PHystorique vous ouvre les portes du temps au château du Cardinal de Richelieu

Le château de Richelieu était, comme le point sur lequel Armand avait concentré tous ses rêves d'homme de goût et de fin dilettante : il songeait à transformer la maison paternelle en un palais qui fut le rendez-vous de tous les arts. Évêque de Luçon, aumônier de la reine, conseiller du roi et ministre d'État, il se trouvait en mesure de réaliser le projet qu'il caressait dès longtemps. Il fut d'ailleurs servi, à souhait, par les circonstances.

A la fin du XVIe siècle, la famille de Richelieu se ressentait de la gêne qui pesait sur plus d'une maison de la noblesse de province. Les guerres auxquelles François du Plessis avait pris part, les frais causés par l'éducation de ses enfants, les folles prodigalités de l'aîné, trop familier avec l'hypothèque, avaient fort amoindri le patrimoine. Les créanciers firent entendre des réclamations aussitôt le décès du chef de maison, dont la haute position pouvait jusque-là les rassurer ou du moins les arrêter. La succession fut mise sous le séquestre, en attendant une vente judiciaire. Elle se composait des seigneuries de Richelieu, Mausson, le Chillou, Neufville et de différents fiefs.

 (Entrée principale du parc au temps du Château de Richelieu - voyage virtuel)

Un acte de 1608 nous apprend que le puissant seigneur de Faye, Jean de Gillier, fit cession de ses droits de suzerain par rapport à cette vente. L'année suivante, le 26 novembre, le conseil royal rendit un arrêt portant qu'on abrégerait les formalités et qu'il serait passé outre à ce qui restait encore à remplir. Quant à la veuve de François, on réservait naturellement son droit de se faire « colloquer », c'est-à-dire rembourser, à son rang, des sommes qui lui étaient dues.

Une liquidation de domaine nécessite un arpentage. Le 21 avril 1612, on décida « l'arpentage général du château, terres et seigneuries de Richelieu et autres ». L'annonce ou, comme on disait alors, « les criées » furent faites dans les localités et le temps voulus ; et, le 27 mai 1616, le tribunal de Saumur, d'où relevait ce domaine, rendit une sentence de « vérification et certification », du moins pour la première partie. Le conseil se borna à présenter une observation. Peut-être pour donner plus d'importance à la vente, les affiches portaient « chatellenie de Richelieu », dénomination qui indique un rang inférieur à la baronnie, mais supérieur aux fiefs ordinaires.

En gardien scrupuleux des règles féodales, il ordonna que le mot serait rayé et remplacé par celui de seigneurie. Il fallait cinq « criées »; la dernière étant faite, le conseil, par arrêt du 7 décembre 1620, déclara qu'il serait procédé à l'adjudication selon les formes usitées ; la vente eut lieu en février 1621. Quel sera l'adjudicataire ? L'enchère monta à la somme de 79,000 livres pour Richelieu et ses dépendances.

Elle fut couverte par le frère aîné, Alphonse, alors archevêque d'Aix. Mais, sur-le-champ, il déclara qu'il avait agi au nom d'Armand. L'acquéreur paya comptant; et, le même jour, 15 février 1621, un arrêt du conseil porta « adjudication de la terre, seigneurie et forteresse de Richelieu avec ses appartenances et dépendances à Messire Armand Jean du Plessis de Richelieu, évêque de Luçon. »

Trois jours après, la vente fut ratifiée par qui de droit et, un mois plus tard, Armand prenait possession de son domaine par un procureur, qui devait en même temps rendre la foi et les hommages dus au seigneur de Faye ( Terrier de Richelieu —Archives d'Indre-et-Loire, Titres de Richelieu)

Vue Générale en perspective du Château du Cardinal de Richelieu

(Vue Générale en perspective du Château du Cardinal de Richelieu: A. Principale entrée; B. Base Court; C. Cheni; D Arrière Cour ou sont les Escuries du commun à mettre cent chevaux, les Granges, Fenil, et logement des jardiniers, et autres gens de travail; E. Arrière cour ou sont les Fourrieres, Feni, Escuries, Boulangerie, et ménagerie; F. Anti-cou ou sont les Escuries magnifiques, le maneges et plusieurs beaux appartemes; G. Le Chasteau; H. grand Pré; I. Jardin; L. Bois)

Dans l'intervalle, Armand du Plessis avait marié sa nièce à Antoine du Roure, seigneur de Combalet. Le contrat fut signé au Louvre, le 26 novembre 1620, en présence des deux reines, des princes et princesses du sang.

Elle devint dame d'atours de Marie de Médecis, et lui-même fut créé cardinal, en 1624. Comme pour déjouer les cabales de ses ennemis, et surtout de ses ennemies, il fit, avec sa nièce, un voyage en Touraine et en Poitou.

Tandis que Mme de Combalet visite, à Glenay, les restes de ses parents, le Cardinal, qui se repose au manoir de Richelieu, rêve de transformer ce château en un palais somptueux, et cette vallée en jardins et parcs délicieux où, quelque jour, il fera à son souverain l'honneur de le traiter royalement. C'était en 1625 : l'heure était favorable.

Si la seconde moitié du XVIIe siècle brille davantage par la pureté du goût et la beauté de la forme, avec Racine, Le Brun, Girardon et Perrault, la première partie s'affirme par une conception plus originale, une allure plus indépendante et une exécution plus simple, avec Descartes, Corneille, Le Poussin et Le Mercier. Celle-ci contient en germe celle-là qui, à son tour, en laissant s'exagérer les défauts, s'égarera tour à tour en deux excès contraires, le solennel et le maniéré.

plan général du château de Richelieu 2

plan général du château de Richelieu 1

(A. Principale entrée; B. Porte pour aller aux arrière-cours; C. Manege couvert; D. Porte pour aller en base-cour; E. Porte du Chasteau; F. La Cour; G. Fossez; H. Porte pour aller au grand degré; I. Porte pour aller au parterre; J. Porte du parc; K le dôme des écuries)

Le règne de Louis XIII, à moins qu'on ne dise du cardinal de Richelieu, fut une ère féconde pour les lettres, les sciences et les arts. Les arts en particulier, rompant en visière à l'ornementation exagérée mise à la mode par la Renaissance à son déclin, reprirent les traditions antiques avec leurs règles, marquées au coin de la mesure et de la sobriété. L'architecture donna l'exemple et marcha au premier rang, dans cette nouvelle carrière.

Les grands architectes de la Renaissance, Pierre Lescot et Philibert de l'Orme se sont couchés dans la tombe, avec le XVIe siècle.

Les deux du Cerceau, Audrouet et Jacques, ont jeté sur le règne de Henri IV un éclat que du Pérac, Pierre Chambiges et Louis Metezeau s'efforcent de soutenir et d'accroître. A leur tour ils disparaissent, mais en posant des principes et en éveillant des conceptions.

Peut-être les uns et les autres eurent-ils le tort de briser trop ouvertement avec les habitudes de la Renaissance ; du moins, ils surent élever sur le sol architectural une école artistique, que l'on peut discuter, mais qui s'impose à l'attention, toujours, par sa correction et son ampleur, à l'admiration, souvent, par sa beauté et sa pureté.

Principale entrée

A l'époque de Louis XIII, l'architecture ne voit pas encore sous sa bannière Jules-Hardouin Mansart, dont Versailles redit à jamais le nom, et Charles Perrault qui, d'une main traduira Vitruve, et de l'autre, élèvera la colonnade du Louvre. Déjà elle compte, dans ses rangs, Pierre le Muet (1591-1669) qui construisit le Luxembourg; François Mansard (1598-1660), qui commença le Val-de-Grâce et inaugura les toits brisés, auxquels il a donné son nom; Auguste Villain (1581-1636), architecte de la ville de Paris ; Michel Villedo, architecte des bâtiments royaux ; Pierre Dubois, qui fit l'hospice des Incurables ; enfin Salomon de Brosse et Frémin de Cotte, architecte du roi.

 Grâce au talent de ces maîtres, Paris et la province s'embellirent des édifices remarquables qui ont arraché à La Bruyère cette boutade, d'ailleurs quelque peu vraie: « Un bourgeois aime les bastiments ; il se fait baslir un hostel si beau, si riche et si orné, qu'il est inhabitable ; le maître honteux de s'y loger, se retire au galetas où il achève sa vie ».

Le plus éminent des architectes de cette époque fut Jacques Le Mercier (1585-1654)

Plusieurs années, passées en Italie, l'avaient familiarisé avec les chefs-d’œuvre de l'antiquité. Il devint architecte du roi en 1618, agrandit le vieux Louvre et rebâtit la Sorbonne avec la chapelle. Son habileté le fit distinguer de Richelieu qui lui confia la construction de son Palais-Cardinal, depuis Palais-Royal. Le ministre en fut si satisfait qu'il lui demanda les plans du merveilleux château qu'il se proposait de bâtir sur les bords du Mable.

  Dès son arrivée à Paris, Armand fit part de sa résolution à Le Mercier, avec cette rare facilité d'assimilation et cette netteté d'exposition, qui le distinguaient, il lui exposa son projet d'édifier un palais, digne de sa fortune, et il lui donna carte blanche, tout en lui recommandant de conserver l'aile droite du château existant.

Le Mercier partit aussitôt de Paris pour se rendre à Richelieu. Il dressa ses plans et, à son retour, les soumit au Cardinal qui les approuva.

Pour le tout-puissant ministre, vouloir et exécuter, c'est tout un. Bientôt la vallée se transforme en un vaste chantier où des centaines d'ouvriers amènent la pierre, taillent les blocs, assoient les fondations et dressent les murs comme par enchantement.

En quelques années, l'édifice s'élève imposant et radieux, avec les logements de service qui forment comme une cité.

Le gros oeuvre achevé, sous la direction de l'architecte en chef ou des maîtres qui le remplacent, l'intérieur est livré aux ouvriers en bois ou en fer, qui travaillent à l'aménagement tandis que les artistes, habiles à manier le ciseau ou le pinceau, s'occupent à la décoration (1).

Tout le luxe du XVIIe siècle s'épanouit comme sous une baguette de fée. Les places, laissées vides dans les appartements ou les façades, sont occupées par des chefs-d’œuvre de l'art antique ou moderne, que des chariots amènent de toutes les parties du monde. Encore un peu, et ce château sera le plus splendide palais et le plus riche musée de la France.

On a prétendu (c'est son secrétaire intime), que le Cardinal ne vit pas le monument qu'il avait fait bâtir. Ce qu'il y a de certain, c'est qu'il était tenu au courant des travaux par ses intendants et que, plus d'une fois, les membres de sa famille lui firent la peinture des merveilles du château.

Cette époque est précisément celle que nous choisirons pour visiter, à notre tour, le palais de Richelieu.

S'il avait eu, comme quelques autres, la bonne fortune de se survivre, nous nous contenterions de dire au lecteur : « Allez et voyez ; » mais hélas ! il n'en reste plus rien que le souvenir et l'emplacement.

C'est donc une sorte de visite rétrospective, de pèlerinage artistique que nous allons accomplir, bien résolus à recueillir tout ce qui s'offrira à nos regards, je me trompe, à notre souvenir. L'architecte, dans sa restitution, le paléontologue, dans sa reconstitution, n'apportent pas plus de vigilance que nous n'en voulons mettre à cette résurrection historique.

Transportons-nous par la pensée au lieu où fut cette merveille, et essayons de la ressusciter, sous nos yeux, jusque dans ses plus minces détails.

La disparition totale du monument et la dispersion des richesses artistiques nous font un devoir de ne rien omettre, au risque même de fatiguer le lecteur, ou si mieux l'on aime, le visiteur, par notre description minutieuse.

Principale entrée au château de Richelieu

 

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