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PHystorique- Les Portes du Temps
5 août 2018

A la table de Gargantua, on y mange aussi des légendes (Cave à sel Abbaye de Maillezais)

A la table de Gargantua, on y mange aussi des légendes (Cave à sel Abbaye de Maillezais)

Le chant du ventre, Viandes et nourriture dans le «Gargantua» ou les métamorphoses du banquet.

A la composition de ce livre seigneurial ne perdi[t] ne employa oncques plus ny aultre temps que celluy qui estoit estably à prendre [sa] refection corporelle, scavoir est beuvant et et mangeant».

Et si le livre débute par la fameuse apostrophe : «beuveurs très illustres et vous, véroles très précieux - car à vous non à aultres sont dédies mes écrits»..., il s'achève par un appel de frère Jean à faire ripaille : «Et bonne chère !».

Mais ce n'est pas à dire qu'il faille avaler le livre entre la poire et le fromage. Il s'agit en effet d'un «beau livre de haulte graisse» qu'il convient comme on sait de «fleurer», «sentir», et «estimer» avec dévotion avant de «rompre l'os et sugcer la substantificque mouelle»...

 

Geoffroy de Madaillan d'Estissac accorde sa protection à François Rabelais maillezais

Le personnage de Gargantua  de François Rabelais provient des mythes populaires en rapport avec le roi Arthur (Gargantua était un géant au service du roi Arthur) il est donc rattaché à la légende arthurienne.

Gargantua et Mélusine constituent les éléments fondamentaux de la Gaule celtique. Les traditions orales populaires, probablement peu modifiées au cours des siècles, auraient des origines des plus authentiques.

En racontant que le Mont-Saint-Michel doit son origine Grant-Gosier, père de Gargantua, l’auteur des Grandes Chronique est donc resté fidèle à la tradition mythologique.

François Rabelais (Gargantua Pentagruel)

« Comment Gargantua s'en retourna au mont Sainct Michel, et comment Merlin s'apparut à luy, et l'emmena à la court du Roy Artus pour servir ledict Roy. »

La création de Grantgosier nécessita l’emploi d’une ampoule pleine du sang de Lancelot, et celle de Gallemelle les rognures d’ongles de la reine Guenièvre.

Cave à sel des moines bénédictin de l'abbaye de Maillezais (4)

Rabelais à Maillezais. Ses pérégrinations en Poitou.

 

C'est en 1518 que Geoffroy de Madaillan d'Estissac devient abbé, grâce au roi François Ier. C'est un érudit qui accorde sa protection à François Rabelais alors étudiant chez les cordeliers de Fontenay le Comte.

Il devient secrétaire du Père Abbé, précepteur de ses neveux et y séjourne durant quatorze ans.

Rabelais s'était donc décidé à quitter les Cordeliers de Fontenay-le-Comte pour entrer chez les Bénédictins. Les canons et décrets ecclésiastiques ne laissaient pas aux religieux la faculté de passer à leur guise d'un ordre dans un autre.

Une autorisation du Saint-Siège était nécessaire pour ces mutations. Rabelais, grâce à l'appui que lui prêta vraisemblablement son ordinaire l'évêque de Maillezais, obtint du pape Clément VII un induit, lui permettant d'entrer dans l'ordre de Saint-Benoît, en l'église de Maillezais (1).

De l'abbaye bénédictine de Saint-Pierre-de-Maillezais, il ne reste depuis longtemps que les murs à demi-ruinés de l'église. Ils se dressent sur un large tertre (insula Malleacensis) qui domine le marais poitevin, vaste plaine occupant l'ancien estuaire de la Sèvre-Niortaise.

Jadis cette région de terres basses était submergée chaque hiver par le reflux de l'Océan ou par les eaux de la Sèvre et de ses affluents, la Vendée et l'Autize. Des chaussées et des « terrées », des canaux, écheneaux et biefs ont assaini ce sol marécageux et l'ont transformé en un riche terroir. Ces travaux sont dus en grande partie aux moines qui s'établirent au moyen âge aux bords du marais, à Saint-Michel-de-l'Herm, à Nieul-sur-l'Autize, à Maillezais.

Cave à sel des moines bénédictin de l'abbaye de Maillezais (5)

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(1) Voici le texte de la Supplicatio pro Apostasia adressée en 1535, par Rabelais au pape Paul III, afin d'obtenir l'absolution de l'apostasie qu'il avait commise en quittant, sans l'autorisation de ses supérieurs, son froc, pour courir le monde en habit de prêtre séculier. Il rappelle au début de cette supplique qu'il avait régulièrement été transféré de l'ordre de Saint-François dans celui de Saint-Benoît avec l'agrément du pape Clément VIL « De ordine Fratrum Minorum... ad ordinem S. Benedicti in Ecclesia Maleacensi dicti ordinis se libere transferre per fœlicis recordationis Clementem Papam VII... apostolica obtinuerat autoritate concedi seu indulgeri. » Ed. Marty-Laveaux, III, 336. Sur l'origine et l'authenticité de ce document, voir Marty-Laveaux, IV, 388.

Le dernier de ces monastères datait de la fin du xe siècle (1). Après deux cents ans d'une existence paisible et prospère, il fut saccagé au début du XIIIe siècle par Geoffroy II de Lusignan, seigneur de Vouvent (dans le voisinage de Fontenay), surnommé Geoffroy à la Grand-Dent, celui-là même dont Rabelais fait un ancêtre du géant Pantagruel.

A la suite de différends qui s'élevèrent entre cet ombrageux personnage et l'abbé de Maillezais, les bâtiments de l'abbaye furent pillés et incendiés (2), les moines chassés et poursuivis par les gens de Geoffroy. Le pape prononça l'excommunication contre l'auteur de ces attentats. Alors Geoffroy se rendit à Rome en pénitent et après avoir fait amende honorable, scella sa paix avec l'abbaye de Saint-Pierre-de-Maillezais par de riches donations. Lorsqu'il mourut, les moines, ne se souvenant que de sa pénitence et de la généreuse réparation' de ses outrages, élevèrent en son honneur, dans leur église abbatiale, un cénotaphe orné de son effigie sculptée dans la pierre. Geoffroy fut inhumé à Vouvent.

 (1) Consulter Ch. Arnauld, Histoire de Maillezais, Niort, 1840, et un article de Bourloton, dans Paysages et monuments du Poitou, de Robuchon.

(2) Dans l'enfer, tel que le décrit Eplstémon, au chap. XXX du Pantagruel, Rabelais fait de Geoffroy à la Grand-Dent, en souvenir de cet incendie, un « allumetier », c'est-à-dire un marchand d'allumettes.

 

 

Rabelais accompagnait son évêque. Il pérégrina ainsi pendant plusieurs années à travers le Poitou. Il le parcourut dans tous les sens de l'ouest à l'est, du nord au sud, de Maillezais à Montmorillon et de Parthenay à Charroux. Plus de cinquante noms de lieux poitevins sont cités dans le Gargantua et le Pantagruel (1). Quelques-uns désignent d'obscures bourgades que seuls les hasards des voyages avaient signalées à l'attention de Rabelais.

De reconstituer ces pérégrinations du secrétaire de Geoffroy d'Estissac à travers le Poitou, il ne saurait être question. Un des itinéraires qu'il suivit le plus fréquemment est celui qu'il assigne à Pantagruel se rendant à Maillezais par Lusignan, Sanxay, Celles, Saint-Ligaire, Coulonges-les-Royaux (Sur L'autize) et Fontenay (le comte)(2), chacun de ces noms représentant soit des terres ou des couvents appartenant à l'évêque de Maillezais, soit encore des lieux où il avait quelques amis.

Mais, à défaut de données précises sur les déplacements de Rabelais en Poitou, on jugera de la familiarité qu'il avait avec cette région à l'abondance des renseignements que son livre nous donne sur les mœurs, les traditions, les légendes, le parler de cette province. On trouve chez lui des mentions de certaines particularités locales, qui n'avaient de notoriété qu'à quelques lieues à la ronde. En sorte que maître Alcofribas semble parfois n'écrire que pour les seuls Poitevins parmi lesquels il avait vécu, au temps de sa jeunesse.

 

Cave à sel Abbaye de Maillezais A la table de Gargantua, on y mange aussi des légendes

(1) Sur ces localités poitevines, voir H. Clouzot, Topographie Rabelaisienne, dans R. E. R.. t. II. n. 143 et 227

(2) Pantagruel, chap. V.

S'il compose, par exemple, le menu d'un repas destiné à son géant, il n'hésite pas à y inscrire des vins du crû, de Ligugé ou de La Foye-Monjault  et des produits du terroir, chapons du Loudunois  ou châtaignes du bois d'Estos, près Sainte-Hermine, dans le voisinage de la maison épiscopale de l'Hermenault.

On a signalé dans ses énumérations de victuailles et dans ses catalogues de poissons et d'oiseaux, des vocables qui n'ont jamais eu cours que dans le Poitou : tels la meuille (mulet), la moulue (morue), le papillon (raie bouclée), 12 buor (butor), le corbigeau (courlis), le hegronneau (petit du héron), le pouacre (héron cendré), le tyranson (chevalier gambette), le bitard (outardeau), le chardrier (chardonneret), la duppe (huppe), le huteaudeau (chaponneau), la puput (huppe).

Ici ce sont des noms d'oiseaux de rivière qui abondaient dans le marais poitevin; là, des noms de certains poissons de l'Océan, saumons, aloses, etc., qui remontaient les cours d'eau jusqu'aux environs de Maillezais et qu'on pouvait voir entassés, les jours maigres, aux étals des poissonneries ou sur les tables des couvents.

 

L'adolescence de Rabelais en Poitou / Jean Plattard

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