Isabelle, ayant mis Jeanne au monde, ne dut se sentir en paix que lorsqu’elle la vit emportée vers la vieille église ou la petit fille allait recevoir le sacrement du baptême, propre à la laver du péché  qui l’avait mise au monde et à la délivrer à tout jamais du péril des limbes.

La chaumière était plein de gens.

Il y avait là, outre la parenté des époux, les douze parrains et marraines de l’enfant ; la coutume lorraine voulait qu’ils fussent nombreux. Presque tous portaient le nom de Jean ou Jeanne,  et il devait être plaisant de les voir s’égayer autour du nourrisson, le secouer dans ses robes, lui apporter leur présent de linge, chercher déjà une ressemblance sur ces traits menus, et enfin suivre à l’église la porteuse, qui marchait d’un air glorieux, son poupon au poing et compère au bras.

Isabelle, de sa couche, entendit la troupe joyeuse se bousculer et pousser de grands éclats de rire. Alors, grave, recueillie, elle la suivit en pensée ; elle imagina les parrains et marraines bredouillant leur latin, les cierges brûlant autour de l’enfant, et l’abbé Jean Minet, en blanc surplis, traçant le signe de la croix sur la petite figure offerte à la grâce du ciel.

Les cloches de l’église sonnaient ; cette fois, ce n’était plus un glas lent. Elles saluaient gaiement l’arrivée du cortège.

Plus que les autres encore, la petite Jeannette entendit de belles histoires et de pieuses recommandations, car sa sœur ainée Catherine aidait maintenant la mère, et prenait soi de l’enfant quand à Isabelle n’en pouvait trouver le temps.

Les deux sœurs couchaient dans la même chambre.

Il y avait deux petites pièces au fond de la maison ; l’une, à droite, servait aux garçons, l’autre aux filles. C’était la plus petite ; une lucarne carrée ne laissait entrer que très peu de jour ; en face de la lucarne, le lit étroit et bas, touchait la terre du sol. Il consistait en deux caisses placées l’une sur l’autre et reliées par de petite colonnettes droites, de façon à former deux étages superposés. Il y avait, auprès du lit, le coffre de bois ou l’on pétrissait la pâte du pain,  de l’autre côté le four. Mais la jeune fille et l’enfant, au matin, quand elles s’éveillaient, ne sentaient plus la bonne odeur de pain chaud qui sortait de sa grande bouche noire, car la maison en était tout imprégnée.

6 janvier 1412 : Naissance de Jeanne d’Arc à Domrémy  <==.... ....==>L’enfance de Jeanne d’Arc

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