Carte des environs de Fontenay le Comte avant le Xe siècle - Motte féodale du RULLAN (la tour de Rulhan)
Il est peu de travailleurs qui aient entrevu jusqu'ici le secours que peut prêter à la géographie gauloise le cadastre combiné avec les anciens aveux, les registres censiers et autres titres de même nature.
Les renseignements précieux y abondent pourtant; il suffit de savoir les extraire du fatras qui les entoure. Indépendamment des noms de rivières, de ruisseaux, de bourgs, villages et maisons isolées, dont l'origine est celtique, il est une foule de lieux-dits qui ont conservé leurs antiques appellations ou gardent le souvenir de monuments détruits. Nous nous sommes livrés à cette recherche, pour quelques communes de la Vendée, et nous avons été amplement payés de nos peines, par les résultats obtenus.
Les environs de Fontenay ont surtout été étudiés avec un soin tout particulier. La carte ci-jointe porte tous les noms remontant au- delà du Xe siècle, trouvés dans les divers documents qui nous sont passés sous les yeux.
Elle indique l'état des lieux antérieurement à cette date, restitué surtout à l'aide des dénominations de ténements, lesquelles ont souvent été tirées de l'état primitif des endroits qu'elles servent encore à désigner. Nous avons ainsi constaté que les plaines, s'étendant de la Sèvre-Niortaise au Lay, n'ont jamais été couvertes de bois, comme on l'a souvent répété, sans tenir compte de la nature du sol, où les arbres des forêts ne sauraient trouver leur nourriture.
Quelques points seulement ont pu faire exception, grâce à la couche siliceuse qui, sur les plans inclinés et dans les vallons, y couvre le calcaire ; encore le buis, les genêts, les ajoncs, mêlés de quelques chênes rabougris, ont-ils dû seuls y planter leurs racines. L'œil ne rencontrait partout alors que des landes et des broussailles sans fin, bordées d'un côté par les hautes futaies du bocage, de l'autre par les aubraies du golfe, et que rappellent, tout le long de la plaine, les noms d'une foule de ténements analogues à ceux inscrits sur notre carte (les Ardillers, les Genêts, les Ajoncs, les Landes, les Roncereaux, Boisse, le Désert, etc., etc.).
La monotonie de ces perspectives était, çà et là, interrompue par quelques misérables assemblages de huttes (de colliberts), posées autour d'un petit nombre de sources, taries pour la plupart aujourd'hui, et sur les bords des rivières coupant de temps à autre les terrains incultes et brûlés par le soleil. La végétation vigoureuse de ces oasis contrastait avec la tristesse du plat pays.
Des chemins peu fréquentés sillonnaient la lande dans toute sa longueur, ou menaient d'une bourgade à une autre.
La principale de ces voies de communication, appelée le Chemin-Vert dans tous les anciens titres, venait de Niort (2), passait par Sérigny, Lesson, Prinçay, Massigné, Cénan, Sauvéré-le-Sec, Nieul-sur-l'Autise, Cuiron (aujourd'hui Puy-Letard), Darlais, se réunissait, avant d'entrer à Fontenay, au vieux Chemin-des-Sauniers, venant de Poitiers, et se dirigeait ensuite, par Petosse et le Grand-Vanzay, vers Mareuil.
Rendu là, le Chemin-Vert se bifurquait : l’une de ses branches conduisait à Talmond et à Jart; l'autre allait vers un second point de l'Océan, que nous croyons avoir été Brem ou plutôt le port nommé maintenant Saint-Gilles.
Le Chemin-des-Sauniers se séparait du Chemin-Vert, au- delà de Pétosse, près du lieu appelé depuis l'Abbaye, laissait Luçon sur sa gauche et traversait, au pont de la Claye, la rivière du Lay, qui se passait en bateau.
Cet obstacle franchi, il allait entre Saint-Cyr et Curzon, vers le ruisseau de Troussepoil, qu'il coupait au-dessous du Pé-de- Fontaines, couvert au sommet de sépultures celtiques, et touchait Longeville, avant d'arriver à Becciacum (Saint-Vincent-sur-Jard) et à Belesbat.
Ce qui frappe surtout, en suivant sur la carte de l'état-major le parcours du Chemin- Vert, dont l'origine remonte à la plus haute antiquité, et qui ne porte pourtant aucune des traces propres aux voies romaines, c'est le caractère celtique de la plupart des noms des bourgs qu'il traverse, et qui ont par conséquent été presque tous fondés depuis sa création. En certaines parties, principalement entre Pétosse et Mareuil, il a disparu sous la culture; mais il n'en est pas moins facile de le suivre, car il sert toujours de limites aux paroisses situées de chaque côté de son passage.
Même remarque peut être faite au sujet des centres d'habitations placés sur le tracé du Chemin-des-Sauniers.
Lorsqu'on le remonte à partir de Fontenay, on le voit passer par Charzay, Ardenne, Arty, Ardin et une foule d'autres bourgs ou villages d'origine celtique ou romaine.
Si maintenant nous revenons à notre carte, les traces celtiques ne manquent pas non plus.
Charzay, Bone (3), le Couron (4), Pahu (5), Panteuil, Auzay, et quelques autres peut-être, sont autant de noms gaulois.
Des huttes sur pilotis n'étaient plus d'ailleurs les seules demeures des Fontenaisiens ; ils s'étaient répandus sur les deux rives.
La découverte des trésors des Cabourdes en fournit la preuve.
Tout porte donc à croire que, lorsque ces dépôts furent enfouis, Fontenay avait déjà pris quelque extension, et que son petit port contribuait à favoriser cette marche ascendante. Les haches en bronze, extraites de ses sables, témoignent même d'une civilisation assez avancée. Certaines portions de la plaine devaient aussi avoir été livrées à la culture, des cabanes avaient été çà et là bâties, et le froment était venu mûrir à côté de l'orge et du millet.
L'existence de trois mottes factices semble venir encore à l'appui de cette assertion. L'une d'elles, élevée sur le sommet de l'enceinte du château et appelée, dans les documents écrits des XIVe et XVe siècles, le Rullan ou Motte-du-Rullan, cache probablement, sous un nom héroïque du moyen âge, un nom héroïque gaulois (6).
La seconde, qui s'élevait presque aux pieds de la précédente, servit, par la suite, de base au manoir féodal du Puy-de-la-Vau, et a été détruite en 1665.
La dernière, placée à côté de l'église Notre- Dame, porta, une villa mérovingienne.
Plusieurs chemins datent, selon nous, de ces temps. Ils ne furent pour la plupart, dans le principe, que de simples sentiers. Nous les avons indiqués sur la carte. Ce sont ceux allant, vers le nord, à Bone; à la Balingue, lieu de réunion dont nous parlerons; à Mervent, autre point important, entouré d'épaisses forêts, refuge ordinaire des habitants du pays dans les moments critiques; au Saint-Luc, le bois sacré (Lucus) de la contrée, et à Pareds , qui, plus tard, fut le chef-lieu d'une vaste circonscription ecclésiastique;
— vers l'ouest, à Thiré, localité celtique, rebaptisée au VIe siècle; au Langon, que des substructions antiques très considérables signalent à l'attention des archéologues; à Mouzeuil et à Nalliers, en passant par Panteuil; au Vieil-Auzay; à Auzay, dont la source en entonnoir fut le séjour préféré des lutins;
— vers le sud, au Martrais- de-Boisse (Buxus, buis) ; à Brillac; à Veluire; à Escoué et à l'île de Maillé; — vers l'est enfin, à Niort par Benet.
Mais il est deux points des environs de Fontenay qui méritent une attention plus spéciale, eu égard aux questions qui nous occupent.
Entre Gaillardon, la Croix-du-Camp (7), les Gourfailles, Pahu, le Martrais, la Garde et le Chemin- Vert, se trouve un espace assez vaste, coupé par deux combes profondes, se réunissant bientôt en une seule vallée, qui descend vers la Longève, au- dessous de la Garnison.
Les titres des XVe, XVIe et XVIIe siècles, relatifs à ces terrains, nous ont conservé les appellations caractéristiques de leurs diverses parties. Le versant, situé au-dessous des ruines romaines de Gaillardon, se nommait la Pierre-Fâche (fâcheuse) (8) ; la combe qu'il surmonte, la Vau-des-Landes; le versant opposé, la Lande- aux-Carns (aux pierres levées); l'autre combe, le Champ-Maloit (maudit).
Au -delà se trouvaient le Chiron-Garou et le Champ-des-Tombeaux, qu'avoisine l'un de ces lieux , couverts de débris romains, nommés Martrais, où les sépultures sont toujours si abondantes, et que fréquentait déjà, sans doute, quelque divinité infernale, avant la venue de César (9).
Nous sommes donc ici au milieu de souvenirs antérieurs à la conquête. Quelle était cette pierre fâche, sinon un monument druidique, aussi bien que les carns plantés sur l'autre coteau?
Et cette note d'infamie, cette malédiction jetée sur ces monuments et sur tout ce qui les entoure, ne sont-elles pas les preuves vivantes des efforts que firent les prêtres des dieux de Rome, et les premiers chrétiens après eux, pour éloigner les populations de ces lieux vénérés?
Le garou (l'homme-loup) de la mythologie Scandinave, qui plane encore sur le chiron du Champ-des-Tombeaux, ne semble-t-il pas une alluvion germanique posée sur un génie malfaisant de la religion des Celtes?
Le cadastre a négligé d'enregistrer plusieurs de ces noms, et ils se sont effacés de la mémoire des hommes, comme les rudes simulacres auxquels ils avaient longtemps survécu.
Notons en passant que la Pierre-Fâche, les Carns et le Martrais sont tournés vers l'ouest. Un autre Martrais, placé non loin de Boisse, a la même orientation.
Sur le chemin de Panteuil, au-dessus du gué qui sert à traverser la Longève, est le village de la Folie, bâti pareillement sur un coteau regardant l'ouest ou le nord- ouest. Or, il est à remarquer que la presque totalité des points si nombreux, d'origine ancienne (10), portant ce nom ou ceux de Champs-Fous, Champs-Follets et autres analogues, se trouvent dans une position identique, qui a été également donnée aux pierres folles, dolmens, allées couvertes des tumulus, pierres debout, à tous les monuments en un mot de cette catégorie.
Notre carte, qui ne renferme pourtant qu'une bien petite étendue de terrain, en fournit plusieurs exemples, indépendamment de la Folie en question, des deux Martrais, de la Pierre-Fàche et des Carns mentionnés tout à l'heure.
On y voit en effet les Champs-Fous-de-Boisse, placés, non sans cause peut-être, au-dessus de l'un des Martrais; le Chiron-Follet, paraissant avoir été un tumulus, qui s'élevait encore, en 1765, au-dessus du lit desséché du Seillot ou ruisseau de Mouillesac, et la pierre de la Folie, non loin de l'Orberie, citée dans un titre de 1329.
Le Poitou possède des centaines de lieux-dits de ce genre, et ce n'est pas l'un des moindres arguments en faveur de notre opinion sur le chiffre assez élevé de la population à l'époque gauloise.
Un motif puissant, une croyance religieuse généralement adoptée a pu seule faire choisir cette orientation. Les chrétiens dirigent le chœur des églises vers le berceau de leur religion. Il est très vraisemblable que les Gaulois ont été mus, en cette circonstance, par un sentiment de même ordre, et qu'ils ont tourné de préférence leurs prières du côté d'où leurs dogmes étaient venus.
Quelque île de la Grande-Bretagne a peut-être été le centre d'attraction où tout convergeait pour eux, à moins que ce ne fût quelque autre point inconnu des immensités de l'Océan, où se cachaient ces mystérieux hyperboréens, initiateurs présumés d'une partie de l'ancien monde.
(La Motte féodale du RULLAN Fonteneum castellum-castrum - Château de Fontenay)
En résumé, nous pensons que les Folies, les Champs-Fous, les Follets, etc., etc., furent autant de lieux consacrés au culte druidique, auxquels les Romains d'abord, et les chrétiens ensuite, ont attaché des idées et des qualifications injurieuses, afin de faire perdre au peuple l'habitude de s'y réunir.
Lorsque le paganisme fut à son tour proscrit, il a dû arriver parfois que ces dénominations furent appliquées à certains endroits dédiés aux idoles de ce culte, qui, n'appartenant plus à la même donnée, ne pouvaient avoir la même orientation ; c'est ce qui a amené quelques dérogations à la règle commune, dérogations qui se trouvent ainsi naturellement expliquées.
Nous serions porté à conclure de tous ces faits, que la population, disséminée sur l'espace limité par la Vendée, la Longève, la vallée de Sérigné et le bocage, qui commence à Pissotte (Puy-Sault, Podium saltûs, le Puy-du-Bois), formait une petite agrégation, dont Fontenay était le point central, possédant ses lieux de réunions religieuses et civiles, et qui se rattachait à une autre, d'un ordre supérieur, ayant Mervent pour chef-lieu.
Si le nom de Bone, donné aux deux villages marqués sur la carte, signifiait borne, comme le pensent quelques-uns, et non localité bâtie sur le penchant d'une colline, ainsi que le prétendent quelques autres, — position qu'ils occupent en effet, — notre hypothèse se trouverait recevoir de ce fait un certain appui. Mais nous savons si peu de chose de la vie de nos pères, que nous en sommes réduits, le plus souvent, à de simples conjectures.
Poitou et Vendée... Fillon, Benjamin
Amelie de Fontenay signataire En 1069, l'un des fidèles de Guillaume VIII d'Aquitaine, Ayraud surnommé Gassedener, fonde l'abbaye de Nieul-sur-l'Autise
La paix, achetée au prix de tant de sang, allait être violemment rompue par le plus infâme attentat. Les premiers mois de 1572 avaient été assez tranquilles, et la cour épuisait tous les semblants d'une hypocrite amitié envers ses anciens ennemis. Le roi de Navarre reçut même la main d'une fille de France, la belle Marguerite...
A mesure que le commerce et l'industrie prenaient du développement, l'insuffisance des voies de communication par eau se manifestait de plus en plus. Il ne suffisait plus de remonter ou de descendre les fleuves ou les rivières et d'aborder ainsi aux villes en faisant souvent de longs détours....
(1) Cette carte a été dressée sur nos notes par M. Billet, ancien chef de bureau du cadastre, qui publie en ce moment le bel Atlas cantonal du département de la Vendée.
(2) Au delà de Niort, il semble s'être dirigé par Mougon vers Limoges.
(3) Côte-Bone est simplement nommée Bone dans les anciens titres.
(4) Couron ou Curon signifie, en Franche-Comté, avance arrondie au-dessus d'une vallée.
(5) Pahu est cité dans un titre de 1387, ce qui prouve qu'il n'a pas reçu, comme on l'a dit, son nom de celui de l'un de ses propriétaires du XVIIe siècle.
(6) Rullan pour Rolland. Nous ne serions cependant pas éloigné de croire que ce nom n'a jamais été celui d'un homme, mais qu'il a eu, pour les Celtes, une signification tirée de la position du lieu, de sa nature ou de la destination qui lui avait été donnée. Plusieurs lieux-dits du Bas-Poitou portent ce même nom de Rullan.
(7) L'origine de cette croix est inconnue; mais elle remonte au -delà du milieu du XIIIe siècle.
(8) Peut-être aussi Pierre-Fâche est une traduction altérée de petra ficta.
(9) Notre savant ami et compatriote M. J. Cardin prépare un travail sur cette question. V. cependant l'explication du mot Martreium, donnée par Ducange dans son Glossaire.
(10) On a donné, dans le dernier siècle, ce nom de Folie à des rendez-vous de plaisir. Il est facile de les distinguer de ceux dont nous nous occupons.