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PHystorique- Les Portes du Temps
18 janvier 2019

Le mystère du siège d'Orléans - Jeanne d'Arc, Gilles de Rais - Château de Tiffauges

Le mystère du siège d'Orléans - Jeanne d'Arc Gilles de Rais Château de Tiffauges visite virtuelle

Ce mystère, pièce de théâtre religieux de la fin du Moyen Age, met en scène le siège d'Orléans par les Anglais en 1428-1429 et la levée de ce siège par l'intervention victorieuse de Jeanne d'Arc. On dit qu'elle pourrait avoir été inspirée par Gilles de Rais.

L’unique manuscrit connu du Mystère du siège d’Orléans est conservé à Rome dans la Bibliothèque du Vatican, sous le n° 1022

GOUT DE GILLES DE RAIS POUR LE THÉATRE. — LE MYSTÈRE DU SIÈGE D'ORLÉANS.

Le besoin insatiable de bruit et de renommée, qu'avait Gilles de Rais, et qui se manifeste par le faste de sa maison militaire, par le luxe de ses demeures, par les splendeurs de sa chapelle, trouvait, dans le théâtre, un aliment nouveau et fréquent. Après les spectacles religieux, les spectacles de la scène, dont les divertissements, à cette époque, n'étaient souvent que des spectacles religieux, d'une nature particulière et originale. Au sortir des cérémonies de l'Église, aux grandes fêtes de l'année, dans les beaux jours du printemps et de l'été, Gilles n'avait pas de plaisir plus grand, et, disons-le, plus noble aussi, malgré les dépenses où il était entraîné, que de passer de sa chapelle ou des cathédrales de Nantes, d'Angers et d'Orléans, aux jeux variés, religieux et profanes, tristes ou joyeux de la scène. Voilà pourquoi, après sa chapelle, après les cérémonies de l'Eglise, et plus que toutes ces choses peut-être, Gilles de Rais aima les jeux du théâtre.

A ses besoins, le théâtre procurait un remède ; aux joies monotones et fatigantes de la satiété, il offrait des plaisirs nouveaux, piquants, variés; à son ambition, qui seule s'agitait sous la forme mobile de ses désirs, il donnait des applaudissements, la gloire, une renommée brillante et sans égale. Telles sont les vraies raisons, pour lesquelles Gilles, retiré des camps, devint, de 1432 à 1440, l'un des plus enthousiastes et des plus généreux protecteurs du théâtre ; celui aussi dont la scène française ait le moins lieu de s'honorer.

Château de Tiffauges au Moyen Age

Un tableau rapide du théâtre français au moyen âge, et en particulier du théâtre durant les premières années du. XVe siècle, fera comprendre la passion de Gilles de Rais pour les représentations de la scène, et jettera de la clarté sur cette partie si curieuse de ses goûts et de ses folies : il n'y a pas de doute, en effet, que les jeux du théâtre, n'aient été l'une des causes principales de sa ruine, qui le précipita elle-même dans les derniers excès.

Il ne faudrait pas se représenter le théâtre du XV° siècle, tel qu'il fut à Tiffauges, à Machecoul, à Angers, à Orléans, par l'image du théâtre moderne ou contemporain; pas plus qu'il ne faudrait juger des mœurs de la société du temps de Gilles de Rais par les mœurs du XVII ou du XIX° siècle.

Non seulement rien ne serait plus faux, mais rien ne serait moins juste. Par les règles, par l'inspiration, par le style, par le décor et le lieu où se joue la pièce, rien n'est plus différent, que l'ancienne et la nouvelle scène française. Les règles de l'unité, formulées par Boileau, observées jadis par Sophocle et Euripide, retrouvées il y a deux siècles par Corneille et Racine, n'avaient point encore établi leur empire. Vaste comme le monde, le théâtre en avait souvent la durée, et en embrassait toute l'histoire. Mais cette histoire, au lieu d'être exclusivement profane, était surtout religieuse : le peuple ignorait le nom des héros grecs et romains; or, le peuple qui formait le gros des spectateurs comme dans l'antiquité, imposait naturellement au théâtre, il l'insu même des auteurs, ses goûts, sa foi, ses traditions; il serait demeuré froid en face d'Hector et d'Andromaque '. Comme ce peuple aimait la Bible, les pieuses légendes, les histoires des saints et des martyrs, l'inspiration du poète ne pouvait venir d'autres sources, s'il s'agissait de pièces religieuses; ou encore des mœurs contemporaines, s'il s'agissait de pièces profanes. Quant au style, il fut ce qu'il pouvait être, vu non seulement l'imperfection de la langue, mais encore et surtout le pauvre génie des poètes.

 Au premier rang, d'accord avec nos documents, il faut placer les mystères. De tous les genres dramatiques, c'était celui qui, à cette époque, avait le plus de vogue, parce qu'il offrait les plus merveilleux spectacles. La scène, quelquefois vaste comme le monde, mettait en action les plus grands événements de l'histoire, et pendant des journées intéressait le spectateur immobile devant l'interminable série des tableaux les plus divers. En même temps que le théâtre devenait plus populaire, le mystère lui-même, par un même mouvement, prenait, vers la première moitié du XV° siècle, un accroissement considérable, sinon en originalité, du moins en importance.

On peut dire même que le mystère du moyen âge, avec les Passions de Metz et de Paris, celle de Jean Michel, d'Angers, que Gilles connut vraisemblablement et fit peut-être jouer ; avec le Mystère du siège d'Orléans surtout, qui avait obtenu et méritait .ses préférences, fut le suprême effort du théâtre au moyen âge : s'il n'en est pas le chef-d'œuvre, il en est assurément le monument le plus gigantesque par les proportions.

 

L'auteur, ou du moins l'inspirateur de ce document, René de la Suze, puîné de Gilles, avait bien raison, d'ailleurs, de regarder cette manie ou cette ambition comme l'une des causes de la ruine de son frère. Car, n'avait pas qui voulait de poète à ses gages; il fallait les payer fort cher; et il n'y avait guère que les princes et les rois à se passer la fantaisie de faire composer des drames. On dit qu'un poète obtint du roi René, en une seule fois, la somme de deux cent cinquante florins « pour certain livre ou histoire des Apôtres qu'il avait naguères dressée et mis en ordre selon la matière que ledit seigneur lui avait bailléel. » Comme on le voit, aux princes plus amis de la gloire que de la fortune, il en coûtait parfois très cher de se constituer protecteurs des arts.

Mais, pour grande que fût cette dépense, il serait puéril de la compter pour considérable, quand on voit celles qu'entraînaient les représentations elles-mêmes; car l'on peut dire que s'il était dispendieux de payer les poètes, il était ruineux de faire jouer les drames. L'une des premières charges, — car Gilles les prenait toutes sur lui, — était d'habiller les acteurs, et, certes, le maréchal de Rois aimait trop ce qu'il y a de plus beau dans les ornements ; il se montrait trop prodigue dans les représentations, et nous savons trop également, par d'autres textes, qu'il n'achetait rien sinon à très haut prix, pour admettre qu'il ait pu lésiner sur ce point non plus que sur les autres. Mais, d'ailleurs, les documents sont explicites à ce sujet.

Rien ne manquait au décor des représentations théâtrales, pas plus qu'à la pompe des cérémonies de sa chapelle; chaque personnage avait son costume particulier, d'après son rôle et sa dignité. Reconnaissons, d'ailleurs, que les mendiants, les valets, « les bélistres », au mépris de la vérité historique et dramatique, n'étaient pas moins bien accoutrés que les rois et les grands ; car pour lui un mystère n'était pas seulement l'exposé de grands évé nements, il le considérait surtout comme une exhibition de richesses.

L'or, le satin cramoisi, l'argent, le velours, les pierreries, les draps d'or et d'argent, les riches armures, les. harnais luxueux, les.broderies fines, la soie, toutes les merveilles de l'art s'y trouvaient étalées à profusion : c'était une manière nouvelle de faire assaut de luxe et de puissance.

Le, moyen âge, dans sa civilisation encore grossière, était indiscrètement magnifique.: il faut la politesse de siècles, plus parfaits pour donner au luxe la mesure et à l'opulence le bon goût. Pour demeurer dans les bornes communes et raisonnables, il eût fallu à Gilles de Rais une moindre ambition, un moins grand désir d'éblouir la foule, en frappant ses yeux.

Afin de suffire aux grandes dépenses des costumes qu'exigeaient les représentations théâtrales, il était de règle qu'elles demeuraient à la charge des acteurs, c'est-à-dire des amateurs qui acceptaient et souvent sollicitaient les rôles. Les acteurs fournissaient donc leurs costumes, et juraient le plus souvent « d'eux habiller, à leurs frais, missions et dépens, chacun selon qu'il appartiendra et que son personnage le requerra », sous peine de dix écus d'amende. Ces dépenses considérables étaient entièrement aux frais de Gilles de Rais ; et cependant il faut dire encore quelque chose de plus : non seulement ces costumes étaient splendides, et « propices » à la matière du drame ; mais encore les acteurs formaient une foule véritable.

Voilà ce qui causait de si prodigieuses dépenses ; « car, à chascune foiz que il faisoit jouer, il faisoit faire, selon la matière, habillemens tous nouveaulx et propres. » Sans doute, dans la représentation des mystères, lorsque les ornements d'église devaient entrer dans le décor, sa chao pelle était toute prête, et le théâtre devenait un lieu où il avait occasion d'exhiber ses richesses aux yeux de la foule et de satisfaire ainsi sa vanité : chapes, chasubles, dalmatiques, aubes fines, toute la garde-robe ecclésiastique que nous avons décrite, si riche, si somptueuse, était mise à la disposition des acteurs.

 

Et premierement Sallebry commance en Engleterre et dit ce qui ensuit

Très haulx et très puissans seigneurs,

Vous remercy des grans honneurs

Dont vous a pieu ainsi me faire,

Quant vous autres, princes greigneurs,

Qui estes les conservateurs,

De tout nostre territoire,

Me vouloir faire commissaire,

Estre lieutenant exemplaire,

C'est de Henry, noble roy de renom.

Pour le jourd'uy n'est de si noble affaire,

De France est roy, il en est tout notoire,

Et d'Engleterre qui est son propre nom.

Or, suis je dont, par la vostre sentence,

Son lieutenant, par la vostre ordonnance,

Esleu par vous pour conduire sa guerre;

Dont pluseurs sont de vostre appartenance

Plus suffisant et de magnificence

Pour mieulx besognes et à savoir conquerre;

Mais, puis que ainsi l'avez- volu reqnerre

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