1712 Le père Montfort visite l'évêque de Luçon Jean-François Salgues de Valdéries de Lescure
A l'heure même où Mgr de Beauvau refusait au Bienheureux sa protection, les évêques de Luçon et de la Rochelle l'appelaient à la fois dans leurs diocèses. Après sa lutte contre le jansénisme, M. de Montfort allait s'attaquer aux erreurs de Calvin, répandues dans une partie de cette région.
Avant de le suivre dans sa nouvelle campagne, un mot sur les prélats qui lui promettent leur appui.
Mgr Étienne de Champflour, né à Clermont, avait été élevé par les Jésuites de cette ville, puis par les prêtres de Saint-Sulpice. C'est dire qu'il avait puisé dans son éducation des principes très opposés au jansénisme. Nommé, très jeune, vicaire général de Limoges, il était rentré plus tard à Clermont, où la confiance du chapitre l'avait appelé aux fonctions de vicaire capitulaire, qu'il avait exercées dix ans. Il était vicaire général dans son diocèse d'origine, lorsque, en 1702, un décret royal l'appela à l'évêché de la Rochelle.
Il allait retrouver, sur un siège voisin, un de ses condisciples de Saint-Sulpice, Mgr Jean -François Salgues de Lescure.
Celui-ci était originaire d'Albi. Élève des Jésuites, lui aussi, successivement directeur de la Congrégation de la Croix au Mont-Valérien, missionnaire dans les Cévennes et vicaire général -d'Albi, avant d'être appelé à l'évêché de Luçon, il n'était pas seulement lié à Mgr de Champflour par les souvenirs d'une amitié de jeunesse, il partageait ses opinions théologiques et son zèle pour la vraie doctrine (1). Un exemple montrera jusqu'à quel point ils étaient, l'un et l'autre, opposés à l'hérésie.
Lorsque parurent les Réflexions morales de Quesnel, qui contenaient les principes de la secte, les deux évêques condamnèrent l'ouvrage par un mandement collectif. Le cardinal de Noailles, archevêque de Paris, qui n'avait pas aperçu le venin du livre et l'avait approuvé, se sentit blessé, et, dans son mécontentement, fit expulser du séminaire Saint-Sulpice les neveux des deux prélats. Ceux-ci n'hésitèrent pas à écrire au roi pour se plaindre d'une pareille mesure. Leur requête fut accueillie, et, de plus, un bref très élogieux du pape Clément XI leur donna raison.
Ce n'est pas seulement à Paris qu'ils avaient rencontré de l'opposition. Le clergé de Luçon, en partie atteint de jansénisme, résistait à l'impulsion de son évêque, et, à la Rochelle, le protestantisme avait survécu aux dragonnades de Louis XIV. C'est dans ces circonstances que M. de Montfort fut appelé par les deux prélats, pour les seconder dans leur tâche.
Il devait se rendre tout d'abord dans le diocèse de la Rochelle ; mais un prêtre du diocèse de Luçon, M. Louis Dorion, curé de la Garnache, fit appel à son zèle, et il consentit à s'arrêter dans sa paroisse pour y donner une mission.
Ce curé était un saint prêtre, ce qui facilita singulièrement la tâche du missionnaire. Celui-ci n'obtint pas seulement des habitants la parfaite assiduité aux exercices, il fit accepter aux plus aisés d'entre eux de nourrir chacun un ou deux des pauvres qui affluaient, à chaque mission, autour du prédicateur.
Un fait recueilli par la tradition explique cette docilité des habitants de la Garnache. On avait cru voir le missionnaire converser, dans le jardin de la cure, « avec une belle dame blanche qui était dans l'air (2),» et le récit de cette merveille avait fortifié encore la confiance qu'il inspirait.
Fort de cette popularité, il voulut, à la fin de la mission, laisser un souvenir de son passage en réédifiant, sous le vocable de Notre-Dame de la Victoire, une ancienne chapelle autrefois dédiée à saint Léonard.
« Ayant obtenu, dit le Père de Clorivière, le consentement de l'évêque et des habitants, il fit aussitôt travailler suivant le plan qu'il donna lui-même. Il voulut que l'autel fût construit en belles pierres blanches. Au lieu d'un tableau, il ordonna qu'il y eût un pavillon, dont les rideaux, pendant des deux côtés, seraient soutenus par des anges.
Au milieu, sous le pavillon, il fit faire une niche ovale et cintrée, d'où sortaient des rayons d'or. Dans la niche, et sur un piédestal doré, une statue de la sainte Vierge, de deux pieds et demi, avec son Fils entre les bras, devait être placée, avec cette inscription: « Notre-Dame de la Victoire. (3) »
Le Bienheureux fut obligé de laisser les travaux inachevés pour se rendre à Nantes, où l'appelaient les intérêts de ses pieuses confréries, mais promit de revenir bénir la chapelle l'année suivante.
L'évêque de la Rochelle l'attendait. Pour se rendre dans son diocèse, il devait passer par Saint-Hilaire-de-Lonlay, dont le curé lui avait demandé une mission, en termes pleins de cordialité.
Par une soirée pluvieuse, harassé de fatigue et ruisselant d'eau, le Bienheureux frappa à la porte de son presbytère. Au lieu de l'accueil gracieux qu'il espérait, il reçut des paroles blessantes et de sanglants reproches, avec la déclaration que la mission était ajournée. « L'homme ennemi » avait passé par là : le faible jugement du pauvre curé n'avait pu résister aux calomnies proférées contre le missionnaire. On ne lui offrit même pas, au presbytère, un abri pour la nuit, et il dut se réfugier sous le toit d'une pauvre femme qui lui donna, pour son souper et son gîte, un morceau de pain noir et un peu de paille.
Le lendemain, après avoir dit la messe à Montaigu, chez les Dames de Fontevrault, il arriva à Luçon, où sa première visite fut pour les Pères Jésuites, qui dirigeaient le grand séminaire.
Il comptait y faire une nouvelle retraite, avant de reprendre avec suite la carrière des missions dans les diocèses qui l’avaient appelé. Les bons religieux l'avaient accueilli avec une joie extraordinaire, et avaient vanté à leurs élèves sa haute vertu. La Providence allait confirmer leur opinion.
Un matin, le servant de messe du Bienheureux observa que, après la consécration, il restait immobile, les mains jointes et comme ravi en extase.
Ayant vainement tenté de le rappeler à lui, le jeune homme finit par quitter l'autel et la chapelle, afin de reprendre les exercices de la communauté. Il arriva au réfectoire vers la fin du déjeuner. Le voyant entrer si tard, le supérieur l'interrogea:
« Est-ce que M. de Montfort vient seulement d'achever sa messe? — Il s'en faut, répondit le servant, qu'elle soit achevée. Il y a plus d'une demi-heure qu'il a consacré, et, depuis ce moment, je ne sais s'il est vivant ou mort. »
On envoya à la chapelle un autre séminariste, qui trouva le saint homme dans la même position, et dut le tirer par sa chasuble pour le faire revenir à lui : le missionnaire avait passé trois quarts d'heure, étranger à tous les bruits de la terre, dans un colloque d'amour avec le Dieu caché. Il n'en fallait pas davantage pour faire dire « qu'il venait d'arriver un saint dans la maison ».
Le fait fut bientôt connu de toute la ville, et les Pères Capucins établis à Luçon sollicitèrent du Bienheureux l'honneur de le posséder quelque temps dans leur maison.
Il s'y rendit, avec l'espoir de s'édifier lui-même. En effet, leur bure grossière, leur corde et leurs sandales, éternel défi aux recherches sensuelles des mondains, le confirmèrent dans son admiration pour les fils de saint François, et lui inspirèrent le cantique sur le respect humain, qui compte parmi ses meilleurs.
Il était temps d'offrir ses devoirs à l'évêque. Un dignitaire de la cathédrale, M. Dupuy, le présenta au prélat.
Celui-ci le reçut avec bonne grâce, exprimant le regret de ne pouvoir le retenir immédiatement dans le diocèse, mais aussi l'espoir de le faire travailler, à son retour de la Rochelle.
En attendant, il l'invita à prêcher dans sa cathédrale le lendemain, qui était le cinquième dimanche après Pâques.
L'évangile du jour traitait de la prière. Après l'avoir brièvement commenté, le Bienheureux recommanda avec chaleur une prière qu'il tenait pour une des plus excellentes, le rosaire, et, à cette occasion, il crut devoir rappeler les excès des hérétiques albigeois, dont les fidèles avaient eu raison par la récitation réitérée du chapelet.
Luçon. — Les cloîtres de l'ancienne abbaye et l'évêché. Armand Jean du Plessis de Richelieu, de la Sorbonne à l’évêché de Luçon (Time Travel 1606)
Pendant qu'il flagellait ainsi ces ennemis de l'Eglise, il remarqua deux chanoines qui souriaient malicieusement, en regardant à la dérobée la contenance de l'évêque.
Descendu de chaire, il demanda à M. Dupuy la raison de ce manège: « Sans doute, dit celui-ci, vous auriez été un peu moins sévère pour les Albigeois, si vous aviez su que Mgr l'évêque est d'Albi. »
Le missionnaire était navré. Il voulut faire à Mgr de Lescure d'humbles excuses; mais celui-ci l'interrompit en lui disant avec un fin sourire: « Monsieur de Montfort, d'une mauvaise souche il sort quelquefois de bons rejetons. »
Après cette aimable entrevue, le Bienheureux continua sa route vers la Rochelle, où il arriva, en compagnie du frère Mathurin, vers la fin du mois de mai 1711.
Vers la fin du mois de mai, Montfort, répondant à l'appel de Mgr de Champflour, arrivait à la Rochelle. Il était si tard, quand il y entra, qu'il dut demander un gîte pour la nuit dans une méchante auberge.
Le lendemain, ne pouvant payer sa dépense, qui ne s'élevait pourtant qu'à douze sous, il laissa en gage son bâton de voyage, en attendant qu'il pût acquitter sa dette. Son attrait naturel le conduisit à l'hôpital, où il ne tarda pas à se faire connaître pour un saint; et bientôt une demoiselle Prévot demanda et obtint la faveur de lui donner l'hospitalité dans sa maison.
Comme son collègue de Luçon, l'évêque de la Rochelle accueillit avec joie le nouvel apôtre que Dieu lui envoyait, pour travailler au salut de son troupeau. Disons dès maintenant que ces deux prélats demeurèrent constamment fidèles au saint missionnaire, et lui donnèrent toujours raison contre les jansénistes, les persécuteurs et les calomniateurs de toute sorte acharnés à sa perte.
La secte qui avait réussi à le faire chasser, comme un perturbateur, des diocèses de Poitiers, de Saint-Brieuc, de Saint-Malo, de Rennes et de Nantes, ne put rien contre lui dans ceux de Luçon et de la Rochelle. La raison en est que les prélats de ces deux diocèses étaient de l'école de Fénelon, et les seuls peut-être en France, avec Mgr Révol, l'évêque d'Oloron, et l'illustre archevêque de Cambrai, sur lesquels l'hérésie n'eut aucune influence, et qui se distinguèrent toujours par leur soumission parfaite au Vicaire de Jésus-Christ.
Après avoir jeté, comme à l'essai, le filet de sa parole apostolique dans la paroisse de Lhoumeau, aux portes de la Rochelle, Montfort donna successivement quatre missions dans la ville même.
Dès la première, à l'église de l'hôpital Saint-Louis, l'affluence des auditeurs fut telle, qu'il fut obligé d'abandonner cette église trop étroite, et de prêcher en plein air, dans la cour de l'établissement. Le succès dépassa toute espérance.
On pensera peut-être que pour ramener les calvinistes, encore nombreux alors à la Rochelle, la controverse fut l'arme, dont se servit le prédicateur. C'est une erreur. Le Dominique des temps modernes crut que l'exposition pure et simple des mystères adorables de notre sainte religion et la prédication du rosaire lui réussiraient mieux. Les conversions nombreuses qui furent la récompense de ses travaux, notamment celle de Mme Mailly, l'une des colonnes de l'hérésie, dans ce temps-là, démontrèrent qu'il avait cent fois raison.
Les églises de la ville, toujours trop grandes en temps ordinaire, sont insuffisantes à contenir la masse toujours grossissante de ses auditeurs. Que fera-t-il? Il choisira la plus vaste, celle des Jacobins, et y prêchera consécutivement trois missions, la première pour les hommes, la seconde pour les femmes, la troisième pour les soldats de la garnison.
Toutes furent très édifiantes, mais surtout la der- nière.
C'était un spectacle à nul autre pareil, que de voir ces hommes, endurcis par le métier des armes, fondre en larmes, comme des enfants, au pied de la chaire de l'éloquent missionnaire, prier à haute voix sans le moindre. respect humain, chanter des cantiques, se jeter à ses pieds pour lui faire l'aveu de leurs crimes, et effacer dans les pleurs du repentir les souillures de leur vie.
Mais rien ne fut touchant comme la procession qu'il leur fit faire le jour de la clôture des exercices.
Écoutons le récit de l'historien Clorivière : « Tous les soldats, dit-il, y marchaient nu-pieds, tenant un crucifix dans une main et un chapelet dans l'autre. A leur tête, un officier, aussi pieds nus, portait une espèce de drapeau ou d'étendard de la croix. Tous chantaient les litanies de la sainte Vierge; les chantres, d'espace en espace, entonnaient ces mots : Sainte Vierge, demandez pour nous, et le chœur répondait : Le saint amour de Dieu. Et cette réponse se faisait d'un air si touchant, chacun ayant les yeux sur son crucifix, que tous ceux qui étaient présents se trouvaient attendris de ce spectacle. »
Ces quatre missions terminées, Montfort voulut en perpétuer le souvenir par la plantation de deux croix, l'une à la porte Dauphine, l'autre à la porte Saint- Nicolas. La plantation de la dernière, notamment, se fit au milieu d'un concours immense de peuple, et fut accompagnée de circonstances extraordinaires. Le ciel sembla prendre part à la fête. En effet, au beau milieu du sermon, des cris enthousiastes s'élevèrent tout à coup du sein de la foule : Miracle ! miracle , Nous, voyons des croix en l'air ! Ces cris durèrent près d'un quart- d'heure, et plus de cent personnes, tant ecclésiastiques que laïques, toutes très dignes de foi, certifièrent avoir vu, en ce moment, un grand nombre de croix en l'air. N'était-ce pas comme une approbation donnée par le Ciel à la pieuse pratique de Montfort d'ériger des calvaires partout où il prêchait des missions ?
Le vaillant missionnaire trouva à la Rochelle des croix d'un autre genre. Le vice, auquel il avait déclaré une guerre à outrance, essaya de le décrier par des calomnies, des railleries, des chansons.
Là, comme à Nantes, les libertins, poursuivis par lui jusque dans les repaires de la débauche avec une audace que seuls les saints se peuvent permettre, formèrent plusieurs fois le projet d'attenter à sa vie.
Un soir, voulant pénétrer dans la rue dite de la Rochelle, il sentit son cœur devenir froid comme glace, et ne put jamais avancer. Il dut faire un long détour pour arriver où il voulait aller. La main de Dieu l'avait arrêté sans doute, et ce mystère de protection fut révélé plus tard au prêtre qui l'accompagnait dans la circonstance, lorsqu'il entendit raconter à l'un des auteurs mêmes du guet-apens, qu'on avait attendu Montfort dans cette rue de la Rochelle, depuis sept heures jusqu'à onze heures du soir, pour lui casser la tête.
D'autre part, les calvinistes, outrés des conquêtes qu'il faisait sur l'hérésie, trouvèrent un jour le moyen d'empoisonner un bouillon qu'il devait prendre en descendant de chaire. L'homme, de Dieu ressentit aussitôt les effets du poison.
Le contre-poison qu'il s'empressa de prendre ne put réagir suffisamment ; il lui en resta une faiblesse organique qui, sans l'arrêter dans ses travaux, contribua néanmoins, à n'en point douter, à hâter la fin de ses jours.
Somme toute, l'apostolat de Montfort à la Rochelle remua profondément cette ville et y opéra des changements merveilleux dont tout le monde eut à se féliciter. Le gouverneur, M. de Chamilly, en conçut tant d'estime pour le missionnaire, que, durant les quatre missions, il lui fit l'honneur de l'inviter plusieurs fois à sa table.
Dans les derniers mois de l'année 1711 et les premiers de l'année 1712, Montfort donna quelques missions à la campagne, et c'est au cours de ces prédications, dont l'histoire n'a pas gardé le souvenir précis, que l'évêque de Luçon le pria de nouveau de venir travailler dans son diocèse , en lui recommandant spécialement l'île d'Yeu, comme un lieu plus destitué de secours spirituels, à cause de sa situation même.
Cette statue de saint Louis-Marie Grignion de Montfort porte la date 1888 et la signature du sculpteur angevin Honoré Charon. Elle a été réalisée dans son atelier et en porte la marque. La chapelle où il se trouve a été dédiée au père de Montfort en 1888, date de sa béatification.
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==> Louis-Marie Grignion de Montfort en dates
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l'évêque de Luçon Jean-François Salgues de Valdéries de Lescure (1699-1723)
A 6 km. d'Alby se dresse le vieux manoir de Lescure berceau de la famille de ce nom, restée fidèle dans la bonne comme dans la mauvaise fortune à son Dieu et a son Roi, justifiant sa fière devise : «Non timebit cor meum».
Les armes sont : D’or au lion d'azur tenant une croix ancrée de gueules, écartelé : d'azur à trois roses d'or en pal, à deux fasces du même brochant entre les roses.
Védian, chevalier de Lescure, reçut en fief, pour lui et sa postérité, le château de Lescure, du Pape Sergius IV, le 30 mars 1012 Raymond 1er, baron de Lescure en 1158, eut l'honneur de voir édifier dans ses terres, la chapelle de N. D. de la Drêche, à l'endroit même où la Sainte Vierge apparut.
Sicard III de Lescure, marié en 1350, à Hermengarde de Gauteri, eut un fils Louis de Lescure marié à Marie de Salvaignac et une fille Hélix de Lescure, mariée à Pierre-Durand de Salgues.
Leur fils Pierre releva le nom de Lescure, fut promu chevalier en 1405, et épousa Jeanne de Landorre. Il fortifia Lescure dont Rodrigue de Villandras s'empara cependant, et resta le maitre pendant trois ans.
Pierre laissa entre autres le troubadour Hugues de Lescure et Pierre de Lescure, marié 1° à Marie de Rabastens, 2° en 1454, à Joséphine de Lentillac.
Du premier lit naquit Bernard de Lescure, marié à Catherine de Gozou ; c'est à cette branche, honorée par Louis XIV du titre de marquis, qu'appartenait le célèbre général vendéen, marié à Victorine de Donissan.
Du second lit de Pierre de Lescure naquit Antoine de Lescure, conseiller au Parlement de Bordeaux, procureur du Roi, marié en 1487, à Marie de Clinet de Chaumont.
C'est de ce mariage que naquit entre autres enfants Jacques de Lescure, marié en 1512, à Marguerite de Malbois, héritière de la seigneurie de Puisserguier.
Leur descendance est représentée (XXIIIe degré de la maison de Lescure) par Jean-Joseph de Lescure, seigneur de Puisserguier, Chevalier de Saint-Louis, époux de Marie-Madeleine de Maurel.
A partir de leur fils Jean-Joseph de Lescure la famille vivra tantôt à Béziers, tantôt à Lyon où pendant trois générations les Lescure viendront prendre femme. Jean-Joseph de Lescure, épousa en effet, Louise-Elisabeth - Charlotte Dauphin d'Halengen et leur fils Jean- François-Josephs unira en premières noces, le 23 Mai 1776, à Anne- Marie Terrasson, et en secondes noces, le 22 Janvier 1780 à Claudine-Hélène Noyel de Béreins, d'une grande famille de bibliophiles du Beaujolais, dont les majestueux ex-libris sont bien connus des collectionneurs.
Du premier lit naquit Marie-Anne-Gabrielle de Lescure, qui épousa en 1798, Joseph-César-Emilien de Jessé, baron de Levas et du second lit : Jean-Charles-François marquis de Lescure après la mort du héros vendéen.
Il était né le 10 novembre 1780 et épousa le 15 Octobre 1806, une femme d'une grande beauté, dernière héritière de la branche principale d'une vieille maison forézienne, Catherine-Gabrielle de Girard de Vaugirard.
Septimanie : revue d'art directeur Paul Duplessis de Pouzilhac
Jean-François Salgues de Valdéries de Lescure « Élevé par les Jésuites, jésuite de cœur, il fit appel aux Jésuites pour combattre, par des missions données par eux, le protestantisme. Il courait avec empressement vers les endroits de son diocèse où il avait appris qu'il y avait nombre de frères égarés. Levé avant le jour, mangeant fort peu, voyageant en plein midi et souvent à pied, prêchant, confessant, catéchisant, écoutant les pauvres comme les riches, couvert d'habits fort simples, pour ne pas dire grossiers, qu'il raccommodait lui-même, marchant le bâton d'une main et le bréviaire de l'autre, entrant sans pompe et sans éclat dans les villages, tel était le prélat qui gouvernait le diocèse de Luçon, depuis le 11 novembre 1699. » (Histoire du monastère et des évêques de Luçon, par A. D. de La Fontenelle et l'abbé Durand. )
D’après M. de la Fontenelle de Vaudoré, dont la liste est loin d’être définitive, Jean- François de Lescure fut le 33e évêque de Luçon.
La vie de ce prélat a été écrite con amore par un dignitaire de son chapitre, son compatriote et son secrétaire, l’abbé Durand, chanoine et prévôt de Fontenay-le-Comte ; à l’en croire, on pourrait dire de M. de Lescure qu’il était évêque de naissance, sa mère, Anne de Caïlus, l’ayant élevé dès l’âge le plus tendre pour l’épiscopat.
Il appartenait à une famille d’ancienne noblesse du Languedoc; Lescure est une commune assez importante, à 5 kilomètres d’Albi, qui montre encore la ruine du château où naquit l’évêque, le 5 janvier 1644 ; ce château avait appartenu jadis, dit-on, au pape Sylvestre II, régnant à la fin du dixième siècle.
M. de Lescure était vicaire général d’Albi, lorsque le roi le promut à l’évêché de Luçon, le 6 juin 1699.
Son prédécesseur, Mgr de Barillon s’était montré d’une piété scrupuleuse et timorée ; le nouvel évêque livra lui et son diocèse aux jésuites, qui l’avaient élevé : le système des compensations vit de ces revirements.
Au profit des Révérends Pères, il fit expulser de son séminaire, par les gendarmes, les Oratoriens que Richelieu y avait appelés; les orages qui troublèrent fréquemment son épiscopat furent invariablement des chocs en retour de l’interminable lutte des Jésuites et des Jansémites.
La largeur de ses opinions sur la grâce ne l’empêcha pas d’être un évêque d’une piété et d’une simplicité exemplaires. Il n’aimait guère habiter son palais de Luçon; sans vouloir ennuyer personne, c’est plutôt la preuve de goût.
L’ancien château de plaisance des évêques de Luçon aux Moutiers- sur-le-Lay ayant été détruit pendant les guerres, Mgr songea à acheter, auprès de Mareuil, une maison de campagne appelée Montdoré.
Mais Montdoré convenait aux Jésuites, qui circonvinrent la propriétaire, une veuve âgée, « simple infirme et aveugle » dit un historien, et qui se firent donner la propriété, au moyen d’une vente simulée.
L’évêque en éprouva quelque dépit; aussi les bons Pères s’empressèrent-ils de la prier de considérer leur maison de Montdoré comme la sienne ; il y mit de l’amour-propre, et fît bâtir en 1708 à Châteauroux, propriété de l’évêché dans la paroisse de la Réorthe, une grande maison, qui tenait plutôt de la ferme que du château, et où il prit sa résidence habituelle.
Ce fut là qu’il mourut, vraisemblablement de la pierre, le 23 mai 1723.
Pour sauvegarder les droits du roi, seigneur suzerain du temporel des évêchés, et pour prévenir des pertes ou soustractions de titres, les scellés étaient toujours apposés, à la mort des titulaires, sur les palais épiscopaux.
C’est le procès-verbal de cette opération, consécutive à la mort de Mgr de Lescure, que nous avons retrouvé dans le dossier coté G 256 aux archives départementales de la Vienne.
« Les présidents, trésoriers-généraux de France, grands voyers, juges conservateurs des domaines du roi en la généralité de Poitiers, sur ce qui nous a été représenté par le procureur du roi qu’il a appris que Mgr le Révérendissime évêque du diocèse de Luçon, est décédé à une maison de campagne, membre dudit évêché, appelée Châteauroux, qu’étant nécessaire de veiller à la conservation des titres, papiers et enseignements qui concernent ledit évêché qui relève de Sa Majesté, et aux droits qui peuvent lui appartenir, requérait qu’il nous plûtordonner que les scellés de ce bureau soient apposés au trésor du palais épiscopal du feu dit seigneur, où est le dépôt desdits titres, comme aussi au trésor et dépôt de ces titres qui peuvent être à Châteauroux où feu ledit seigneur est décédé et résidait le plus souvent. »
Nous, ayant égard au réquisitoire dudit procureur du roi, ordonnons que les scellés seront apposés par le commis-greffier de ce bureau, qui en dressera procès-verbal, qu’il nous rapportera. »
Fait au bureau des finances à Poitiers, le 26 mai 1723. »
Maleden, Maisonneuve, Riquet, etc. »
Le commis-greffier du bureau des finances de Poitiers mit peu de vivacité à s’acquitter d’une procédure qui n’a d’intérêt que si elle est rapidement menée ; il ne commença l’opération que quatre jours plus tard, le 30 mai ; d’autres l’avaient déjà prévenu.
« Nous, Etienne Garnier, commis-greffier au bureau des finances et chambre du domaine de la généralité de Poitiers, sommes transporté au palais épiscopal du diocèse de Luçon, en exécution de l’ordonnance ci-dessus, et, étant audit palais épiscopal et parlant à M. l’abbé de Lescure, neveu dudit défunt seigneur évêque, nous l’avons sommé, requis et interpellé de nous indiquer et conduire au lieu où est le trésor et dépôt dans ledit palais épiscopal, où sont les titres, papiers et enseignements qui concernent ledit évêché qui relève du roi, afin d’y apposer le scellé dudit bureau pour la conservation desdits titres et des droits qui peuvent appartenir à Sa Majesté. »
Lequel nous a fait conduire par M. François Boyer, prêtre et chanoine de l’église cathédrale de Luçon, à une porte qu’il a dit être celle du trésor, située au bout d’une salle et à côté d’une autre petite chambre, sur la serrure de laquelle y avons trouvé deux scellés apposés de deux bandes de papier, la première par le sénéchal dudit lieu de Luçon sans inscription, et la seconde, qui croise la première, par le sieur sénéchal de Fontenay assisté du procureur du roi et son greffier, avec ces mots ; scellé, le 29 mai 1723.
Lesquels scellés nous avons croisés d’une bande de papier avec cette inscription : scellé à la requête du procureur du roi du bureau des finances de la généralité de Poitiers en vertu d’ordonnance du 26 de ce mois, par nous Etienne Garnier, commis-greffier dudit bureau; à Luçon, le 30 mai 1723.
«Et nous étant informé s’il n’y avait point d’autre entrée dans ledit trésor à un laquais qui aurait paru, il aurait dit qu’il y en avait une autre et qu’il fallait passer dans la bibliothèque pour y aller; et à l’instant serait allé chercher la clef de la bibliothèque par laquelle nous aurions entré et vu ladite porte du trésor sur laquelle sont aussi deux bandes de papier... (répétition des énoncés précédents).
«Ce fait, nous aurions requis ledit sieur Boyer de nous dire qui avait les clefs desdites portes ; il aurait déclaré ne le savoir ; comme aussi de se charger de la garde desdits scellés et de signer le présent procès- verbal. Ce qu’il a refusé en disant que ce n’était point son affaire ; ensuite nous aurions fait dire à M. l’abbé de Lescure d’avoir la bonté de monter, et, étant venu, nous lui aurions fait les mêmes réquisitions ; à quoi, il aurait répondu qu’il ne se chargeait de rien et que ceux qui avaient apposé les premiers scellés ne lui avaient point tant fait de questions, et n’a voulu signer. Nous lui aurions aussi, déclaré que nous nous transporterions alors à Châteauroux demain matin et s’il voulait nous y faire conduire ; il aurait répondu qu’il n’avait personne. »
Fait, clos et arrêté le présent procès-verbal vers les 7 heures du soir, les jours, mois et an que dessus. » Garnier.
« Un peu de mauvaise humeur contre l’exécution de ces formalités judiciaires, la douleur de la perte qu’il venait de faire, ou encore la prudence qui lui inspiraient des précédents personnels, expliquent l’attitude plus que réservée de l’abbé de Lescure.
Il avait été recueilli par son oncle à Luçon, après avoir été mis à la porte du séminaire de Saint-Sulpice, dans des conditions honorables sans doute, mais pas moins désagréables quand même.
Quand le cardinal de Nouailles, archevêque de Paris, eut approuvé le livre janséniste du Père Quesnel, Les Réflexions morales, Mgr de Lescure et son confrère et intime ami, Mgr de Champflour, l’évêque de la Rochelle, censurèrent vivement l’ouvrage.
Pour se venger, l’archevêque de Paris exigea que le neveu de l’évêque de Luçon, alors à Saint-Sulpice, fut mis à la porte du séminaire; ce qui fut fait.
Les deux évêques poussèrent l’affaire en cour de Rome, et obtinrent en faveur de leur opinion la fameuse bulle Unigenitus ; mais le neveu ne rentra pas à Saint-Sulpice, et sa carrière se trouva brisée par ce fâcheux début.
Le testament de l’oncle ne répara d’ailleurs pas l’injustice dont l’abbé avait été l’innocente victime. Maître Etienne Garnier alla poser les scellés à Châteauroux le lendemain, 31 mai, sans incident.
Le 2 juin suivant, maître Bernard Rampillon, receveur des décimes du diocèse de Poitiers, porteur de la procuration des sieurs économes, généraux des bénéfices consistoriaux vacants dans l’étendue du royaume, requit le procureur du roi de faire assigner les intéressés, afin de procéder à l’inventaire des meubles. Mais on lui remontra que si autres avaient procédé avec lenteur, lui allait trop vite, et que, faute d’avoir observé les délais de rigueur de huit jours au moins et d’un mois au plus, sa procédure était nulle et à recommencer. Le dossier finit là, sans donner les procès- verbaux d’inventaire, qui eussent été pourtant intéressants. Les de Lescure n’étaient pas riches, et l’évêque en avait fait venir le plus qu’il avait pu en Bas-Poitou, où il les avait pourvus de quelques bénéfices.
Dans son testament, il ne laissa à chacun que 300 livres de rente, sauf à l’aîné de ses neveux, chef de la famille, Alphonse de Lescure, qu’il avait marié avec une héritière poitevine, Marie des Granges de Surgères, du château de Puiguyon, près de Cerizais, et qu’il institua son légataire universel, à charge d’acquitter ses legs et aumônes.
Sa famille devait, à sa suite, se fixer dans la région de Luçon, et c'est d'elle que devait sortir le héros vendéen qui, sous le nom de saint du Poitou, le marquis de Lescure, premier mari de la célèbre marquise de La Rochejaquelein. devait lui donner sa plus magnifique illustration. (Louis de Salgues de Lescure)
Le Patriote de la Vendée, Fontenac.
2 Ce fait a été rapporté par le R. P. Bethuys, ancien missionnaire de Chavagnes. C'est l'aïeul de sa mère, alors tout enfant, qui aurait été témoin de l'apparition miraculeuse.
3 Op. cit., p. 221.