc° xxxiiiito. Blois.

Collacio facta est cum originali.

 

Lettre de la promesse faicte par monseigneur de Thoars de garantir au roy et acquicter les terres d’Amboise et de Civray.

Loys d’Amboise, viconte de Thouars et conte de Bannon, à tous ceulx qui ces presentes lettres verront, salut.

Comme le roy nostre sire, par ses lettres patentes, données à Tours, ou moys de septembre derrenier passé, entre autres choses, me ait de sa grace especial donné et octroyé, cedé, quicté, transporté et delaissé, pour moy, les miens et mes ayans cause à tousjours, toutes et chascunes les terres, possessions et seigneuries que j’avoie, tenoie et possedoie au temps et par avant certain arrest pronuncié l’an mil cccc.xxxi., tant en proprieté que avec les droiz, foiz, hommages, noblesses, prerogatives, fruiz, prouffiz, revenues et emolumens quelxconques d’icelles, sauf et reservé la chastellenie, terre et seigneurie de Thalemont sur Jard, avec ses appartenances et appendences quelxconques, et la place de Chasteaugautier, et aussi la terre, seigneurie et chastellenie d’Amboyse, avec ses appartenances quelxconques, et la terre de Civray, lesquelles le dit seigneur a retenu et reservé à soy ; et par les dictes lettres ait voulu et ordonné que la terre et chastellenie de Bleré, avec ses appartenances et appendences, soit et demeure à moy, aux miens et à mes ayans cause, comme les autres terres à moy restituées, parmy ce toutesvoyes qu’il a retenu et reservé à soy mettre capitaine de par lui et en son nom, audit pont dudit lieu de Bleré, parmy ce aussi que je acquicteray et deschargeray et seray tenu acquicter et descharger le roy nostre dit seigneur et aussi la dicte terre et chastellenie d’Amboise envers le seigneur de Mongauguier et ses coheritiers, tant en principal que ès arrerages, de ce que leur puet competer et appartenir en ladicte terre et chastellenie d’Amboyse, par le moyen de certain arrest par lui obtenu en la court de Parlement, et de ce bailler mes lettres convenables audit seigneur, si comme tout ce et autres choses par les dictes lettres du roy nostre dit seigneur puet plus à plain apparoir.

Pour ce est il que je, voulant de tout mon povoir obeir au roy mon souverain seigneur, et desirans aussi acomplir ses ordonnances, bon plaisir et voulenté, promettant en bonne foy, et soubz l’obligacion de tous mes biens, garentir et acquicter le roy nostre dit seigneur, et la dicte terre, chastellenie et seigneurie d’Amboyse, avecques la dicte terre de Civray et leurs appartenances envers le dit sr de Montgauguier et ses coheritiers, du droit et de tout ce que par le moyen du dit arrest par lui obtenu en la dicte court de Parlement, tant [p. 69] en principal que ès arrerages, leur pourroit et peut competer et appartenir, et en faire tenir quictes, paisibles et deschargez le roy nostre dit seigneur et la dicte terre, chastellenie et seigneurie d’Amboyse, tant du temps passé que avenir.

 En tesmoing de ce, j’ay fait mettre et apposer le seel de mes armes à ces presentes, et à plus grant confirmacion les ay fait signer des seigns manuelz de André Chambret (11) et Jehan Gentis, notaires de la court du seel estably aux contraux à Touars, et seeller du seel des diz contraux, le xvme jour de fevrier l’an mil cccc. xxxiiii.

Ainsi signé : A. Chambret, par commandement et à la requeste de mon dit seigneur ; J. Gentis, par commandement et à la requeste de mon dit seigneur.

Et au dos :

Lecta et publicata Pictavis in Parlamento, xvii. februarii millesimo ccccmo tricesimo quarto.

Collacio facta est cum originali.

 

Ces terres lui furent aussi remises par de nouvelles lettres expédiées â Tours au mois de janvier 1437. Le roi Charles VII déclara que les fautes de Louis d'Amboise ne concernaient point sa personne ni l'état; que l'arrêt de confiscation avait été rendu à l'instigation de quelques malveillants, sans forme de procès.

Il fait ensuite l'éloge des services du vicomte, surtout au siège de Pontoise, où il avait conduit avec lui nombre de ses sujets et vassaux. Cette justice rendue par Charles VII à Louis d'Amboise, les éloges que le prince fait de ses services, détruisent l'accusation de révolte, de trahison, dont quelques historiens ont noirci le seigneur de Thouars.

 

La terre d'Amboise ne lui fut cependant point restituée, et sa famille perdit pour toujours la propriété de cette ancienne baronnie.

 

Dans la suite, Louis II de la Trémouille, jugeant sans doute qu'il n'était pas prudent de réclamer cette terre, y renonça par un acte authentique ; et le roi lui céda, dit-on, d'autres domaines en forme d'échange.

Louis d'Amboise, courbé depuis longtemps sous le poids de l'infortune et des afflictions, vit enfin renaître des jours plus heureux; il eut la satisfaction de marier Françoise, sa fille aînée, avec le duc Pierre de Bretagne. Il obtint pour ce mariage l'agrément du roi, qui lui fut accordé par des lettres en bonne forme.

 Il maria ensuite Perronelle d’Amboise sa cadette au maréchal de France Guillaume de Harcourt, comte de Tancarville, baron de Montreuil Bellay; elle mourut fort jeune, avant son père et sans enfants.

Marguerite, troisième fille de Louis d'Amboise, épousa Louis Ier, fils aîné du seigneur de la Trémouille, qui avait été peu d'années auparavant son plus cruel ennemi.

 

C'est par ce dernier mariage que tous les biens de la maison d'Amboise passèrent dans celle de la Trémouille.

 

La terre de la Trémouille, qui a donné son nom à cette maison, est située en Poitou près de Montmorillon. Pierre, seigneur de la Trémouille, qui est le premier qui soit connu, vivait en 1040.

Guy, sire de la Trémouille, suivit Godefroy de Bouillon à la conquête de la Palestine.

Thibault ou Imbault de la Trémouille accompagna le roi Saint Louis en son premier voyage de la Terre-Sainte, et fut tué à la bataille de la Massoure avec trois de ses enfants.

 L'un d'eux portait pour armoiries, d'or au chevron de gueules, accompagné de trois aiglettes d'azur becquées et membrées de gueules.

Les anciens seigneurs de cette maison ont fait beaucoup de donations à l'hôpital de Montmorillon et aux abbayes de L’étoile et de la Colombe. Il y en a plusieurs inhumés dans l'église de cette abbaye; on y voit la sépulture et l'épitaphe de Guy III, sire de la Trémouille, mort en 1360.

Guy V, sire de la Trémouille, surnommé le Vaillant, fut chambellan du roi, porte-oriflamme de France, et employé dans toutes les affaires importantes de ce temps. Il refusa l'épée de connétable après la retraite de Clisson.

George de la Trémouille son fils fut aussi grand-chambellan de France, et premier ministre de Charles VII; ayant été pris par les Anglais, il fut obligé de payer une grosse rançon.

Le roi lui donna en récompense le château de Melle en Poitou, à faculté de rachat, moyennant dix mille écus.

Louis Ier, fils de George de la Trémouille, épousa, comme nous l'avons dit, Marguerite d'Amboise, qui fut depuis vicomtesse de Thouars. Cette vicomté passa par ce moyen dans la maison de la Trémouille (12).

Louis d'Amboise n'ayant plus de sujet d'inquiétude, s'abandonna à une vie voluptueuse dans son château de Thouars, et se livra dans sa vieillesse à des dérèglements qui obligèrent ses enfants de demander son interdiction. Voici ce qu'ils exposaient pour y parvenir.

 

« La vicomté de Thouars est une des plus considérables terres du royaume; il en relève à foi et hommage vingt baronnies, savoir :

Bressuire, Argenton, Mortagne, Tiffauges, Pouzauges, la Garnache, Beauvoir-sur-mer, l'Ile de Noirmoutiers, Châteaumur, la Grève, les Essarts, Palluau, Apremont, Mareuil, Sainte-Hermine, et vingt-cinq à trente châtellenies qui en dépendent aussi; le droit de fondation de vingt ou vingt-cinq abbayes, comme de Saint Laon de Thouars, Saint-Jean de Bonneval, Chambon , Brignon, Airvault, la Grenetière, Orbetier, Mauléon, Saint-Jouin, Ferrières, Saint-Michel d'Angle, et autres. La vicomté de Thouars relève du roi à cause de son comté de Poitou; c'est le premier hommage et la plus noble et honorable vicomté du royaume, et d'un revenu considérable.

Quoique Louis d'Amboise, vicomte de Thouars, jouit de ces revenus et de ceux de plusieurs autres terres, et qu'il ait reçu du roi beaucoup de gratifications, il a tout consommé en folles dépenses.

Au vice du jeu il joignait l'amour des femmes : il avait fait venir dans son château de Thouars trois sœurs, l'une desquelles était mariée, qu'il entretenait et dont il avait eu des enfants.

Il avait maltraité et frappé son épouse, et l'avait tenue en prison dans son château de Thouars, d'où elle s'était évadée pour se retirer auprès de la duchesse de Bretagne, sa fille.

Ces femmes avaient tant d'empire sur lui, et il avait l'esprit si faible, qu'elles le faisaient rire et pleurer quand elles voulaient. Elles étaient venues à Thouars très mal vêtues et endettées; mais le vicomte leur avait donné trente ou quarante paires de robes, tant de draps de soie que d'écarlate, et sont aussi fourrées de belles et riches pannes, comme marthes, letices gris, menu vair, agneaux fins de Romenie; sont garnies de beaux et riches tissus ferrés d'or, émaillés de telle façon, qu'elles ont voulu des chaînes d'or d'agneaux, garnies de diamans, de rubis, de chapeaux et autres bagues et joyaux garnis de grosses perles et riches pierreries; plusieurs tapisseries, linges et ustensiles d'hôtel, le tout valant plus de cinquante mille écus. Ces femmes avaient des demoiselles, femmes, valets-de-chambre, et autres, jusqu'au nombre de sept à huit chacune. Elles avaient leur logement séparé, et tenaient un état de dame ou princesse, ayant confesseur, médecin, charriât garni de bon nombre de beaux chevaux, dont le moindre serait prisé trois ou quatre cents écus, et y en a tel qui a coûté mille écus. Le vicomte voulant apaiser le mari d'une de ces femmes lui avait donné plus de deux mille écus et la capitainerie de Brandois. L'évêque de Poitiers ayant fait des représentations au vicomte sur le scandale de sa conduite, il fit partir sa femme du château de Thouars, pour la tenir dans celui de Talmond, qui est du diocèse de Luçon : on assurait que ces femmes l'avaient ensorcelé, et il le disait lui-même.

« Les dépenses qu'il avait faites pour elles, l'avaient obligé d'aliéner partie de ses biens. Il avait vendu à Joachim Rouaut (13) la baronnie de la Chaise-le-Vicomte, valant huit cents livres de revenu ; la forêt, garenne et étang, et autres revenus pour neuf mille écus d'or; la terre et seigneurie d'Oiron, valant par an trois à quatre mille livres de rente, à Pierre Berart, dont il a eu sept mille écus d'or; a vendu à un nommé Leiraut, certains fromentaiges dus à la châtellenie près Ervaut, qui peuvent valoir par an trente livres; le droit d'épaves, aubenage de ladite vicomte, qui peuvent monter à beaucoup de choses , y ayant en icelle marche plus de quatre cents habitans , qui, s'ils décédaient sans hoirs ou fussent bâtards , tous leurs biens meubles et immeubles appartiennent audit Leiraut.

« Le droit de justice et de guet sur les hommes de la seU gneurie d'Ervaut, et justice à trois piliers au siége d'Ervaut, qui n'en avait que deux.

«  A un nommé Roulant de la Voërie, une portion de la grande garenne de Thouars.

« A l'abbé de Saint-Laon, le droit de vendre vin en détail durant le ban du seigneur, et la garenne tant dessus que dessous les fossés.

« A l'abbesse de Fontevrault le droit d'un homme d'arme qu'elle lui devait à cause de sa seigneurie de Berrye, toutesfois qu'il y a armée, etc... »

Le vicomte disait au contraire qu'il n'y avait aucun reproche à lui faire; il administrait ses biens en bon économe, ayant acquitté les anciennes dettes de sa maison; il était resté mineur en bas âge et sans secours d'aucuns de ses parents, si ce n'est Jean Rouaut, père de Joachim, qui lui avait fait beaucoup d'avances; il avait lui-même été obligé de faire de la dépense dans les guerres et entreprises dont il avait été chargé, et pour le mariage de ses trois filles.

Les poursuites faites contre lui par le duc et la duchesse de Bretagne sa fille, n'étaient que l'effet du ressentiment qu'ils avaient eu de ce qu'il n'avait pas voulu leur donner la terre de Thouars; la procédure était irrégulière, parce que vu sa qualité, et qu'il est issu de la maison de France, il devait être jugé per pares curiœ, c'est à savoir par le roi et la cour dûment assemblée de pairs.

Il disait, quant aux trois sœurs qui étaient avec lui, qu'elles avaient été auprès de son épouse et étaient ses demoiselles et femmes de bien et d'honneur, et sont nobles, et simplement vêtues comme à leur état appartient; qu'il y a vingt-cinq ans ou environ, qu'il fit faire un charriot qui coûta quatorze écus ou environ ; que c'était pour un chapelain nommé Pierre de la Salle, lequel charriot, avec les chevaux de la cuisine, il pouvait avoir prêté à la femme dudit Thibaut d'Aubigny, avec ses sœurs, pour aller ébattre, et a toujours bu, mangé et couché ladite femme dudit vicomte avec lui, fors et excepté quand aucunes maladies lui survenaient.

Par des considérations particulières (14), le parlement ne voulut qu'appointer les parties au principal, et fit seulement une défense provisoire au vicomte d'aliéner ses biens, et faire contrats ou traités quelconques, sans le conseil et consentement de Me Robert Liboust, qui était lors président en cette cour, et de rien entreprendre pendant le procès.

L'arrêt est du 26 janvier 1457. Mais cette interdiction provisoire, qui avait été prononcée contre le vicomte, ne fut point insérée dans l'arrêt d'appointement par des raisons particulières, et pour ne pas déshonorer publiquement le vicomte de Thouars.

C'est ainsi qu'on le trouve énoncé dans un inventaire de titres qui furent produits dans le procès de 1485, dont il sera question dans la suite.

(1478 Philippe de Commynes, seigneur d'Argenton, reçoit Louis XI dans son château d'Argenton. chapelle Saint-Georges)

Louis d'Amboise aurait probablement resté longtemps dans l'heureuse nécessité de conserver sa fortune, si Louis XI et Commines n'avaient pas été aussi vigilants pour mettre à profit les occasions qu'ils jugeaient favorables à leur dessein.

L'année même où ce prince monta sur le trône, il fit dire à Louis d'Amboise par Loysel, que s'il voulait lui donner la vicomté de Thouars, il serait bientôt au-dessus de tous ses procès.

D'Amboise ne tarda pas à se rendre à la cour qui était pour lors à Tours ; il fut, comme on le pense, très bien accueilli : cependant Louis XI ne lui fit aucune proposition. Ce prince voyait de loin les instants où il pourrait encore mieux assurer l'exécution de son projet; il lui dit seulement qu'il avait intention de marier la jeune douairière de Bretagne avec le duc Philippe de Savoie son beau-frère.

Le vicomte ne manqua pas d'offrir sa médiation auprès de sa fille. Louis XI était cependant instruit par l'amiral Montauban, qu'elle avait absolument résolu de ne point contracter de second mariage; mais le prince, qui avait ses raisons, accepta ses offres, et l'engagea de se rendre à Rhedon en Bretagne, où il devait lui-même aller.

La princesse, qui se tenait alors au château de Rochefort, près de Rhedon, informée de l'entreprise, se fit conduire par la dame de Rieux sa mère à l'église du lieu, où, prosternée au pied des autels, elle fit vœu de ne point se remarier. Louis XI apprit aussitôt ce qui venait d'arriver, et reprocha très durement au vicomte cette action de sa fille. Ce prince lui dit d'un ton menaçant: « M. de Thouars, vous ne voulez rien faire pour moi, je le vois bien ; nous ne serons pas toujours en Bretagne, je vous retrouverai en France : vous vous entendez avec votre fille. »

Le vicomte, qui était innocent, fut effrayé; il se jeta aux genoux du roi, les larmes aux yeux, sans oser répondre. Arbel, son écuyer, qui était présent, voulut l'excuser; mais le roi, prenant cet officier du vicomte à la gorge, le menaça de le jeter à la mer, en ajoutant que personne ne pourrait l'en empêcher.

D'Amboise, accompagné des seigneurs de Beauvau et de Montauban, alla au château de Rochefort -en-Terre, et il sollicita vivement sa fille d'acquiescer aux propositions du roi. Il lui représenta que, si elle persistait dans ses refus, toute sa famille allait être exposée aux effets de la haine et du ressentiment d'un prince qui ne pardonnait jamais; il promit de lui céder tous ses biens, si elle voulait consentir au mariage. Passant ensuite aux propos les plus vifs, il lui dit qu'il fallait sans différer venir trouver le roi, ou qu'il l'y traînerait par les cheveux.

La duchesse répondit à son père avec douceur qu'elle n'était plus sous sa puissance; que d'ailleurs elle n'avait point affaire au roi.

Le vicomte ne put jamais vaincre la résistance de sa fille. Le roi lui en ayant fait de nouveaux reproches, il fut dans la plus grande consternation, et se regarda comme perdu. Le moment d'entamer l'affaire projetée depuis longtemps ne pouvait être plus favorable; aussi Louis XI ne manqua pas d'en profiter.

Sachant que Louis d'Amboise était dans la crainte de quelque événement fâcheux, ce prince envoya chez lui le bailli de Sens, pour l'assurer de sa part qu'il lui ferait un très grand plaisir s'il voulait lui donner la vicomté de Thouars.

D'Amboise, très flatté de cette ouverture, promit tout ce qu'on voulut, et dit : Je ne sais si je fais bien ou mal; mais si j'avais trois terres semblables à celle de Thouars, je les donnerais toutes au roi. Le vicomte alla promptement au château de Nantes, où il trouva le prince très disposé à le bien recevoir (15).

La donation de la vicomté de Thouars fut donc faite à Louis XI, le 25 janvier 1461; l'acte fut passé par des notaires de Nantes. Il était néanmoins stipulé dans l'acte, que le vicomte en jouirait pendant sa vie; que le roi lui paierait une pension viagère de quatre mille livres, et que si le vicomte avait un enfant mâle de son mariage, la donation serait nulle.

Louis XI, instruit par son conseil que l'interdiction prononcée contre le vicomte s'opposait à la validité de cette donation, jugea qu'il fallait tenir une autre marche.

Ce prince était pour lors à l'abbaye de Saint-Florent, près de Saumur: il y fit inviter le vicomte à dîner avec lui, et il fut convenu que le roi ferait d'abord casser l'arrêt du parlement, et annuler l'interdiction portée par cet arrêt; qu'ensuite Louis d'Amboise transporterait la propriété de la vicomté de Thouars à Louis XI, par un acte en forme de vente; et enfin que le vicomte reconnaîtrait avoir reçu les sommes qui paraîtraient avoir été fixées pour le prix des objets.

Cette convention faite, le prince évoqua au grand-conseil le procès appointé au parlement, entre le vicomte de Thouars et la duchesse de Bretagne sa fille. Celle-ci mit tout en usage pour empêcher que l'affaire n'y fût jugée ; elle fit même proposer un déclinatoire: mais Jean de la Mothe son procureur, qui osa se charger de la commission, fut emprisonné.

Un arrêt du conseil, rendu à Saumur le 5 septembre 1462, cassa celui du parlement, et annula l'interdiction.

Louis XI et le vicomte se rendirent ensemble à Thouars pour rédiger les clauses de l'acte, qui fut passé ensuite par des notaires de Saumur le 25 septembre 1462.

Le vicomte vendait sa terre cent mille écus, qui devaient être payés dans huitaine, aux conditions qu'il en jouirait sa vie durant; qu'il aurait une pension viagère de quatre mille livres, et que la vente n'aurait point d'effet, si le vicomte avait un enfant mâle de son mariage. Bérard, trésorier de France, apporta quelques jours après à Louis d'Amboise dix mille écus, et lui fit donner quittance des cent mille écus portés par l'acte. Ainsi le vicomte fit remise au roi des quatre-vingt-dix mille écus qui restaient à payer.

 

La duchesse de Bretagne sa fille protesta contre l'arrêt, et soutenait que le conseil n'avait pu connaître de la cause sans entreprendre sur les droits du parlement qui en était saisi. Elle persistait à dire qu'attendu la qualité des parties, l'affaire ne pouvait être jugée que par la cour des pairs. Mais les poursuites de la duchesse ne furent point continuées.

Elle voulut quitter le monde; et avant d'exécuter ce pieux dessein, elle céda au fils aîné de sa sœur Marguerite et de Louis Ier de la Trémouille, toutes ses prétentions; l'acte de ce transport fut passé à Vannes le 24 février 1468 : ce neveu était le célèbre Louis II de la Trémouille; Françoise d'Amboise fit profession religieuse dans le couvent des Carmélites de Boudon, près de Vannes, et elle mourut dans le monastère de Couets, près de Nantes, qu'elle avait fait bâtir, et où elle est inhumée.

Depuis les conventions faites avec Louis XI, le vicomte de Thouars vivait retiré dans ses terres, dont il fit même hommage au roi le 12 juillet 1466, environ quatre ans après l'acte du prétendu transport qu'il en avait fait.

 

Enfin, après avoir éprouvé toutes les vicissitudes de la fortune, Louis d'Amboise mourut enfin le 28 février 1469 au château de Thouars, dépossédé depuis un an de ses biens au profil du roi.

 

Il fut inhumé dans un caveau, au milieu du choeur de l'église de Saint-Laon de Thouars.

Après la mort de ce seigneur, Louis Tindo, seigneur de la Brosse, filleul de Louis d'Amboise, sénéchal de la vicomté, fut nommé par le roi conseiller et premier président du Parlement de Bordeaux pour avoir aidé Louis XI à déposséder le vicomte, son bienfaiteur et ses héritiers.

 (circuit saint Jean de Bonneval rue du pont "des chouans")

 Le roi écrivit aussitôt à Jacques de Beaumont, seigneur de Bressuire, de se rendre à Thouars et de s'emparer du château, dont il aurait grand soin de fermer l'entrée à la seconde épouse du vicomte, à la dame de Montsoreau sa belle-mère, aux gens de la Trémouille et à tous leurs adhérens.

Ce début annonçait déjà que Louis XI ne faisait pas grand cas des voies ordinaires de la justice. Beaumont se rendit donc à Thouars, accompagné d'une troupe de gentilshommes, s'empara du château, et fit faire inventaire des meubles et des titres.

Il prit ensuite possession, au nom du roi, de la vicomté de Thouars, et de tous les autres biens du feu vicomte, qui n'appartenaient certainement pas à la couronne.

L'auteur des Mémoires sur Thouars dit que le roi chargea Commines de cette affaire; s'il eût fait un peu plus d'attention à l'enquête de 1483, il aurait vu que ce prince donna cette commission au sire de Beaumont, seigneur de Bressuire, qui l'exécuta.

Commines vint bien à Thouars, mais fort longtemps après, avec d'autres commissaires, pour soustraire des archives quelques titres dont il sera question dans la suite.

Toutes les entreprises de Louis XI sur les biens de Louis d'Amboise, avaient été suggérées et conduites par Commines, favori du prince, seigneur d'Argenton en Poitou, et qui comptait partager les dépouilles du seigneur de Thouars.

Louis XI lui donna la principauté de Talmond, les seigneuries d'Olonne, Brain, Brandois, Château-Gaultier, la Chaume, Curson et autres terres; ou, pour mieux dire, le favori choisit et prit ce qu'il voulut dans la succession.

Les lettres de cette gratification furent expédiées à Amboise par le chancelier d'Oriolle, Richard Estivalle, et le sieur de Serizay. On les présenta au parlement pour y être vérifiées : mais Louis Ier de la Trémouille, comme étant administrateur de ses enfants, y forma opposition.

Commines sentait bien que les contrats faits entre Louis XI et le vicomte de Thouars portaient une empreinte assez profonde de collusion pour être reprochables; d'ailleurs il n'était question dans ces actes que des terres de Thouars, Mauléon et Berrye. Plusieurs de celles qui avaient été données à Commines ne faisaient point partie des objets vendus; elles étaient donc manifestement usurpées.

Commines, très fécond en ressources, imagina un moyen de défense fondé sur la confiscation qui avait été prononcée autrefois contre Louis d'Amboise. Ce moyen pouvait devenir décisif, par les précautions frauduleuses qu'il prit afin d'empêcher le seigneur de la Trémouille de se défendre sur cet article. Voici comme la chose se passa.

Nous avons déjà dit que tous les biens du vicomte de Thouars avaient été confisqués et unis à la couronne; que Charles VII ayant reconnu l'innocence de ce seigneur, l'avait rétabli dans ses possessions, mais à certaines conditions, entr'autres qu'il ne marierait point sa fille aînée sans la permission du roi.

Les lettres de restitution et celles qui permettaient le mariage, étaient des titres précieux que Louis d'Amboise avait grand soin de conserver pour sa sûreté. Commines savait parfaitement que ces lettres avaient été accordées, et qu'elles existaient en bonne forme dans les archives de Thouars; il ne restait donc aucun autre parti que celui de les soustraire.

Louis XI, qui se prêtait à tout pour favoriser son ministre, ordonna au sire de Beaumont de venir le trouver aux Forges près de Chinon, et d'y conduire avec lui les officiers du siège de Thouars.

Beaumont s'y rendit, accompagné de Louis Tindeau, sénéchal, et Richard Estivalle, procureur du roi. Le roi leur dit, en présence de Jean Chambon, Réné du Nohier, Philippe de Commines et du maréchal de Gié, de la maison de Rohan, qu'il avait fort à cœur le procès contre la Trémouille, et que son intention était qu'ils allassent à Thouars pour voir si dans les archives il y aurait quelques pièces utiles dans la cause.

Le roi chargea de cette commission tous ceux qui étaient présents, et que nous venons de nommer.

Les commissaires allèrent à Thouars avec Commines; ils firent l'ouverture d'un coffre placé dans la chambre où Louis d'Amboise était décédé. Ils y trouvèrent les lettres de restitution, et celles qui permettaient le mariage de Françoise d'Amboise avec Pierre, duc de Bretagne; elles furent données à Beaumont.

Mais Commines, qui n'eut pas la force et la prudence de se contenir, les lui tira brusquement des mains, en disant que le roi voulait qu'elles fussent brûlées, et sur-le-champ il les jeta au feu.

Le vertueux Chambon, indigné du procédé de Commines, les retira promptement, et dit en colère : Quel diable est ceci? C'est mal fait, elles ne seront pas brûlées ; il faut les porter au roi. Commines n'alla pas plus loin; il était trop assuré qu'elles ne lui échapperaient pas, lorsqu'elles auraient été remises à ce prince.

Beaumont et les autres commissaires les portèrent donc au roi, qui était pour lors à Cande; il les reçut avec beaucoup de satisfaction, et les fit brûler. Il fit jurer à tous ceux qui étaient présents, de n'en pas parler; Louis pouvait compter sur leur serment, il y avait trop à craindre pour celui qui aurait osé manquer à sa parole.

Quelque temps après, ce prince, étant encore aux Forges, s'entretenait du procès avec ses courtisans; et en parlant des lettres de restitution qu'on assurait avoir été données par Charles VII, il dit qu'elles n'étaient ni en l'air, ni en terre, ni au ciel. Cette indiscrétion dut faire soupçonner bien des choses à ceux qui n'avaient pas connaissance du fait de Cande.

Un jour Louis XI engageait Chambon d'aller à Paris pour presser le jugement de l'affaire, qui, disait-il, traînait fort en longueur. Il lui observa qu'il fallait insister sur la confiscation; mais Chambon, qui aurait désiré n'être point chargé d'une telle commission, répondit au prince avec cette franchise et cette candeur qui caractériseront toujours une âme honnête : Ait! sire, vous savez bien que c'est grande charge de conscience d'avoir brûlé les lettres qui servaient en cette matière aux pauvres en fans de la Trémouille; comment pourrai-je faire honnêtement la poursuite, moi qui sais qu'elles ont été brûlees ?... Ne vous en chaille, dit le roi ; il faut y aller, et ne m'en parlez plus. Chambon, forcé d'obéir, se rendit à Paris, et n'eut pas de peine à faire juger la cause en faveur de son commettant.

La confiscation était un moyen puissant, dès que le seigneur de la Trémouille ne pouvait plus représenter les pièces qui militaient pour lui, et dont la soustraction entraînait la perte de ses biens.

La vicomte de Thouars fut donc réunie à la couronne pour la seconde fois, et Commines fut maintenu dans la possession de la principauté de Talmond et quelques autres terres : mais il fut très mécontent de voir que l'arrêt adjugeait aux enfans de la Trémouille les seigneuries d'Olonne, la Chaume, Curzon, Brain et Brandois, que le roi lui avait données. Ces terres étaient situées aux environs de Talmond; elles plaisaient à l'avide Commines, auquel il n'était pas possible de résister.

Louis XI fit donc proposer au seigneur de la Trémouille un échange des terres de Marans, l'Ile de Ré, Mauléon, la Chaise le-Vicomte, en y joignant les seigneuries de Vierson et d'Issoudun en Berri, pour celles de la Chaume, Curzon, Olonne, Brain et Brandois.

Mais Louis de la Trémouille, quoique réduit aux plus affreuses extrémités, eut encore l'âme assez grande pour rejeter la proposition; il eut cependant la douleur de voir ses malheureux enfants dans la dure nécessité de consentir à ce que le roi voulait. Le prince avait assuré qu'ils n'entreraient jamais au service s'ils n'obéissaient pas; on leur conseilla de ne point résister.

En conséquence, un sieur de Souille et le prévôt d'Orléans, tous deux amis de Commines, firent les fonctions de curateurs pour les enfants encore mineurs, et présidèrent à l'acte d'échange qui laissait à Commines les terres de la Chaume, Olonne, Brain et Brandois, pour celles de Marans, l'Ile de Ré, Mauléon, et la Chaise-le-Vicomte. On ne leur donna point les seigneuries de Vierson et d'Issoudun qu'on avait d'abord promises. Les seigneurs de la Trémouille sacrifiaient une partie de leurs biens pour racheter l'autre.

Depuis quelques années, Louis de la Trémouille et Marguerite d'Amboise son épouse avaient cédé à Louis XI les terres de Marans et l'Ile de Ré, pour celles de Vierson et Xainctcome en Berri; l'acte d'échange avait été fait en 1470: mais ce prince, qui probablement n'y trouva pas son avantage, rompit bientôt les conventions. Toutes les parties de cette affaire forment une chaîne de violences et d'iniquités.

Histoire du Poitou De Antoine-René-Hyacinthe Thibaudeau

 

 

Arrestation lors d’une partie de Chasse de Louis d'Amboise, Vicomte de Thouars, prince de Talmont pour lèse-majesté <==.... ....==> Description du château de Thouars dans l’inventaire de Louis d’Amboise, vicomte de Thouars

 

  Juin 1433 Complot formé contre le favori de Charles VII, Georges de La Trémoille qui résidaient au château de Chinon.<==

....==> Église Saint-Étienne d'Ars-en-Ré ; Louis 1er de la Trémoïlle, Comte de Benon, seigneur de Sully, des îles de Ré et de Marans

 

 

 

 

 


(1). Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, comte de Benon et de Guines, seigneur de Talmont, de Mauléon, Montrichard, l’île de Ré, Marans, etc., fils d’Ingelger II seigneur d’Amboise et de Jeanne de Craon, avait hérité de tous les biens de son oncle Pierre, seigneur d’Amboise et vicomte de Thouars, vers l’an 1422. (Voy. notre vol. précédent, p. 42, note.)

 Nous n’essaierons pas ici de faire la biographie, même sommaire, de ce célèbre personnage dont la carrière fut longue et accidentée ; nous nous contenterons de citer quelques actes inédits, relatifs surtout à la période de sa vie dont il est question dans ces lettres, et d’énumérer les procès criminels qu’il eut à soutenir au Parlement.

Le vicomte de Thouars fut arrêté à Poitiers le 28 mars 1431 n.s. (voir Bibl. nat., ms. fr. 21302, à cette date, extraits d’un registre du conseil du Parlement de Poitiers, aujourd’hui perdu).

L’arrêt du 8 mai 1431, le relevant de la peine de mort qu’il avait encourue, et le condamnant à la prison et à la confiscation, est conservé en original aux Arch. nat., J. 366, n° 1.

Une autre layette du Trésor des chartes renferme deux serments de fidélité prêtés au roi, par Louis d’Amboise. L’un est du 7 août 1436.

 L’autre, plus intéressant, n’est malheureusement pas daté ; il est antérieur de peu de temps à sa condamnation, et c’est précisément ce qui le rend important et fait regretter qu’il ne porte pas une date précise.

Par cet acte, le vicomte de Thouars déclare renoncer à toute alliance contraire à la volonté de Charles VII, notamment à celle d’Antoine de Vivonne, d’André de Beaumont et de Renaud de Velors, qui avait été son capitaine à Amboise, et nommer dans les principales places qui lui appartiennent des capitaines ayant l’agrément du roi : à Thouars, Louis d’Avaugour ; à Mauléon, Hardy Savary ; à Talmont, le sire de Tonnay[-Boutonne], et à Amboise, Jacques de Lestang. (J. 400, nos 74 et 76.)

 D’après le P. Anselme, le capitaine de Thouars qui livra cette ville aux commissaires royaux, le 14 mai 1431, était Jacques de Montbron. (T. VII, p. 17.)

Le 11 décembre 1433, le roi ayant mandé au Parlement de lui délivrer copie de l’arrêt rendu contre le vicomte de Thouars et des interrogatoires, en ce qui le concernait, d’André de Beaumont et d’Antoine de Vivonne, ses complices, la cour fit réponse qu’elle ne possédait rien des arrêts ni des confessions. (Arch. nat., X2a 21.)

Outre les biens déclarés dans les lettres de restitution, il y avait encore les terres de Laleu et de Loumeau en Aunis ; le procureur général en contestait la possession à Louis d’Amboise. Celui-ci toutefois avait obtenu d’en percevoir les revenus, à titre de récréance, pendant la durée du procès ; le receveur royal à la Rochelle ayant émis la prétention d’en faire la recette, Louis obtint du procureur du roi la pleine reconnaissance de son droit d’usufruit, jusqu’au prononcé de l’arrêt, par accord du 10 décembre 1434. (X1c 148.)

Dans d’intéressantes plaidoiries du 28 février 1427 n.s., on apprend que Louis d’Amboise, vicomte de Thouars, et son capitaine de la Chaize-le-Vicomte, Jean Buor, chevalier, sr de la Gerbaudière, ayant fait démolir les fortifications du prieuré dudit lieu, dépendant de l’abbaye de Saint-Florent de Saumur, furent l’objet d’une plainte en attentat et abus d’autorité de la part du prieur, Zacharie Geffroy. (X1a 9198, fol. 249 v°, 251.)

 Le vicomte de Thouars, qui s’était rendu coupable du meurtre de Simon de Velors, avant le mois de juillet 1435, ayant obtenu des lettres de rémission, des poursuites furent exercées contre lui par Renaud de Velors, écuyer, sr de Meulles et de la Chapelle-Belloin (son ancien allié), Jeanne de Velors, sœur de celui-ci et femme de Jean Loube (aliàs Boubé), écuyer, Thibaut Fourrateau et Guyonne de La Coudre, sa femme, tous parents et héritiers de la victime et opposants à l’entérinement de la grâce, et les procédures, commencées le 2 juillet 1435, durèrent jusqu’au 18 mai 1442. (X2a 22, aux dates des 31 mars 1438, 20 janvier et 3 février 1439, 4 janvier, 21 avril et 2 mai 1440 ; X2a 23, fol. 12 et 94 v°, arrêt du 18 mai 1442 ; X2a 25, aux 2 et 20 juillet, 2 août 1435, 23 mai, 7 juillet et 6 octobre 1436.)

Louis d’Amboise fut encore poursuivi, ainsi que Jean Sanglier, chevalier, et Guillaume Maynard, ses familiers, par Huguet Vivier qui les accusait d’excès et de mutilation sur sa personne. (Actes des 2 août 1443, 8 juin 1444, et arrêt du 5 avril 1447 ; X2a 23, fol. 120 et 370 ; X2a 24, au 8 juin 1444.)

Mentionnons, en outre, les procès criminels engagés par le vicomte de Thouars contre le duc et la duchesse de Bretagne, les 3 juin et 14 octobre 1457 (appel d’une sentence du sénéchal de Poitou, X2a 27, fol. 263, 286 v°) ; contre Louis Fumée, avocat au Parlement, le 23 juillet 1457. (Id., fol. 271.) Aux 5 et 8 juin 1469, Guillaume Chauvin était demandeur en matière d’excès contre lui et contre Jean Guymar, son sénéchal de Talmont, Étienne Bricet et autres officiers du lieu. (X2a 35, aux dates.)

Une autre affaire relative au prieuré de Saint-Jouin de Mauléon donna lieu à des procédures criminelles entre François de Brillac, abbé de Pontlevoy, et Louis d’Amboise, les 28 novembre, 5 et 7 décembre 1469. (Même registre.)

 Le vicomte de Thouars décéda dans les premiers mois de l’année suivante.

Le 25 janvier 1462 n.s., il avait fait cession à Louis XI de la vicomté de Thouars, à la réserve de l’usufruit, moyennant la somme de 10,000 écus d’or, en présence de Louis de Crussol, sénéchal de Poitou, et de plusieurs autres personnages. (Anc. mémorial M de la Chambre des comptes, fol. 24 ; Arch. nat., P. 2299, p. 284.) La collection de dom Fonteneau contient aussi un grand nombre d’actes intéressants relatifs à Louis d’Amboise.

(2). Une notice a été consacrée à Pierre d’Amboise, vicomte de Thouars, dans notre précédent volume, p. 42, note.

(3). Jean II de Sainte-Maure, seigneur de Montgauguier, fils de Jean Ier et de Jeanne des Roches, était en 1425 sous la tutelle de Philippe d’Orgemont. La mère de Jean Ier, seconde femme de Pierre de Sainte-Maure, sr de Montgauguier, était Marguerite d’Amboise, fille puînée d’Ingelger Ier, seigneur d’Amboise. A la mort de celle-ci, son fils réclama le tiers de la succession d’Amboise qui lui fut contestée par les co-héritiers. D’où naquit le procès dont il est question ici. Il n’était point terminé à la mort de Jean Ier et fut repris par le tuteur de Jean II, contre Louis d’Amboise, vicomte de Thouars. (Le P. Anselme, Hist. généalogique, t. V, p. 11.)

Jean Ier de Sainte-Maure et Jeanne des Roches, sa femme, réclamèrent aussi une part de la seigneurie de Mortagne-sur-Sèvre à Jean de la Haye, sr de Passavant, Isabelle de Vivonne et Pierre de Brézé, qui la tenaient par indivis. (Long et curieux arrêt du 31 janvier 1420 n.s., Arch. nat., X1a 9190, fol. 75.)

Jean II soutint encore d’autres procès, qu’il nous suffira de mentionner sommairement. Une affaire criminelle, dont l’origine n’est pas nettement établie, était pendante, le 9 juin 1430, entre le sr de Montgauguier et Philippe d’Orgemont, chevalier, sr de Méry, d’une part, et Jean Mauliart. A cette date, celui-ci obtint son élargissement et un sursis jusqu’à la Saint-Martin suivante. (X2a 21, fol. 134 v°.) Le 7 juillet 1433 et le 7 juin 1434, Jean procédait contre Geoffroy de Trémarret et Isabelle Goyon, sa femme, auxquels il réclamait la tierce partie de la seigneurie de Berrie. (X1a 9200, fol. 171 v°, 248.) Du 7 juin 1432 au 15 novembre 1435, on trouve le sr de Montgauguier engagé dans une autre contestation judiciaire, commencée du vivant de son père, contre Pierre sr de la Rocherousse. Marie de Sainte-Maure, sa tante, lors de son mariage avec Pierre de la Rocherousse, le père, avait eu en don la terre de Rivarennes ; il paraît qu’il avait été stipulé qu’après le décès de son mari, cette terre ferait retour aux frères ou neveux de Marie et ne deviendrait pas l’héritage de ses enfants. (X1a 9194, fol. 17, 83 et v°, 85 v°, 86 ; X1a 9200, fol. 286.) La cour s’étant montrée disposée à reconnaître le droit prétendu par Jean de Sainte-Maure sur Rivarennes, le sr de la Rocherousse déposa en garde au greffe une somme de 100 royaux d’or « pour certaines erreurs qu’il entendait proposer » contre un arrêt rendu au profit du sr de Montgauguier. (Acte du 16 juillet 1435, X2a 21.) Jean II de Sainte-Maure décéda avant l’année 1463. A cette époque, sa veuve plaidait contre un fils du premier lit.

(4). Jean de Norry, fils de Pierre, chevalier, conseiller et chambellan de Charles VI, et de Jeanne de Montboissier, fut élu en 1433 archevêque de Vienne, siège qu’il occupait encore en 1437 et qu’il parait avoir gardé jusqu’à sa mort arrivée en octobre 1438. (Gallia christ., t. XVI, col. 113.)

(5). Robert de Rouvres, d’abord évêque de Séez, occupait le siège de Maguelonne depuis un an et demi. (Voy. ci-dessus, p. 23, note 3.)

(6). Sur ce personnage, cf. ci-dessus, p. 27, note 2.

(7). Robert Le Maçon, seigneur de Trèves en Anjou. (Vol. précédent, p. 298, note 2.)

(8). Jean Malet, sire de Graville et de Marcoussis, grand-maître des arbalétriers, de 1427 à 1449.

(9). Jean V, sire de Bueil, Montrésor, Saint-Calais, etc., comte de Sancerre, conseiller et chambellan du roi, fils de Jean IV et de Marguerite dauphine d’Auvergne, dame de Marmande, personnage des plus considérables du règne de Charles VII, fut créé amiral de France après la mort de Prégent de Coëtivy (1450) et vécut jusqu’au 7 juillet 1477. M. Camille Favre a placé en tête de l’édition du Jouvencel, texte établi et annoté par M. Léon Lecestre, publié par la Société de l’Histoire de France, une importante et très complète biographie de Jean V sire de Bueil (Paris, 2 vol. in-8°, 1887).

La duchesse d’Anjou, Yolande, reine de Sicile, lui engagea la baronnie de Mirebeau, pour le prix de 11000 réaux d’or, par acte du 20 février 1431 n.s., et René d’Anjou la lui racheta les 8 et 15 mars 1448 n.s. (Arch. nat., P. 1340, cotes 260, 1 à 6.)

(10). Hardouin VIII, baron de Maillé, né en 1383, encore vivant en 1466, alors grand-maître d’hôtel de la reine Marie d’Anjou et membre du conseil du roi. Il avait épousé Perrette d’Amboise, dame de Rochecorbon.

(11). Le Dictionnaire des familles du Poitou contient quelques notes sur divers membres de cette famille originaire des environs de Thouars et cite deux actes, l’un du 17 février 1434, l’autre du 21 juin 1437, dans lesquels André Chambret paraît en cette même qualité de notaire. (Nouv. édit., t. II, p. 225.)

Le 5 mars 1426 n.s., Jean Chambret, procureur de la vicomté de Thouars, était poursuivi au criminel par un nommé Jean Cartaut, ainsi que Jean Barret, sénéchal, et Jean Colas, châtelain dudit lieu. (Arch. nat., X2a 18, fol. 90.)

(12) « Messiturs de Sainte-Marthe , auteurs du Gullia christiana, trait vaillcrent à l'histoire généalogique de la maison de la Trémouille » aussitôt qu'ils eurent mis au jour celle de la maison de Beauvau; ils « en avaient recueilli beaucoup de mémoires et de titres de divers en« droits. André Duchesne , historiographe du roi , les aida beaucoup « pour ce travail, avec M. Jules le père , secrétaire du roi. En récom« pense les jumeaux (de Sainte-Marthe) donnèrent au premier tout ce « qu'ils avaient ramassé sur la maison de Montmorency; et par cet a échange, on assembla en un corps tout ce qui concernait ces deux « grandes et illustres maisons. Les manuscrits de celle de la Trémouille, en trois volumes in-fu, sont conservés parmi ceux de leur y bibliothèque. »

(13) La maison de Rouault est illustre, et tire sou origine de Clément Rouault, écuyer, qui vivait en 1327. André Rouault, premier de ce nom, seigneur de Boisménard, se trouva aux guerres de Guienne et de Poitou en 1341 et 1352. Il avait épousé, selon quelques mémoires, Marie de Montfaulcon, veuve de Guillaume de Beaumont, seigneur de Glenay, dont il eut Clément Rouault, dit Tristan, seigneur de l'île de Ré, de Marans, de la Garnache, et vicomte de Thouars, à cause de Perronelle, sa femme, qu'il épousa en 1376 ; elle était fille ainée de Louis, vicomte de Thouars, et de Jeanne, deuxième du nom, comtesse de Dreux. André Rouault prit la qualité de comte de Dreux, vicomte de Thouars, et tint un rang à la cour et dans les armées, sous les règnes de Charles V et de Charles VI. Il mourut sans laisser de postérité.

(14) Tout ce qui suit jusqu'à l'arrêt de 1533, est extrait des pièces qui sont aux archives du château de Thouars.

(15) Tout ce que nous avons dit sur ce qui se passa entre Louis XI, le vicomte de Thouars et la duchesse de Bretagne, est, d'après MM. Estivalle et Arbcl, officiers du vicomte, René d'Appelvoisin, Hugues Cartier, du Kegnier, et plusieurs autres gentilhommes de la compagnie de ce seigneur , qui furent témoins oculaires des faits que nous avons rapportés, et qui les déposèrent dans l'enquête juridique du mois d'avril 1471.

 

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